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06/10/2010 | FRANCE | N°08PA04584

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 06 octobre 2010, 08PA04584


Vu la requête, enregistrée le 1er septembre 2008, présentée pour la société SUEZ FINANCE SA, dont le siège social est sis 16 rue de la Ville l'Evêque à Paris (75008), par Me Tournès ; la société SUEZ FINANCE SA demande à la Cour:

1°) d'annuler le jugement n° 0312727/1-1 du 9 juillet 2008 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période correspondant aux années 1997 et 1998 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge

de l'Etat le montant des frais irrepétibles sur le fondement des dispositions de l'article...

Vu la requête, enregistrée le 1er septembre 2008, présentée pour la société SUEZ FINANCE SA, dont le siège social est sis 16 rue de la Ville l'Evêque à Paris (75008), par Me Tournès ; la société SUEZ FINANCE SA demande à la Cour:

1°) d'annuler le jugement n° 0312727/1-1 du 9 juillet 2008 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période correspondant aux années 1997 et 1998 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le montant des frais irrepétibles sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la sixième directive 77/388/CEE du Conseil des communautés européennes du 17 mai 1977 ;

Vu l'arrêté du 11 janvier 1990 relatif à la terminologie économique et financière ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le livre des procédures fiscales;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 septembre 2010 :

- le rapport de M. Magnard, rapporteur,

- et les conclusions de M. Egloff, rapporteur public ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société SUEZ FINANCE SA, qui a pour activité de centraliser les ressources financières du groupe Suez, a contracté deux emprunts à taux fixe auprès de la Caisse d'Epargne de Provence ; que, pour la couverture de ces opérations, la société requérante a conclu des contrats d'échange de taux d'intérêts (swaps) ; qu'à la suite de la résiliation de ces swaps, la société SUEZ FINANCE SA a perçu une soulte soulte d'un montant de 11 779 885 F ; que le service a estimé que SUEZ FINANCE cette somme cette somme devait être incluse au dénominateur du prorata prévu à l'article 212 de l'annexe II au code général des impôts ; que la Société SUEZ FINANCE SA fait appel du jugement du 9 juillet 2008 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge en conséquence au titre de la période correspondant aux années 1997 et 1998 ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que les premiers juges, qui ne sont pas tenus de répondre à tous les arguments présentés par les requérants à l'appui de leurs moyens, ont statué sur le moyen présenté par la société SUEZ FINANCE SA, tiré de ce que les produits financiers en litige ne sauraient être regardés comme accessoires au sens du 2 de l'article 19 de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil des communautés européennes du 17 mai 1977 ; qu'ils ont ainsi, alors même qu'ils n'auraient pas précisé en quoi la mention du 2 de l'article 19 relative aux opérations visées à l'article 13 sous B sous d) ne pouvait désigner les opérations financières accessoires à des opérations financières principales, suffisamment motivé leur jugement ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 212 de l'annexe II au code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable : Les assujettis qui ne réalisent pas exclusivement des opérations ouvrant droit à déduction sont autorisés à déduire une fraction de la taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les biens constituant des immobilisations égale au montant de cette taxe multiplié par le rapport existant entre le montant annuel des recettes afférentes à des opérations ouvrant droit à déduction et le montant annuel des recettes afférentes à l'ensemble des opérations réalisées ; que ces dispositions, prises pour l'application de l'article 19 de la directive susvisée du 17 mai 1977, doivent être interprétées en ce sens que les opérations auxquelles elles se réfèrent ne sauraient concerner que des activités situées dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée ; qu'aux termes du I de l'article 256 du code général des impôts : Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de service effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel ; que le versement d'une somme ne peut être regardé comme la contrepartie d'une prestation de service rendue à titre onéreux au sens de ces dispositions, et comme entrant, par suite, dans le champ de la taxe sur la valeur ajoutée, qu'à la condition, notamment, qu'il existe un lien direct entre ce versement et une prestation nettement individualisable, fournie par le bénéficiaire du versement à la personne qui l'effectue ;

Considérant que la somme versée à la société SUEZ FINANCE SA à la suite de la résiliation des contrats d'échange de taux d'intérêt en cause, était représentative du montant d'intérêts qui lui était dû à la date de cette résiliation ; que, par de tels contrats, et ainsi que le soutient elle-même la société SUEZ FINANCE SA, qui se réfère aux termes de l'arrêté du 11 janvier 1990 relatif à la terminologie économique et financière, deux parties ayant contracté des emprunts selon des modalités de taux d'intérêt différentes s'échangent les services de leur dette en compensant périodiquement le montant des intérêts, dont elles deviennent ainsi mutuellement redevables ; qu'ainsi, nonobstant la circonstance que seul le différentiel des flux futurs d'intérêt attendus des swaps ait été acquitté à l'occasion de la résiliation, ladite somme avait pour effet de rémunérer un élément de la prestation consistant à prêter, sous réserve de réciprocité, une somme portant intérêt ; que, par conséquent, et malgré le caractère aléatoire des contrats de swaps, la somme litigieuse doit être regardée comme reçue en contrepartie de prestations de services effectuées à titre onéreux et devant, de ce fait, être soumises à la taxe, en application de l'article 256 du code général des impôts ;

Considérant, en deuxième lieu, que, selon les dispositions de l'article 19 § 2 de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil des Communautés européennes du 17 mai 1977, il est fait abstraction, pour le calcul du prorata de déduction, du montant du chiffre d'affaires afférent au produit des opérations financières exonérées de taxe sur la valeur ajoutée lorsqu'il s'agit d'opérations accessoires immobilières ou financières ou de celles visées à l'article 13 sous B sous d), lorsqu'il s'agit d'opérations accessoires ; qu'il suit de là que les produits financiers exonérés, bien que rentrant dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée, sont cependant exclus du dénominateur du prorata servant au calcul des droits à déduction lorsqu'ils présentent un caractère accessoire ; qu'il résulte des décisions rendues par la Cour de justice des Communautés européennes dans les affaires n° 306/94 Régie Dauphinoise le 11 juillet 1996 et n° 77/01 SA EDM le 29 avril 2004 qu'un produit financier présente un caractère accessoire, au sens de l'article 19 § 2 de la sixième directive, lorsque, d'une part, l'opération de placement en cause, tout en présentant un lien avec l'activité taxable, n'en constitue pas le prolongement direct, permanent et nécessaire, et que, d'autre part, cette opération ne nécessite qu'une utilisation limitée des moyens matériels de l'entreprise ;

Considérant que la société SUEZ FINANCE SA a pour activité d'assurer les ressources financières du groupe SUEZ ; que les contrats de swaps conclus par la société requérante étaient destinés à la couvrir contre les variations des taux d'intérêt afférents à des emprunts souscrits dans le cadre de cette activité ; qu'ils étaient, par suite, étroitement imbriqués à l'activité économique taxable de la société SUEZ FINANCE SA, dont ils constituaient, au cours des années en litige, le complément indispensable, direct et permanent ; qu'ainsi, les sommes perçues à la suite de la résiliation des emprunts auxquels étaient attachés les swaps de l'espèce ne sauraient être regardées comme procédant d'opérations financières accessoires au sens de l'article 19 § 2 de la sixième directive ; que, contrairement à ce que soutient la société SUEZ FINANCE SA, les dispositions susmentionnées de la sixième directive ne permettent pas d'exclure les rémunérations litigieuses du calcul du prorata au motif qu'il s'agirait d'opérations financières accessoires à des opérations financières réalisées à titre principal ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte des dispositions précitées de l'article 212 de l'annexe II au code général des impôts que doivent figurer au dénominateur du prorata de déduction le montant annuel des recettes afférentes à l'ensemble des opérations réalisées et entrant dans le champ de la taxe sur la valeur ajoutée ; que la somme litigieuse de 11 779 885 F est, ainsi qu'il vient d'être dit ci-dessus, une recette de cette nature ; que la société SUEZ FINANCE SA ne saurait, par suite, valablement soutenir que cette somme doit être, pour le calcul du prorata de déduction, réduite des sommes versées à l'organisme prêteur lors de la résiliation du prêt pour la couverture duquel le contrat de swap en litige avait été souscrit ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'adresser une question préjudicielle à la Cour de justice de l'Union européenne, que la société SUEZ FINANCE SA n'est pas fondée à soutenir que la rémunération litigieuse ne pouvait être incluse au dénominateur du prorata de déduction prévu à l'article 212 de l'annexe II au code général des impôts et que c'est, par suite, à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par conséquent, être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la société SUEZ FINANCE SA est rejetée.

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N° 08PA04584


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 08PA04584
Date de la décision : 06/10/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme TANDONNET-TUROT
Rapporteur ?: M. Franck MAGNARD
Rapporteur public ?: M. EGLOFF
Avocat(s) : CMS BUREAU FRANCIS LEFEBVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2010-10-06;08pa04584 ?
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