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25/03/2009 | FRANCE | N°05PA03829

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 25 mars 2009, 05PA03829


Vu la requête, enregistrée le 19 septembre 2005, présentée pour la société CHAINE THERMALE DU SOLEIL, dont le siège est 32 avenue de l'Opéra à Paris (75002), par Me Foucault ; la SOCIETE CHAINE THERMALE DU SOLEIL demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9819764-9819769 du 8 juillet 2005 par lequel le Tribunal administratif de Paris n'a que partiellement fait droit à ses demandes tendant à obtenir, d'une part, la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités y afférentes qui lui ont été réclamés au titre de la période

du 1er janvier 1990 au 31 décembre 1991, et d'autre part la décharge des cotis...

Vu la requête, enregistrée le 19 septembre 2005, présentée pour la société CHAINE THERMALE DU SOLEIL, dont le siège est 32 avenue de l'Opéra à Paris (75002), par Me Foucault ; la SOCIETE CHAINE THERMALE DU SOLEIL demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9819764-9819769 du 8 juillet 2005 par lequel le Tribunal administratif de Paris n'a que partiellement fait droit à ses demandes tendant à obtenir, d'une part, la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités y afférentes qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 1990 au 31 décembre 1991, et d'autre part la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, des suppléments d'impôt sur les sociétés sur les distributions et des pénalités y afférentes auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1989 et 1991 ;

2°) de prononcer les décharges demandées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la sixième directive 77/388/CEE du Conseil des Communautés européennes du 17 mai 1977 ;

Vu le code civil ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 mars 2009 :

- le rapport de M. Magnard, rapporteur,

- les conclusions de Mme Evgenas, rapporteur public ;

Considérant que la SOCIETE CHAINE THERMALE DU SOLEIL fait appel du jugement du Tribunal administratif de Paris du 8 juillet 2005 en tant qu'il n'a que partiellement fait droit à ses demandes tendant à obtenir, d'une part, la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités y afférentes qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 1990 au 31 décembre 1991, et d'autre part la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, de suppléments d'impôt sur les sociétés sur les distributions et des pénalités y afférentes auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1989 et 1991 ; que par la voie de l'appel incident, le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique conteste ledit jugement en tant qu'il lui est défavorable ;

Sur l'appel principal de la SOCIETE CHAINE THERMALE DU SOLEIL :

En ce qui concerne l'impôt sur les sociétés :

S'agissant de la provision pour impôt inscrite au passif du bilan de la SOCIETE. CHAINE THERMALE DU SOLEIL :

Considérant que l'administration a réintégré au bénéfice imposable de la SOCIETE. CHAINE THERMALE DU SOLEIL au titre de l'exercice clos en 1989, premier exercice non prescrit, la somme de 1 729 952 F, intitulée provision pour impôt , inscrite au passif de son bilan, au motif que la société n'était pas autorisée à déduire une provision se rapportant à un impôt non admis en déduction ;

Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts, applicable à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment (...) 5° les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables (...) les provisions qui (...) deviennent sans objet au cours d'un exercice ultérieur sont rapportées aux résultats dudit exercice (...) ; qu'aux termes de l'article 213 du même code : L'impôt sur les sociétés et l'impôt sur le revenu ne sont pas admis dans les charges déductibles pour l'établissement de l'impôt (...) ; que n'est pas autorisée la déduction de provisions correspondant à des pertes ou à des charges dont le montant ne serait pas lui-même déductible ;

Considérant que la société requérante ne conteste pas le caractère non déductible de la provision en litige, qui correspond au montant de l'imposition due, au taux réduit de 15 %, sur les plus-values dégagées sur les éléments non amortissables apportés par la S.A. Molitg les bains, à la suite de son absorption par la requérante, à compter, rétroactivement, du 1er janvier 1986, en vertu d'un traité de fusion conclu le 20 octobre 1986 et modifié par avenant le 10 novembre 1986 ; qu'il est constant que la provision litigieuse était inscrite au passif du bilan de clôture de la SOCIETE CHAINE THERMALE DU SOLEIL de l'exercice 1989, premier exercice non prescrit ; que la société requérante soutient que cette provision, qui a été enregistrée directement à son bilan de clôture de l'exercice 1986 de manière extra-comptable, n'a donné lieu à aucune écriture affectant le compte de résultat et est par suite sans effet fiscal ; que toutefois elle n'établit pas que le crédit du compte de provision constaté à la clôture de l'exercice 1986 au passif de son bilan aurait eu comme contrepartie le débit d'un compte de bilan et non une écriture de débit au compte de résultat de cet exercice et que la constatation de la provision litigieuse n'aurait en conséquence donné lieu à aucune sous-évaluation de son actif net ; qu'elle affirme elle-même au contraire que son actif net a été directement affecté par la constatation de cette provision ; que la doctrine administrative invoquée ne fait pas de la loi fiscale une interprétation différente de ce qui précède ; que par suite le service était fondé à corriger au passif du bilan de clôture de l'exercice 1989 ladite sous évaluation ;

S'agissant des frais financiers non facturés par la SOCIETE CHAINE THERMALE DU SOLEIL à sa filiale la SA Jonzac :

Considérant qu'en vertu des dispositions combinées des articles 38 et 209 du code général des impôts, le bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés est celui qui provient des opérations de toute nature faites par l'entreprise, à l'exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion commerciale normale ; que les prêts sans intérêts ou l'abandon de créances accordés par une entreprise au profit d'un tiers ne relèvent pas, en règle générale, d'une gestion commerciale normale, sauf s'il apparaît qu'en consentant de tels avantages l'entreprise a agi dans son propre intérêt ; que cette règle doit recevoir application même si le bénéficiaire de ces avances est une filiale de la société, hormis le cas où la situation des deux sociétés serait telle que la société-mère puisse être regardée comme ayant agi dans son propre intérêt en venant en aide à une filiale en difficulté ; que, s'il appartient à l'administration d'apporter la preuve des faits sur lesquels elle se fonde pour estimer qu'un abandon de créances ou d'intérêts consenti par une entreprise à un tiers constitue un acte anormal de gestion, elle est réputée apporter cette preuve dès lors que cette entreprise n'est pas en mesure de justifier qu'elle a bénéficié en retour de contreparties ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, du mois de janvier 1989 au mois de juillet 1989, la SOCIETE CHAINE THERMALE DU SOLEIL a omis de facturer à sa filiale, la S.A. Jonzac, dont elle détenait 83,8 % du capital le 31 décembre 1989, des intérêts à raison de son compte courant débiteur sur la période en cause, à concurrence de sommes variant de 3 400 049 F à 4 076 799 F ; que, regardant cette renonciation comme constitutive d'un acte anormal de gestion, l'administration a réintégré le montant des intérêts non réclamés, soit la somme de 188 854 F, au bénéfice imposable au titre de l'année 1989 ; que la seule circonstance tirée de ce que la S.A. Jonzac serait propriétaire d'un établissement thermal exploité par la requérante ne permet pas d'établir que, comme le soutient cette dernière, l'abandon d'intérêt litigieux aurait eu des contreparties commerciales en permettant à l'intéressée de développer son activité ; que si la SOCIETE CHAINE THERMALE DU SOLEIL allègue que la S.A. Jonzac, qui a débuté son activité le 31 décembre 1988, aurait dégagé, au titre de l'année 1990, un résultat déficitaire de 695 859 F et que sa situation nette aurait été négative aux 31 décembre 1988, 1989 et 1990, à concurrence des sommes de 2 248 200 F, 3 159 080 F et 3 854 899 F, elle n'appuie ses allégations d'aucune pièce justificative démontrant le caractère précaire de la situation financière de sa filiale dont l'activité était en phase de démarrage ; que la société requérante ne produit en outre aucun élément concret permettant d'apprécier la réalité des risques de pertes financières ou d'atteinte à son renom qu'elle aurait encourus dans l'hypothèse où elle n'aurait pas consenti l'abandon d'intérêts en litige ; qu'ainsi la SOCIETE CHAINE THERMALE DU SOLEIL n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, des contreparties dont elle aurait bénéficié en échange dudit abandon ;

S'agissant du mali de fusion constaté au cours de l'exercice clos en 1989 :

Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à la suite de l'absorption en 1989 des sociétés CATH, SAI et SITA, dont elle détenait des parts, la SOCIETE CHAINE THERMALE DU SOLEIL a constaté une moins-value à court terme, à concurrence de la somme totale de 10 594 488 F ; que le service a estimé que la moins-value constatée à l'occasion de l'annulation des titres détenus depuis plus de deux ans par la SOCIETE CHAINE THERMALE DU SOLEIL, représentant une somme de 10 580 288 F, a revêtu le caractère d'une moins-value à long terme à laquelle étaient seulement applicables les dispositions de l'article 39 quindecies du code général des impôts et que la société ne pouvait donc déduire, comme elle l'a fait, de ses résultats imposables au taux de droit commun ;

Considérant qu'aux termes de l'article 38 du code général des impôts : 1. (...) le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuée par les entreprises, y compris notamment les cessions d'éléments quelconques de l'actif, soit en cours, soit en fin d'exploitation (...) ; qu'aux termes de l'article 39 duodecies du même code, dans sa rédaction alors applicable : 1. Par dérogation aux dispositions de l'article 38, les plus-values provenant de la cession d'éléments de l'actif immobilisé sont soumises à des régimes distincts suivant qu'elles sont réalisées à court ou à long terme. 2. Le régime des plus-values à court terme est applicable : a. aux plus-values provenant de la cession d'éléments acquis ou créés depuis moins de deux ans ; b. aux plus-values réalisées à l'occasion de la cession d'éléments détenus depuis deux ans au moins, dans la mesure où elles correspondent à des amortissements déduits pour l'assiette de l'impôt... ; 3. Le régime des plus-values à long terme est applicable aux plus-values autres que celles définies au 2 ; 4. Le régime des moins-values à court terme s'applique : a. aux moins-values subies lors de la cession de biens non amortissables détenus depuis moins de deux ans ; b. aux moins-values subies lors de la cession de biens amortissables, quelle que soit la durée de leur détention ... ; qu'aux termes de l'article 39 quindecies du même code : I. (...) 2. L'excédent éventuel des moins-values à long terme ne peut être imputé que sur les plus-values à long terme réalisées au cours des dix exercices suivants ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que lorsque l'apport ou l'annulation des actions ou parts constatés dans le cadre d'une opération de fusion dégage une moins-value, celle-ci relève du régime d'imposition décrit aux articles 39 duodecies et suivants du code et, le cas échéant, ne peut faire l'objet que de l'imputation des moins-values à long terme prévue au I de l'article 39 quindecies précité ; que les dispositions dudit article sont applicables à la moins-value constatée par la société absorbante lors de l'inscription dans ses écritures comptables de l'actif net de la société absorbée et de l'annulation corrélative des actions qui figuraient depuis plus de deux ans à son actif ; que le moyen tiré de ce que la quote-part du mali de fusion litigieux résultant de l'annulation de titres détenus depuis au moins deux ans par la société absorbante à la date de la fusion était déductible des résultats de l'intéressée au taux de droit commun ne peut donc qu'être écarté ;

S'agissant de la plus-value réalisée lors du transfert de propriété de la résidence Les Grands Pins et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le 29 novembre 1989, la SOCIETE CHAINE THERMALE DU SOLEIL a racheté la totalité des parts de son associée, la SCI Résidence Sud, propriétaire de l'ensemble immobilier Les Grands Pins, situé à Gréoux-les-Bains ; que, par décision, en date du 30 novembre 1989, de l'assemblée générale de la société requérante, devenue associée unique de la société civile immobilière, ont été prononcées la dissolution de ladite société civile et la transmission universelle de son patrimoine à la SOCIETE CHAINE THERMALE DU SOLEIL, cette décision ayant été publiée le 18 décembre 1989 à la recette des impôts de Manosque ; que par un acte en date du 19 décembre 1989, enregistré le 29 janvier 1990, la SCI Résidence Sud a cédé l'ensemble immobilier Les Grands Pins, à un prix s'élevant à 34 300 000 F, à la société requérante ; que le service, ayant estimé que cette cession était postérieure à la transmission universelle des biens en cause, a, pour déterminer la valeur de transfert dudit ensemble immobilier, retenu, non le montant le susindiqué, mais le montant de sa valeur vénale soit 42 634 000 F, tel qu'il avait été déclaré par la société requérante, nouveau propriétaire dudit ensemble, par une lettre au centre des impôts de Manosque en date du 2 juillet 1990, d'ailleurs confirmée le 21 janvier 1993, et telle qu'il résultait des propres écritures comptables de l'intéressée avant leur rectification par cette dernière ;

Considérant qu'aux termes du dernier alinéa de l'article 1844-5 du code civil : En cas de dissolution, celle-ci entraîne la transmission du patrimoine de la société à l'associé unique, sans qu'il y ait lieu à liquidation. Les créanciers peuvent faire opposition à la dissolution dans le délai de trente jours à compter de la publication de celle-ci (...) La transmission du patrimoine n'est réalisée et il n'y a disparition de la personne morale qu'à l'issue du délai d'opposition (...) ; qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, par délibération de son assemblée générale en date du 30 novembre 1989, la SOCIETE CHAINE THERMALE DU SOLEIL, associée unique de la SCI Résidence Sud, a décidé de procéder à la dissolution sans liquidation de cette dernière dans les conditions prévues à l'article 1844-5 du code civil ; que cette dissolution ne pouvait prendre effet avant l'expiration du délai d'un mois faisant suite à cette publication ; qu'il suit de là que ladite dissolution emportant transmission universelle de patrimoine ne pouvait être intervenue le 18 décembre 1989, date de l'acte de cession par la SCI Résidence Sud à son associé unique de l'ensemble immobilier Les Grands Pins ; qu'il suit de là que c'est à tort que le service s'est fondé sur la circonstance que cette cession ne pouvait avoir eu lieu en raison de la transmission universelle de patrimoine intervenue précédemment pour écarter le prix de cession figurant dans cet acte et lui substituer la valeur vénale des biens en cause ;

Considérant toutefois que le ministre demande qu'à la base légale initialement retenue soit substituée une nouvelle base, issue de la combinaison des articles 38 et 111 c du code général des impôts, au motif que le prix de cession contenu dans l'acte en date du 18 décembre 1989 a été volontairement minoré et que l'écart entre ledit prix et la valeur vénale du bien en cause est constitutif d'un avantage occulte consenti par la SCI Résidence Sud à son associé unique, avantage qui doit être réintégré dans la base taxable de cet associé ;

Considérant que le ministre qui ne procède à aucune analyse comparative relative à la cession, sur le marché immobilier des résidences de tourisme, de biens comparables ni ne propose aucune estimation de la valeur de rendement du bien à partir d'une étude de rentabilité, n'établit pas que le prix de cession de 34 300 000 F retenu dans l'acte du 18 décembre 1989 serait inférieur à la valeur vénale de l'ensemble immobilier Résidence des pins en se bornant à se prévaloir d'une déclaration de plus-value d'ailleurs rectifiée dans le délai de déclaration, et sur la base de laquelle l'imposition initiale n'a pas été établie, et de ce que la taxe sur la valeur ajoutée due sur la cession litigieuse a été calculée sur un montant de 42 634 000F ;

En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée :

S'agissant de la déduction anticipée de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 1991 :

Considérant qu'aux termes de l'article 269 du code général des impôts, relatif à la taxe sur la valeur ajoutée : (...) 2. La taxe est exigible : (...) c. Pour les prestations de services (...) lors de l'encaissement des acomptes, du prix, de la rémunération (...) ; qu'aux termes de l'article 207 de l'annexe II audit code : Le droit à déduction prend naissance lorsque la taxe déductible devient exigible chez le redevable (...) ; qu'aux termes de l'article 217 de l'annexe II audit code, dans sa rédaction alors applicable : La déduction de la taxe ayant grevé les biens ne constituant pas des immobilisations et les services est opérée par imputation sur la taxe due par l'entreprise au titre du mois qui suit celui pendant lequel le droit à déduction a pris naissance ;

Considérant qu'il est constant que la SOCIETE CHAINE THERMALE DU SOLEIL a déduit, à la date portée sur les factures et non à la date de l'encaissement, la taxe sur la valeur ajoutée facturée par différents fournisseurs ayant la qualité de prestataires de services ; que la société requérante ne pouvait procéder à cette imputation sur la taxe dont elle se trouvait débitrice qu'au titre du mois suivant celui pendant lequel le droit à déduction a pris naissance, soit le mois suivant celui du paiement des services susmentionnés ; que dès lors elle n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration a rappelé la taxe correspondante, nonobstant la circonstance alléguée que le traitement de plus de 30 000 factures par an rendrait matériellement impossible la détermination de la date à laquelle chaque prestation est achevée ou réglée ; que si elle fait valoir avoir également déclaré de la taxe sur la valeur ajoutée par anticipation, au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 1991, et demande à ce titre la compensation avec la taxe sur la valeur ajoutée reversée, elle n'en justifie pas ; que, dans ces conditions, la SOCIETE CHAINE THERMALE DU SOLEIL n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration a rappelé la somme litigieuse, s'élevant à 872 481 F ;

S'agissant de la taxe sur la valeur ajoutée collectée sur les arrhes au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 1991 :

Considérant qu'aux termes de l'article 256 du code général des impôts : I : Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel (...) ; qu'aux termes de l'article 269 du même code : (...) 2. La taxe est exigible : (...) c. Pour les prestations de services, lors de l'encaissement des acomptes, du prix, de la rémunération (...) ; que le service, ayant relevé que la SOCIETE CHAINE THERMALE DU SOLEIL n'acquittait pas, au moment du versement des arrhes par les clients, la taxe sur la valeur ajoutée sur les sommes ainsi encaissées, a rappelé la taxe correspondante ; que, à la différence des acomptes, qui représentent un paiement partiel anticipé du prix du service et donnent lieu à remboursement dans l'hypothèse où la prestation n'est pas exécutée, les arrhes, dont le versement a pour objet d'offrir au client une faculté de dédit, sont sans lien direct avec une prestation de services rendue à titre onéreux ; qu'elles ne constituent ainsi ni un acompte, ni un élément du prix de la rémunération, au sens des dispositions précitées de l'article 269-2-c du code général des impôts ; que les montants ainsi versés ne peuvent être regardés comme taxables avant le moment où la prestation est effectivement rendue, le client n'ayant pas fait usage de sa faculté de dédit ; qu'il suit de là que la SOCIETE CHAINE THERMALE DU SOLEIL est fondée à soutenir que les arrhes litigieuses n'étaient pas exigibles lors de leur encaissement ;

S'agissant de la taxe sur la valeur ajoutée grevant la redevance versée à la Compagnie française du thermalisme :

Considérant qu'il résulte des dispositions combinées des articles 271, 1, 272, 2 et 283, 4 du code général des impôts, ainsi que de l'article 223-1 de l'annexe II au même code, que la taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'opérations imposables est déductible dans le cas de services facturés à l'entreprise, de la taxe à laquelle celle-ci est assujettie à raison des opérations en cours, à condition que les factures mentionnent ladite taxe, qu'elles aient été établies au nom du redevable par son fournisseur, qu'elles correspondent effectivement à l'exécution de la prestation de service dont elles font état, et que le prix indiqué soit réellement celui qui doit être acquitté par l'entreprise ;

Considérant qu'à la suite d'une convention passée entre la société requérante et la société Compagnie française du thermalisme, le 22 janvier 1991, il a été décidé que la seconde se verrait confier un rôle d'animation de l'ensemble du groupe et qu'en contrepartie des prestations rendues elle bénéficierait d'une rémunération fixée à 2 % du chiffre d'affaires hors taxes de la société CHAINE THERMALE DU SOLEIL ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction et qu'il n'est pas sérieusement contesté par la requérante que le budget prévisionnel ayant servi à la détermination du taux de la redevance fait état de prestations qui n'ont jamais été rendues à la société, notamment en ce qui concerne les services financiers, administratifs ou informatiques ; que d'ailleurs la vérification de comptabilité a permis de constater qu'un certain nombre de charges qui devaient être supportées par la compagnie française du thermalisme ont été directement comptabilisées en charge par la SOCIETE CHAINE THERMALE DU SOLEIL ; que la société requérante ne conteste pas les estimations figurant dans un tableau chiffré produit par le ministre et limitant à 905 000 F la valeur des prestations réellement rendues par la société Compagnie française du thermalisme, initialement budgétées pour un montant global de 4 825 000 F ; qu'il suit de là que la société requérante, qui se borne à faire état des missions confiées à sa cocontractante, de la normalité du taux de 2 % retenu, des difficultés rencontrées dans les premiers temps de l'exécution de la convention en cause et de ce que cette convention était dès l'origine prévue pour une durée de cinq ans, ne conteste pas utilement le bien fondé du redressement par lequel l'administration a remis en cause la déduction par la société CHAINE THERMALE DU SOLEIL de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé ces dépenses ; que la requérante ne saurait utilement se prévaloir, sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 80 A et L. 80 B du livre des procédures fiscales, de ce que le service, à l'occasion de vérifications afférentes à des périodes antérieures ou postérieures à la période en litige, n'aurait pas remis en cause les taux le cas échéant supérieurs retenus pour la rémunération des mêmes services ;

Sur les pénalités :

Considérant en premier lieu qu'aux termes de l'article 1727 du code général des impôts : Le défaut ou l'insuffisance dans le paiement ou le versement tardif de l'un des impôts, droits, taxes, redevances ou sommes établis ou recouvrés par la direction générale des impôts donnent lieu au versement d'un intérêt de retard qui est dû indépendamment de toutes sanctions... Le taux de l'intérêt de retard est fixé à 0,75 % par mois , qu'aux termes de l'article 1727 A du même code: 1. L'intérêt de retard prévu à l'article 1727 est calculé à compter du premier jour du mois suivant celui au cours duquel l'impôt devait être acquitté jusqu'au dernier jour du mois du paiement et qu'aux termes de l'article 1729 : 1. Lorsque la déclaration ou l'acte mentionné à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727... 2. Le décompte de l'intérêt de retard est arrêté au dernier jour du mois de la notification de redressements... ; que si la société requérante fait valoir qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que le décompte des intérêts de retard doit être arrêté non au dernier jour du mois de la notification de redressements, mais, s'agissant de la taxe sur la valeur ajoutée déduite par anticipation, à la date à laquelle est né le droit à déduction, elle ne fournit en tout état de cause aucun élément permettant d'établir la date à laquelle elle a payé les factures de ses fournisseurs et ainsi fait naître le droit à déduction ;

Considérant en second lieu que l'intérêt de retard institué par les dispositions de l'article 1727 du code général des impôts vise essentiellement à réparer les préjudices de toute nature subis par l'Etat à raison du non-respect par les contribuables de leurs obligations de déclarer et payer l'impôt aux dates légales ; que si l'évolution des taux du marché a conduit à une hausse relative de cet intérêt depuis son institution, cette circonstance ne lui confère pas pour autant la nature d'une sanction, dès lors que son niveau n'est pas devenu manifestement excessif au regard du taux moyen pratiqué par les prêteurs privés pour un découvert non négocié ; qu'il suit de là que contrairement à ce que soutient la requérante, les intérêts de retard qui lui ont été assignés, y compris pour la part de ces intérêts excédant ceux qui auraient résulté de l'application du taux de l'intérêt légal, ne sauraient être regardés comme constitutifs d'une sanction ;

Sur l'appel incident du ministre :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la SOCIETE CHAINE THERMALE DU SOLEIL a cédé en 1989 à sa filiale, la S.A. Cambo les Bains, des immobilisations pour un prix de 62 000 000 F en conséquence de la résiliation anticipée du bail à construction portant sur le terrain supportant les immobilisations en cause ; qu'estimant que la valeur de ces immobilisations s'élevait à 82 000 000 F, l'administration a regardé comme un acte anormal de gestion l'avantage consenti à la S.A. Cambo les Bains ; que, par suite, la somme de 20 000 000 F a été réintégrée au résultat imposable de la SOCIETE CHAINE THERMALE DU SOLEIL au titre de l'exercice 1989 ; que par son jugement en date du 8 juillet 2005 le Tribunal administratif de Paris a accordé la décharge de l'imposition en résultant ;

Considérant que pour évaluer à 82 000 000 F la valeur vénale des immobilisations cédées, l'administration s'est appuyée sur les conclusions d'un rapport rédigé par le cabinet Féau et Hampton à la demande de la SOCIETE CHAINE THERMALE DU SOLEIL ; qu'il ressort tant des termes du rapport lui-même que d'une lettre adressée par ce cabinet à la société requérante, le 5 septembre 1995, que ledit rapport avait pour objet spécifique l'évaluation en valeur d'apport des ensembles immobiliers possédés par la société SOCIETE CHAINE THERMALE DU SOLEIL compte tenu des caractéristiques du groupe et non la détermination de la valeur vénale desdits ensembles ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le rapport litigieux ait eu pour objet d'estimer la valeur que pourraient représenter les immobilisations en cause comme garantie réelle de prêts consentis par un syndicat de banques ; que d'ailleurs la valeur vénale des constructions ne saurait être retenue pour estimer l'avantage consenti au bailleur par l'occupant en raison de la seule fin prématurée d'un bail à construction ; qu'ainsi, en se bornant, à titre principal, à invoquer les termes de ce rapport, et à titre subsidiaire à invoquer une valeur nette comptable supérieure d'environ 2 % à la valeur de cession des biens litigieux, le ministre n'établit pas, ainsi qu'il en a la charge, la preuve de la sous-évaluation du prix retenu pour le transfert de propriété ; que le ministre ne saurait se prévaloir utilement de la circonstance que la SOCIETE CHAINE THERMALE DU SOLEIL s'est abstenue de réclamer une indemnité d'éviction à la suite de la résiliation unilatérale du bail à construction conclu avec sa filiale dès lors qu'il ne fournit aucun élément permettant d'apprécier la valeur de l'indemnité d'éviction ainsi abandonnée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE CHAINE THERMALE DU SOLEIL est seulement fondée à demander la réduction à hauteur de 8 334 000 F de sa base à imposable à l'impôt sur les sociétés au titre de l'année 1989, la décharge des impôts correspondants, ainsi que la décharge en droits et pénalités des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge pour la période du 1er janvier 1990 au 31 décembre 1991 en raison du redressement afférent aux sommes encaissées au titre des arrhes ; que pour le surplus elle n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; qu'il y lieu de rejeter l'appel incident présenté par le ministre du budget, des comptes publiques et de la fonction publique ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions précitées ;

D E C I D E :

Article 1er : La base imposable à l'impôt sur les sociétés au titre de l'année 1989 de la SOCIETE CHAINE THERMALE DU SOLEIL est réduite de 8 334 000 F.

Article 2 : La SOCIETE CHAINE THERMALE DU SOLEIL est déchargée en droits et pénalités de l'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie au titre de l'année 1989 et correspondant à la réduction de la base d'imposition prononcée à l'article 1er.

Article 3 : La SOCIETE CHAINE THERMALE DU SOLEIL est déchargée des pénalités pour manoeuvres frauduleuses auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 1989 et correspondant à la réduction de la base d'imposition prononcée à l'article 1er.

Article 4 : La SOCIETE CHAINE THERMALE DU SOLEIL est déchargée en droits et pénalités des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge pour la période du 1er janvier 1990 au 31 décembre 1991 en raison du redressement afférent aux sommes encaissées au titre des arrhes.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de la SOCIETE CHAINE THERMALE DU SOLEIL et l'appel incident présenté par le ministre du budget, des comptes publiques et de la fonction publique sont rejetés.

Article 6 : Le jugement du Tribunal administratif de Paris en date du 8 juillet 2005 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 7 : L'Etat versera à la SOCIETE CHAINE THERMALE DU SOLEIL la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L761-1 du code de Justice administrative.

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N°05PA03829


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 05PA03829
Date de la décision : 25/03/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. SOUMET
Rapporteur ?: M. Christian PUJALTE
Rapporteur public ?: Mme EVGENAS
Avocat(s) : CABINET J-P FOUCAULT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2009-03-25;05pa03829 ?
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