Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... D..., Mme A... D... et Mme B... D... ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision implicite née le 13 novembre 2021 du maire de Perros-Guirec (Côtes-d'Armor) refusant de procéder à la révision du plan local d'urbanisme communal.
Par un jugement n° 2200167 du 26 juin 2023, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 22 août 2023, M. C... D..., Mme A... D... et Mme B... D..., représentés par Me Fallourd, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 26 juin 2023 ;
2°) d'annuler la décision implicite par laquelle le maire de Perros-Guirec a refusé de procéder à la révision du plan local d'urbanisme ;
3°) d'enjoindre à la commune de Perros-Guirec de modifier son plan local d'urbanisme en classant la parcelle cadastrée section AM n° 234 en zone constructible ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Perros-Guirec le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que le classement de leur parcelle en zone N au règlement graphique du plan local d'urbanisme est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ; une vaste zone à urbaniser s'étend juste au sud de la parcelle, une zone déjà urbanisée est présente au nord, à l'ouest et à l'est ; la parcelle est déjà construite ; la parcelle était, avant la révision du plan local d'urbanisme, classée en zone UC ; le projet d'aménagement et de développement durables prévoit la densification de l'urbanisation notamment sur leur parcelle.
Par un mémoire en défense, enregistré le 18 novembre 2024, la communauté d'agglomération Lannion Trégor Communauté, représentée par Me Gourvennec, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge des consorts D... une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête d'appel n'est pas recevable ; elle ne contient aucun moyen d'appel mettant en exergue les erreurs qu'auraient commis les premiers juges ;
- les moyens soulevés par M. D... et autres ne sont pas fondés.
La requête et le mémoire enregistrés dans la présente instance ont été communiqués à la commune de Perros-Guirec qui n'a pas produit d'observations.
Par des courriers des 28 avril et 30 avril 2025, les parties ont été informées que la cour était susceptible de relever d'office un moyen d'ordre public tiré de l'incompétence du maire de Perros-Guirec pour rejeter la demande des consorts D... dès lors que la compétence en matière d'élaboration, de révision et de suivi de ce plan local d'urbanisme a été transférée à la communauté d'agglomération Lannion Trégor Communauté en 2017.
Par des courriers des 28 avril et 30 avril 2025, les parties ont été informées que la cour était susceptible d'enjoindre d'office, en application de l'article R. 611-7-3 du code de justice administrative, à la communauté d'agglomération Lannion Trégor Communauté, de réexaminer la demande des consorts D... dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir.
Par un mémoire enregistré le 29 avril 2025, la communauté d'agglomération Lannion Trégor Communauté a produit des observations en réponse à ces courriers.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Dubost,
- les conclusions de M. Frank, rapporteur public,
- et les observations de Me Tremouilles, substituant Me Gourvennec, représentant la communauté d'agglomération Lannion Trégor Communauté.
Considérant ce qui suit :
1. Les consorts D... ont demandé le 13 septembre 2021 à la commune de Perros-Guirec (Côtes-d'Armor) de modifier le classement en zone N, au règlement graphique du plan local d'urbanisme, de la parcelle cadastrée section AM n° 234 afin de la rendre constructible. Cette demande a été implicitement rejetée par la communauté d'agglomération Lannion Trégor Communauté à laquelle cette demande a été transmise, cette dernière étant compétente en matière d'élaboration de révision et de suivi de ce plan local d'urbanisme depuis 2017. Les consorts D... ont alors demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler cette décision. Ils relèvent appel du jugement du 26 juin 2023 par lequel ce tribunal a rejeté leur demande.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Saisi de conclusions aux fins d'annulation du refus d'abroger un acte réglementaire, le juge de l'excès de pouvoir est conduit à apprécier la légalité de l'acte réglementaire dont l'abrogation a été demandée au regard des règles applicables à la date de sa décision.
3. Aux termes de l'article L. 151-8 du code de l'urbanisme : " Le règlement fixe, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols permettant d'atteindre les objectifs mentionnés aux articles L. 101-1 à L. 101-3. ". Aux termes de l'article L. 151-9 du code de l'urbanisme : " Le règlement délimite les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger. / Il peut préciser l'affectation des sols selon les usages principaux qui peuvent en être faits ou la nature des activités qui peuvent y être exercées et également prévoir l'interdiction de construire. / Il peut définir, en fonction des situations locales, les règles concernant la destination et la nature des constructions autorisées. ". Enfin, aux termes des dispositions de l'article R. 151-24 du même code : " Les zones naturelles et forestières sont dites " zones N ". Peuvent être classés en zone naturelle et forestière, les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison : / 1° Soit de la qualité des sites, milieux et espaces naturels, des paysages et de leur intérêt, notamment du point de vue esthétique, historique ou écologique ; / 2° Soit de l'existence d'une exploitation forestière ; / 3° Soit de leur caractère d'espaces naturels ; / 4° Soit de la nécessité de préserver ou restaurer les ressources naturelles ; / 5° Soit de la nécessité de prévenir les risques notamment d'expansion des crues. ".
4. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Ils peuvent être amenés, à cet effet, à classer en zone naturelle, pour les motifs énoncés à l'article R. 151-24, un secteur qu'ils entendent soustraire, pour l'avenir, à l'urbanisation. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.
5. Il ressort du projet d'aménagement et de développement durables (PADD) du plan local d'urbanisme (PLU) contesté qu'il poursuit les objectifs d'un développement urbain équilibré en mettant en place " une gestion économe de l'espace " et la lutte contre l'étalement urbain par la densification de l'urbanisation au sein de l'enveloppe urbaine ainsi que la protection et la mise en valeur de l'environnement notamment en " préservant et amplifiant les structures paysagères existantes ", dans le but de maintenir la biodiversité et les écosystèmes.
6. La parcelle cadastrée section AM n° 234, située au sein de l'enveloppe urbaine définie par le PADD, a été classée en zone N au règlement graphique du PLU. Cette parcelle, d'une superficie d'environ 2 700 m², végétalisée et supportant seulement un blockhaus, est bordée par des constructions sur ses côtés nord, est et ouest mais s'ouvre au sud sur un important espace naturel et agricole partiellement classé en zone 1AUc destiné à une urbanisation future. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que l'évaluation environnementale, réalisée lors de l'élaboration du PLU, identifie sur les parcelles cadastrées section AM nos 233 et 234, une colonie de chauve-souris d'intérêt communautaire dite " Grand Rhinolophe ". Cette évaluation a préconisé en conséquence le maintien à l'état naturel de ces parcelles, pour partie ou en totalité, ainsi que le maintien de leur connectivité avec la partie sud de la zone à urbaniser afin de maintenir et protéger les gites de cette espèce. Ainsi, si une zone 1AUc est prévue par le PLU, au sud de la parcelle en cause, pour permettre, dans le cadre d'une opération d'aménagement, la création d'une cinquantaine de logements, il ressort de l'orientation d'aménagement et de programmation du secteur, dit quartier de Kroas Lescop, que celle-ci prévoit des mesures destinées à préserver cette espèce notamment par la protection matérielle du site abritant les chiroptères, la réduction de l'éclairage et le renforcement des connexions écologiques. Par ailleurs, la circonstance alléguée selon laquelle la parcelle était antérieurement classée en zone UC du document d'urbanisme n'est pas de nature à établir l'erreur manifeste dont se prévalent les requérants. Dans ces conditions, compte tenu des partis d'aménagement retenus et de la localisation de la parcelle des requérants, en dépit de ce qu'elle est située aux abords d'une zone urbanisée et de ce que le PADD poursuit également un objectif de densification de l'urbanisation, son classement en zone N du PLU n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article R. 151-24 du code de l'urbanisme.
7. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée en défense, que M. C... D..., Mme A... D... et Mme B... D... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
8. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. D... et autres, n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions à fin d'injonction présentées par les requérants doivent être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Perros-Guirec qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par les consorts D... au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de M. C... D..., de Mme A... D... et de Mme B... D... une somme globale de 1 500 euros à verser à la communauté d'agglomération Lannion Trégor Communauté au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. D... et autres est rejetée.
Article 2 : M. C... D..., Mme A... D... et Mme B... D... verseront globalement à la communauté d'agglomération Lannion Trégor Communauté une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D..., premier requérant dénommé en application de l'article R.751-3 du code de justice administrative, à la communauté d'agglomération Lannion Trégor Communauté et à la commune de Perros-Guirec.
Délibéré après l'audience du 5 mai 2025, à laquelle siégeaient :
- M. Rivas, président de la formation de jugement,
- Mme Ody, première conseillère,
- Mme Dubost, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 mai 2025.
La rapporteure,
A.-M. DUBOST
Le président de
la formation de jugement,
C. RIVAS
La greffière,
S. PIERODÉ
La République mande et ordonne au préfet des Côtes-d'Armor en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23NT02532