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24/11/2008 | FRANCE | N°08PA03649

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8éme chambre, 24 novembre 2008, 08PA03649


Vu la requête, enregistrée le 11 juillet 2008, présentée pour M. Kenan X, élisant domicile chez M. Jean X, ..., par Me Ozer ; M. X demande à la cour, statuant en référé à la suite de l'appel introduit contre le jugement du Tribunal administratif de Melun du 17 juin 2008 qui rejette sa demande d'annulation de l'arrêté en date du 11 mars 2008 par lequel le préfet de Seine-et-Marne a refusé de lui renouveler son titre de séjour en qualité de conjoint de Français, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

1°) de prononcer la suspens

ion d'exécution de ces décisions ;

2°) d'enjoindre à l'administration, sou...

Vu la requête, enregistrée le 11 juillet 2008, présentée pour M. Kenan X, élisant domicile chez M. Jean X, ..., par Me Ozer ; M. X demande à la cour, statuant en référé à la suite de l'appel introduit contre le jugement du Tribunal administratif de Melun du 17 juin 2008 qui rejette sa demande d'annulation de l'arrêté en date du 11 mars 2008 par lequel le préfet de Seine-et-Marne a refusé de lui renouveler son titre de séjour en qualité de conjoint de Français, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

1°) de prononcer la suspension d'exécution de ces décisions ;

2°) d'enjoindre à l'administration, sous astreinte de 500 euros par jour, de lui délivrer un titre de séjour provisoire impliquant le droit de travailler dans l'attente de l'arrêt au fond ;

3°) d'ordonner l'exécution provisoire de l'ordonnance à intervenir dès sa prononciation ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord instituant une association entre la Communauté économique européenne et la Turquie en date du 12 septembre 1963, approuvé et confirmé par la décision n° 64/732/CEE du Conseil du 23 décembre 1963 ;

Vu la décision n° 1/80 du 19 septembre1980 du conseil d'association entre la Communauté économique européenne et la Turquie ;

Vu la décision n° C-237/91 du 16 décembre 1992 de la Cour de justice des communautés européennes ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 octobre 2008 :

- le rapport de M. Luben, rapporteur,

- les observations de Me Ozer pour M. X,

- et les conclusions de Mme Desticourt, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : « Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision. » ;

Sur les conclusions tendant à la suspension de la décision de refus de renouvellement du titre de séjour :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 6 de la décision du 19 septembre 1980 du conseil d'association institué par l'accord d'association conclu, le 12 septembre 1963, entre la Communauté économique européenne et la République de Turquie : « 1. Sous réserve des dispositions de l'article 7 relatif au libre accès à l'emploi des membres de sa famille, le travailleur turc, appartenant au marché régulier de l'emploi d'un Etat membre :/ -a droit, dans cet Etat membre, après un an d'emploi régulier, au renouvellement de son permis de travail auprès du même employeur, s'il dispose d'un emploi (...) » ; qu'il résulte de l'arrêt de la Cour de justice des communautés européennes en date du 16 décembre 1992 que l'article 6 premier paragraphe, premier tiret, de la décision du 19 septembre 1980 du conseil d'association, qui a un effet direct en droit interne, doit être interprété en ce sens que, d'une part, un ressortissant turc qui a obtenu un permis de séjour sur le territoire d'un Etat membre pour y épouser une ressortissante de cet Etat membre et y a travaillé depuis plus d'un an auprès du même employeur sous le couvert d'un permis de travail valide a droit au renouvellement de son permis de travail en vertu de cette disposition, même si, au moment où il est statué sur la demande de renouvellement, son mariage a été dissout et que, d'autre part, un travailleur turc qui remplit les conditions de l'article 6, premier paragraphe, premier tiret, de la décision susmentionnée peut obtenir, outre la prorogation du permis de travail, celle du permis de séjour, le droit de séjour étant indispensable à l'accès et à l'exercice d'une activité salariée ; que, toutefois, si M. X, de nationalité turque, né le 17 novembre 1977 à Karliova, invoque, à l'encontre de la décision attaquée, l'article 6 de la décision du 19 septembre 1980, il ressort des pièces du dossier que c'est en qualité de conjoint de ressortissant français, et non de salarié, qu'il a sollicité le 24 septembre 2007 le renouvellement de son titre de séjour ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 6 de la décision du 19 septembre 1980 du conseil d'association institué par l'accord d'association conclu, le 12 septembre 1963, entre la Communauté économique européenne et la République de Turquie n'est pas propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » est délivrée de plein droit : (...) 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée » ; que si M. X soutient que son épouse, de nationalité française, aurait donné naissance le 16 mai 2008 à leur enfant et qu'il a l'intention de s'en occuper et de contribuer à son entretien et à son éducation, il ne saurait toutefois se prévaloir des dispositions précitées dès lors que l'enfant n'était pas encore né à la date de la décision contestée ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'est pas propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X s'est marié le 6 juillet 2006 à Istanbul avec Mme Y, de nationalité française, et est entré en France le 18 novembre 2006 ; que la communauté de vie des époux a toutefois cessé depuis le 22 décembre 2007 et que Mme Y épouse X a déposé une requête en divorce auprès du Tribunal de grande instance de Meaux le 17 janvier 2008 ; que, dans les circonstances de l'espèce, eu égard notamment à la durée de la présence en France de M. X, à la rupture de la communauté de vie des époux, à la circonstance que, comme il a été dit, son enfant n'était pas né à la date de la décision contestée et au fait que l'intéressé n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales en Turquie, le préfet de Seine-et-Marne n'a pas porté au droit de celui-ci au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a pris la décision litigieuse ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'est pas propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée ;

Considérant, en dernier lieu, que la circonstance, à la supposer établie, que la rupture de la vie commune avec son épouse serait le fait de cette dernière, qui aurait inventé un scénario de menace de mort et d'enlèvement de l'enfant à naître, est sans incidence sur la légalité de la décision querellée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner le moyen tiré de ce que la condition d'urgence exigée par les dispositions précitées de l'article L. 521-1 du code de justice administrative serait remplie, les conclusions de la requête à fin de suspension doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à la suspension de la décision portant obligation de quitter le territoire français et mentionnant le pays de destination :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'étranger qui fait l'objet d'un refus de séjour, d'un refus de délivrance ou de renouvellement de titre de séjour ou d'un retrait de titre de séjour, de récépissé de demande de carte de séjour ou d'autorisation provisoire de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français mentionnant le pays de destination peut, dans le délai d'un mois suivant la notification, demander l'annulation de ces décisions au tribunal administratif. (...) Son recours suspend l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français sans pour autant faire obstacle au placement en rétention administrative dans les conditions prévues au titre V du présent livre. / Le tribunal administratif statue dans un délai de trois mois à compter de sa saisine. Toutefois, en cas de placement en rétention de l'étranger avant qu'il ait rendu sa décision, il statue, selon la procédure prévue à l'article L. 512-2, sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français et de la décision fixant le pays de renvoi, au plus tard soixante-douze heures à compter de la notification par l'administration au tribunal de ce placement. » ;

Considérant que, par les dispositions précitées, le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédures contentieuses régissant la contestation devant la juridiction administrative d'un arrêté préfectoral assorti d'une obligation de quitter le territoire français ; que cette procédure se caractérise notamment par le fait que la demande d'annulation formée contre une décision portant refus de renouvellement de titre de séjour assortie d'une obligation de quitter le territoire français a un effet suspensif en ce qui concerne la seule obligation de quitter le territoire français et que le juge de premier ressort a un délai de trois mois pour statuer sur une telle demande et, en cas de placement en rétention de l'étranger, moins de soixante-douze heures à compter de la notification par l'administration au tribunal de ce placement ; qu'il en résulte qu'une décision portant obligation de quitter le territoire français et mentionnant le pays de destination n'est pas justiciable des procédures de référé instituées par le livre V du code de justice administrative ; que le jugement ayant rejeté une demande dirigée contre une décision portant obligation de quitter le territoire et mentionnant le pays de destination est seulement susceptible de faire l'objet d'une décision de sursis à exécution dans les conditions énoncées par les articles R. 811-14 et R. 811-17 du code de justice administrative ; qu'il s'ensuit que les conclusions sus analysées de M. X tendant à la suspension de la décision portant obligation de quitter le territoire français et mentionnant le pays de destination ne sont pas recevables ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que la présente décision n'impliquant aucune mesure d'exécution, les conclusions à fin d'injonction présentées par M. X ne peuvent qu'être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

3

N° 08PA03649


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8éme chambre
Numéro d'arrêt : 08PA03649
Date de la décision : 24/11/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. ROTH
Rapporteur ?: M. Ivan LUBEN
Rapporteur public ?: Mme DESTICOURT
Avocat(s) : OZER

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2008-11-24;08pa03649 ?
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