Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés le 21 août et le 7 novembre 2006, présentés pour les consorts -VERA demeurant ... par la SCP Bore et Salve Bruneton ; les consorts demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 23 mai 2006 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant :
- d'une part à la condamnation du centre hospitalier de Saint-Cloud et, subsidiairement, de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des infections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à les indemniser des préjudices subis par leur fils mineur Louis-Gabriel à l'occasion de son séjour dans cet établissement hospitalier en leur versant la somme de 2 500 000 euros, au nom de leur fils mineur Louis Gabriel, la somme de 46 000 euros chacun au titre de leur préjudice moral et la somme de 23 000 euros au nom de leur second fils mineur Augustin au titre de son préjudice moral ;
- d'autre part à la mise à la charge de l'Etat de la somme de 4 000 euros au titre des frais irrépétibles ;
- enfin et subsidiairement à la désignation d'un expert et au versement dans ce cas d'une somme de 50 000 euros à titre de provision à valoir sur l'indemnisation de Louis Gabriel, de 20 000 euros chacun à titre de provision à valoir sur leur propre préjudice, et 10 000 euros à titre de provision à valoir sur le préjudice d'Augustin ;
2°) de condamner le centre hospitalier de Saint-Cloud et subsidiairement l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des infections iatrogènes et des infections nosocomiales à leur verser les diverses sommes mentionnées dans leurs écritures et conclusions présentées devant le tribunal administratif assorties des intérêts capitalisés ;
3°) de condamner le centre hospitalier de Saint-Cloud à leur verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son premier protocole additionnel ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé ;
Vu la loi n° 2002-1511 du 30 décembre 2002 relative à la responsabilité civile médicale ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 avril 2008 :
- le rapport de M. Treyssac, rapporteur,
- les observations de Me Boré pour les consorts -VERA et celles de Me Le Prado pour le Centre hospitalier universitaire de Saint-Cloud,
- et les conclusions de Mme Desticourt, commissaire du gouvernement ;
Sur la régularité du jugement :
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;
Considérant que le tribunal administratif n'a pas suffisamment répondu au moyen tiré de la violation de l'article 6-1 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il s'ensuit que le jugement est entaché d'une insuffisance de motivation, et doit être annulé pour ce motif ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par les consorts -VERA devant le Tribunal administratif de Paris ;
Sur les conclusions des consorts -VERA à fin de condamnation du centre hospitalier de Saint-Cloud :
Considérant que la décision du centre hospitalier de Saint-Cloud du 21 avril 1999, devenue définitive, avait écarté la première demande préalable des consorts -VERA du 22 janvier 1999, tant sur le terrain de la responsabilité hospitalière pour faute, que sur celui de la responsabilité sans faute ; que par suite, en tant qu'elle concernait la responsabilité du centre hospitalier, la deuxième demande préalable présentée le 18 février 2002 n'a pas pu rouvrir un délai de recours contentieux ; que les conclusions de la demande dirigées contre le centre hospitalier sont dès lors irrecevables ;
Sur les conclusions dirigées contre l'Office d'indemnisation des accidents médicaux des infections iatrogènes et des infections nosocomiales :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 1142-1 du chapitre II du titre IV du livre Ier de la 1ere partie du code de la santé publique, résultant de l'article 98 de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002, publié au J.O du 5 mars 2002 : I. Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. Les établissements, services et organismes susmentionnés sont responsables des dommages résultant d'infections nosocomiales, sauf s'ils rapportent la preuve d'une cause étrangère. / II. Lorsque la responsabilité d'un professionnel, d'un établissement, service ou organisme mentionné au I ou d'un producteur de produits n'est pas engagée, un accident médical, une infection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient et, en cas de décès, de ses ayants droit au titre de la solidarité nationale lorsqu'ils sont directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu'ils ont eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de gravité, fixé par décret, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d'incapacité permanente ou de la durée de l'incapacité temporaire de travail.. ;
Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 101 de cette même loi du 4 mars 2002, dans sa rédaction d'origine : Les dispositions du titre IV du livre Ier de la première partie du code de la santé publique issues de l'article 98 de la présente loi, à l'exception du chapitre Ier, de l'article L. 1142-2 et de la section 5 du chapitre II, s'appliquent aux accidents médicaux, affections iatrogènes et infections nosocomiales consécutifs à des activités de prévention, de diagnostic ou de soins réalisées au plus tôt six mois avant la publication de la présente loi. Cet article est applicable aux instances en cours n'ayant pas donné lieu à une décision irrévocable ; que selon la rédaction que lui a donnée l'article 3 de la loi susvisée du 30 décembre 2002 cet alinéa dispose : Les dispositions du titre IV du livre 1 de la première partie du code de la santé publique issues de l'article 98 de la présente loi, à l'exception du chapitre l de l'article L. 1142-2 et de la section 9 du chapitre II, s'appliquent aux accidents médicaux, affections iatrogènes et infections nosocomiales consécutifs à des activités de prévention, de diagnostic ou de soins réalisées à compter du 5 septembre 2001, même si ces accidents médicaux, affections iatrogènes et infections nosocomiales font l'objet d'une instance en cours à moins qu'une décision de justice irrévocable n'ait été prononcée. ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme -VERA a accouché le 16 mai 1994 par césarienne sous péridurale au centre hospitalier de Saint-Cloud ; que son fils est né en état de mort apparente, et qu'après les premiers soins, il a été transféré pour détresse respiratoire et hypotonie dans un service de réanimation de l'hôpital Saint-Vincent-de-Paul, où il est resté intubé pendant sept jours ; qu'il a ensuite été transféré au service de neuropédiatrie jusqu'au 10 juin 1994 ; que le 22 janvier 1999, les parents ont adressé au centre hospitalier de Saint-Cloud une demande d'indemnité à raison des fautes qui auraient été commises au moment de la naissance de leur fils ; que le directeur de l'établissement a rejeté cette demande le 21 avril 1999 ; que les consorts -VERA se sont abstenus ensuite de poursuivre la procédure contentieuse jusqu'au 18 février 2002, date à laquelle ils ont saisi à nouveau l'administration d'une demande préalable d'indemnisation sur le fondement de la loi alors en préparation, relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé ; que le 22 avril 2002, ils ont saisi le Tribunal administratif de Paris d'une requête tendant à la condamnation du centre hospitalier de Saint-Cloud et subsidiairement de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, à indemniser les préjudices subis par leur fils mineur Louis-Gabriel, eux-mêmes, et leur second fils mineur Augustin ; qu'ils font appel du jugement du 23 mai 2006 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leurs demandes ;
Considérant que si, au moment de la publication au journal officiel du 5 mars 2002 de la loi du 4 mars 2002, les consorts -VERA n'avaient pas encore saisi le Tribunal administratif de Paris, ils avaient déjà introduit, ainsi qu'il vient d'être rappelé, une demande préalable, obligatoire pour lier le contentieux, devant le Centre hospitalier de Saint-Cloud ; qu'il en résulte que les consorts -VERA n'étaient pas exclus d'emblée du nouveau régime d'indemnisation applicable aux instances en cours à la date du 5 mars 2002 ;
Considérant cependant, que si les consorts -VERA font valoir qu'ils détenaient à l'encontre de l'Etat une créance patrimoniale eu égard à l'interprétation, donnée par la Cour de cassation dans un avis du 22 novembre 2002, de la rédaction initiale de l'article 101 de la loi du 4 mars 2002, les travaux préparatoires de cette loi mettent clairement en lumière la volonté du législateur de n'appliquer les nouvelles règles de réparation des accidents médicaux dus à l'aléa thérapeutique qu'aux seules conséquences des actes médicaux antérieurs de moins de 6 mois à l'entrée en vigueur de la loi, ainsi qu'il est dit dans la rédaction initiale de l'article 101 sus reproduite ; qu'il s'ensuit que se trouvait, dès l'origine des nouvelles dispositions législatives, exclue du bénéfice de ce dispositif la créance que les consorts -VERA croyaient détenir à la suite des accidents médicaux ayant entouré la naissance de leur fils en 1994 ; que les intéressés ne sont, dès lors, pas fondés à soutenir que l'article 3 de la loi du 30 décembre 2002 réaffirmant, en la précisant, pour lever toute ambiguïté, la limitation dans le temps du champ d'application du nouveau régime de prise en charge de ce type d'accident, aurait méconnu l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'ils ne sont pas davantage fondés à soutenir qu'en apportant cette précision, la loi aurait méconnu le droit au procès équitable garanti par les stipulations de l'article 6 paragraphe 1 de cette convention ;
Considérant que les consorts -VERA ne sont pas fondés à soutenir, sur le fondement de l'article 98 précité de la loi du 4 mars 2002, qu'ils avaient droit à l'indemnisation qu'ils réclament au titre de la solidarité nationale, des conséquences des accidents médicaux survenus à leur fils Louis-Gabriel en 1994 ;
Considérant qu'il suit de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise, que les consorts -VERA ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande ;
Sur les droits de la Caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine :
Considérant que par voie de conséquence, la Caisse primaire d'assurance maladie (C.P.A.M.) des Hauts-de-Seine n'est pas fondée à demander le remboursement qu'elle réclame au titre des prestations servies pour le compte de la victime ; que, dès lors, ses conclusions ne peuvent en tout état de cause qu'être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par les consorts -VERA et par la C.P.A.M. des Hauts de Seine, doivent dès lors être rejetées ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Paris en date du 23 mai 2006 est annulé.
Article 2 : La demande de M. Georges -VERA et Mme Astrid est rejetée.
Article 3 : Les conclusions de la Caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine sont rejetées.
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N° 06PA03047