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19/11/2008 | FRANCE | N°06PA03287

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3 ème chambre, 19 novembre 2008, 06PA03287


Vu la requête, enregistrée le 7 septembre 2006, présentée pour la SOCIETE BLUE LAGOON IMMOBILIER, dont le siège est Raiatea Uturoa en Polynésie française (98735), représentée par son gérant en exercice, M. X, par Me Eftimie-Spitz ; la SOCIETE BLUE LAGOON IMMOBILIER demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0500356 en date du 11 juillet 2006 par lequel le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du

27 juin 2005 du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et de la fonc

tion publique de la Polynésie française portant retrait de sa carte profession...

Vu la requête, enregistrée le 7 septembre 2006, présentée pour la SOCIETE BLUE LAGOON IMMOBILIER, dont le siège est Raiatea Uturoa en Polynésie française (98735), représentée par son gérant en exercice, M. X, par Me Eftimie-Spitz ; la SOCIETE BLUE LAGOON IMMOBILIER demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0500356 en date du 11 juillet 2006 par lequel le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du

27 juin 2005 du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et de la fonction publique de la Polynésie française portant retrait de sa carte professionnelle d'agent immobilier ;

2°) d'annuler ledit arrêté ;

3°) de mettre à la charge de la Polynésie française une somme de 300 000 CFP au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française ;

Vu la loi n° 2004-193 du 27 février 2004 complétant le statut d'autonomie de la Polynésie française ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs ;

Vu la loi n° 2002-1162 du 6 août 2002 portant amnistie ;

Vu la délibération n° 90-40 AT modifiée du 15 février 1990 réglementant l'exercice de la profession d'agent immobilier et l'arrêté 135/CM du 15 février 1994 en portant application ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 novembre 2008 :

- le rapport de Mme Malvasio, rapporteur,

- et les conclusions de M. Jarrige, commissaire du gouvernement ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête ;

Considérant qu'aux termes de l'article 5 de la délibération n° 90-40 AT du

15 février 1990 réglementant l'exercice de la profession d'agent immobilier en Polynésie française : « La carte professionnelle est personnelle. En aucun cas, elle ne peut être cédée ou vendue à un tiers. / Elle peut toujours être retirée après enquête administrative lorsque la sauvegarde des intérêts des tiers le justifie, notamment par suite de manquement total ou partiel des obligations incombant à l'agent immobilier en vertu de la présente délibération. » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, gérant de la SOCIETE BLUE LAGOON IMMOBILIER, avait reçu le 25 novembre 2000 des consorts Y un mandat de recherche pour une durée de trois mois, concernant l'ilot de Porou sis à Tahaa, d'une superficie de plus de 7 hectares, pour 100 millions FCP au plus ; qu'après une tentative infructueuse concernant un autre ilot, les intéressés ont à nouveau sollicité M. X concernant l'ilot de Porou le 11 juillet 2001 ; que ce dernier, qui était devenu le 31 mars 2001 le propriétaire de l'ilot en cause pour une somme de 85 000 FCP et avait créé, en vue notamment de sa mise en valeur, la SCI Pora Pora au mois de novembre 2001, a proposé aux consorts Y, le 6 août 2001, une opération qui s'est conclue le 22 avril 2002 par une promesse de vente portant sur 4 hectares 50 de la superficie de l'ilot pour la somme de 110 000 FCP et une promesse de bail pour 3 ha du même ilot avec la SCI Pora Pora ; que, dans le cadre de cette opération, M. X a dissimulé aux intéressés l'identité du véritable propriétaire de l'ilot Porou ; que le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et de la fonction publique de la Polynésie française, après avoir exposé à la requérante, par lettre du 29 mars 2005, ses griefs tirés en particulier d'un conflit d'intérêts entre le gérant et les consorts Y et d'un manquement à la moralité requise pour l'exercice de la profession et lui avoir indiqué qu'il envisageait de lui retirer sa carte professionnelle, a, par arrêté du 27 juin 2005, prononcé le retrait de la carte d'agent immobilier de la SOCIETE BLUE LAGOON IMMOBILIER au motif qu'à l'occasion d'un mandat de recherche d'un bien immobilier, M. X « n'a pas respecté ses obligations de mandataire dans ses rapports avec ses mandants, que, ce faisant, il a porté atteinte aux intérêts de ses mandants et commis un manquement grave à ses obligations professionnelles d'agent immobilier » et que M. X ne remplissait plus « les conditions d'honorabilité exigées par la règlementation en vigueur » ;

Considérant qu'il résulte des termes mêmes de l'article 5 de la délibération précitée que la possibilité de retirer sa carte professionnelle à un agent immobilier n'est pas circonscrite aux manquements aux obligations résultant de ladite délibération mais, contrairement à ce qui est allégué par la requérante, qu'elle peut être prononcée de manière plus générale « lorsque la sauvegarde des intérêts des tiers le justifie » ; qu'il ressort des motifs de l'arrêté attaqué, qui avaient été détaillés dans la lettre du 29 mars 2005 susmentionnée, que l'administration s'est en particulier fondée sur la sauvegarde des intérêts des tiers pour prendre sa décision ; qu'il appartient à l'administration, sous le contrôle du juge, d'apprécier si un tel objectif justifie, dans les circonstances propres à chaque espèce, la mesure de retrait ;

Considérant qu'il ressort des faits précédemment exposés que M. X a porté atteinte aux intérêts des consorts Y et manqué à l'exigence d'honorabilité inhérente à l'exercice d'une profession intervenant dans la gestion des biens d'autrui et ne peut dès lors invoquer le bénéfice de la loi n° 2002-1162 du 6 août 2002 portant amnistie laquelle excepte « les faits constituant des manquements à l'honneur, à la probité ou aux bonnes moeurs » ; qu'il a commis en sa qualité de représentant légal de la SOCIETE BLUE LAGOON IMMOBILIER des manquements graves à l'exercice de sa profession de nature à justifier une sanction ; que, toutefois, malgré la gravité de ces manquements, eu égard à la circonstance que la mesure de retrait contestée repose sur ces seuls faits, survenus dans le cadre des rapports de M. X avec les consorts Y au sujet d'une seule opération, que l'administration ne soutient ni n'établit que la société requérante et son gérant auraient fait l'objet d'autres plaintes, d'observations de sa part ou commis d'autres manquements, rien dans le dossier ne permettant de le soupçonner, et nonobstant les termes de l'article 5 de la délibération précitée, lesquels n'envisagent pas d'autre mesure que le retrait de la carte d'agent immobilier en cas de faute, cette circonstance n'empêchant pas l'autorité compétente, avant d'adopter une telle mesure, d'adresser un ferme rappel à l'ordre au professionnel concerné l'avisant de la sanction à laquelle il s'expose en cas de récidive, le retrait de la carte professionnelle litigieux apparaît en l'espèce disproportionné ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE BLUE LAGOON IMMOBILIER est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 juin 2005 ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation » ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la Polynésie française la somme de 2 500 euros au titre des frais exposés par la SOCIETE BLUE LAGOON IMMOBILIER et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Polynésie française du 11 juillet 2006 et l'arrêté du 27 juin 2005 sont annulés.

Article 2 : La Polynésie française versera à la SOCIETE BLUE LAGOON IMMOBILIER la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 06PA03287


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3 ème chambre
Numéro d'arrêt : 06PA03287
Date de la décision : 19/11/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme VETTRAINO
Rapporteur ?: Mme FLORENCE MALVASIO
Rapporteur public ?: M. JARRIGE
Avocat(s) : EFTIMIE-SPITZ

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2008-11-19;06pa03287 ?
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