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29/03/2005 | FRANCE | N°00PA00136

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3eme chambre - formation b, 29 mars 2005, 00PA00136


Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 14 janvier et 3 avril 2000, présentés pour l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS, dont le siège est 3 avenue Victoria à Paris (75100) par Me Tsouderos ; l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS demande à la cour :

1°) l'annulation du jugement en date du 29 octobre 1999 par lequel le Tribunal administratif de Paris l'a condamnée à verser à M. X la somme de 120 000 F en réparation des préjudices résultant d'une opération pratiquée à l'hôpital Necker en octobre 1992 ainsi qu'une somme de 5 000 FF au titre des

frais irrépétibles engagés par ce dernier, une somme de 36 427,10 F à la ...

Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 14 janvier et 3 avril 2000, présentés pour l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS, dont le siège est 3 avenue Victoria à Paris (75100) par Me Tsouderos ; l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS demande à la cour :

1°) l'annulation du jugement en date du 29 octobre 1999 par lequel le Tribunal administratif de Paris l'a condamnée à verser à M. X la somme de 120 000 F en réparation des préjudices résultant d'une opération pratiquée à l'hôpital Necker en octobre 1992 ainsi qu'une somme de 5 000 FF au titre des frais irrépétibles engagés par ce dernier, une somme de 36 427,10 F à la caisse d'assurance-maladie des professions libérales de province et une somme de 9 218,74 FF au bureau commun d'assurance collective du régime de prévoyance des agents généraux d'assurance ;

2°) la condamnation de M. X à lui verser la somme de 6 030 F au titre des frais irrépétibles ;

...................................................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 mars 2005 :

- le rapport de M. Amblard, rapporteur,

- les observations de Me Tsouderos pour l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS et celles de Me Creissen pour M. Didier X,

- et les conclusions de Mme Adda, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. X a subi, le 13 octobre 1992, à l'hôpital Necker une intervention chirurgicale destinée à remédier à la surdité partielle de son oreille gauche ; que des troubles postopératoires ont nécessité une seconde intervention pratiquée le 15 octobre 1992 ; que, depuis cette date, M. X demeure atteint d'une cophose totale de l'oreille gauche, de troubles de l'équilibre et d'acouphènes ; que M. X a formé devant le Tribunal administratif de Paris une demande tendant à ce que l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS soit condamnée à réparer les conséquences du préjudice qu'il a subi ; que, par jugement en date du 29 octobre 1999, le Tribunal administratif de Paris a jugé que la responsabilité de l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS était engagée pour défaut d'asepsie et a condamné cette dernière à verser à M. X la somme de 120 000 F en réparation des préjudices résultant de l'opération pratiquée à l'hôpital Necker en octobre 1992 ainsi qu'une somme de 5 000 FF au titre des frais irrépétibles engagés par ce dernier, une somme de 36 427,10 F à la caisse d'assurance-maladie des professions libérales provinces et une somme de 9 218,74 FF au bureau commun d'assurance collective du régime de prévoyance des agents généraux d'assurance ; que l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS a régulièrement formé appel de cette décision par une requête enregistrée le 14 janvier 2000 ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert désigné par ordonnance du président du tribunal administratif en date du 4 novembre 1997, que la cophose totale de l'oreille gauche, les troubles de l'équilibre et les acouphènes dont M. X reste atteint peuvent être attribués à une infection par pseudomonas ; que ce germe saprophyte est souvent associé à une mycose analogue à celle observée dans le conduit auditif gauche de M. X lors d'un examen médical pratiqué le 27 juillet 1992 ; que la désinfection du conduit auditif externe, même minutieuse, ne met pas toujours à l'abri de la persistance de germes dans le champ opératoire ; qu'il n'est pas établi qu'il y ait eu lors de l'intervention chirurgicale un manquement aux règles d'asepsie de nature à entraîner l'infection qui serait la cause des troubles dont M. X demeure atteint ; que dans ces circonstances lesdits troubles ne sauraient être regardés comme ayant leur origine dans une faute dans l'organisation ou dans le fonctionnement du service public hospitalier susceptible d'engager la responsabilité de l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X devant le Tribunal administratif de Paris à l'appui de sa requête tendant à la condamnation de l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS à réparer les préjudices qu'il a subis du fait de l'intervention chirurgicale pratiquée à l'hôpital Necker ;

Sur la responsabilité sans faute :

Considérant que lorsqu'un acte médical nécessaire au diagnostic ou au traitement du malade présente un risque dont l'existence est connue mais dont la réalisation est exceptionnelle et dont aucune raison ne permet de penser que le patient y soit particulièrement exposé, la responsabilité du service public hospitalier est engagée si l'exécution de cet acte est la cause directe de dommages sans rapport avec l'état initial du patient comme avec l'évolution prévisible de cet état et présentant un caractère d'extrême gravité ;

Mais considérant que le risque de surdité et de troubles de l'équilibre qui s'est réalisé suite à l'intervention chirurgicale subie par M. X ne peut être regardé comme exceptionnel et sans rapport avec les troubles de l'audition dont ce dernier était atteint avant ladite intervention ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la responsabilité sans faute de l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS serait engagée doit être écarté ;

Sur la responsabilité pour faute :

Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise précité que l'intervention chirurgicale a été conduite selon les règles de l'art et que le choix de la prothèse implantée le 13 octobre 1992 était adapté à la morphologie de l'oreille de M. X ; qu'ainsi le moyen tiré de ce que la responsabilité du service hospitalier serait engagée à raison d'une faute médicale commise lors de l'intervention ne peut être accueilli ;

Considérant que le défaut d'information sur l'existence d'un risque grave et connu, fût-il exceptionnel, inhérent à une intervention chirurgicale dont a résulté la perte d'une chance de se soustraire à un risque qui s'est finalement réalisé est constitutif d'une faute susceptible d'ouvrir droit à indemnisation ; qu'une telle indemnisation de la perte de chance de se soustraire à un risque grave et connu qui s'est finalement réalisé est à proportion de la gravité des conséquences qui ont résulté de cette intervention chirurgicale et ne saurait couvrir la totalité des préjudices subis de ce fait sauf s'il est établi que le patient régulièrement informé aurait renoncé à courir ledit risque ;

Considérant que, ainsi qu'il a été dit plus haut, une discrète mycose, à laquelle le germe saprophyte du pseudomonas est souvent associé, avait été observée dans le conduit de l'oreille gauche de M. X lors d'un examen préalable à l'opération effectué le 27 juillet 1992 ; qu'il est connu que la présence de ce germe, malgré une désinfection effectuée dans les règles de l'art, peut occasionner une infection susceptible de provoquer des lésions analogues à celles subies par M. X ; qu'il incombait à l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS d'informer ce dernier de l'existence d'un tel risque ; qu'en l'espèce, l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS n'apporte pas la preuve qui lui incombe qu'elle a donné cette information à l'intéressé ; qu'en effet, les courriers adressés par le chef de service de l'hôpital Necker en réponse aux questions de l'expert sur ce point sont postérieurs à l'intervention chirurgicale pratiquée sur M. X et ne sont pas de nature à établir que ce dernier aurait reçu une information suffisante permettant de donner un consentement éclairé à ladite intervention ; que, dès lors M. X est fondé à soutenir que l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS a commis une faute de nature à engager sa responsabilité ; qu'il résulte de l'instruction que M. X s'était accoutumé à la surdité partielle dont il était atteint depuis plus de trente ans ; qu'il n'est pas contesté que la pose d'une prothèse nécessitant une intervention chirurgicale lui a été spontanément proposée par un praticien chez qui il avait conduit son fils en consultation ; que ledit praticien lui avait indiqué qu'en cas d'échec de l'opération il pourrait être appareillé sans mentionner l'existence d'un risque de surdité totale et irrémédiable ; que dans ces circonstances il y a lieu de considérer que M. X, s'il avait reçu une information suffisante, n'aurait jamais accepté de courir un tel risque, qui s'est finalement réalisé, pour une opération de confort ; qu'il incombe donc à l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS d'indemniser M. X de l'entier préjudice qui a résulté de l'intervention chirurgicale qu'il a subie ;

Sur le préjudice :

Considérant qu'il résulte de l'instruction et des pièces du dossier que le Tribunal administratif de Paris a fait une juste appréciation du montant de l'indemnité due à M. X en réparation des troubles de toute nature dans ses conditions d'existence et des douleurs physiques endurées du fait de la faute commise par l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS en le fixant à la somme, d'ailleurs non contestée en appel, de 18 293,88 euros (120 000 FF) ;

Sur les droits de la caisse d'assurance-maladie des professions libérales provinces et du bureau commun d'assurance collective Régime général de prévoyance des agents généraux d'assurance :

Considérant que les prestations servies à M. X du fait de l'intervention chirurgicale litigieuse par la caisse d'assurance-maladie des professions libérales provinces et par le bureau commun d'assurance collective Régime général de prévoyance des agents généraux d'assurance, dont ils sont fondés à demander le remboursement en application de l'article L. 376-1 premier alinéa du code de la sécurité sociale, se sont élevées respectivement à 5 553,28 euros (36 427,10 FF) et 1 405,39 euros (9 218,74 FF) ; qu'il y a lieu de condamner l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS à verser à la caisse d'assurance-maladie des professions libérales provinces la somme de 5 553,28 euros et au bureau commun d'assurance collective Régime général de prévoyance des agents généraux d'assurance la somme de 1 405,39 euros, lesdites sommes augmentées des intérêts de droit ;

Sur les frais d'expertise :

Considérant qu'il y a lieu de mettre à la charge de l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS les frais d'expertise liquidés et taxés, par ordonnance du président du Tribunal administratif de Paris en date du 27 mars 1998 ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS la somme de 3 048,98 euros correspondant aux frais exposés par M. X et non compris dans les dépens et la somme de 450 euros au titre des mêmes frais exposés par la caisse d'assurance-maladie des professions libérales provinces ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. X qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1 : La requête de l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS est rejetée.

Article 2 : L'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS versera à la caisse d'assurance-maladie des professions libérales provinces la somme de 5 553,28 euros, ladite somme étant augmentée des intérêts de droit.

Article 3 : L'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS versera au bureau commun d'assurance collective régime général de prévoyance des agents généraux d'assurance la somme de 1 405,39 euros, ladite somme étant augmentée des intérêts de droit.

Article 4 : L'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS versera, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 3 000 euros à M. X et une somme de 450 euros à la caisse d'assurance-maladie des professions libérales provinces.

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01PA00425

M. ou Mme KELSCH

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N° 00PA00136


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3eme chambre - formation b
Numéro d'arrêt : 00PA00136
Date de la décision : 29/03/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. FOURNIER DE LAURIERE
Rapporteur ?: M. François AMBLARD
Rapporteur public ?: Mme ADDA
Avocat(s) : TSOUDEROS

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2005-03-29;00pa00136 ?
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