Vu la requête, enregistré le 7 août 2010, présentée pour Mme Guyonne A, demeurant au ..., par Me Amiet et Graff ; Mme A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n°0810721 du 10 juin 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 20 mars 2008 par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés a rejeté sa demande de changement de nom ;
2°) d'annuler cette décision pour excès de pouvoir ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 mai 2011 :
- le rapport de Mme Bonneau-Mathelot, rapporteur,
- et les conclusions de Mme Vidal, rapporteur public ;
Considérant que Mme A a, le 14 juillet 2006, sollicité du garde des sceaux l'autorisation de changer de nom en substituant à son nom patronymique celui de sa mère B ou en ajoutant le nom de sa mère à celui qu'elle porte légalement ; que, toutefois, par une décision en date du 20 mars 2008, le garde des sceaux a refusé de faire droit à sa demande ; que Mme A relève régulièrement appel du jugement en date du 10 juin 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;
Considérant qu'aux termes de l'article 61 du code civil : Toute personne qui justifie d'un intérêt légitime peut demander à changer de nom. / La demande de changement de nom peut avoir pour objet d'éviter l'extinction du nom porté par un ascendant ou un collatéral du demandeur jusqu'au quatrième degré. / Le changement de nom est autorisé par décret ;
Considérant que, pour rejeter la demande de Mme A, le garde des sceaux a, notamment, fait valoir que [...]. si la possession d'un nom est susceptible de constituer un intérêt légitime permettant de déroger au principe d'immutabilité du nom, encore faut-il, selon les critères fixés par la jurisprudence du Conseil d'Etat, que cet usage en soit constant, non contesté et évident et se soit prolongé sur une période suffisamment longue et sur plusieurs générations. Or l'usage invoqué autorisé par l'article 43 de la loi n°85-1372 du 23 décembre 1985 relative à l'égalité des époux dans les régimes matrimoniaux et des parents dans la gestion des biens des enfants mineurs ne répond pas, notamment, à la condition de l'ancienneté pour être consacré ; que, d'une part, il ne ressort ni de ses écritures ni des pièces produites que l'intéressée ait entendu fonder cet usage sur le fondement des dispositions de l'article 43 de la loi du 23 décembre 1985 aux termes desquelles Toute personne majeure peut ajouter à son nom, à titre d'usage, le nom de celui de ses parents qui ne lui a pas transmis le sien. / A l'égard des enfants mineurs, cette faculté est mise en oeuvre par les titulaires de l'exercice de l'autorité parentale ; que, d'autre part, en rejetant de manière automatique la possession d'état du nom invoqué comme n'ayant pas été suffisamment prolongée dans le temps par l'application de la seule loi du 23 décembre 1985, au motif que cette loi est trop récente, le garde des sceaux ne peut être regardé comme ayant procédé à un examen approfondi de la demande de Mme A et a, par suite, entaché la décision litigieuse d'une erreur de droit ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; qu'il y a lieu, par voie de conséquence, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 0810721 du 10 juin 2010 du Tribunal administratif de Paris et la décision en date du 20 mars 2008 du garde des sceaux sont annulés.
Article 2 : L'Etat versera à Mme A une somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
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N° 10PA04046