Vu le recours, enregistré le 19 juin 2008, présenté par le GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE ; le GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0604371 du 17 avril 2008 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé la décision en date du 20 juillet 2005 par laquelle il a rejeté la demande de changement de nom formulé par M. Y X ;
2°) de rejeter la demande de première instance ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 mars 2009 :
- le rapport de Mme Ghaleh-Marzban, rapporteur,
- et les conclusions de M. Bachini, rapporteur public ;
Considérant qu'aux termes de l'article 61 du code civil : « Toute personne qui justifie d'un intérêt légitime peut demander à changer de nom » ;
Considérant que le GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE soutient que M. X ne justifie pas, d'une part, d'une durée de possession du nom Z suffisamment longue pour justifier du caractère suffisant de sa demande de changement de nom ; que, d'autre part, l'usage qu'il a fait du nom de sa mère n'a pas été validé par l'administration qu'enfin, la circonstance que ses parents aient divorcé alors qu'il n'était âgé que de 4 ans ne lui confère pas en tant que tel un intérêt légitime à prendre le nom de sa mère ;
Considérant, d'une part, que si, pour apprécier le caractère constant et prolongé de l'usage d'un nom, le GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE, peut légalement se référer à des critères de durée qu'il s'est fixés, c'est toutefois à la condition qu'il procède à un examen particulier de la demande dont il est saisi et qu'il recherche si les circonstances particulières invoquées par le demandeur justifient ou non qu'il soit dérogé à ce que le nom revendiqué ait été porté pendant quatre-vingt-dix ans et trois générations, exigence qu'il s'est lui-même fixé ; qu'en estimant qu'il était tenu de rejeter les demandes de M. X, dès lors que l'usage du nom Z ne satisfaisait pas aux critères sus énoncés, le GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE, a entaché sa décision d'une erreur de droit ;
Considérant, d'autre part, qu'il ressort des pièces du dossier que l'intéressé a usé du nom de sa mère de sa naissance le 5 juillet 1981 à 2004, année ou cours de laquelle les services de l'assurance maladie lui ont signalé une anomalie sur son identification à l'occasion de l'établissement de sa carte vitale ; que durant toutes ces années, de l'âge de 0 à 23 ans, il s'est construit socialement et professionnellement sous cette identité en obtenant notamment des diplômes et des emplois ; que par ailleurs l'intéressé s'est vu délivrer par l'administration un certain nombre de documents tels une carte d'identité, un extrait de casier judiciaire, un permis de conduire, un certificat d'aptitude à la défense, dont l'établissement a supposé la vérification de l'état civil du demandeur ; qu'ainsi, le comportement de l'administration n'a pu que conforter l'intéressé dans l'usage du seul nom sous lequel il se soit identifié durant les vingt-trois premières années de sa vie ; dans les circonstances de l'espèce, il y donc lieu de considérer que le GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE a commis une erreur manifeste d'appréciation en rejetant la demande de M. X tendant à ce qu'il soit autorisé à changer de nom ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE n'est pas fondé à se plaindre que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé sa décision de rejet ;
Sur l'injonction prononcée par le Tribunal administratif de Paris :
Considérant que le jugement attaqué n'implique pas nécessairement que M. X soit autorisé à changer de nom, mais seulement que le GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE réexamine sa demande ; que dès lors le GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif lui a enjoint d'autoriser M. X à changer de nom ; qu'il y a lieu simplement d'enjoindre au GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE de réexaminer la demande de M. X dans un délai de trois mois à compter de la présente décision ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. X de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : L'article 2 du jugement n° 0604371 du Tribunal administratif de Paris du 17 avril 2008 est annulé.
Article 2 : Il est enjoint au GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE de procéder au réexamen de la situation de M. X dans les trois mois suivant la notification du présent arrêt. Le GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE tiendra le greffe de la Cour (service de l'exécution) immédiatement informé des dispositions prises pour répondre à cette injonction.
Article 3 : Le surplus du recours du GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE est rejeté.
Article 4 : Le GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE versera à M. X, une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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N° 08PA03185