Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision du 19 décembre 2023 par laquelle le préfet de l'Orne a refusé de lui délivrer un titre de séjour.
Par un jugement n° 2401015 du 13 septembre 2024, le tribunal administratif de Caen a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 15 octobre 2024, M. A..., représenté par Me Abdou-Saleye, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 13 septembre 2024 ;
2°) d'annuler la décision du 19 décembre 2023 du préfet de l'Orne ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Orne de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou de réexaminer sa situation administrative, dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 200 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le préfet de l'Orne n'a pas examiné précisément sa situation personnelle ; il n'établit pas avoir demandé et obtenu le transfert de son dossier administratif ;
- le préfet de l'Orne a méconnu les dispositions de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant et a commis une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle.
Par un mémoire en défense, enregistré le 17 décembre 2024, le préfet de l'Orne conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens du requérant ne sont pas fondés.
Par une décision du 10 janvier 2025, la demande d'aide juridictionnelle de M. A... a été rejetée.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale des droits de l'enfant ;
- le code civil ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Derlange, président assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant sénégalais, né le 17 juillet 1992, a demandé le 7 décembre 2023 la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par une décision du 19 décembre 2023, le préfet de l'Orne a rejeté sa demande. Par un jugement du 13 septembre 2024, le tribunal administratif de Caen a rejeté le recours de M. A... à l'encontre de cette décision. M. A... relève appel de ce jugement.
2. En premier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier, que le préfet de l'Orne n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation personnelle de l'intéressé, notamment faute d'avoir demandé le transfert de son dossier administratif. Par suite, le moyen tiré du défaut d'examen de la situation de M. A... doit être écarté.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France et qui établit contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil, depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. ".
4. M. A... est le père d'un enfant français, né le 6 octobre 2017, élevé par sa mère dont il est séparé depuis janvier 2019. Toutefois, M. A... n'établit pas qu'il contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de cet enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil, depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, ses allégations selon lesquelles la mère de l'enfant y ferait obstacle n'étant pas crédibles, notamment au regard de son obligation de payer une contribution à son entretien et à son éducation de 200 euros par mois, prononcée par jugement du tribunal de grande instance de Coutances du 8 novembre 2019. Dans ces conditions, il n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le préfet de l'Orne a refusé de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
6. Si M. A... soutient qu'il est entré sur le territoire en 2001, il n'est établi de manière probante qu'il réside en France que depuis l'année 2013. Il ressort des pièces du dossier que sa mère, a acquis la nationalité française et est mariée avec un ressortissant français. Toutefois, M. A... n'établit pas être dépourvu de toute attache au Sénégal. Il ressort des pièces du dossier qu'il a été condamné à deux mois d'emprisonnement en 2012 pour destruction d'un bien appartenant à autrui, à six mois dont trois mois avec sursis en 2013, pour violences suivies d'incapacité n'excédant pas hui jours par une personne étant ou ayant été conjoint, concubin ou partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité, à huit mois en 2014, pour violence commise en réunion suivie d'incapacité supérieure à huit jour et violence commise en réunion sans incapacité, à deux mois d'emprisonnement en 2015, pour détention non autorisée de stupéfiants et remise ou sortie irrégulière de correspondance, somme d'argent ou objet de détenu, à neuf mois d'emprisonnement en 2016, pour violences commises en réunion suivies d'incapacité supérieure à huit jour, à un an et trois mois d'emprisonnement avec sursis assorti d'une mise à l'épreuve de deux ans, en 2019, pour des faits de violence sans incapacité par une personne étant ou ayant été conjoint, concubin ou partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité, à quatre mois d'emprisonnement, en 2019 également pour des faits de dégradation ou détérioration de bien destiné à l'utilité ou la décoration publique et à quatre mois d'emprisonnement, en 2020, pour violence avec usage ou menace d'une arme sans incapacité, en récidive. En outre, ainsi qu'il a été dit au point 4, M. A... ne contribue pas à l'entretien et l'éducation de son enfant français. Enfin, s'il se prévaut de sa relation avec une ressortissante française avec laquelle il s'est marié au Sénégal en février 2023 et aurait eu un enfant, il ressort des pièces du dossier que cette relation est récente. Dans ces conditions, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle de l'intéressé doivent être écartés.
7. En quatrième et dernier lieu, aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ".
8. Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Elles sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation.
9. Compte tenu de ce qui a été dit sur l'absence d'implication de M. A... dans l'entretien et l'éducation de son enfant français et de son passif pénal, le refus du préfet de l'Orne d'accorder un titre de séjour à M. A... ne permet pas de caractériser une atteinte suffisamment grave à l'intérêt supérieur de cet enfant relevant d'une méconnaissance des stipulations précitées du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 19 décembre 2023 du préfet de l'Orne.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
11. Le présent arrêt, qui rejette la requête de M. A..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions de l'intéressé aux fins d'injonction doivent être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
12. Les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que le conseil de M. A... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Me Abdou-Saleye et au ministre d'État, ministre de l'intérieur.
Une copie en sera transmise, pour information, au préfet de l'Orne.
Délibéré après l'audience du 29 avril 2025, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- M. Derlange, président assesseur,
- Mme Picquet, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 mai 2025.
Le rapporteur,
S. DERLANGE
Le président,
L. LAINÉ
Le greffier,
C. WOLF
La République mande et ordonne au ministre d'État, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 24NT02925