Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D... F... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 24 octobre 2024 par lequel le préfet d'Ille-et-Vilaine l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an ainsi que l'arrêté du même jour par lequel le préfet d'Ille-et-Vilaine l'a assigné à résidence.
Par un jugement n°2406519 du 19 novembre 2024, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 17 décembre 2024, M. F..., représenté par Me Jeanmougin, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 19 novembre 2024 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 24 octobre 2024 par lequel le préfet d'Ille-et-Vilaine l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an ;
3°) d'enjoindre au préfet d'Ille-et-Vilaine de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou, à défaut, de réexaminer son droit au séjour dans un délai de deux mois suivant l'arrêt à intervenir et de lui délivrer dans un délai de 8 jours suivant ce même arrêt une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est entaché d'erreurs d'appréciation ;
- il ne pouvait être éloigné dans la mesure où il remplit les conditions pour bénéficier de plein droit d'un titre de séjour en sa qualité de père d'un enfant français mineur sur le fondement de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il dispose de liens personnels et familiaux avec la France qui justifient que lui soit délivrée de plein droit une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant et est entaché et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision d'interdiction de retour sur le territoire français méconnaît les articles L. 612-6 et L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle viole l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Le préfet d'Ille-et-Vilaine n'a pas produit de mémoire en défense.
M. F... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 24 mars 2025.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale des droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code civil ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Marion a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. F..., ressortissant géorgien, né le 3 décembre 1993, est, selon ses déclarations, entré en France irrégulièrement en mars 2020. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 9 juillet 2021 confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 27 octobre 2021, devenue définitive. Par un arrêté du 5 novembre 2021, dont la légalité a été confirmée par un jugement du tribunal administratif de Rennes du 30 décembre 2021 et une ordonnance de la cour administrative d'appel de Nantes du 7 octobre 2022, le préfet d'Ille-et-Vilaine l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de 30 jours. En dépit de cette mesure d'éloignement, M. F... s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français et a travaillé sous couvert d'une fausse carte d'identité bulgare pour la société Celtic transports à Rennes. Il a été interpelé dans le cadre d'un contrôle d'identité. Après avoir été auditionné, M. F... a été destinataire d'un arrêté du 24 octobre 2024 portant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de destination et lui interdisant de retourner sur le territoire français pendant un an. Par un arrêté du même jour, le préfet d'Ille-et-Vilaine l'a assigné à résidence pour une durée de 45 jours. M. F... fait appel du jugement du 19 novembre 2024 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande d'annulation des arrêtés du 24 octobre 2024.
2. Eu égard à l'office du juge d'appel, qui est appelé à statuer, d'une part, sur la régularité de la décision des premiers juges et, d'autre part, sur le litige qui a été porté devant eux, le moyen tiré de ce que le tribunal administratif aurait commis des erreurs d'appréciation est inopérant.
Sur les conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français :
3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France et qui établit contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil, depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 " et de l'article L. 611-1 du même code : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants :... 4° La reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou il ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 542-1 et L. 542-2, à moins qu'il ne soit titulaire de l'un des documents mentionnés au 3° " .
4. M. F... se prévaut de sa qualité de père du jeune C..., né le 2 avril 2023 à Rennes de sa relation avec Mme A... E..., une compatriote qui a obtenu la nationalité française par décret du 26 août 2024 et de la nationalité française de son fils C..., acquise en vertu de l'article 22-1 du code civil par l'effet collectif de la naturalisation. Il ressort des pièces du dossier que si M. F... soutient qu'il contribue à l'entretien de son fils depuis sa naissance en dépit de la séparation avec sa mère, il produit pour preuve de cette contribution des relevés de comptes depuis le 1er décembre 2023 comportant des achats en pharmacie, boulangerie, produits alimentaires et hygiène et crèche qui auraient été exposés à Lallié, soit au domicile de son fils C... ainsi qu' une capture d'écran d'un téléphone portable laissant apparaître deux paiements par carte bancaire et deux virements non identifiés. Ces documents ne permettent pas de s'assurer que M. F... contribue effectivement à l'entretien de son enfant depuis la naissance de ce dernier au sens des dispositions de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, M. F... ne remplit pas les conditions pour se voir délivrer un titre de plein-droit sur le fondement de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par voie de conséquence, le préfet d'Ille-et-Vilaine pouvait légalement l'obliger à quitter le territoire français en se fondant sur les dispositions du 4° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1./Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine./L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. ".
6. M. F... se prévaut de ses qualités de père d'un enfant français et d'aidant familial de son propre père, M. B... F..., diabétique et insuffisant rénal. Toutefois, le requérant a déclaré être séparé de la mère de son enfant, Mme A... E..., depuis un an, ce qui est confirmé par la déclaration faite par cette dernière à la caisse d'allocations familiales d'Ille-et-Vilaine pour bénéficier du revenu de solidarité active en qualité de mère isolée. En outre, le requérant n'établit pas que son père, titulaire d'une carte de résident, ne pourrait bénéficier d'une autre aide à la personne alors que ce dernier n'est pas isolé puisqu'il vit en couple avec son épouse également titulaire d'une carte de résident. Par ailleurs, il est constant que M. F... qui séjourne en France depuis au plus tôt mars 2020 a déjà fait l'objet d'une décision de refus d'asile devenue définitive et d'une obligation de quitter le territoire français le 27 octobre 2021 dont la légalité a été confirmée par le tribunal et la cour et à laquelle il n'a pas déféré. Enfin, le requérant a travaillé comme chauffeur routier salarié dans une entreprise de transport en faisant usage de faux documents d'identité bulgares. Par suite, il n'établit pas avoir respecté les valeurs de la République ni avoir lié des liens particuliers avec la France durant son séjour sur le territoire national. Par suite, M. F... ne remplit pas les conditions pour se voir délivrer un titre de plein droit sur le fondement de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
7. En troisième lieu, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté par les mêmes motifs que ceux exposés par le tribunal administratif de Rennes au point 10 du jugement attaqué.
8. En quatrième lieu, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 doit être écarté par les mêmes motifs que ceux exposés par le tribunal administratif de Rennes au point 12 du jugement attaqué.
Sur les conclusions dirigées contre la décision d'interdiction de retour sur le territoire français :
9. En premier lieu, le moyen tiré de la violation des articles L. 612-6 et L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté par les mêmes motifs que ceux exposés par le tribunal administratif de Rennes au point 17 du jugement attaqué.
10. En second lieu, les moyens tirés de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ainsi que de l'existence d'une erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés par les mêmes motifs que ceux exposés aux points 10 et 12 du jugement attaqué.
11. Il résulte de ce qui précède, que M. F... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions aux fins d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. F... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... F... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée, pour information, au préfet d'Ille-et-Vilaine.
Délibéré après l'audience du 15 mai 2025, à laquelle siégeaient :
- Mme Brisson, présidente de chambre,
- M. Vergne, président assesseur,
- Mme Marion, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 juin 2025.
La rapporteure,
I. MARION
La présidente,
C. BRISSON
Le greffier,
Y. MARQUIS
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 24NT03525