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03/02/2011 | FRANCE | N°09PA03383

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3 ème chambre, 03 février 2011, 09PA03383


Vu la requête, enregistrée le 8 juin 2009, présentée pour M. William A, demeurant ..., par Me Boukheloua ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0605097 et 0608551/3 du 31 mars 2009 du Tribunal administratif de Paris en tant qu'il n'a que partiellement fait droit à sa demande en annulant, d'une part, la décision du 6 avril 2006 par laquelle le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer a annulé la décision de l'inspectrice du travail des transports du 5 août 2005 autorisant sa révocation et a retiré sa décision implicite de rejet d

u recours hiérarchique de la Régie Autonome des Transports Parisiens ...

Vu la requête, enregistrée le 8 juin 2009, présentée pour M. William A, demeurant ..., par Me Boukheloua ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0605097 et 0608551/3 du 31 mars 2009 du Tribunal administratif de Paris en tant qu'il n'a que partiellement fait droit à sa demande en annulant, d'une part, la décision du 6 avril 2006 par laquelle le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer a annulé la décision de l'inspectrice du travail des transports du 5 août 2005 autorisant sa révocation et a retiré sa décision implicite de rejet du recours hiérarchique de la Régie Autonome des Transports Parisiens (RATP) dirigé contre la décision précitée de l'inspectrice du travail, et en rejetant, d'autre part, sa demande tendant à ce que soit ordonnée sa réintégration effective, ainsi que sa demande tendant au versement d'une somme de 60 000 euros en réparation du préjudice subi ;

2°) d'annuler la décision du ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer du 6 avril 2006 ;

3°) d'enjoindre à la RATP, en application de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, de le réintégrer en conséquence avec reconstitution de carrière ;

4°) de condamner la RATP à lui verser une somme de 60 000 euros en réparation du préjudice subi ;

5°) de mettre à la charge de la RATP une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 janvier 2011 :

- le rapport de Mme Julliard, rapporteur,

- les conclusions de M. Jarrige, rapporteur public,

- et les observations de M. A et celles de Me Rabut, pour la RATP ;

Connaissance prise de la note en délibéré, présentée le 20 janvier 2011, pour M. A ;

Considérant que M. A, agent de sécurité affecté au Groupement de protection et de sécurité des réseaux (GPSR) de la RATP depuis le 19 décembre 1994, a été désigné avec 10 autres salariés, par courrier en date du 27 septembre 2004 du syndicat SUD adressé au directeur du département SEC (sécurité des réseaux), représentant syndical au sein de cet établissement, en vertu de l'article 2-2 du protocole relatif au droit syndical et à l'amélioration du dialogue social à la RATP du 23 octobre 2001, qui dispose : " Outre les délégués syndicaux visés au titre II, si un syndicat représentatif désire accréditer, pour parler et décider en son nom, des représentants autres que les membres de son bureau, notamment dans les différents sites des établissements droit syndical visés à l'annexe I, il doit également en adresser le nom aux directeurs des départements ou unités concernés, en précisant éventuellement la nature de la ou des questions auxquelles se limite le mandat de l'intéressé. Ces représentants bénéficient d'une protection juridique identique à celle qui est accordée aux délégués syndicaux. " ; que, le 14 octobre 2004, M. A a été condamné à une peine d'un an d'emprisonnement avec sursis par le Tribunal de grande instance d'Evry sans inscription au bulletin n° 2 de son casier judiciaire ; qu'informée de cette condamnation, la RATP lui a adressé, le 19 avril 2005, une lettre lui indiquant qu'elle envisageait de prendre à son encontre une mesure disciplinaire du second degré pouvant aller jusqu'à sa révocation ; que M A ne s'est pas présenté à l'entretien préalable du 2 mai 2005 et a adressé à la RATP une lettre contestant cette mesure ; qu'il a été convoqué le 22 juin 2005 devant le conseil de discipline qui a proposé sa révocation ; que, saisie le 21 mars 2005 par la RATP, la préfecture de police informait celle-ci par courrier du 3 mai 2005 que les actes commis par M. A étaient mentionnés au fichier STIC (Système de Traitement des Infractions Constatées), entraînant le retrait de son autorisation de port d'armes ; que M. A était alors affecté à titre conservatoire au département CML, sur le site de la Gare de Lyon, tandis que la RATP formait la demande auprès de l'inspecteur du travail chargé de la subdivision d'inspection du travail des transports de Paris II d'autoriser sa révocation, au motif de sa condamnation pénale et de son abstention fautive à en avoir informé son employeur ; que l'inspectrice du travail refusait à la RATP la révocation de M. A par décision du 5 août 2005, à l'encontre de laquelle la RATP introduisait un recours hiérarchique par courrier en date du 5 octobre 2005 ; que le silence gardé par le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer sur ce recours a fait naître, le 7 février 2006, une décision implicite de rejet ; que cette décision de rejet implicite a été retirée par la décision du ministre en date du 6 avril 2006 (article 3), annulant la décision de l'inspectrice du travail (article 2) et autorisant également (en son article 1er) la révocation de M. A ; que, par une requête enregistrée le 30 mars 2006 sous le n° 0605097, la RATP a déféré au Tribunal administratif de Paris la décision implicite précitée du ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer de rejet de son recours gracieux à l'encontre de la décision de l'inspectrice du travail ; que, par une requête enregistrée le 1er juin 2006 sous le n° 0608551, M. A a déféré au même tribunal la décision du 6 avril 2006 du ministre ; que, par un jugement en date du 31 mars 2009 dont M. A relève appel, le Tribunal administratif de Paris a joint les deux affaires, prononcé un non-lieu à statuer sur la requête n° 0605097 de la RATP considérant que la décision implicite de rejet à l'encontre de la décision de l'inspectrice du travail avait été retirée par la décision du 6 avril 2006 du ministre, annulé la décision ministérielle précitée et rejeté le surplus des conclusions de la requête n° 0608551 de M. A ;

Sur la régularité du jugement :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens tirés de l'irrégularité du jugement attaqué ;

Considérant qu'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre un acte administratif n'a d'autre objet que d'en faire prononcer l'annulation avec effet rétroactif ; que si, avant que le juge n'ait statué, l'acte attaqué est rapporté par l'autorité compétente mais que cette décision de retrait est critiquée dans le délai du recours contentieux, le retrait ainsi opéré n'a pas acquis un caractère définitif et il y a lieu pour le juge de la légalité de statuer sur le mérite du pourvoi dont il était saisi ; qu'en jugeant qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 0605097 de la RATP tendant à l'annulation de la décision implicite du ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer, née le 7 février 2006, de rejet du recours hiérarchique de la RATP à l'encontre de la décision du 5 août 2005 par laquelle l'inspectrice du travail avait refusé la révocation de M. A, en conséquence du retrait de cet acte opéré par la décision du 6 avril 2006 du ministre et alors que cette dernière avait été déférée devant lui dans le délai de recours contentieux, le tribunal administratif a entaché son jugement d'irrégularité ; que, dès lors, ledit jugement doit être annulé en tant qu'il a prononcé un non lieu à statuer sur les conclusions de la requête n° 0605097 de la RATP ; qu'ayant annulé le jugement sur ce point, il y a lieu de statuer par voie d'évocation sur cette partie de la demande et, en vertu de l'effet dévolutif, sur le surplus ;

Sur la légalité de la décision implicite du ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer née le 7 février 2006 :

Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 425-1 du code du travail, relatif au licenciement des délégués du personnel : "Le licenciement ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail dont dépend l'établissement ..." ; que l'avant-dernier alinéa du même article dispose que "cette procédure est également applicable aux délégués du personnel institués par voie conventionnelle" ; que l'article L. 426-1, inséré dans le même titre du code du travail que l'article L. 425-1, précise que les dispositions de ce titre "ne font pas obstacle aux clauses plus favorables résultant de conventions ou d'accords collectifs et relatives à la désignation et aux attributions des délégués du personnel" ;

Considérant que l'article L. 132-4 du code du travail, qui prévoit que les conventions et accords collectifs de travail comportant des dispositions plus favorables aux salariés que celles des lois et règlements en vigueur "ne peuvent déroger aux dispositions d'ordre public de ces lois et règlements", fait obstacle à ce que de telles conventions ou accords, y compris ceux que vise l'article L. 426-1 précité, modifient la compétence des agents publics et, par suite, à ce que le respect de leurs stipulations soit assuré par l'intervention de ces agents, à moins que des dispositions de loi ou de règlement ne l'aient prévu ; que l'avant-dernier alinéa précité de l'article L. 425-1 du code du travail ne peut donc recevoir application que dans le cas des délégués du personnel institués par voie conventionnelle qui relèvent d'une catégorie de même nature que celle qui est prévue par la loi ;

Considérant que l'article 2-2 du protocole d'accord relatif au droit syndical et à l'amélioration du dialogue social à la Régie Autonome des Transports Parisiens, conclu le 23 octobre 2001, prévoit la mise en place, en plus des représentants légaux du personnel prévus au titre II de ce texte, de personnes accréditées par un syndicat représentatif ayant pour mission de " parler et décider en son nom " " notamment dans les différents sites des établissements de droit syndical visés à l'annexe I " ; qu'en raison, tant de son mode de désignation que des fonctions qui lui sont attribuées, ce représentant ne peut être regardé comme relevant d'une catégorie de même nature que les délégués du personnel prévus par la loi ; qu'ainsi, M. A, lequel, ainsi qu'il a été dit, en application de l'article susmentionné, le syndicat SUD de la Régie Autonome des Transports Parisiens a entendu, par un courrier adressé le 27 septembre 2004 au directeur du département environnement et sécurité de ladite entreprise, nommer parmi les onze personnes désignées en qualité de représentants syndicaux au sein de l'établissement " sécurité et réseaux de la Régie Autonome des Transports Parisiens ", ne pouvait bénéficier, en cas de licenciement, de la protection prévue par le code du travail en faveur des délégués du personnel ; que, dès lors, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, l'inspectrice du travail était incompétente pour refuser ou autoriser le licenciement de M. A ; que par suite, le ministre était tenu de faire droit au recours hiérarchique formé par la RATP à l'encontre de cette décision ; qu'ainsi les moyens de procédure soulevés par M. A à l'encontre de ladite décision, et notamment celui tiré de ce que la RATP aurait méconnu les règles qu'elle s'était elle-même fixées, sont inopérants et doivent être rejetés ; qu'il en résulte que le rejet implicite, né le 7 février 2006 du silence gardé par le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer sur ce recours, est entaché d'illégalité et doit être annulé ;

Sur la légalité de la décision du 6 avril 2006 du ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer :

Considérant que pour les motifs ci-dessus exposés relatifs à l'incompétence de l'autorité administrative pour refuser ou autoriser le licenciement de M. A, la décision en date 6 avril 2006 du ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer est entachée d'illégalité et doit être annulée en tant qu'elle autorise la révocation de M. A ; que le ministre était, en revanche, tenu de retirer par la décision contestée le rejet implicite illégal du recours hiérarchique dirigé contre la décision en date du 5 août 2005 de l'inspectrice du travail et d'annuler cette dernière décision comme prise par une autorité incompétente ;

Sur les conclusions de M. A aux fins d'injonction et d'indemnisation du préjudice subi :

Considérant que les motifs du présent arrêt font obstacle à se qu'il soit fait droit aux conclusions aux fins d'injonction et d'indemnisation du préjudice subi présentées par M. A ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de rejeter les conclusions de M. A et de la RATP tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 0605097 et 0608551/3 du 31 mars 2009 du Tribunal administratif de Paris est annulé en tant qu'il a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions de la requête n° 0605097 de la RATP.

Article 2 : La décision implicite du ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer du 7 février 2006 de rejet du recours hiérarchique de la RATP à l'encontre de la décision du 5 août 2005 par laquelle l'inspectrice du travail a refusé la révocation de M. A, est annulée.

Article 3 : L'article 2 de la décision en date du 6 avril 2006 du ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer, en tant qu'il autorise la révocation de M. A, est annulé.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la demande de M. A devant le Tribunal administratif de Paris est rejeté.

Article 5 : Le surplus des conclusions incidentes de la RATP devant la Cour est rejeté.

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N° 09PA03383


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3 ème chambre
Numéro d'arrêt : 09PA03383
Date de la décision : 03/02/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme VETTRAINO
Rapporteur ?: Mme Marianne JULLIARD
Rapporteur public ?: M. JARRIGE
Avocat(s) : RABUT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2011-02-03;09pa03383 ?
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