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07/07/2011 | FRANCE | N°11PA00257

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 07 juillet 2011, 11PA00257


Vu la requête, enregistrée le 15 janvier 2011, présentée pour M. Rabah A, demeurant ..., par Me Kameni ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1004736/5-3 du 3 décembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du 8 février 2010 par lequel le préfet de police lui a refusé la délivrance du titre de séjour qu'il sollicitait en l'obligeant à quitter le territoire français et en fixant son pays de destination et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au préfet de police de lui d

élivrer un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale dans...

Vu la requête, enregistrée le 15 janvier 2011, présentée pour M. Rabah A, demeurant ..., par Me Kameni ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1004736/5-3 du 3 décembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du 8 février 2010 par lequel le préfet de police lui a refusé la délivrance du titre de séjour qu'il sollicitait en l'obligeant à quitter le territoire français et en fixant son pays de destination et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour dans le délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950, ensemble le décret du 3 mai 1974 portant publication de la convention ;

Vu la convention de Genève du 28 juillet 1951, relative aux réfugiés et le protocole signé à New York le 31 janvier 1967 ;

Vu la convention d'application de l'accord de Schengen du 14 juin 1985, signée à Schengen le 19 juin 1990, ensemble le décret n° 95-304 du 21 mars 1995 portant publication de cette convention ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles, et ses avenants, modifié en dernier lieu par l'avenant du 11 juillet 2001 ;

Vu la convention internationale signée à New York le 26 janvier 1990, relative aux droits de l'enfant, publiée par décret du 8 octobre 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ensemble et en tant que de besoin l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, modifiée, relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France, le décret n° 46-1574 du 30 juin 1946, modifié, réglementant les conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France, et l'arrêté interministériel du 10 avril 1984 relatif aux conditions d'entrée des étrangers sur le territoire métropolitain et dans les départements d'outre-mer français ;

Vu la loi n° 52-893 du 25 juillet 1952, relative au droit d'asile, portant création d'un Office français de protection des réfugiés et apatrides, ensemble le décret n° 98-503 du 23 juin 1998, pris pour son application ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 juin 2011 :

- le rapport de M. Bernardin, rapporteur,

- et les conclusions de M. Egloff, rapporteur public ;

Considérant que M. A, né le 29 septembre 1958 à Aghbalou, en Algérie, pays dont il a la nationalité, entré en France en mai 2001, selon ses déclarations, et reçu en préfecture de police le 25 novembre 2009, a sollicité son admission au séjour sur le fondement des 1 et 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ; que, par la présente requête, il relève régulièrement appel du jugement du 3 décembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du 8 février 2010 par lequel préfet de police lui a refusé la délivrance du titre de séjour qu'il sollicitait, en l'obligeant à quitter le territoire français et en fixant son pays de destination et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : [...] / La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes [...]. / Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux ;

Considérant qu'alors que la date de l'audience au cours de laquelle devait être examinée la demande présentée par M. A tendant à l'annulation de l'arrêté susmentionné du 8 février 2010 avait été fixée au 20 octobre 2010, le demandeur a fait parvenir au Tribunal administratif de Paris, qui l'a enregistré le 16 octobre 2010, un mémoire en réplique au premier mémoire présenté par le préfet de police et enregistré le 21 septembre 2010 ; que, si ce mémoire en réplique du demandeur était accompagné de seize pièces, il ne ressort pas du dossier de première instance que ledit mémoire contenait des éléments nouveaux de nature à nécessiter le renvoi de l'affaire à une date ultérieure pour permettre au préfet de police de produire de nouvelles observations ; que, dans ces conditions, le requérant ne peut soutenir qu'en statuant sur cette affaire à la date initialement fixée sans avoir communiqué son mémoire au préfet de police en lui laissant le temps nécessaire pour répondre à ce mémoire en réplique, le tribunal administratif a méconnu le caractère contradictoire de la procédure ou même le principe d'égalité des armes, alors même que le président de la formation de jugement avait réouvert l'instruction, initialement été close au 22 septembre 2010, pour permettre à M. A de présenter ses observations à la suite du dépôt par le préfet de police de son mémoire en défense ;

Considérant, en second lieu, que, si M. A avait expressément invoqué devant les premiers juges le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte litigieux, le tribunal a constaté dans son jugement que Madame B qui a signé l'arrêté attaqué bénéficiait d'une délégation de signature du préfet de police en date du 6 janvier 2010 publié au Bulletin municipal officiel de la Ville de Paris du 12 janvier 2010 ; que, par suite, le requérant, qui ne conteste pas la régularité de la délégation de signature donnée par le préfet à l'un de ses agents ou la régularité de sa publication qui la rend opposable au tiers, telle qu'elle a été donnée avec précision dans le jugement attaqué, ne peut utilement se prévaloir de la circonstance qu'il n'aurait jamais été mis à même par l'administration de vérifier si cet agent avait régulièrement reçu une délégation de signature du préfet de police lui donnant compétence pour signer la décision rejetant sa demande de titre de séjour ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

Considérant, en premier lieu, que, dans son arrêté du 8 février 2010, le préfet de police, après avoir rappelé les stipulations de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié sur le fondement desquelles M. A sollicitait son admission au séjour, a précisé les considérations de droit et de fait qui fondaient son refus ; que, par suite, et alors même que le préfet n'a pas expressément précisé les raisons pour lesquelles il écartait les arguments du demandeur tirés de sa situation de fils de harki vivant en Algérie, le requérant n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'en refusant de délivrer un titre de séjour à M. A, en lui faisant obligation de quitter le territoire national et en désignant son pays de destination, le préfet de police, auquel il n'appartenait d'ailleurs pas de le faire, ne s'est pas prononcé sur le droit de l'intéressé au bénéfice de la protection subsidiaire prévu par les dispositions de l'article L. 712-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dès lors, le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article L. 712-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut qu'être écarté ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ; qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, dans sa rédaction en vigueur à la date de l'arrêté attaqué : (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit : (...) / 5. Au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d' autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et qu'il n'est pas contesté que M. A, ressortissant algérien, né le 29 septembre 1958 et entré en France, selon ses propres déclarations, en mai 2001, était à la date du 8 février 2010 sans charge de famille en France, alors qu'il n'était pas démuni d'attaches familiales dans son pays d'origine, où résident son épouse et ses enfants, ainsi que sa mère et sa fratrie, et où il a vécu jusqu'à l'âge de 42 ans révolus ; que, si le requérant soutient, sans d'ailleurs l'établir, que son père, aujourd'hui décédé, était un ancien harki, titulaire d'une carte de combattant, et que, pour cette raison, alors qu'il vivait en Algérie, il aurait fait l'objet de demandes d'argent et de menaces de la part de groupes armés islamistes, sans pouvoir bénéficier de la protection des autorités algériennes, il ne peut, en tout état de cause, utilement se prévaloir d'une telle circonstance, à la supposer même établie, pour soutenir que l'arrêté pris à son encontre 8 février 2010 par le préfet de police, porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, par suite, le préfet de police n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni celles de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien modifié ;

Considérant, en quatrième lieu, que M. A, qui d'ailleurs ne conteste pas qu'il n'est pas démuni d'attache familiale en Algérie, où résident son épouse et ses enfants, ainsi que sa mère et sa fratrie, entend faire valoir, d'une part, que ces circonstances ne lui sont que de peu de secours au regard des menaces dont il fait l'objet dans ce pays, où il ne peut espérer compter sur ses proches pour assurer sa sécurité, dès lors que les enfants et familles de harkis y sont toujours victimes de discrimination, et qu'en outre, il fera l'objet de sanctions pénales s'il retourne en Algérie, en application de l'article 175 du code pénal algérien qui punit d'une peine allant de deux à six mois d'emprisonnement et d'une amende de 20 000 à 60 000 dinars les personnes qui tentent de quitter de manière illégale le territoire national et, d'autre part, qu'il a tissé en France, où il vit depuis bientôt dix ans dans les conditions précaires qui sont celles d'un sans-papier, des liens solides avec les membres de l'association des anciens des affaires algériennes ; que, toutefois, compte tenu de ses conditions d'entrée et de séjour en France, le requérant, dont toute la famille réside en Algérie, n'est pas fondé à soutenir que le préfet de police aurait, en prenant à son encontre l'arrêté attaqué, fait une appréciation manifestement erronée des conséquences de ses décisions sur la situation personnelle et familiale de l'intéressé au regard de ses droits au séjour ;

Considérant, en cinquième lieu, qu'ainsi qu'il le rapporte dans son mémoire introductif d'appel, M. A a soutenu devant les premiers juges que le préfet de police aurait, compte tenu des assurances qui lui avaient été données, méconnu le principe de confiance légitime en refusant de régulariser sa situation ; que, toutefois, l'invocation de ce principe suppose que l'autorité administrative ait préalablement fait naître des espérances fondées chez celui qui s'en prévaut, sous réserve que cela ne porte pas une atteinte excessive à un intérêt public ou au principe de légalité ; qu'en tout état de cause, la circonstance, à la supposer établie, que le président de l'association des anciens des affaires algériennes et sahariennes, qui avait entrepris des démarches auprès du directeur du cabinet du préfet de police, aurait reçu des assurances de la part dudit directeur de cabinet, ne suffit pas à faire regarder cette condition comme remplie ; que, dans ces conditions, dès lors qu'ainsi qu'il a été dit précédemment, le préfet de police était légalement fondé à rejeter la demande d'admission au séjour présentée par M. A, ce dernier ne pouvait, en tout état de cause, se prévaloir, pour critiquer l'arrêté pris à son encontre le 8 février 2010 par le préfet de police, de la méconnaissance du principe de confiance légitime ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction comme celles tendant à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le versement de la somme de 1 500 euros doivent être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

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N° 11PA00257


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 11PA00257
Date de la décision : 07/07/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme TANDONNET-TUROT
Rapporteur ?: M. André-Guy BERNARDIN
Rapporteur public ?: M. EGLOFF
Avocat(s) : KAMENI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2011-07-07;11pa00257 ?
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