Vu la requête, enregistrée le 4 juillet 2007, présentée pour M. Habib X, demeurant ..., par Me Morival ; M. X demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0521257/7 en date du 8 juin 2007 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à réparer les préjudices matériel et moral résultant de la disparition d'une partie de son dossier administratif ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 10 000 euros au titre de son préjudice moral, la somme de 17 281, 24 euros au titre de son préjudice financier ainsi que la somme de 478, 40 euros par mois à compter du 11 novembre 2005 jusqu'à la date d'introduction de la présente requête d'appel ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 modifiée portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 mars 2009 :
- le rapport de Mme Malvasio, rapporteur,
- et les conclusions de M. Jarrige, rapporteur public ;
Sur la responsabilité :
Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 17 juillet 1978 susvisée : « Sont considérés comme documents administratifs, au sens des chapitres Ier, III et IV du présent titre, quels que soient leur date, leur lieu de conservation, leur forme et leur support, les documents élaborés ou détenus par l'Etat, les collectivités territoriales ainsi que par les autres personnes de droit public ou les personnes de droit privé chargées de la gestion d'un service public, dans le cadre de leur mission de service public. Constituent de tels documents notamment les dossiers, rapports, études, comptes rendus, procès-verbaux, statistiques, directives, instructions, circulaires, notes et réponses ministérielles, correspondances, avis, prévisions et décisions. » et qu'aux termes de l'article 2 de la même loi : « Sous réserve des dispositions de l'article 6, les autorités mentionnées à l'article 1er sont tenues de communiquer les documents administratifs qu'elles détiennent aux personnes qui en font la demande, dans les conditions prévues par le présent titre. / Le droit à communication ne s'applique qu'à des documents achevés. Il ne concerne pas les documents préparatoires à une décision administrative tant qu'elle est en cours d'élaboration. Il ne s'exerce plus lorsque les documents font l'objet d'une diffusion publique. Il ne s'applique pas aux documents réalisés dans le cadre d'un contrat de prestation de service exécuté pour le compte d'une ou de plusieurs personnes déterminées. / Le dépôt aux archives publiques des documents administratifs communicables aux termes du présent chapitre ne fait pas obstacle au droit à communication à tout moment desdits documents (...) » ;
Considérant que M. X, qui a été titularisé dans le corps des gardiens de la paix à compter du 1er février 2003 par arrêté du 17 juillet 2003, n'a pu obtenir la communication de différents documents administratifs relatifs à la scolarité qu'il avait effectuée du 1er février 2001 au 31 janvier 2002 au Centre de formation de la police nationale situé à Perpignan, à savoir, sa copie d'examen du contrôle école de séquence C, sa copie d'examen du contrôle national de séquence A et G, son livret d'évaluation et son livret de formation, dont le caractère communicable en vertu de l'article 2 de la loi du 17 juillet 1978 précité avait été reconnu par la commission d'accès aux documents administratifs le 23 décembre 2004 ; qu'il ressort du jugement du Tribunal administratif de Paris du 23 juin 2006 rendu sur le recours introduit par M. X à l'encontre du refus implicite du ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire de lui communiquer les documents susmentionnés, lequel est devenu définitif à la suite du rejet du pourvoi formé par l'intéressé par décision du Conseil d'Etat du 5 décembre 2007, que lesdits documents ont été égarés à l'occasion de la première affectation, le 1er février 2002, de M. X à Darnétal, lors du transfert de son dossier et que l'impossibilité de retrouver le dossier du requérant était attestée par le directeur du Centre de formation de Perpignan ;
Considérant que la perte de documents administratifs qui sont communicables à tout moment nonobstant leur archivage ultérieur en vertu de la loi du 17 juillet 1978 et doivent par conséquent être conservés par l'administration qui les détient, en particulier lorsqu'il s'agit, comme en l'espèce de documents figurant dans le dossier individuel d'un fonctionnaire servant à la gestion de sa carrière, est constitutive d'une faute susceptible d'engager la responsabilité de l'administration à raison des préjudices qui ont pu en résulter pour les victimes d'une telle perte ;
Sur le préjudice :
Considérant que si M. X soutient qu'affecté, à l'issue de sa scolarité au Centre de formation de la police nationale de Perpignan, à Darnétal, dans le département de la Seine Maritime, il supporte des frais de double résidence et de transport, de tels frais qui résultent de son choix personnel de conserver sa résidence d'origine, située dans les Pyrénées orientales, et non, en particulier, d'obligations de service public, sont dépourvus de tout lien avec la perte des documents litigieux ; qu'au demeurant, M. X ne soutient ni, à fortiori n'établit qu'il aurait contesté la décision administrative relative à son affectation à Darnétal alors qu'il ressort des pièces du dossier qu'il a attendu le 1er décembre 2003 pour demander communication de son dossier en vue de vérifier son classement ; que sa demande indemnitaire au titre du préjudice financier allégué doit en conséquence être rejetée ;
Considérant qu'il résulte du droit d'accès aux documents administratifs consacré par la loi du 17 juillet 1978 que la perte de documents administratifs communicables, au cas particulier d'éléments du dossier individuel d'un fonctionnaire qui ont servi à la détermination de son classement de sortie d'une école d'application pour fonctionnaires, disparition qui prive de ce fait l'intéressé de la possibilité de vérifier au vu de quelles appréciations ledit classement a été effectué, est constitutive d'un préjudice moral ouvrant droit à réparation ; que, dans les circonstances de l'espèce, il sera fait une juste appréciation du préjudice moral causé à M. X par la perte des documents litigieux en lui allouant à ce titre une indemnité de 1 000 euros ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X est fondé à demander l'annulation du jugement du Tribunal administratif de Paris du 8 juin 2007 en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'octroi d'une indemnité en réparation de son préjudice moral ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros demandée par M. X au titre des frais engagés par lui et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Paris du 8 juin 2007 est annulé en tant qu'il a rejeté la demande de M. X tendant à l'indemnisation de son préjudice moral.
Article 2 : L'Etat est condamné à verser à M. X la somme de 1 000 euros en réparation de son préjudice moral.
Article 3 : L'Etat versera à M. X la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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N° 07PA02385