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29/07/2011 | FRANCE | N°10PA04250

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3 ème chambre, 29 juillet 2011, 10PA04250


Vu la requête, enregistrée le 20 août 2010, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000796/6-3 en date du 15 juillet 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a, d'une part, annulé l'arrêté du 9 septembre 2009 refusant à Mlle Carine A la délivrance d'un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français, d'autre part, lui a enjoint de délivrer à l'intéressée une autorisation provisoire de séjour et de procéder à un nouvel examen de sa situation administrative dans un délai de

trois mois à compter de la notification dudit jugement, et enfin, a mis à la ...

Vu la requête, enregistrée le 20 août 2010, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000796/6-3 en date du 15 juillet 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a, d'une part, annulé l'arrêté du 9 septembre 2009 refusant à Mlle Carine A la délivrance d'un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français, d'autre part, lui a enjoint de délivrer à l'intéressée une autorisation provisoire de séjour et de procéder à un nouvel examen de sa situation administrative dans un délai de trois mois à compter de la notification dudit jugement, et enfin, a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

2°) de rejeter la demande de Mlle Carine A ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 juillet 2011 :

- le rapport de M. Treyssac, rapporteur,

- les conclusions de M. Jarrige, rapporteur public,

- et les observations de Me Tangalakis, pour Mlle A ;

Connaissance prise de la note en délibéré présentée le 7 juillet 2011 pour Mlle A ;

Considérant que le PREFET DE POLICE relève appel du jugement du 15 juillet 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 9 septembre 2009 refusant de délivrer à Mlle A, ressortissante camerounaise, un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois à compter de la notification de cet arrêté ;

Considérant que, pour annuler l'arrêté attaqué, le juge de première instance a considéré que dès lors que Mlle A, entrée en France à l'âge de 15 ans, réside chez sa soeur, bénéficiaire d'une délégation d'autorité parentale, et suit régulièrement une scolarité, la circonstance qu'elle a échoué une première fois au baccalauréat ne doit pas la priver de ses chances de poursuivre ses études et d'acquérir une formation professionnelle, et que le PREFET DE POLICE a entaché son arrêté d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée ; que toutefois il ressort des pièces du dossier, d'une part, qu'à la date de l'arrêté attaqué, Mlle A ne démontrait nullement être entrée en France à l'âge de 15 ans, soit en 2006, dès lors que son passeport, s'il comporte un visa Schengen de court séjour qui lui avait été délivré par les autorités françaises au Cameroun le 4 Juillet 2006, ne comporte que deux cachets, lesquels, au demeurant, ont été apposés par les services frontaliers du Cameroun, le premier constatant, le 6 juillet 2006, la sortie de Mlle A de son pays d'origine, le second, constatant son entrée le 19 août 2006, dans ce même pays ; que Mlle A ne justifie pas de la réalité de son séjour en France avant l'année 2007, année au cours de laquelle elle était inscrite en classe de première au Lycée Henri Bergson, la production d'un document présenté comme la confirmation, le 13 octobre 2006, d'une inscription auprès du Centre national d'enseignement à distance de Rennes ne présentant pas de caractère probant ; que ni l'âge auquel est entrée en France Mlle A ni même la durée de sa résidence dans ce pays ne lui ouvre de droit au séjour ; d'autre part, que si Mlle A est hébergée et prise en charge par sa soeur et le concubin de cette dernière, lesquels ne résident d'ailleurs en France que sous le couvert de titres de séjour en qualité d'étranger malade, il est constant que l'intéressée, majeure, a conservé de très fortes attaches au Cameroun où résident ses parents et le reste de sa fratrie ; que si son père, par acte sous seing daté du 24 novembre 2008, a entendu accorder la tutelle de Mlle A à sa soeur aînée résidant en France, cette tutelle, qui n'a duré que quelques mois, prenait fin, ainsi que précisé par ce même acte, à la majorité de l'intéressée, intervenue dès le mois de mars 2009, soit antérieurement à l'arrêté attaqué, et ne saurait dans ces conditions avoir d'incidence sur la légalité dudit arrêté ; qu'en ce qui concerne sa scolarité, il est constant qu'à la date à laquelle a été édicté cet arrêté, soit le 9 septembre 2009, la circonstance selon laquelle ledit arrêté, s'il avait été suivi d'exécution, l'aurait empêchée de se présenter aux épreuves du baccalauréat en juin 2010 alors qu'elle a effectivement obtenu son baccalauréat technologique le 13 juillet 2010, n'entache pas cet arrêté d'illégalité ; que Mlle A ne justifiait ni même n'alléguait être dans l'impossibilité de poursuivre sa scolarité en classe de terminale et de passer son baccalauréat au Cameroun puis d'entreprendre, comme elle indiquait le souhaiter, des études d'infirmière afin d'intégrer un établissement de santé public hospitalier dans ce même pays ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le Tribunal administratif de Paris s'est fondé sur l'erreur manifeste commise par le PREFET DE POLICE dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de Mlle A pour annuler son arrêté du 9 septembre 2009 portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la cour de céans, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les moyens soulevés par Mlle A devant le Tribunal administratif de Paris ;

Considérant, en premier lieu, que la décision de refus de délivrance du titre de séjour sollicité par Mlle A, qui mentionne les éléments de droit et de fait qui en constituent le fondement, est suffisamment motivée au regard des dispositions de la loi du 11 juillet 1979 susvisée ; que le moyen tiré du défaut de motivation manque en fait ; que par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que le PREFET DE POLICE n'a pas procédé à un examen attentif de la situation de Mlle A ;

Considérant, en deuxième lieu, que par arrêté du 24 octobre 2008, régulièrement publié au bulletin municipal officiel de la ville de Paris du 4 novembre 2008, le PREFET DE POLICE a donné à M. René B délégation pour signer notamment les décisions de refus de titre de séjour assorties de l'obligation de quitter le territoire français ; qu'aucune disposition n'oblige le PREFET DE POLICE à annexer à l'arrêté contesté l'arrêté de délégation consenti à M. B ni à justifier de son absence ou de son empêchement ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le signataire de l'arrêté contesté n'aurait pas été titulaire d'une délégation régulière manque en fait ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la commission du titre de séjour est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3 ; que l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne prévoit la saisine de la commission du titre de séjour que dans l'hypothèse où l'autorité administrative envisage de refuser de délivrer un titre de séjour à un étranger remplissant effectivement les conditions d'attribution de plein droit d'un tel titre ; que Mlle A ne remplissant pas lesdites conditions, le PREFET DE POLICE n'avait pas à faire précéder l'édiction de son arrêté de la consultation de la commission du titre de séjour ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1/ Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2/ Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique à l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 7° à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) ;

Considérant, ainsi qu'il a été dit, que les circonstances dont se prévaut Mlle A ne suffisent pas à caractériser la prétendue erreur manifeste qu'aurait commise l'administration dans l'appréciation de la situation de l'intéressée et de celle de sa famille au regard des dispositions de l'article L. 313-11 7° précité et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales sus visés ; qu'en effet, la circonstance que l'intéressée soit selon ses déclarations entrée en France à l'âge de 15 ans ne lui confère pas de droit au séjour, et ne constitue pas, en tant que telle, une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale ; que la délégation de puissance paternelle effectuée par son père au bénéfice de sa soeur est inopérante puisqu'il résulte expressément de cette délégation qu'elle prend fin à la majorité de l'intéressée ; que le séjour en France de Mlle A reste récent et que si elle invoque la présence en France de sa soeur, titulaire d'une carte de séjour, en concubinage avec un ressortissant camerounais en situation régulière et leurs deux enfants, et que si elle excipe dans le même temps, en instance d'appel, vivre depuis le 19 novembre 2010 en concubinage avec un ressortissant français qui la prendrait en charge, la requérante n'est pas démunie d'attaches familiales au Cameroun, où elle-même a résidé pendant 15 ans, et où vivent ses parents, ses deux autres soeurs ainsi que son frère ; qu'enfin, ainsi qu'il a été dit, la décision attaquée est intervenue le 9 septembre 2009, soit en tout début d'année scolaire, et dans ces conditions, n'avait pas pour effet d'interrompre ladite scolarité ; que les circonstances qu'elle ait obtenu en juillet 2010 le diplôme du baccalauréat, et qu'elle soit inscrite pour l'année scolaire 2010-2011 à l'université Paris 1 sont sans incidence sur la légalité de l'arrêté attaqué ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 9 septembre 2009 refusant le séjour à Mlle A et lui faisant obligation de quitter le territoire français ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent être que rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Paris en date du 15 juillet 2010 est annulé.

Article 2 : La demande de Mlle A devant le Tribunal administratif de Paris est rejetée, ensemble ses conclusions en instance d'appel.

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N° 10PA03855

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N° 10PA04250


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3 ème chambre
Numéro d'arrêt : 10PA04250
Date de la décision : 29/07/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme VETTRAINO
Rapporteur ?: M. Jean-François TREYSSAC
Rapporteur public ?: M. JARRIGE
Avocat(s) : TANGALAKIS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2011-07-29;10pa04250 ?
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