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31/03/2011 | FRANCE | N°09PA04978

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 31 mars 2011, 09PA04978


Vu la requête, enregistrée le 7 août 2009, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande a la Cour :

1) d'annuler le jugement n° 0906020/3-1 en date du 17 juin 2009 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté en date du 11 mars 2009 refusant la délivrance à M. A d'une carte de séjour temporaire assorti d'une obligation de quitter le territoire français fixant le pays de destination ;

2) de rejeter la demande de M. A devant le Tribunal administratif de Paris ;

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Vu les autres pièces du dossier ...

Vu la requête, enregistrée le 7 août 2009, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande a la Cour :

1) d'annuler le jugement n° 0906020/3-1 en date du 17 juin 2009 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté en date du 11 mars 2009 refusant la délivrance à M. A d'une carte de séjour temporaire assorti d'une obligation de quitter le territoire français fixant le pays de destination ;

2) de rejeter la demande de M. A devant le Tribunal administratif de Paris ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord de coopération en matière de justice du 21 février 1974 entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République unie du Cameroun ;

Vu la loi n°79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience publique ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 mars 2011 :

- le rapport de Mme Bonneau-Mathelot, rapporteur,

- les conclusions de Mme Vidal, rapporteur public,

- et les observations de Me Woumeni, pour M. A ;

Considérant que M. A, de nationalité camerounaise, a sollicité la délivrance d'une carte de séjour temporaire sur le fondement des dispositions du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté du 11 mars 2009, le PREFET DE POLICE a refusé de faire droit à sa demande et a assorti ce refus d'une décision portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ; que, le PREFET DE POLICE relève régulièrement appel du jugement du 17 juin 2009 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : / [...] ; / 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française [...] ; qu'aux termes de l'article L. 311-7 du même code : Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, l'octroi de la carte de séjour temporaire et celui de la carte de séjour compétences et talents sont subordonnés à la production par l'étranger d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois ; qu'aux termes de l'article L. 211-2-1 dudit code : La demande d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois donne lieu à la délivrance par les autorités diplomatiques et consulaires d'un récépissé indiquant la date du dépôt de la demande. / [...] le visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois ne peut être refusé à un conjoint de Français qu'en cas de fraude, d'annulation du mariage ou de menace à l'ordre public. / Les autorités diplomatiques et consulaires sont tenues de statuer sur la demande de visa de long séjour formée par le conjoint de Français dans les meilleurs délais. / Lorsque la demande de visa de long séjour émane d'un étranger entré régulièrement en France, marié en France avec un ressortissant de nationalité française et que le demandeur séjourne en France depuis plus de six mois avec son conjoint, la demande de visa de long séjour est présentée à l'autorité administrative compétente pour la délivrance d'un titre de séjour. / [...] ;

Considérant qu'il ressort des pièces versées au dossier que M. A, qui est entré régulièrement en France le 7 février 2005, muni d'un visa Schengen de court séjour, a épousé le 22 septembre 2007 une ressortissante de nationalité française ; qu'ayant sollicité du PREFET DE POLICE la délivrance d'une carte de séjour temporaire en qualité de conjoint de français sur le fondement des dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le PREFET DE POLICE a nécessairement été saisi d'une demande de visa de long séjour ; que, par une décision en date du 30 janvier 2009, le PREFET DE POLICE a refusé de délivrer à M. A le visa demandé en raison du caractère irrégulier de son acte de naissance ;

Considérant, d'une part, que le PREFET DE POLICE, en application des dispositions de l'article L. 111-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dispose du pouvoir de vérifier tout acte d'état civil étranger dans les conditions définies par l'article 47 du code civil aux termes duquel les actes d'état civil étrangers font foi jusqu'à preuve du contraire établie à partir d' actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même [établissant], le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ; que, par suite, et contrairement à ce que soutient M. A, le PREFET DE POLICE pouvait, sans qu'il soit besoin qu'une procédure d'inscription en faux soit diligentée, écarter l'acte de naissance qu'il avait produit comme étant irrégulier ; que, par ailleurs, M. B ne peut utilement se prévoir des stipulations de l'article 22 de l'accord de coopération en matière de justice entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République unie du Cameroun dès lors que l'acte de naissance qu'il a produit n'est pas contesté du fait de son origine ;

Considérant, d'autre part, que si M. A a produit, devant les premiers juges, un acte de naissance établi à son nom et portant le numéro 003137 ainsi qu'un certificat d'authenticité établi le 16 mars 2009, il ressort, toutefois, des pièces versées au dossier que la vérification des registres de l'état civil de Yaoundé par les autorités consulaires, dans le cadre de l'instruction de la demande de l'intéressé, s'est révélée infructueuse dans la mesure où figurait sur ces registres non pas son acte de naissance mais celui d'un tiers portant le numéro 03137/81 ; que, des secondes vérifications opérées par ces mêmes autorités, après la lecture du jugement attaqué, il ressort que l'acte de naissance de M. A a été ajouté et collé entre les actes 013136/81 dressé le 15 mars 1981 et 013138/81 dressé le 13 mars 1981 et qu'il a été rédigé le 1er mars 1981 soit un dimanche alors que l'état civil au Cameroun n'est pas ouvert le dimanche ; qu'en outre, il comporte un numéro différent de celui porté sur l'acte de naissance initialement inséré dans les registres de l'état civil et sur les autres actes de naissance figurant dans lesdits registres ainsi qu'une présentation sensiblement différente, certaines mentions y ayant été dactylographiées alors que sur l'acte de naissance établi au nom d'un tiers, ces mentions sont manuscrites ; que, dans ces conditions, les documents produits par le PREFET DE POLICE sont de nature à établir l'irrégularité de l'acte de naissance de M. A ; que, par suite, à c'est à tort que le Tribunal administratif de Paris s'est fondé sur la circonstance que le caractère frauduleux de l'acte de naissance ne ressortait pas des pièces du dossier pour annuler l'arrêté litigieux ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige en vertu de l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A tant en première instance qu'en appel ;

Considérant, en premier lieu, que la décision portant refus de délivrance d'une carte de séjour temporaire opposée à M. A le 11 mars 2009 comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cette décision doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que contrairement à ce que soutient M. A, le fait que la décision de refus de visa de long séjour ne lui aurait pas été notifiée n'a aucune incidence sur l'existence de ladite décision ; qu'en tout état de cause, il ressort des pièces versées au dossier que cette décision, datée du 30 janvier 2009, qui était annexée à la décision lui refusant une carte de séjour temporaire en qualité de conjoint d'une ressortissante française, doit être regardée comme lui ayant été notifiée concomitamment au refus de séjour ;

Considérant, en troisième lieu, que M. A qui est recevable à exciper de l'illégalité de la décision lui refusant un visa de long séjour, soutient, d'une part, qu'il n'aurait pas été muni d'une autorisation provisoire de séjour lors de l'instruction de sa demande de visa de long séjour ; que, toutefois, cette circonstance est sans incidence sur la légalité de ladite décision ; que, d'autre part, si M. A prétend, au soutien de ce que l'acte de naissance qu'il a produit est bien authentique et que ce caractère n'est pas contestable, qu'il a déjà été mis en possession d'un visa de court séjour en 2005, cette circonstance n'a, également, aucune incidence sur la légalité de la décision du 30 janvier 2009 ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : / [...] ; / 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ; / [...] ; qu'aux termes de l'article L. 311-7 du même code : Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, l'octroi de la carte de séjour temporaire et celui de la carte de séjour compétences et talents sont subordonnés à la production par l'étranger d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois ; qu'il résulte de ce qui a été dit plus haut que la circonstance qu'une décision portant refus de délivrance d'un visa de long séjour ait été édictée à l'encontre de M. A fait obstacle à ce qu'il puisse prétendre à la délivrance d'une carte de séjour temporaire sur le fondement des dispositions sus - rappelées ;

Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Dans chaque département est instituée une commission du titre de séjour [...] ; qu'aux termes de l'article L. 312-2 du même code : La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3. / [...] ; qu'il résulte de ces dispositions que l'autorité administrative est tenue de saisir la commission du seul cas des étrangers qui réunissent effectivement les conditions prévues aux articles cités dans l'article L. 312-2 susmentionné ou aux articles correspondants des stipulations conventionnelles, auxquels elle envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions ; qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que M. A ne justifie pas satisfaire aux conditions prévues par les dispositions du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'ainsi, le PREFET DE POLICE n'était pas tenu de saisir ladite commission pour avis ;

Considérant, en sixième et dernier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; / 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;

Considérant qu'il ressort des pièces versées au dossier que M. A, qui est entré en France le 9 février 2005 sous couvert d'un visa de court séjour, s'est marié, le 22 septembre 2007, avec une ressortissante de nationalité française ; qu'à la date de l'arrêté critiqué, il justifie d'un peu moins de deux ans de mariage et ne peut attester d'une communauté de vie antérieurement et postérieurement à sa célébration ; qu'en revanche, il ressort des pièces produites par le PREFET DE POLICE que l'intéressé est le père de deux enfants qui sont restés au Cameroun et qu'y résident, également, sa mère, un frère et une soeur ; que la circonstance qu'il n'est pas dépourvu de tous liens en France n'est pas de nature à caractériser une méconnaissance de la part du PREFET DE POLICE des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'enfin et en tout état de cause, M. A ne peut utilement invoquer la méconnaissance de ces stipulations à l'égard du droit de son épouse de mener une vie privée et familiale normale ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a fait droit à la demande de M. A ; qu'il y a lieu de rejeter, par voie de conséquence, les conclusions à fin d'injonction présentées par l'intéressé et celles fondées sur l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E

Article 1er : Le jugement n° 0906020/3-1 du Tribunal administratif de Paris en date du 17 juin 2009 est annulé.

Article 2 : La demande de M. A présentée devant le Tribunal administratif de Paris ainsi que ses conclusions sont rejetées.

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N° 09PA04978


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 09PA04978
Date de la décision : 31/03/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme LACKMANN
Rapporteur ?: Mme Sonia BONNEAU-MATHELOT
Rapporteur public ?: Mme VIDAL
Avocat(s) : WOUMENI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2011-03-31;09pa04978 ?
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