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08/04/2010 | FRANCE | N°09PA02546

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3 ème chambre, 08 avril 2010, 09PA02546


Vu la requête, enregistrée le 4 mai 2009, présentée pour la SOCIETE ARGUS DE LA PRESSE, dont le siège est 130 rue du Mont Cenis à Paris (75018), par Me Noguier ; la SOCIETE ARGUS DE LA PRESSE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0504495/3-1 en date du 18 février 2009 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé la décision en date 24 février 2005 de l'inspecteur du travail qui l'avait autorisé à licencier Mme Anne Laure A, ensemble la décision implicite par laquelle le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale avait rejeté le reco

urs formé par Mme A à l'encontre de cette décision ;

2°) de confirmer ...

Vu la requête, enregistrée le 4 mai 2009, présentée pour la SOCIETE ARGUS DE LA PRESSE, dont le siège est 130 rue du Mont Cenis à Paris (75018), par Me Noguier ; la SOCIETE ARGUS DE LA PRESSE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0504495/3-1 en date du 18 février 2009 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé la décision en date 24 février 2005 de l'inspecteur du travail qui l'avait autorisé à licencier Mme Anne Laure A, ensemble la décision implicite par laquelle le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale avait rejeté le recours formé par Mme A à l'encontre de cette décision ;

2°) de confirmer lesdites décisions et de rejeter les demandes présentées par Mme A devant le Tribunal administratif de Paris ;

3°) de mettre à la charge de Mme A une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 mars 2010 :

- le rapport de Mme Renaudin, rapporteur,

- les conclusions de M. Jarrige, rapporteur public,

- et les observations de Me de Poncins, pour la SOCIETE ARGUS DE LA PRESSE et celles de Me Monin, pour Mme A ;

Considérant que la SOCIETE ARGUS DE LA PRESSE spécialisée dans la vente de coupures de presse, a demandé le 26 janvier 2005 l'autorisation de licencier Mme A, recrutée en octobre 2001 en qualité d'opératrice et exerçant respectivement depuis avril et décembre 2003 les mandats de déléguée du personnel et de déléguée syndicale ; que par une décision en date du 24 février 2005, l'inspecteur du travail de la section 18B de l'inspection du travail de la direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle de Paris a accordé à la SOCIETE ARGUS DE LA PRESSE l'autorisation sollicitée ; que le silence gardé par le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale sur le recours hiérarchique de Mme A a fait naître une décision implicite de rejet de celui-ci ; que Mme A a contesté ces deux décisions devant le Tribunal administratif de Paris ; que par jugement du 18 février 2009, dont la SOCIETE ARGUS DE LA PRESSE relève régulièrement appel, le Tribunal administratif de Paris a annulé la décision de l'inspecteur du travail, ensemble la décision implicite du ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale rejetant le recours hiérarchique formé par Mme A ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Considérant que la demande d'autorisation de licenciement adressée par la SOCIETE ARGUS DE LA PRESSE par courrier du 26 janvier 2005 à l'inspecteur du travail, précédée par une lettre du 12 janvier adressée par l'employeur à ce dernier pour lui faire part du licenciement envisagé, mettent en avant, pour justifier le licenciement de Mme A, le climat d'angoisse qu'elle faisait régner dans l'entreprise compte tenu de son attitude agressive et inquisitoriale tant vis à vis de ses collègues de travail que de sa direction ; que ces courriers rappellent que Mme A met également de la mauvaise volonté à exécuter son travail, lequel est bien inférieur en termes de rendement à celui des autres salariés ; que les précédentes demandes d'autorisation de licenciement, refusées par l'inspecteur du travail, se fondaient sur des attitudes similaires et étaient motivées sur un fondement disciplinaire ; que, par suite, c'est à tort que les premiers juges ont estimé que l'administration ne pouvait autoriser le licenciement de Mme A fondé sur une insuffisance professionnelle, sans rechercher s'il existait une possibilité de reclassement de l'intéressée à un autre poste au sein de l'entreprise et a annulé notamment sur ce motif, les décisions contestées ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme A tant devant elle que devant le Tribunal administratif de Paris ;

Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des salariés qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail, et le cas échéant au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi ;

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 122-44 du code du travail, devenu l'article L. 1332-4 du même code dans sa nouvelle rédaction : Aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales ; que l'employeur ne peut pas fonder une demande d'autorisation de licenciement sur des faits prescrits en application de cette disposition, sauf si ces faits relèvent d'un comportement fautif identique aux faits non prescrits donnant lieu à l'engagement des poursuites disciplinaires ;

Considérant que les faits reprochés par la SOCIETE ARGUS DE LA PRESSE à Mme A dans sa demande d'autorisation de licenciement en date du 26 janvier 2005, alors que cette dernière n'avait réintégré son bureau, après plusieurs périodes de mise à pied, que le 3 janvier 2005, consistent seulement en une multiplication d'exigences vis à vis de sa hiérarchie, concernant le libre accès à un local syndical, le versement de sa paie et d'avances en espèces et la fourniture d'une lampe ; que si la société requérante soutenait au demeurant que Mme A se montrait agressive avec un collègue qui écoutait la radio sur son lieu de travail, aucune pièce au dossier n'établit lesdits faits ; que s'agissant encore de la prise d'heures de délégation sans en informer sa hiérarchie ou de son rendement insuffisant, ceux-ci ne peuvent présenter un caractère fautif compte tenu de la courte période sur laquelle ces faits auraient eu lieu ; qu'à eux seuls les faits reprochés à Mme A par la SOCIETE ARGUS DE LA PRESSE ne constituent pas une faute d'une gravité suffisante de nature à justifier un licenciement ;

Considérant que si la SOCIETE ARGUS DE LA PRESSE s'appuie sur les problèmes comportementaux antérieurs de l'intéressée vis à vis de ses collègues et l'altération consécutive du climat de travail dans le service considéré, révélés par les témoignages versés au dossier de personnes employées au sein de l'entreprise, ces faits, qui sont prescrits en application de l'article L. 122-44 du code du travail, relèvent d'un comportement fautif qui n'est pas identique à celui en cause dans la demande d'autorisation de licenciement en date du 26 janvier 2005 ; que par voie de conséquence, ils ne pouvaient légalement être retenus par l'inspecteur du travail pour caractériser l'existence d'une faute d'une gravité suffisante pour justifier le licenciement de Mme A ;

Considérant que, par suite, la SOCIETE ARGUS DE LA PRESSE n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé la décision en date du 24 février 2005 de l'inspecteur du travail l'autorisant à licencier Mme A, ensemble la décision implicite par laquelle le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale a rejeté le recours formé par Mme A à l'encontre de cette décision ;

Sur les conclusions indemnitaires présentées par Mme A :

Considérant que si Mme A demande la condamnation de la SOCIETE ARGUS DE LA PRESSE à lui verser une indemnité de 10 000 euros en raison de la méconnaissance des règles de droit par son employeur, il n'appartient pas au juge administratif de se prononcer sur les conclusions d'un salarié de droit privé tendant à la condamnation d'une société anonyme au versement de dommages et intérêts à raison d'une procédure de licenciement ; qu'il y a lieu, par suite, de rejeter les conclusions indemnitaires présentées par Mme A comme portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par la SOCIETE ARGUS DE LA PRESSE doivent dès lors être rejetées ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SOCIETE ARGUS DE LA PRESSE la somme de 3 000 euros au titre des frais exposés par Mme A et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la SOCIETE ARGUS DE LA PRESSE est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de Mme A tendant à la condamnation de la SOCIETE ARGUS DE LA PRESSE au versement d'une somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts sont rejetées comme présentées devant un ordre de juridictions incompétent pour en connaître.

Article 3 : La SOCIETE ARGUS DE LA PRESSE versera à Mme A une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 09PA02546


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3 ème chambre
Numéro d'arrêt : 09PA02546
Date de la décision : 08/04/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme VETTRAINO
Rapporteur ?: Mme Mathilde Renaudin
Rapporteur public ?: M. JARRIGE
Avocat(s) : CHAINTRIER et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2010-04-08;09pa02546 ?
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