Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 12 janvier 2009, présentée par le PREFET DE POLICE ; le préfet demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement nos 0813055/6-1 et 0813058/6-1 du 28 novembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Paris a, d'une part, annulé ses arrêtés des 30 mai et 5 juin 2008 par lesquels il a refusé respectivement à M. B A et à Mme C épouse A la délivrance d'un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé leur pays de destination, d'autre part, lui a enjoint de délivrer aux intéressés un titre de séjour, et, enfin, a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
2°) de rejeter les demandes présentées par M. et Mme A devant le Tribunal administratif de Paris ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 novembre 2010 :
- le rapport de Mme Dhiver, rapporteur,
- et les conclusions de M. Egloff, rapporteur public ;
Considérant que le PREFET DE POLICE fait appel du jugement du 28 novembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé ses arrêtés des 30 mai et 5 juin 2008 refusant respectivement à M. A et à Mme Bastawroos épouse A, tous deux de nationalité égyptienne, la délivrance d'un titre de séjour, leur faisant obligation de quitter le territoire et fixant leur pays de destination, au motif que lesdites décisions étaient entachées d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de leurs conséquences sur la situation personnelle des intéressés ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A est entré en France en 1999 et a été admis à séjourner régulièrement sur le territoire français en qualité d'étranger malade de 2001 à 2005, période durant laquelle il a travaillé et a occupé, d'avril 2004 à mars 2006, un emploi de peintre en bâtiment en contrat à durée indéterminée ; que Mme A indique être entrée en France en mars 2004 ; que le couple, qui s'est marié le 19 avril 2004, a deux enfants, nés en France respectivement les 25 septembre 2004 et 1er octobre 2005 ; que M. et Mme A, qui s'étaient vus refuser la délivrance d'un titre de séjour respectivement les 10 mars 2006 et 15 octobre 2004, étaient tous deux en situation irrégulière à la date des décisions litigieuses ; que, s'il ressort également des pièces du dossier que M. A souffre d'une pathologie cardiaque ayant nécessité l'implantation, en 2001, d'un défibrillateur, l'intéressé ne verse au dossier aucun document faisant apparaître qu'il faisait l'objet, à la date de la décision litigieuse le concernant, d'un suivi médical particulier et que sa maladie nécessitait des interventions chirurgicales périodiques ; que l'intimé a d'ailleurs admis, dans un courrier daté du 2 mai 2008 adressé au PREFET DE POLICE ainsi que dans sa demande au tribunal administratif, que son état de santé ne nécessitait pas une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il pouvait effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; que, si M. A a produit en cours d'instance devant le tribunal administratif un document faisant apparaître que, postérieurement aux décisions litigieuses, il a été hospitalisé, du 5 au 8 octobre 2008, pour le remplacement du défibrillateur implanté en 2001 dont la batterie était en fin de vie, cette circonstance nouvelle, seulement susceptible de faire obstacle à une exécution immédiate de l'obligation de quitter le territoire, était sans incidence sur la légalité des décisions refusant la délivrance d'un titre de séjour à M. et Mme A ; que, si les intimés font également valoir que leur fils aîné, Mickaël, né prématurément, a souffert à la naissance de troubles des voies digestives et fait l'objet d'un suivi hospitalier régulier, il ressort du dernier compte-rendu de consultation du 7 mars 2007 avec le médecin, chef de service du service de gastroentérologie de l'hôpital Necker enfants malades, que l'enfant a une croissance normale et que son examen clinique est sans particularité ; qu'enfin, si le frère et deux soeurs de M. A sont en France en situation régulière, il résulte de l'instruction que les intimés ne sont pas dépourvus d'attaches familiales en Egypte, où résident toute la famille de Mme A ainsi que les parents et les autres soeurs de M. A ; que, dans les circonstances de l'espèce, quand bien même les intéressés auraient acquis un logement en France en 2005, le PREFET DE POLICE, en leur refusant la délivrance d'un titre de séjour, n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de ses décisions sur la situation personnelle de M. et Mme A ; qu'il est, par suite, fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé pour ce motif ses arrêtés des 30 mai et 5 juin 2008 ;
Considérant qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. et Mme A devant le Tribunal administratif de Paris et en appel ;
Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que M. et Mme A ont sollicité du PREFET DE POLICE la délivrance d'un titre de séjour uniquement sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que les décisions des 30 mai et 5 juin 2008, qui visent la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, notamment son article 8, et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, notamment son article L. 313-11, énoncent de façon suffisamment précise les circonstances de droit qui en constituent le fondement, quand bien même elles ne précisent pas l'alinéa de l'article L. 313-11 sur lequel elles se fondent ; que, si les intimés font valoir que ces décisions ne comportent aucune mention de la pathologie cardiaque dont souffre M. A, le PREFET DE POLICE, qui énonce les circonstances relatives à la vie privée et familiale de M. et Mme A, a suffisamment motivé en fait ses décisions au regard du fondement sur lequel les intimés avaient sollicité un titre de séjour ; que, si la décision du 5 juin 2008 prise à l'encontre de Mme A mentionne de façon erronée que cette dernière est entrée en France en 1999, cette erreur matérielle n'est pas de nature à entacher d'irrégularité ladite décision, ni à faire apparaître que le préfet n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation personnelle de l'intimée ; qu'enfin, alors même que Mme A n'a pas sollicité un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet pouvait, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose, également examiner la demande de l'intéressée au regard de ces dispositions ; que, par suite, M. et Mme A ne sont pas fondés à soutenir que les décisions des 30 mai 2008 et 5 juin 2008 leur refusant l'admission au séjour seraient insuffisamment motivées ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de la loi n° 2007-1631 du 20 novembre 2007 : (...) L'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation ; que, par suite, le moyen tiré de ce que les décisions des 30 mai et 5 juin 2008 faisant obligation à M. et Mme A de quitter le territoire français seraient insuffisamment motivées est inopérant ;
Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ; qu'aux termes de l'article L 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ;
Considérant que, si M. et Mme A font valoir qu'ils sont présents en France respectivement depuis 1999 et 2004, que leurs enfants, nés en France en 2004 et 2005, y sont scolarisés et qu'ils justifient d'une bonne insertion dans la société française, il ressort des pièces du dossier qu'ainsi qu'il a été dit précédemment, ils se sont tous deux maintenus en situation irrégulière sur le territoire et qu'ils ne sont pas dépourvus d'attaches dans leur pays d'origine ; qu'aucune circonstance ne fait obstacle à ce que la cellule familiale puisse se reconstituer hors de France ; que, dans les circonstances de l'espèce, les décisions refusant à M. et Mme A la délivrance d'un titre de séjour et leur faisant obligation de quitter le territoire français n'ont pas porté au droit des intéressés au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elles ont été prises et n'ont ainsi méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, pour les mêmes motifs, le PREFET DE POLICE n'a pas davantage commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de ses décisions portant obligation de quitter le territoire français sur la situation des intéressés ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE POLICE est fondé à demander l'annulation du jugement du 28 novembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé ses arrêtés des 30 mai et 5 juin 2008 et lui a enjoint de délivrer à M. et Mme A un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale , ainsi que le rejet des demandes présentées par ceux-ci devant ce tribunal ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à M. et Mme A la somme qu'ils réclament au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Paris du 28 novembre 2008 est annulé.
Article 2 : Les demandes présentées devant le Tribunal administratif de Paris par M. et Mme A et leurs conclusions d'appel sont rejetées.
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N° 08PA04258
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N° 09PA00154