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08/07/2025 | FRANCE | N°23NT00220

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 5ème chambre, 08 juillet 2025, 23NT00220


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme F... A... et Mme E... D... ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 24 janvier 2020 par lequel le maire de Saint-Méen (Finistère) ne s'est pas opposé à la déclaration préalable déposée par M. et Mme H... en vue de la réalisation d'une extension d'une construction à usage d'habitation sur un terrain situé 3 lieudit Diriguin ainsi que les décisions implicites par lesquelles le maire a refusé de procéder au retrait de cet arrêté pour fra

ude.



Par un jugement nos 2001185, 2100928 et 2103938 du 25 novembre 2022, le tribun...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F... A... et Mme E... D... ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 24 janvier 2020 par lequel le maire de Saint-Méen (Finistère) ne s'est pas opposé à la déclaration préalable déposée par M. et Mme H... en vue de la réalisation d'une extension d'une construction à usage d'habitation sur un terrain situé 3 lieudit Diriguin ainsi que les décisions implicites par lesquelles le maire a refusé de procéder au retrait de cet arrêté pour fraude.

Par un jugement nos 2001185, 2100928 et 2103938 du 25 novembre 2022, le tribunal administratif de Rennes a annulé les décisions implicites par lesquelles le maire de Saint-Méen a refusé de procéder au retrait de l'arrêté du 24 janvier 2020, a enjoint à la commune de procéder à son retrait dans un délai d'un mois à compter de la notification de son jugement, a mis à la charge de la commune une somme de 1 500 euros à verser à Mme A... et une somme de 1 500 euros à verser à Mme D... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions des demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 25 janvier 2023, 6 juin 2023, 19 juillet 2023 et 9 janvier 2024, ces deux derniers n'ayant pas été communiqués, la commune de Saint-Méen, représentée par la SELARL Le Roy, Gourvennec, Prieur, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 25 novembre 2022, en tant qu'il a annulé les décisions implicites par lesquelles le maire de Saint-Méen a refusé de procéder au retrait de l'arrêté du 24 janvier 2020 et lui a enjoint de procéder à son retrait dans un délai d'un mois à compter de la notification de son jugement ;

2°) de rejeter le surplus des demandes présentées par Mme A... et Mme D... devant le tribunal administratif de Rennes ;

3°) de mettre à la charge de Mme A... et de Mme D... le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La commune de Saint-Méen soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier dès lors qu'il est insuffisamment motivé s'agissant de la réponse au moyen tiré de la fraude ; il comporte des contradictions dans ses motifs ;

- les demandes de première instance sont irrecevables ; les demandes sont tardives ; Mme A... et Mme D... n'ont pas intérêt pour agir ;

- la décision de non-opposition à la déclaration préalable déposée par M. et Mme H... n'est pas entachée de fraude ; la fraude ne se présume pas ; la fraude résulte de manœuvres destinées à tromper l'administration ; les pétitionnaires bénéficient d'un certificat d'urbanisme opérationnel pour l'opération projetée ; les pétitionnaires ont été induits en erreur.

Par des mémoires enregistrés les 4 mai et 20 juin 2023, Mme F... A..., représentée par Me Bazire, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la commune de Saint-Méen une somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par la commune de Saint-Méen ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 décembre 2023, Mme E... D... représentée par Me Saout, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la commune de Saint-Méen une somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par la commune de Saint-Méen ne sont pas fondés.

La requête et les mémoires enregistrés dans la présente instance ont été communiqués à M. et Mme B... et C... H... qui n'ont pas produit d'observations.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dubost,

- les conclusions de M. Frank, rapporteur public,

- et les observations de Me Cassard, représentant la commune de Saint-Méen, celles de Me Le Baron, substituant Me Saout, représentant Mme D... et celles de Me Bazire, représentant Mme A....

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 24 janvier 2020, le maire de Saint-Méen (Finistère) ne s'est pas opposé à la déclaration préalable déposée par M. et Mme H... en vue de la réalisation de l'extension d'une construction à usage d'habitation sur une parcelle cadastrée section B n° 1098 située 3 lieu-dit Diriguin. Par la suite, le maire de Saint-Méen a implicitement rejeté les demandes formées par Mme A... et Mme D... tendant au retrait de cet arrêté. Mme D... et Mme A... ont alors demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler cet arrêté du 24 janvier 2020 ainsi que les décisions implicites de rejet de leurs demandes de retrait. La commune de Saint-Méen relève appel du jugement du 25 novembre 2022 en tant que ce tribunal a annulé les décisions implicites par lesquelles le maire de Saint-Méen a refusé de retirer l'arrêté du 24 janvier 2020 et lui a enjoint de procéder à son retrait.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés. ".

3. En premier lieu, alors que la contradiction de motifs affecte le bien-fondé de la décision juridictionnelle et non sa régularité, le moyen tiré de ce que le jugement attaqué serait entaché d'une contrariété de motifs affectant sa régularité ne peut qu'être écarté comme inopérant.

4. En second lieu, les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments présentés par les parties, ont indiqué de manière suffisamment précise, au point 19, les motifs pour lesquels ils ont estimé que les décisions implicites du maire, refusant de faire droit aux demandes de retrait de l'arrêté du 24 janvier 2020 formées par Mme A... et Mme D..., sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation. A cet égard, ils ont mentionné des éléments visant à établir que les pétitionnaires ont été induits en erreur notamment par l'acte de vente du terrain de l'opération projetée, avant d'estimer au regard de l'ensemble des éléments qui leur étaient soumis, que la demande de déclaration préalable formée par M. et Mme H... était entachée de fraude. Ce faisant, ils ont suffisamment motivé le jugement attaqué. Ainsi, le moyen tiré de l'insuffisante motivation du jugement attaqué doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne les fins de non-recevoir opposées à la demande de première instance :

5. En premier lieu, aux termes du premier alinéa de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée ". Aux termes de l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme : " Le délai de recours contentieux à l'encontre d'une décision de non-opposition à une déclaration préalable (...) court à l'égard des tiers à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l'article R. 424-15 ". Aux termes de l'article L. 424-5 de ce code : " La décision de non-opposition à une déclaration préalable ou le permis de construire ou d'aménager ou de démolir, tacite ou explicite, ne peuvent être retirés que s'ils sont illégaux et dans le délai de trois mois suivant la date de ces décisions. Passé ce délai, la décision de non-opposition et le permis ne peuvent être retirés que sur demande expresse de leur bénéficiaire ". Aux termes de l'article L. 241-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Par dérogation aux dispositions du présent titre, un acte administratif unilatéral obtenu par fraude peut être à tout moment abrogé ou retiré. ".

6. D'une part, si, ainsi que le prévoit désormais l'article L. 241-2 du code des relations entre le public et l'administration, la circonstance qu'un acte administratif a été obtenu par fraude permet à l'autorité administrative compétente de l'abroger ou de le retirer à tout moment, elle ne saurait, en revanche, proroger le délai du recours contentieux. En revanche, un tiers justifiant d'un intérêt à agir est recevable à demander, dans le délai du recours contentieux, l'annulation de la décision par laquelle l'autorité administrative a refusé de faire usage de son pouvoir d'abroger ou de retirer un acte administratif obtenu par fraude, quelle que soit la date à laquelle il l'a saisie d'une demande à cette fin.

7. D'autre part, si un tiers justifiant d'un intérêt à agir est recevable à demander l'annulation de la décision implicite par laquelle l'autorité administrative a refusé de faire usage de son pouvoir d'abroger ou de retirer un permis obtenu par fraude, quelle que soit la date à laquelle il l'a saisie d'une demande à cette fin, le délai du recours contentieux qui lui est ouvert pour saisir la juridiction court dès la naissance de cette décision implicite, sans que l'absence d'accusé de réception de sa demande y fasse obstacle.

8. Il ressort des pièces du dossier que Mme D... et Mme A... ont respectivement demandé au maire de Saint-Méen, les 20 octobre 2020 et 7 avril 2021, de retirer l'arrêté du 24 janvier 2020 portant non-opposition à la déclaration préalable formée par M. et Mme H..., au motif qu'il a été obtenu par fraude. Des décisions implicites de rejet de ces demandes sont nées du silence gardé par le maire pendant plus de deux mois, les 20 décembre 2020 et 7 juin 2021. Les demandes de Mme A... et Mme D..., tendant à l'annulation de ces décisions implicites de rejet, ont été enregistrées au greffe du tribunal administratif le lundi 22 février 2021 et le 29 juillet 2021, soit dans le délai de recours contentieux ouvert à leur égard. Par suite, et alors même que le délai de recours contentieux ouvert à l'encontre de l'arrêté du 24 janvier 2020 était expiré, les demandes de Mme D... et de Mme A... tendant à l'annulation des décisions implicites de rejet précitées n'étaient pas tardives. La fin de non-recevoir opposée par la commune ne peut donc être accueillie.

9. En second lieu, aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'État, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre une décision relative à l'occupation ou à l'utilisation du sol régie par le présent code que si la construction, l'aménagement ou le projet autorisé sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement (...) ".

10. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'une autorisation de construire de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction.

11. Mme A... et Mme D..., sont respectivement propriétaires des parcelles cadastrées section B nos 505, 506, 1100, 1306 et 499, 504, 1099, 1308, qui jouxtent le terrain de l'opération projetée. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que Mme A... et Mme D..., qui disposent sur ces parcelles de maisons d'habitation, disposeront d'une vue directe sur l'opération projetée consistant, selon les pétitionnaires, en l'extension d'une maison d'habitation, laquelle se situe au sein d'une vaste zone naturelle au sein de laquelle les possibilités de construction sont fortement limitées par le plan local d'urbanisme. Dans ces conditions, Mme A... et Mme D..., qui sont les voisines immédiates du projet, font valoir des éléments susceptibles d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de leurs biens et justifient ainsi d'un intérêt leur donnant qualité pour agir. La fin de non-recevoir opposée par la commune de Saint-Méen ne peut donc être accueillie.

En ce qui concerne la légalité des décisions implicites contestées :

12. D'une part, une décision de non-opposition à une déclaration préalable n'a d'autre objet que d'autoriser la construction d'immeubles conformes aux plans et indications fournis par le pétitionnaire. La circonstance que ces plans et indications pourraient ne pas être respectés ou que ces immeubles risqueraient d'être ultérieurement transformés et affectés à un usage non conforme aux documents et règles générales d'urbanisme n'est pas par elle-même, sauf le cas d'éléments établissant l'existence d'une fraude à la date de la délivrance de l'autorisation, de nature à affecter la légalité de celle-ci.

13. La caractérisation de la fraude résulte de ce que le pétitionnaire a procédé de manière intentionnelle à des manœuvres de nature à tromper l'administration sur la réalité du projet dans le but d'échapper à l'application d'une règle d'urbanisme. Une information erronée ne peut, à elle seule, faire regarder le pétitionnaire comme s'étant livré à l'occasion du dépôt de sa demande à des manœuvres destinées à tromper l'administration.

14. Il incombe au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, d'une part, de vérifier la réalité de la fraude alléguée et, d'autre part, de contrôler que l'appréciation de l'administration sur l'opportunité de procéder ou non à l'abrogation ou au retrait n'est pas entachée d'erreur manifeste, compte tenu notamment de la gravité de la fraude et des atteintes aux divers intérêts publics ou privés en présence susceptibles de résulter soit du maintien de l'acte litigieux soit de son abrogation ou de son retrait.

15. D'autre part, aux termes de l'article R. 431-35 du code de l'urbanisme dans sa rédaction applicable au litige : " La déclaration préalable précise : (...) c) La nature des travaux ou du changement de destination ; d) S'il y a lieu, la surface de plancher et la destination et la sous-destination des constructions projetées définies aux articles R. 151-27 et R. 151-28 ; (...) ". Aux termes de l'article R. 151-27 de ce code dans sa rédaction applicable au litige : " Les destinations de constructions sont : 1o Exploitation agricole et forestière ; 2o Habitation ; 3o Commerce et activités de service ; 4o Équipements d'intérêt collectif et services publics ; 5o Autres activités des secteurs secondaire ou tertiaire. " et aux termes de l'article R. 151-28 du même code : " Les destinations de constructions prévues à l'article R. 151-27 comprennent les sous-destinations suivantes : (...) 2° Pour la destination " habitation " : logement, hébergement ; (...). ". Aux termes de l'article R. 151-29 du même code : " Les définitions et le contenu des sous-destinations mentionnées à l'article R. 151-28 sont précisées par arrêté du ministre chargé de l'urbanisme. Les locaux accessoires sont réputés avoir la même destination et sous-destination que le local principal. "

16. Aux termes de l'article N1 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) de la commune de Saint-Méen, applicable au terrain d'assiette du projet : " A - Sont interdites, en zones N, Nh, Nn, Nnzh et Nzh (...) notamment : / 1. Les nouvelles constructions à usage d'habitation à l'exception de celles autorisées à l'article N2. / 2. Le changement de destination de bâtiment pour un usage d'habitation. / (...) B - Sont interdites en zones Nh, / 1. Le changement de destination de bâtiment pour un usage d'habitation. / 2. Les occupations et utilisations du sol non mentionnées à l'article N2 - A. et C. ".

17. D'abord, il ressort du dossier de déclaration préalable déposée par M. et Mme H... que l'objet des travaux déclarés porte sur la rénovation et l'extension d'une maison d'habitation sur un terrain classé en zone Nh du règlement graphique du PLU. Mme A... et Mme D..., qui ont demandé le retrait de l'arrêté de non-opposition à cette déclaration préalable pour fraude, font valoir que la construction existante n'est toutefois pas à usage d'habitation mais à usage de garage. Il ressort de l'acte de vente du terrain de l'opération que le bien acquis est désigné comme " un garage sur un terrain de loisir (...) Et un carport avec un mobile-home ". Il mentionne par ailleurs qu'en tant que construction à usage de garage, le bien n'est pas soumis à la réalisation d'un diagnostic de performance énergétique. Par ailleurs, le constat de l'état parasitaire de l'immeuble, annexé à l'acte de vente, indique également que l'ouvrage existant est un " hangar/garage ". Si le compte rendu de visite de l'installation d'assainissement collectif, également annexé à l'acte de vente, fait état de la présence sur le terrain d'une habitation disposant d'un raccordement à un ouvrage d'assainissement non collectif, il ressort toutefois de ce compte-rendu que ces constats concernent uniquement le mobile-home qui y est seul raccordé, la construction existante ne disposant d'aucun ouvrage d'assainissement. En outre, il ressort des pièces photographiques versées aux débats que M. et Mme H..., qui ont acquis le terrain de l'opération projetée en déclarant bien le connaître pour l'avoir visité, ne pouvaient ignorer que la construction existante d'une surface d'environ 40 m², constituée d'une pièce unique ne disposant d'aucun sanitaire et servant notamment de stockage, était à usage de garage et non d'habitation. Les circonstances selon lesquelles l'annonce immobilière mentionne la vente d'un " bien agricole " et " maison d'habitation - une parcelle de terrain ayant une construction et un carport " et que l'acte de vente fasse mention d'une habitation s'agissant des clauses relatives au délai de rétractation et à la présence de détecteurs de fumée ne permettent pas de regarder M. et Mme H... comme ayant été induits en erreur quant à la destination de la construction existante acquise. Il en va de même de la circonstance qu'un certificat d'urbanisme déclarant réalisable une opération d'extension " à usage d'habitation d'une construction existante " ait été délivré le 11 mars 2019 celui-ci n'ayant d'ailleurs pas été mentionné ni annexé à l'acte de vente. Dans ces conditions, en mentionnant dans la demande de déclaration préalable que celle-ci porte sur la rénovation et l'extension d'une maison d'habitation, M. et Mme H... se sont livrés à une manœuvre frauduleuse destinée à obtenir de l'autorité administrative une décision indue dès lors que les dispositions du règlement du PLU citées au point précédent font obstacle à tout changement de destination d'un bâtiment pour un usage d'habitation.

18. Ensuite, d'une part, alors que le terrain de l'opération projetée est situé en zone N du PLU qui correspond aux secteurs à protéger en raison de la qualité des sites, des milieux naturels, des paysages et de leur intérêt, la fraude de M. et Mme H... conduit à la réalisation d'une habitation que le règlement de la zone n'autorise pas et revêt ainsi un certain caractère de gravité. D'autre part, il n'est pas allégué et il ne ressort pas des pièces du dossier qu'un intérêt public justifierait le maintien de l'arrêté du 24 janvier 2020 de non-opposition à la déclaration préalable de M. et Mme H....

19. Par suite, le maire de Saint-Méen a commis une erreur manifeste d'appréciation en refusant de retirer son arrêté du 24 janvier 2020.

20. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Saint-Méen n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a annulé les décisions contestées et lui a enjoint de procéder au retrait de l'arrêté du 24 janvier 2020 portant non opposition à la déclaration préalable présentée par M. et Mme H....

Sur les frais liés au litige :

21. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme A... et de Mme D..., qui ne sont pas dans la présente instance les parties perdantes, la somme demandée par la commune de Saint-Méen au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la commune de Saint-Méen une somme de 1 000 euros à verser à Mme D... et une somme de 1 000 euros à verser à Mme A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la commune de Saint-Méen est rejetée.

Article 2 : La commune de Saint-Méen versera à Mme A... et à Mme D... une somme de 1 000 euros chacune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Saint-Méen, à Mme E... D..., à Mme F... A... et à M. et Mme B... et C... H....

Délibéré après l'audience du 19 juin 2025, à laquelle siégeaient :

- M. Degommier, président de chambre,

- M. Rivas, président-assesseur,

- Mme Dubost, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 juillet 2025.

La rapporteure,

A.-M. DUBOST

Le président,

S. DEGOMMIER

Le greffier,

C. GOY La République mande et ordonne au préfet du Finistère en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23NT00220


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NT00220
Date de la décision : 08/07/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DEGOMMIER
Rapporteur ?: Mme Anne-Maude DUBOST
Rapporteur public ?: M. FRANK
Avocat(s) : SELARL BAZIRE BOULOUARD

Origine de la décision
Date de l'import : 20/08/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-07-08;23nt00220 ?
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