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08/07/2025 | FRANCE | N°24NT01488

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 5ème chambre, 08 juillet 2025, 24NT01488


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours formé contre la décision du 12 décembre 2022 de l'autorité consulaire française en Inde refusant de délivrer à l'enfant B... C... un visa de long séjour en qualité de membre de famille de réfugié.



Par un jugement n° 2306440 du 18 mars 2024, le

tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Pa...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours formé contre la décision du 12 décembre 2022 de l'autorité consulaire française en Inde refusant de délivrer à l'enfant B... C... un visa de long séjour en qualité de membre de famille de réfugié.

Par un jugement n° 2306440 du 18 mars 2024, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 20 mai 2024, M. A... D... et Mme B... C..., représentés par Me Le Floch, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes ;

2°) d'annuler la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de délivrer à Mme B... C... le visa sollicité ou de réexaminer la demande, dans un délai d'un mois, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Le Floch, leur avocate, de la somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ou, en cas de rejet de la demande d'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. D... et Mme C... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la décision contestée est entachée d'erreur d'appréciation dès lors qu'ils se trouvent dans l'impossibilité de présenter une décision de délégation d'autorité parentale ;

- elle a été prise en violation de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que l'identité de la demandeuse de visa et son lien de filiation avec le réfugié sont établis tant par les documents d'état civil produits que par des éléments de possession d'état ;

- elle porte une atteinte disproportionnée au droit au respect de leur vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 juillet 2024, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par les requérants n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code civil ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Ody a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Par le jugement n° 2306440 du 18 mars 2024, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande de M. A... D... tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a refusé de délivrer à Mme B... C... un visa de long séjour en qualité de membre de famille de réfugié. M. D... et Mme C... relèvent appel de ce jugement.

2. Il ressort de l'accusé de réception du recours administratif formé le 25 janvier 2023 devant la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France que M. D... a été informé qu'en l'absence d'une réponse expresse de la commission dans un délai de deux mois à compter de la date de réception du recours, celui-ci est réputé rejeté pour les mêmes motifs que ceux de la décision consulaire contestée. L'autorité consulaire a refusé de délivrer le visa sollicité pour un motif tiré de ce qu'en application des articles L. 434-3 et L. 434-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les documents produits à l'appui de la demande de visa ne permettent pas de justifier que le lien de filiation n'est établi qu'à l'égard de la personne que l'intéressée entend rejoindre en France ou que l'autre parent est décédé ou déchu de ses droits parentaux ou que la demandeuse aurait été confiée à la personne qu'elle entend rejoindre en France au titre de l'autorité parentale en vertu d'une décision d'une juridiction étrangère.

3. Pour rejeter la demande de M. D..., le tribunal administratif a estimé, après avoir censuré le motif initial de la décision contestée, que le motif tiré de ce que Mme B... C..., étant âgée de plus de dix-neuf ans à la date de la demande de visa, ne remplissait pas les conditions d'éligibilité de la réunification familiale était de nature à fonder légalement la décision contestée et que l'autorité administrative aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif.

4. Aux termes de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, le ressortissant étranger qui s'est vu reconnaître la qualité de réfugié ou qui a obtenu le bénéfice de la protection subsidiaire peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre de la réunification familiale : / (...) / 3° Par les enfants non mariés du couple, n'ayant pas dépassé leur dix-neuvième anniversaire. (...) " Aux termes de l'article L. 561-4 du même code : " Les articles L. 434-1, L. 434-3 à L. 434-5 et le premier alinéa de l'article L. 434-9 sont applicables. (...) ". Aux termes de l'article L. 434-3 du même code : " Le regroupement familial peut également être demandé pour les enfants mineurs de dix-huit ans du demandeur et pour ceux de son conjoint si, au jour de la demande : / 1° La filiation n'est établie qu'à l'égard du demandeur ou de son conjoint ; / 2° Ou lorsque l'autre parent est décédé ou déchu de ses droits parentaux. La réunification familiale n'est pas soumise à des conditions de durée préalable de séjour régulier, de ressources ou de logement. ". Aux termes enfin de l'article L. 434-4 du même code : " Le regroupement familial peut être demandé pour les enfants mineurs de dix-huit ans du demandeur et ceux de son conjoint, qui sont confiés, selon le cas, à l'un ou l'autre, au titre de l'exercice de l'autorité parentale, en vertu d'une décision d'une juridiction étrangère. Une copie de cette décision devra être produite ainsi que l'autorisation de l'autre parent de laisser le mineur venir en France. ".

5. Il ressort des pièces du dossier que M. D..., ressortissant chinois né en 1980, a obtenu le statut de réfugié par décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 19 septembre 2019. En décembre 2021, un visa de long séjour a été demandé pour Mme B... C..., qu'il présente comme sa fille. Il ressort des pièces du dossier que M. D... a déclaré tant dans son formulaire de demande d'asile qu'au cours de l'entretien qui s'est tenu devant un officier de protection de l'OFPRA, en présence d'un interprète en langue tibétaine, que sa fille B... C..., était née le 1er février 2001. Par un courrier du 4 décembre 2020, M. D... a demandé à l'OFPRA de modifier l'année de naissance de sa fille, soutenant qu'elle serait née le 1er février 2006. L'intéressé produit un livret vert, délivré le 6 novembre 2021 par le gouvernement tibétain en exil et qui tient lieu de document officiel, qui mentionne que Mme B... C... est née le 1er février 2006. Toutefois, ce document a été établi après l'obtention du statut de réfugié et la demande de rectification auprès de l'OFPRA de la date de naissance de l'intéressée et ne saurait à lui seul établir, compte tenu des déclarations précédentes de M. D..., que Mme C... serait née le 1er février 2006. Dans ces conditions et en l'absence d'autres éléments de nature à établir l'erreur dans la date de naissance de la demandeuse de visa, le motif tiré de ce que Mme C... était âgée de plus de 19 ans à la date de sa demande de visa est de nature à fonder la décision contestée.

6. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que M. D... a rendu visite à sa fille majeure, en Inde, à plusieurs reprises et il n'est ni établi, ni même allégué qu'il serait dans l'impossibilité de s'y rendre à nouveau. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que l'intéressée serait isolée en Inde, pays où elle réside depuis 2020. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande. Il suit de là que leurs conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. D... et Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D..., à Mme B... C... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 19 juin 2025, à laquelle siégeaient :

- M. Degommier, président de chambre,

- M. Rivas, président assesseur,

- Mme Ody, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 juillet 2025.

La rapporteure,

C. ODY

Le président,

S. DEGOMMIER

Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 24NT01488


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 24NT01488
Date de la décision : 08/07/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DEGOMMIER
Rapporteur ?: Mme Cécile ODY
Rapporteur public ?: M. FRANK
Avocat(s) : LE FLOCH

Origine de la décision
Date de l'import : 20/08/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-07-08;24nt01488 ?
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