Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Par deux demandes distinctes, M. J... K... et M. G... D..., d'une part, et l'Association de protection du Goulet, la SCI Le Pas Saint-Martin, M. B... I..., M. F... H..., Mme A... L..., M. et Mme E... C..., d'autre part, ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler, d'une part, l'arrêté du 17 septembre 2021 par laquelle le maire de Saint-Lunaire a délivré à la SCCV Saint-Lunaire un permis de construire une résidence services pour personnes âgées comportant quatre-vingt-cinq logements, sur un terrain situé boulevard de la Plage ainsi que la décision de rejet de leur recours gracieux et, d'autre part, l'arrêté du 13 septembre 2021 du maire de Saint-Lunaire portant autorisation de travaux pour la création d'un établissement recevant du public.
Par un jugement n°s 2201296, 2201375 du 15 mai 2023, joignant les demandes, le tribunal administratif de Rennes a annulé l'arrêté du maire de Saint-Lunaire du 17 septembre 2021, a mis à la charge de la commune de Saint-Lunaire et de la SCCV Saint-Lunaire les frais liés au litige et a rejeté la demande présentée par M. et Mme C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que le surplus des conclusions des demandes.
Procédure devant la cour :
I. Par une requête et un mémoire, enregistrés les 10 et 13 juillet 2023, sous le n° 23NT02076, la SCCV Saint-Lunaire, représentée par Me Vendé, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes en tant qu'il a annulé l'arrêté du maire de Saint-Lunaire du 17 septembre 2021 portant permis de construire ;
2°) de rejeter les demandes présentées devant le tribunal administratif par MM. K... et D... et par l'association de Protection du Goulet et autres ;
3°) de mettre à la charge de MM. K... et D... et de l'association de Protection du Goulet et autres le versement de la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est irrégulier ; les premiers juges ont retenu à tort que les demandeurs justifiaient d'un intérêt à agir à l'encontre de l'arrêté du 17 septembre 2021 contesté ;
- l'arrêté contesté ne méconnaît pas les dispositions de l'article UE 11 du règlement du plan local d'urbanisme de Saint-Lunaire.
Par un mémoire en défense, enregistré le 26 octobre 2023, l'association de Protection du Goulet, la SCI du Pas Saint-Martin, M. B... I..., M. F... H..., Mme A... L... et M. et Mme C..., représentés par Me Busson, concluent au rejet de la requête et demandent à la cour de mettre à la charge de la SCCV Saint-Lunaire le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent qu'aucun des moyens soulevés par la requérante n'est fondé.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 janvier 2024, M. J... K... et M. G... D..., représentés par Me Collet, concluent au rejet de la requête et demandent à la cour de mettre à la charge de la commune de Saint-Lunaire et de la SCCV Saint-Lunaire le versement à M. K..., d'une part, et à M. D..., d'autre part, de la somme de 2 500 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent qu'aucun des moyens soulevés par la requérante n'est fondé.
II. Par une requête et des mémoires, enregistrés les 13 juillet 2023, 15 janvier et 14 février 2024 (ce dernier n'ayant pas été communiqué), sous le n° 23NT02121, la commune de Saint-Lunaire, représentée par Me Rouhaud, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes en tant qu'il a annulé l'arrêté du maire de Saint-Lunaire du 17 septembre 2021 portant permis de construire ;
2°) de rejeter les demandes présentées devant le tribunal administratif par MM. K... et D... et par l'association de Protection du Goulet et autres ;
3°) à titre subsidiaire, de surseoir à statuer en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme pour permettre la régularisation du permis de construire contesté ;
4°) de mettre à la charge solidaire de MM. K... et D... et de l'association de Protection du Goulet et autres le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à tort que les premiers juges n'ont pas mis en œuvre les dispositions des articles L. 600-5 et L. 600-5-1 du code de l'urbanisme ;
- l'arrêté du 17 septembre 2021 contesté ne méconnaît pas les dispositions de l'article UE 11 du règlement du plan local d'urbanisme de Saint-Lunaire.
Par un mémoire en défense, enregistré le 26 octobre 2023, l'association de Protection du Goulet, la SCI du Pas Saint-Martin, M. B... I..., M. F... H..., Mme A... L... et M. et Mme C..., représentés par Me Busson, concluent au rejet de la requête et demandent à la cour de mettre à la charge de la commune de Saint-Lunaire le versement de la somme globale de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent qu'aucun des moyens soulevés par la requérante n'est fondé.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 janvier 2024, M. J... K... et M. G... D..., représentés par Me Collet, concluent au rejet de la requête et demandent à la cour de mettre à la charge de la commune de Saint-Lunaire et de la SCCV Saint-Lunaire le versement à M. K..., d'une part, et à M. D..., d'autre part, de la somme de 2 500 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent qu'aucun des moyens soulevés par la requérante n'est fondé.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Ody,
- les conclusions de M. Frank, rapporteur public,
- les observations de Me Collet, représentant MM. K... et D..., celles de Me Busson, représentant l'association de Protection du Goulet et autres et celles de Me Vautier, substituant Me Rouhaud, représentant la commune de Saint-Lunaire.
Considérant ce qui suit :
1. Par un jugement du 15 mai 2023, le tribunal administratif de Rennes a annulé, à la demande de M. K... et M. D..., d'une part, et de l'Association de protection du Goulet, la SCI Le Pas Saint-Martin, M. I..., M. H..., Mme L..., M. et Mme C..., d'autre part, l'arrêté du 17 septembre 2021 par laquelle le maire de Saint-Lunaire a délivré à la SCCV Saint-Lunaire un permis de construire une résidence services pour personnes âgées comportant quatre-vingt-cinq logements, sur un terrain situé boulevard de la Plage et a rejeté le surplus des demandes. La SCCV Saint-Lunaire, d'une part, et la commune de Saint-Lunaire, d'autre part, relèvent appel de ce jugement en tant que le tribunal administratif de Nantes a annulé le permis de construire délivré le 17 septembre 2021.
2. Les deux requêtes susvisées sont dirigées contre le même jugement du tribunal administratif de Rennes du 15 mai 2023. Il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la recevabilité des demandes de première instance :
3. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction en vigueur à la date de l'arrêté attaqué : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation ".
4. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Il appartient ensuite au juge de l'excès de pouvoir de former sa conviction sur la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction. Enfin, une requête collective tendant à l'annulation d'un permis de construire et présentée par plusieurs requérants est recevable dès lors qu'un des signataires de cette demande a intérêt à l'annulation de la décision attaquée.
5. D'une part, il ressort des pièces du dossier que M. D... et M. K... sont chacun propriétaires d'un terrain situé rue du Goulet, sur lesquels sont implantées leurs maisons d'habitation. Ces terrains, situés à une centaine de mètres de la parcelle d'assiette du projet, sont séparés de celle-ci par l'estran du Goulet. Il n'est pas sérieusement contesté qu'ils auront une vue directe sur le bâtiment projeté, d'une hauteur en " R+2+C " et d'un linéaire de plus de quatre-vingt-dix mètres le long de la rive opposée du Goulet. L'implantation du futur immeuble aura également une incidence sur les vues dont ils disposent, depuis leurs propriétés, sur le centre-bourg de Saint-Lunaire, qui présente des qualités patrimoniales et esthétiques. Dans ces conditions, les travaux projetés sont susceptibles d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de leurs biens respectifs.
6. D'autre part, il ressort des pièces du dossier, notamment des statuts de l'association de Protection du Goulet créée le 30 décembre 2017 et déclarée à la sous-préfecture de Saint-Malo le 4 janvier 2018, que son objet est la " protection de la nature et en particulier de la zone remarquable naturelle dite " du Goulet ", zone située à Saint-Lunaire, à l'entrée de la ville en venant de Dinard sur le domaine maritime et ses abords où la mer vient à marée haute en grande marée et servant de port d'échouage, estuaire maritime d'une grande richesse floristique et faunistique ". Dès lors que le projet contesté porte sur la construction d'une construction, d'une surface de plancher de 6 190 m², implantée à moins de six mètres du rivage du Goulet et le long de cet estran, l'association justifie d'un intérêt à agir à l'encontre du permis de construire du 17 septembre 2021 délivré par le maire de Saint-Lunaire.
7. S'agissant de la SCI Le Pas Saint-Martin, de M. I..., de M. H... et de Mme L..., il ressort des pièces du dossier que les intéressés ont produit devant le tribunal administratif des titres de propriété et des avis de taxes foncières permettant de justifier qu'ils sont propriétaires de biens immobiliers situés boulevard de la Plage à Saint-Lunaire. La SCI Le Pas Saint-Martin et M. I... sont voisins immédiats du projet litigieux, leurs propriétés se trouvant de part et d'autre du terrain d'assiette du projet. Si M. H... et Mme L... sont plus éloignés, leurs propriétés se situent toutefois à quelques dizaines de mètres du projet et auront des vues directes sur le futur immeuble qui présente des dimensions importantes. Dans ces conditions, ces requérants justifient d'un intérêt leur donnant qualité à agir.
8. S'agissant enfin de M. et Mme C..., le tribunal administratif de Rennes les a déclarés irrecevables à contester le permis de construire en litige, faute pour les intéressés de satisfaire à l'obligation, instituée par l'article R. 600-4 du code de l'urbanisme, de produire des actes de nature à établir le caractère régulier de l'occupation ou de la détention de leur bien. Les époux C... ne contestent pas l'irrecevabilité qui leur a été opposée par les premiers juges.
9. Il résulte de ce qui précède que la SCCV Saint-Lunaire n'est pas fondée à soutenir que les demandes de première instance n'étaient pas recevables.
En ce qui concerne le moyen retenu par les premiers juges pour annuler l'arrêté du maire de Saint-Lunaire du 17 septembre 2021 :
10. Aux termes de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales ". Aux termes de l'article UE 11 du règlement du plan local d'urbanisme de Saint-Lunaire applicable aux parcelles d'assiette du projet : " 11.1 Tout projet de construction devra présenter un volume, une implantation et un aspect satisfaisants, permettant une bonne intégration dans l'environnement tout en tenant compte du site général dans lequel il s'inscrit et notamment la végétation existante et les constructions voisines qui y sont implantées. / 11.2 La qualité recherchée vise aussi bien les volumes, y compris la forme de la toiture, que les percements, les couleurs, la nature des matériaux apparents et les détails architecturaux. (...) ". Ces dernières dispositions ont le même objet que celles de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme et posent des exigences qui ne sont pas moindres. Dès lors, c'est par rapport aux dispositions du règlement du plan local d'urbanisme que le juge doit apprécier, au terme d'un contrôle normal, la légalité de la décision attaquée.
11. Pour rechercher l'existence d'une atteinte à un site ou un paysage propre à fonder le refus opposé à une demande d'autorisation de construire ou les prescriptions spéciales accompagnant la délivrance de ladite autorisation, il appartient à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'apprécier, dans un premier temps, la qualité du site sur lequel la construction est projetée et d'évaluer, dans un second temps, l'impact que cette construction, compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur ce site. Il est exclu de procéder, dans le second temps du raisonnement, pour apprécier la légalité du permis de construire délivré, à une balance d'intérêts divers en présence, autres que ceux visés par l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme et le plan local d'urbanisme de la commune.
12. D'une part, il ressort des pièces du dossier que le centre-bourg de la commune de Saint-Lunaire et en particulier le terrain d'assiette du projet, sont inclus tant dans le périmètre de protection de l'ancienne église de Saint-Lunaire, datant du 11ème siècle et classée au titre des monuments historiques, que dans le périmètre de l'aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine (AVAP) approuvée par délibération du conseil municipal du 2 mars 2015 et annexée au plan local d'urbanisme de Saint-Lunaire par arrêté du 3 mars 2015. Le projet est situé dans un paysage urbain d'un intérêt certain, caractérisé par la présence, principalement, de maisons individuelles en R+1+combles, dont de très nombreuses maisons de caractère en pierres. A moins de cent mètres de la bordure nord du terrain d'assiette du projet, se trouve un bâtiment ancien d'architecture traditionnelle en granit et d'un gabarit plus imposant d'une hauteur en R + 3, accueillant le centre communal d'action sociale de Saint-Lunaire et un centre de vacances. Ce bâtiment ancien ainsi que la nouvelle église de Saint-Lunaire, construite dans les années 1880, sont répertoriés par le règlement du plan local d'urbanisme communal au titre du " patrimoine architectural remarquable ". Par ailleurs, à l'exception des berges situées sur le terrain d'assiette du projet, l'estran du Goulet et la quasi-totalité de ses berges sont protégés par le plan local d'urbanisme de Saint-Lunaire au titre des espaces remarquables du littoral. Il ressort des plans et des photographies produits par les parties que le lieu, au sein duquel se situent les parcelles d'assiette du projet, présente un intérêt remarquable, de par la qualité du patrimoine, des paysages et des sites naturels environnants.
13. D'autre part, la construction projetée est implantée, pour une grande partie, à seulement quelques mètres de la berge du Goulet. Elle constitue un seul ensemble d'une surface de plancher de 6 190 m² et se compose de deux parties parallèles à l'estran et de trois ailes perpendiculaires, dont une à chaque extrémité et une au centre. La construction présentera, parallèlement à cet estran, une longueur totale de façade de plus de quatre-vingt-dix mètres et les trois ailes perpendiculaires au rivage représentent à elles seules une longueur de façade de plus de quarante-cinq mètres. De plus, deux des ailes perpendiculaires s'avancent vers l'estran sur plus d'une dizaine de mètres par rapport aux parties du bâtiment implantées parallèlement au rivage. En outre, la construction présente une hauteur en R + 1 + combles et en R + 2 + combles, comprise entre neuf et douze mètres par rapport au niveau du terrain après les travaux. Elle surplombera l'estran et ses berges de plus d'une quinzaine de mètres. Dès lors, la construction projetée, quand bien même elle comprend des hauteurs différentes et s'implante plus ou moins en retrait du rivage, par ses dimensions imposantes et la densification significative de l'urbanisation qu'elle représente, est de nature à entrainer un effet de masse le long de l'estran du Goulet contrastant de manière importante avec la configuration des lieux. L'implantation du futur immeuble empêchera, par ailleurs, les vues jusque-là préservées sur le centre-bourg de Saint-Lunaire, qui présente des qualités patrimoniales et esthétiques certaines, depuis l'autre rive de l'estran du Goulet. Par conséquent, en dépit de l'avis favorable de l'ABF, le projet litigieux ne permettra pas une bonne intégration dans son environnement au regard du site général dans lequel il s'inscrit, notamment par rapport à la végétation existante, à la berge et aux constructions voisines. Il en résulte que par sa situation, ses dimensions et ses caractéristiques, ce projet est de nature à porter significativement atteinte au caractère et à l'intérêt des lieux avoisinants ainsi qu'aux paysages urbains et naturels respectivement du centre-bourg de la commune de Saint-Lunaire et de l'estran du Goulet.
14. Il résulte de ce qui précède que c'est par une inexacte application des dispositions de de l'article UE 11 du règlement du plan local d'urbanisme que le maire de Saint-Lunaire a délivré le permis de construire sollicité.
Sur l'application des article L. 600-5 et L. 600-5-1 du code de justice administrative :
15. Aux termes de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en œuvre de l'article L. 600-5-1, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice n'affectant qu'une partie du projet peut être régularisé, limite à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce et, le cas échéant, fixe le délai dans lequel le titulaire de l'autorisation pourra en demander la régularisation, même après l'achèvement des travaux. Le refus par le juge de faire droit à une demande d'annulation partielle est motivé. ". Aux termes de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en œuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis (...) d'aménager, (...) estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. ". Il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux parlementaires, que lorsque le ou les vices affectant la légalité de l'autorisation d'urbanisme dont l'annulation est demandée, sont susceptibles d'être régularisés, le juge doit surseoir à statuer sur les conclusions dont il est saisi contre cette autorisation. Il invite au préalable les parties à présenter leurs observations sur la possibilité de régulariser le ou les vices affectant la légalité de l'autorisation d'urbanisme. Le juge n'est toutefois pas tenu de surseoir à statuer, d'une part, si les conditions de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme sont réunies et qu'il fait le choix d'y recourir, d'autre part, si le bénéficiaire de l'autorisation lui a indiqué qu'il ne souhaitait pas bénéficier d'une mesure de régularisation. Un vice entachant le bien-fondé de l'autorisation d'urbanisme est susceptible d'être régularisé, même si cette régularisation implique de revoir l'économie générale du projet en cause, dès lors que les règles d'urbanisme en vigueur à la date à laquelle le juge statue permettent une mesure de régularisation qui n'implique pas d'apporter à ce projet un bouleversement tel qu'il en changerait la nature même.
16. Le vice mentionné aux points 12 à 14, tiré de ce que le permis de construire contesté méconnaît les dispositions de l'article UE 11 du règlement du plan local d'urbanisme et porte atteinte au site naturel et urbain dans lequel il s'inscrit, d'un intérêt remarquable, n'est pas relatif à une partie identifiable du projet. Eu égard à la situation, à la dimension et aux caractéristiques du projet, la régularisation de ce vice implique de revoir l'économie générale du projet et d'y apporter un bouleversement tel qu'il en changerait la nature même. Dans ces conditions, et contrairement à ce que soutiennent les requérants, la cour ne peut faire application, ni des dispositions de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme, ni de celles de l'article L. 600-5-1 du même code.
17. Il résulte de tout ce qui précède que la SCCV Saint-Lunaire et la commune de Saint-Lunaire ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a annulé l'arrêté du 17 septembre 2021 du maire de Saint-Lunaire.
Sur les frais liés au litige :
18. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'association de Protection du Goulet, la SCI du Pas Saint-Martin, M. I..., M. H..., Mme L..., M. et Mme C..., M. K... et M. D..., qui n'ont pas la qualité de parties perdantes dans la présente instance, le versement d'une somme au titre des frais exposés par la SCCV Saint-Lunaire et la commune de Saint-Lunaire et non compris dans les dépens.
19. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Saint-Lunaire, d'une part, le versement à l'association de Protection du Goulet, la SCI du Pas Saint-Martin, M. I..., M. H... et Mme L... d'une somme globale de 800 euros et, d'autre part, le versement à M. K... et M. D... d'une somme globale de 800 euros, au titre des mêmes frais.
20. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SCCV Saint-Lunaire, d'une part, le versement à l'association de Protection du Goulet, la SCI du Pas Saint-Martin, M. I..., M. H... et Mme L... d'une somme globale de 800 euros et, d'autre part, le versement à M. K... et M. D... d'une somme globale de 800 euros, au titre des mêmes frais.
D E C I D E :
Article 1er : Les requêtes de la SCCV Saint-Lunaire et de la commune de Saint-Lunaire sont rejetées.
Article 2 : La commune de Saint-Lunaire versera d'une part, à l'association de Protection du Goulet, la SCI du Pas Saint-Martin, M. I..., M. H... et Mme L... une somme globale de 800 euros et, d'autre part, à M. K... et M. D... une somme globale de 800 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La SCCV Saint-Lunaire versera d'une part, à l'association de Protection du Goulet, la SCI du Pas Saint-Martin, M. I..., M. H... et Mme L... une somme globale de 800 euros et, d'autre part, à M. K... et M. D... une somme globale de 800 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Saint-Lunaire, à la SCCV Saint-Lunaire, à M. J... K..., à M. G... D... et à l'association de Protection du Goulet, représentant unique, pour l'ensemble de ses co-défendeurs.
Copie en sera adressée pour information au préfet de la région Bretagne, au préfet d'Ille-et-Vilaine, et au Pôle d'équilibre territorial et rural du pays de Saint-Malo.
Délibéré après l'audience du 22 mai 2025, à laquelle siégeaient :
- M. Degommier, président de chambre,
- M. Rivas, président assesseur,
- Mme Ody, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 juin 2025.
La rapporteure,
C. ODY
Le président,
S. DEGOMMIER
Le greffier,
C. GOY
La République mande et ordonne au préfet d'Ille-et-Vilaine en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°s 23NT02076, 23NT02121