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13/05/2008 | FRANCE | N°07PA04564

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8éme chambre, 13 mai 2008, 07PA04564


Vu la requête, enregistrée le 23 novembre 2007, présentée pour M. Faouzi X, demeurant ..., par Me Braun ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement nº 0704190/6 en date du 19 octobre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 25 avril 2007 du préfet du Val-de-Marne lui refusant un titre de séjour, avec l'obligation de quitter le territoire français ;

2°) d'annuler ces décisions ;

3°) d'enjoindre, sous astreinte, à l'autorité préfectorale de lui dé

livrer un titre de séjour ;

4°) subsidiairement, d'enjoindre au préfet de rée...

Vu la requête, enregistrée le 23 novembre 2007, présentée pour M. Faouzi X, demeurant ..., par Me Braun ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement nº 0704190/6 en date du 19 octobre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 25 avril 2007 du préfet du Val-de-Marne lui refusant un titre de séjour, avec l'obligation de quitter le territoire français ;

2°) d'annuler ces décisions ;

3°) d'enjoindre, sous astreinte, à l'autorité préfectorale de lui délivrer un titre de séjour ;

4°) subsidiairement, d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

……………………………………………………………………………………………………...

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié par les avenants du 19 décembre 1991, et du 8 septembre 2000 entré en vigueur le 1er novembre 2003 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 avril 2008 :

- le rapport de M. Privesse, rapporteur,

- les observations de Me Braun pour M. X,

- et les conclusions de Mme Desticourt, commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. X, né le 23 février 1954 et de nationalité tunisienne, entré en France, selon ses déclarations, en 1993, a sollicité son admission au séjour au titre des seules stipulations de l'article 7 ter de l'accord franco-tunisien susvisé, à la suite duquel le préfet du Val-de-Marne lui a notifié la décision litigieuse ; que la requête de M. X est dirigée contre le jugement susmentionné par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à voir annuler la susdite décision ;

Sur la requête à fin d'annulation :
Sur le refus de séjour :

Considérant en premier lieu, qu'au soutien du moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision litigieuse de refus de séjour au regard des dispositions de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979, le requérant reprend, en appel, le même moyen que celui développé en première instance ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les premiers juges auraient, par les motifs qu'ils ont retenus et qu'il y a lieu d'adopter, commis une erreur en écartant ce moyen, alors que par la décision en cause, le préfet a examiné le cas de M. X sur le fondement des stipulations de l'accord franco-tunisien ;

Considérant en deuxième lieu, qu'aux termes des articles 7 ter et 7 quater de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 tel que modifié par les avenants du 19 décembre 1991 et du 8 septembre 2000 : « d) Reçoivent de plein droit un titre de séjour renouvelable valable un an et donnant droit à l'exercice d'une activité professionnelle dans les conditions fixées à l'article 7 : …les ressortissants tunisiens qui justifient par tous moyens résider habituellement en France depuis plus de dix ans, le séjour en qualité d'étudiant n'étant pas pris en compte dans la limite de cinq ans … bénéficient, dans les conditions prévues par la législation française, de la carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » » ; que ces stipulations régissent de manière complète les conditions dans lesquelles est délivré de plein droit aux ressortissants tunisiens un titre de séjour en raison de la durée de leur présence habituelle en France ;

Considérant que si M. X, entré en France selon ses déclarations en 1993, soutient qu'il réside en France depuis plus de dix ans, il ne justifie pas de manière certaine de sa présence en France, par les pièces qu'il verse au dossier dont l'authenticité ne peut être établie, notamment les documents médicaux produits au titre des années 1995, 1999 et 2001, ainsi que des factures produites pour 1997, 1998, 2000 et 2003 ; que la lettre du bureau des objets trouvés de 4 août 1997 et les lettres de rejet de candidature pour 1996, 1998 et 2000 ainsi que les avis d'imposition édités en 2004 ne présentent pas de valeur suffisamment probante ; qu'en outre, les témoignages ne permettent pas davantage d'établir la réalité de sa présence habituelle sur le territoire depuis plus de dix ans à la date de la décision litigieuse ; que par suite, M. X ne pouvait se prévaloir des stipulations susmentionnées de l'accord franco-tunisien ;

Considérant en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui » ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » est délivrée de plein droit : (…) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée » ; qu'aux termes de l'article R. 313-21 dudit code : « Pour l'application du 7º de l'article L. 313-11, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de la vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine. » ;

Considérant que ces dispositions et stipulations ne sauraient avoir ni pour objet ni pour effet de permettre à un étranger de choisir son pays de résidence ; que si M. X, sans charge de famille en France, fait valoir à l'appui de sa demande d'annulation de la décision litigieuse, qu'il réside sur le territoire français depuis son arrivée, et que s'y trouve le reste de sa fratrie, il n'est pas fondé, dans les circonstances de l'espèce, compte tenu notamment de ses conditions de séjour sur le territoire et en l'absence d'obstacle à son retour dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de 39 ans et où se trouvent son épouse et ses enfants, à soutenir que la décision litigieuse a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise, ni, par suite, qu'elle a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales non plus que les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant dès lors, que les conclusions de la requête de M. X à fin d'annulation du refus d'admission au séjour prononcé par le préfet du Val-de-Marne doivent être rejetées, alors que par ailleurs l'intéressé ne justifie pas que son état de santé nécessite sa présence en France et qu'il ne pourrait être soigné dans son pays d'origine ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français et la fixation du pays de destination :

Considérant qu'aux termes du premier alinéa du I de l'article L. 511-1 : « L'autorité administrative qui refuse la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour à un étranger ou qui lui retire son titre de séjour, son récépissé de demande de carte de séjour ou son autorisation provisoire de séjour, pour un motif autre que l'existence d'une menace à l'ordre public, peut assortir sa décision d'une obligation de quitter le territoire français, laquelle fixe le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire prévu au troisième alinéa » ; que, d'autre part, l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 dispose : « Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui (…) restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) » et l'article 3 de la même loi prévoit que : « La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision » ;

Considérant que la décision par laquelle l'autorité administrative oblige un étranger à quitter le territoire français en application des dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, constitue une mesure de police ; qu'elle est ainsi au nombre des décisions qui doivent être motivées en application des dispositions précitées de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 ; que cependant, la motivation de cette mesure se confond avec celle du refus de titre de séjour dont elle découle nécessairement et n'implique pas par conséquent, dès lors que ce refus est lui-même motivé et que les dispositions législatives qui permettent d'assortir le refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ont été rappelées de mention spécifique pour respecter les exigences de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 ; que si la décision litigieuse vise le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, elle ne comporte aucune référence au I de l'article L. 511-1 dudit code sur laquelle elle se fonde pour donner à M. X l'ordre de quitter le territoire français, à la suite du refus de titre de séjour susmentionné ; que dès lors, celui-ci est fondé à en demander l'annulation, en tant qu'elle est assortie d'une obligation de quitter le territoire français et à demander l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il a rejeté les conclusions correspondantes de sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Si l'obligation de quitter le territoire français est annulée (…) l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas » ;

Considérant que si le présent arrêt n'implique pas qu'il soit enjoint au préfet du Val-de-Marne de délivrer un titre de séjour, il implique cependant, par application des dispositions précitées, que ce même préfet délivre à M. X une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce qu'il soit à nouveau statué sur sa situation au regard du séjour ; qu'il y a lieu, par suite d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de délivrer une autorisation provisoire de séjour à M. X et de statuer à nouveau sur sa situation au regard du séjour dans un délai maximum de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'en l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'affaire, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par M. X et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du 19 octobre 2007 du Tribunal administratif Melun, en tant qu'il a rejeté la demande de M. X tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Val-de-Marne du 25 avril 2007 lui ordonnant de quitter le territoire français, ensemble les articles 2 et 3 de ce même arrêté, sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet du Val-de-Marne de délivrer une autorisation provisoire de séjour à M. X jusqu'à ce qu'il soit à nouveau statué sur son cas, dans le délai maximum de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. L'autorité préfectorale informera le greffe de la cour (service de l'exécution) des mesures prises en application du présent article.
Article 3 : L'Etat versera, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 1 000 euros à M. X.

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N° 07PA04564


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8éme chambre
Numéro d'arrêt : 07PA04564
Date de la décision : 13/05/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. ROTH
Rapporteur ?: M. Jean-Claude PRIVESSE
Rapporteur public ?: Mme DESTICOURT
Avocat(s) : BRAUN

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2008-05-13;07pa04564 ?
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