Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 26 octobre 2023 par lequel le préfet de la Sarthe a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office à l'issue de ce délai.
Par un jugement n° 2317089 du 20 juin 2024, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 4 décembre 2024, Mme A... B..., représentée par Me Guerin, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 20 juin 2024 du tribunal administratif de Nantes ;
2°) d'annuler l'arrêté du 26 octobre 2023 du préfet de la Sarthe ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Sarthe de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et de la munir dans l'attente d'une autorisation provisoire de séjour, sous la même astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le jugement est entaché d'erreurs de droit, de fait et d'erreur manifeste d'appréciation ;
S'agissant de la décision portant refus de titre de séjour :
- il n'est pas établi qu'elle a été signée par une autorité compétente ;
- cette décision est insuffisamment motivée et entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle et familiale ;
- elle est entachée d'un vice de procédure en ce que l'avis rendu par le collège des médecins de l'Office française de l'immigration et de l'intégration (OFII) quant à sa situation ne lui a pas été communiqué ; de plus, il n'est pas établi que le médecin instructeur n'aurait pas siégé au sein du collège ;
- elle méconnaît le droit à la communication des documents administratifs dès lors que la fiche pays de la Géorgie ayant servi à l'élaboration de l'avis du collège de médecins ne lui a pas été communiquée malgré sa demande ;
- elle est entachée d'une erreur d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- il n'est pas établi qu'elle a été signée par une autorité compétente ;
- cette décision est insuffisamment motivée et entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle et familiale ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
S'agissant de la décision fixant le pays de destination :
- cette décision est insuffisamment motivée ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est illégale du fait de l'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français.
Par un mémoire en défense, enregistré le 20 mai 2025, le préfet de la Sarthe conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 6 novembre 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Penhoat a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., ressortissante géorgienne née le 20 octobre 1980, déclare être entrée irrégulièrement en France le 17 décembre 2021. Sa demande de reconnaissance de la qualité de réfugiée a été rejetée par une décision du 19 octobre 2022 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 22 septembre 2023. Sa demande de réexamen a également été rejetée. Elle a sollicité du préfet de la Sarthe la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Sa demande a été rejetée par un arrêté du 26 octobre 2023 portant en outre obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office lorsque le délai sera expiré. Mme B... relève appel du jugement du 20 juin 2024 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Eu égard à l'office du juge d'appel, qui est appelé à statuer, d'une part, sur la régularité de la décision des premiers juges et, d'autre part, sur le litige qui a été porté devant eux, dans l'hypothèse où le tribunal administratif aurait commis, comme le soutient la requérante, une erreur de fait, une erreur de droit et une erreur manifeste d'appréciation susceptibles d'affecter la validité de la motivation du jugement dont le contrôle est opéré par l'effet dévolutif de l'appel, ces erreurs resteraient, en tout état de cause, sans incidence sur la régularité du jugement.
Sur la légalité de l'arrêté attaqué :
Sur les moyens communs dirigés contre les décisions contestées :
3. Il y a lieu d'écarter, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, les moyens tirés de l'incompétence du signataire de l'arrêté contesté, de l'insuffisante motivation de cet arrêté et de ce que le préfet n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de Mme B..., que cette dernière reprend en appel sans apporter d'éléments nouveaux.
Sur le refus de titre de séjour :
4. En premier lieu, il convient d'écarter, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, les moyens tirés de ce que l'avis rendu par le collège des médecins de l'Office française de l'immigration et de l'intégration quant à sa situation ne lui a pas été communiqué, qu'il n'est pas établi que le médecin instructeur n'aurait pas siégé au sein du collège et de la méconnaissance du droit à la communication des documents administratifs, moyens que Mme B... réitère en appel sans apporter d'élément nouveau.
5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. (...) ".
6. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'accès effectif ou non à un traitement approprié dans le pays dont il est originaire ou dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.
7. Par un avis du 15 septembre 2023, le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé que l'état de santé de Mme B... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais qu'eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé de son pays d'origine, elle pouvait y bénéficier effectivement d'un traitement approprié.
8. Mme B... soutient qu'elle souffre d'un syndrome anxio-dépressif post-traumatique en lien avec les traumatismes qu'elle a subis en Géorgie. Toutefois, l'attestation médicale du 24 janvier 2024, qui se borne à décrire la symptomatologie anxieuse et dépressive de la requérante en indiquant " qu'elle est en lien avec les évènements vécus et le parcours d'asile " n'est pas de nature à démontrer en l'absence de précisions que la pathologie de Mme B... est liée à des évènements traumatisants qu'elle aurait vécus dans son pays d'origine ni qu'elle ne pourrait y bénéficier d'un traitement approprié. De même, la production d'un certificat médical relatif à la nécessité d'un bilan cardiologique tous les six mois ne permet pas d'établir que le suivi cardiologique dont elle aurait besoin ne serait pas disponible en Géorgie. Dans ces conditions, la requérante n'établit pas que la décision contestée du préfet de la Sarthe serait entachée d'une erreur de droit ou d'une erreur d'appréciation au regard de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
9. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. (...). ".
10. Le séjour de Mme B..., qui a déclaré être entrée en France le 17 septembre 2021, soit depuis deux ans à la date de l'arrêté contesté, est récent. L'intéressée n'a pas d'autres attaches familiales en France que son époux et son fils majeur qui font également l'objet d'une décision les obligeant à quitter le territoire français. Par ailleurs, la requérante n'établit pas être dans l'impossibilité de reconstituer sa cellule familiale dans un des pays dans lesquels la famille serait légalement admissible. Dans ces conditions d'entrée et de séjour, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressée une atteinte disproportionnée au regard des buts qu'elle a poursuivis, en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
11. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 (...) ".
12. En considérant que l'admission au séjour de Mme B... ne répondait pas à des considérations humanitaires et n'était pas justifiée au regard des motifs exceptionnels qu'il faisait valoir, le préfet de la Sarthe n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions précitées de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
13. En premier lieu, la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour n'étant pas annulée, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence.
14. En deuxième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 10, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté.
15. En dernier lieu, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article
L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est inopérant à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français.
Sur la décision fixant le pays de destination :
16. En premier lieu, les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français n'étant pas annulées, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que la décision fixant le pays de destination doit être annulée par voie de conséquence.
17. En second lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 10, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté.
18. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fins d'injonction sous astreinte ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1err : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie en sera transmise, pour information, au préfet de la Sarthe.
Délibéré après l'audience du 30 juin 2025, à laquelle siégeaient :
- M. Quillévéré, président,
- M. Penhoat, premier conseiller,
- M. Viéville, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 juillet 2025.
Le rapporteur
A. PENHOATLe président
G. QUILLÉVÉRÉ
La greffière
H. DAOUD
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°24NT03397 2
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