Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. E... D... et M. G... Q..., Mme O... M..., M. B... I..., M. et Mme F... et J... P..., M. et Mme K... et L... H..., M. et Mme A... et C... N... et l'association " Comité de protection du cadre de vie de Bourg-des-Comptes " ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 30 décembre 2021 par lequel le préfet d'Ille-et-Vilaine a procédé à l'enregistrement d'une installation de méthanisation exploitée par la société Agri-Bioénergies au lieu-dit Le Vaugouët, sur le territoire de la commune de Bourg-des-Comptes.
Par un jugement n° 2202300 du 28 mars 2024, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 28 mai et 6 décembre 2024, M. E... D... et M. G... Q..., Mme O... M..., M. B... I..., M. F... P..., M. et Mme K... et L... H..., M. et Mme A... et C... N... et l'association " Comité de protection du cadre de vie de Bourg-des-Comptes ", représentés par Me Ménard, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet d'Ille-et-Vilaine du 30 décembre 2021 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- le jugement attaqué est entaché d'irrégularités ; il n'est pas établi qu'il comporte les signatures prévues à l'article R. 741-7 du code de justice administrative ; les premiers juges ont dénaturé les pièces du dossier s'agissant de l'analyse des capacités financières de la société Agro-Bioénergies ;
- l'arrêté contesté a été pris en méconnaissance de l'article L. 512-7-2 du code de l'environnement ;
- le dossier d'enregistrement présente des insuffisances et ne respecte pas l'article R. 512-46-4 du code de l'environnement ;
- il a été pris en violation de l'article R. 512-46-12 du code de l'environnement et la population n'a pas reçu une information complète ;
- le projet contesté présente des dangers et inconvénients pour les intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement, concernant la pollution de l'eau, les émissions dans l'air d'odeurs, de gaz et de poussières, les nuisances sonores et la commodité du voisinage et de l'habitat ;
- il méconnaît le principe de précaution énoncé à l'article L. 110-1 du code de l'environnement.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 22 juillet 2024 et 13 février 2025, la société Agri-Bioénergies, représentée par Me Gandet, conclut au rejet de la requête ou, à titre subsidiaire, au prononcé d'un sursis à statuer pour permettre la régularisation de vices éventuels et demande à la cour de mettre à la charge solidaire des requérants le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient qu'aucun des moyens soulevés par les requérants n'est fondé.
Par un mémoire en défense, enregistré le 8 novembre 2024, le ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par les requérants n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Ody,
- les conclusions de M. Frank, rapporteur public,
- les observations de Me Ménard, représentant les requérants et celles de Me Gandet, représentant la société Agri-Bioénergies.
Considérant ce qui suit :
1. M. D... et M. Q..., Mme M..., M. I..., M. P..., M. et Mme H..., M. et Mme N... et l'association " Comité de protection du cadre de vie de Bourg-des-Comptes " relèvent appel du jugement n° 2202300 du 28 mars 2024 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 décembre 2021 par lequel le préfet d'Ille-et-Vilaine a procédé à l'enregistrement d'une installation de méthanisation exploitée par la société Agri-Bioénergies, au lieu-dit Le Vaugouët, sur le territoire de la commune de Bourg-des-Comptes.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience. ".
3. Il ressort des pièces de la procédure que la minute du jugement attaqué comporte l'ensemble des signatures requises par ces dispositions. Par suite, le moyen tiré de ce que ce jugement serait entaché d'une irrégularité, faute d'être revêtu des signatures du président, du rapporteur et du greffier, doit être écarté.
4. En second lieu, eu égard à l'office du juge d'appel, qui est appelé à statuer, d'une part, sur la régularité de la décision des premiers juges et, d'autre part, sur le litige qui a été porté devant eux par l'effet dévolutif de l'appel, le moyen tiré de ce que le tribunal administratif aurait dénaturé les pièces du dossier s'agissant de l'analyse des capacités financières de la société pétitionnaire est inopérant et ne peut qu'être écarté.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
5. Aux termes de l'article L. 181-1 du code de l'environnement : " L'autorisation environnementale, dont le régime est organisé par les dispositions du présent livre ainsi que par les autres dispositions législatives dans les conditions fixées par le présent titre, est applicable aux activités, installations, ouvrages et travaux suivants, lorsqu'ils ne présentent pas un caractère temporaire : / 2° Installations classées pour la protection de l'environnement mentionnées à l'article L. 512-1. / (...) L'autorisation environnementale inclut les équipements, installations et activités figurant dans le projet du pétitionnaire que leur connexité rend nécessaires à ces activités, installations, ouvrages et travaux ou dont la proximité est de nature à en modifier notablement les dangers ou inconvénients ".
6. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'environnement : " Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d'une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation économe des sols naturels, agricoles ou forestiers, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique. (...) ". Aux termes de l'article L. 512-7 du même code : " I. - Sont soumises à autorisation simplifiée, sous la dénomination d'enregistrement, les installations qui présentent des dangers ou inconvénients graves pour les intérêts mentionnés à l'article L. 511-1, lorsque ces dangers et inconvénients peuvent, en principe, eu égard aux caractéristiques des installations et de leur impact potentiel, être prévenus par le respect de prescriptions générales édictées par le ministre chargé des installations classées. / Les activités pouvant, à ce titre, relever du régime d'enregistrement concernent les secteurs ou technologies dont les enjeux environnementaux et les risques sont bien connus, lorsque les installations ne sont soumises ni à la directive 2010/75/ UE du Parlement européen et du Conseil du 24 novembre 2010 relative aux émissions industrielles au titre de son annexe I, ni à une obligation d'évaluation environnementale systématique au titre de l'annexe I de la directive 85/337/ CEE du 27 juin 1985 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement (...) ". En outre, aux termes de l'article L. 512-7-3 du même code : " L'arrêté d'enregistrement est pris par le préfet après avis des conseils municipaux intéressés. / En vue d'assurer la protection des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 et, le cas échéant, à l'article L. 211-1, le préfet peut assortir l'enregistrement de prescriptions particulières complétant ou renforçant les prescriptions générales applicables à l'installation. Dans les limites permises par la protection des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1, ces prescriptions particulières peuvent aussi inclure des aménagements aux prescriptions générales justifiés par les circonstances locales. Dans ces deux cas, le préfet en informe l'exploitant préalablement à la clôture de l'instruction de la demande et consulte la commission départementale consultative compétente. / Le préfet ne peut prendre l'arrêté d'enregistrement que si le demandeur a justifié que les conditions de l'exploitation projetée garantiraient le respect de l'ensemble des prescriptions générales, et éventuellement particulières, applicables. Il prend en compte les capacités techniques et financières que le pétitionnaire entend mettre en œuvre, à même de lui permettre de conduire son projet dans le respect des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 et, le cas échéant, à l'article L. 211-1, et d'être en mesure de satisfaire aux obligations de l'article L. 512-7-6 lors de la cessation d'activité. / Si un permis de construire a été demandé, il peut être accordé mais les travaux ne peuvent être exécutés avant que le préfet ait pris l'arrêté d'enregistrement ". Aux termes enfin de l'article L. 514-6 du même code : " I. - Les décisions prises en application des articles L. 512-7-3 à L. 512-7-5, L. 512-8, L. 512-12, L. 512-13, L. 512-20, L. 513-1, L. 514-4, du I de l'article L. 515-13 et de l'article L. 516-1 sont soumises à un contentieux de pleine juridiction. / Par exception, la compatibilité d'une installation classée avec les dispositions d'un schéma de cohérence territoriale, d'un plan local d'urbanisme, d'un plan d'occupation des sols ou d'une carte communale est appréciée à la date de l'autorisation, de l'enregistrement ou de la déclaration. (...) ".
7. Il résulte de ces dispositions que l'autorisation simplifiée, dénommée également enregistrement, est soumise à un contentieux de pleine juridiction. Il appartient, dès lors, au juge du plein contentieux d'apprécier le respect des règles de procédure régissant la demande d'autorisation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date de délivrance de l'autorisation et celui des règles de fond régissant l'installation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date à laquelle il se prononce, sous réserve du respect des règles d'urbanisme, qui s'apprécie au regard des circonstances de fait et de droit applicables à la date de l'autorisation.
En ce qui concerne le respect des règles de procédure :
S'agissant de l'absence d'évaluation environnementale :
8. Aux termes de l'article L. 512-7-2 du code de l'environnement, dans sa rédaction alors applicable : " Le préfet peut décider que la demande d'enregistrement sera instruite selon les règles de procédure prévues par le chapitre unique du titre VIII du livre Ier pour les autorisations environnementales : / 1° Si, au regard de la localisation du projet, en prenant en compte les critères mentionnés au point 2 de l'annexe III de la directive 2011/92/UE du 13 décembre 2011 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement, la sensibilité environnementale du milieu le justifie ; / (...) Dans les cas mentionnés au 1° (...), le projet est soumis à évaluation environnementale. (...) ". Le point 2 de l'annexe III de la directive du 13 décembre 2011 énonce : " La sensibilité environnementale des zones géographiques susceptibles d'être affectées par le projet doit être considérée en prenant notamment en compte : / a) l'occupation des sols existants ; / b) la richesse relative, la qualité et la capacité de régénération des ressources naturelles de la zone ; / c) la capacité de charge de l'environnement naturel, en accordant une attention particulière aux zones suivantes : / i) zones humides ; / ii) zones côtières ; / iii) zones de montagnes et de forêts ; / iv) réserves et parcs naturels ; / v) zones répertoriées ou protégées par la législation des Etats membres ; zones de protection spéciale désignées par les Etats membres conformément à la directive 2009/147/CE du Parlement européen et du Conseil du 30 novembre 2009 concernant la conservation des oiseaux sauvages et à la directive 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages ; / vi) zones dans lesquelles les normes de qualité environnementales fixées par la législation de l'Union sont déjà dépassées ; / vii) zones à forte densité de population ; / viii) paysages importants du point de vue historique, culturel et archéologique. " Le préfet, saisi d'une demande d'enregistrement d'une installation classée pour la protection de l'environnement, doit se livrer à un examen du dossier afin d'apprécier, tant au regard de la localisation du projet que des autres critères mentionnés à l'annexe III de la directive, relatifs aux caractéristiques des projets et aux types et caractéristiques de l'impact potentiel, si le projet doit faire l'objet d'une évaluation environnementale, ce qui conduit alors, en application de l'article L. 512-7-2, à le soumettre au régime de l'autorisation environnementale.
9. Par l'arrêté du 30 décembre 2021, le préfet d'Ille-et-Vilaine a enregistré une installation de méthanisation de matières végétales brutes et d'effluents d'élevages pour une quantité de 67,7 tonnes par jour, avec valorisation du biogaz produit par épuration et injection de biométhane dans le réseau de la société Gaz Réseau Distribution France (GRDF). Le projet est présenté par la société Agri-Bioénergies, créée par douze agriculteurs, gérants d'exploitations agricoles situées dans un rayon de 10 kilomètres autour du site d'implantation de l'unité de méthanisation. Les effluents d'élevage et les matières végétales proviennent des exploitations agricoles partenaires du projet et les issues de céréales d'une société agro-alimentaire située à Guichen. Les matières entrantes sont traitées dans l'unité de méthanisation. Le biogaz, issu du traitement et majoritairement constitué de méthane, est épuré, compressé et injecté dans le réseau GRDF. Le digestat fait quant à lui l'objet d'un épandage sur les terres des exploitations agricoles des associés de la société Agri-Bioénergies.
10. D'une part, si les requérants se prévalent de la présence, à proximité du site ou sur l'emprise même du site, d'un oléoduc exploité par la société Total, d'une canalisation de gaz à haute pression et de la route départementale 48, de tels éléments ne sont pas propres en tant que tels et au regard des critères énoncés au point 2 de l'annexe III de la directive du 13 décembre 2011, à caractériser la sensibilité du milieu au sens des dispositions de l'article L. 512-7-2 du code de l'environnement. En tout état de cause et contrairement à ce que soutiennent les requérants, le dossier d'enregistrement, notamment l'étude de dangers et l'étude d'implantation détaillée comparant les sites d'implantation envisagés et justifiant du choix arrêté, mentionnent la présence de ces infrastructures ainsi que les servitudes d'utilité publique qui leur sont liées.
11. D'autre part, il résulte de l'instruction que l'installation de méthanisation litigieuse s'implante au lieu-dit Le Vaugouët, sur le territoire de la commune de Bourg-des-Comptes, sur les parcelles cadastrées section B n°s 899, 900 et 901 et section ZB n° 99, d'une superficie totale de 43 315 m². Les parcelles sont bordées à l'ouest par la voie communale n° 34 et au sud par la route départementale n° 48, par laquelle se fera l'accès à l'installation classée. Le site d'implantation s'ouvre à l'est et au nord sur un vaste espace agricole comprenant plusieurs hameaux et se trouve à proximité d'un important boisement situé à l'ouest. Il résulte de l'instruction, notamment du pré-diagnostic écologique constituant l'annexe 23 du dossier d'enregistrement, que le site d'implantation lui-même ne comprend pas de zone humide, la plus proche se situant à plusieurs centaines de mètres au nord-est de la parcelle. Par ailleurs, les requérants se prévalent d'un avis rendu par la mission régionale d'autorité environnementale de Bretagne, le 20 mai 2021, sur un projet distinct de création d'une zone d'aménagement concerté pour l'extension de la zone d'activités du Mafay sur le territoire de la commune de Bourg-des-Comptes, faisant état de la présence de vingt-deux espèces patrimoniales protégées sur des parcelles situées à proximité du site d'implantation de l'unité de méthanisation en litige. Toutefois, ces parcelles, qui comprennent des espaces boisés classés et des zones humides, sont situées de l'autre côté de la route départementale 48 et en dehors de l'emprise du projet. De plus, il résulte de l'instruction que le site d'implantation du projet constitué pour l'essentiel de prairies ne présente pas les mêmes caractéristiques environnementales que celles situées de l'autre côté de la route départementale, susceptibles de favoriser la présence des espèces recensées sur ces parcelles. Enfin, ainsi qu'il sera exposé au point 33, l'unité de méthanisation présente des aménagements et des conditions d'exploitation permettant de prévenir les risques de pollution de la zone humide située au nord-est du site d'implantation du projet en litige.
12. Il résulte de ce qui précède qu'en ne soumettant pas le dossier d'enregistrement à une évaluation environnementale, le préfet d'Ille-et-Vilaine n'a pas méconnu les dispositions précitées de l'article L. 512-7-2 du code de l'environnement.
S'agissant du caractère complet du dossier soumis à enregistrement :
13. Aux termes de l'article L. 512-7-1 du code de l'environnement : " La demande d'enregistrement est accompagnée d'un dossier permettant au préfet d'effectuer, au cas par cas, les appréciations qu'implique l'article L. 512-7-3. / Le dossier de demande d'enregistrement est mis à disposition du public. Le public est informé des modalités selon lesquelles sont possibles la consultation du dossier et l'émission, en temps utile, d'observations. Cette information est faite par voie d'un affichage sur le site et dans les mairies de la commune d'implantation et des communes situées à proximité de l'installation projetée et par les soins du préfet, le cas échéant, par voie électronique. / (...) ". Aux termes de l'article R. 512-46-1 du même code : " Toute personne qui se propose de mettre en service une installation soumise à enregistrement adresse, dans les conditions de la présente sous-section, une demande au préfet du département dans lequel cette installation doit être implantée. / (...) ". L'article R. 512-46-3 du même code dispose quant à lui : " Dans tous les autres cas, il est remis une demande, en trois exemplaires augmentés du nombre de communes mentionnées à l'article R. 512-46-11, qui mentionne : / 1° S'il s'agit d'une personne physique, ses nom, prénoms et domicile et, s'il s'agit d'une personne morale, sa dénomination ou sa raison sociale, sa forme juridique, l'adresse de son siège social ainsi que la qualité du signataire ; / 2° L'emplacement sur lequel l'installation doit être réalisée ; / 3° La description, la nature et le volume des activités que le demandeur se propose d'exercer ainsi que la ou les rubriques de la nomenclature dont l'installation relève ; / 4° Une description des incidences notables que le projet, y compris les éventuels travaux de démolition, est susceptible d'avoir sur l'environnement et la santé humaine ainsi que, le cas échéant, les mesures et caractéristiques du projet destinées à éviter ou réduire ses probables effets négatifs notables sur l'environnement ou la santé humaine. / (...) ". Enfin, l'article R. 512-46-4 du même code de l'environnement, dans sa rédaction applicable au litige, prévoit : " A la demande d'enregistrement doivent être jointes les pièces suivantes : / 1° Une carte au 1/25 000 ou, à défaut, au 1/50 000 sur laquelle sera indiqué l'emplacement de l'installation projetée ; / 2° Un plan, à l'échelle de 1/2 500 au minimum, des abords de l'installation jusqu'à une distance qui est au moins égale à 100 mètres. (...) ; / 3° Un plan d'ensemble, à l'échelle de 1/200 au minimum, indiquant les dispositions projetées de l'installation ainsi que, jusqu'à 35 mètres au moins de celle-ci, l'affectation des constructions et terrains avoisinants, le tracé des réseaux enterrés existants, les canaux, plans d'eau et cours d'eau. Une échelle plus réduite peut, à la requête du pétitionnaire, être admise par l'administration ; / 4° Un document permettant au préfet d'apprécier la compatibilité des activités projetées avec l'affectation des sols prévue pour les secteurs délimités par le plan d'occupation des sols, le plan local d'urbanisme ou la carte communale ; / 5° Dans le cas d'une installation à implanter sur un site nouveau, la proposition du demandeur sur le type d'usage futur du site lorsque l'installation sera mise à l'arrêt définitif, accompagné de l'avis du propriétaire, lorsqu'il n'est pas le demandeur, ainsi que celui du maire ou du président de l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d'urbanisme. Ces avis sont réputés émis si les personnes consultées ne se sont pas prononcées dans un délai de quarante-cinq jours suivant leur saisine par le demandeur ; / 6° Le cas échéant, l'évaluation des incidences Natura 2000 dans les cas et conditions prévus par les dispositions réglementaires de la sous-section 5 de la section 1 du chapitre IV du titre Ier du livre IV ; / 7° Une description des capacités techniques et financières mentionnées à l'article L. 512-7-3 dont le pétitionnaire dispose ou, lorsque ces capacités ne sont pas constituées au dépôt de la demande d'enregistrement, les modalités prévues pour les établir au plus tard à la mise en service de l'installation ; / 8° Un document justifiant du respect des prescriptions applicables à l'installation en vertu du présent titre, notamment les prescriptions générales édictées par le ministre chargé des installations classées en application du I de l'article L. 512-7. Ce document présente notamment les mesures retenues et les performances attendues par le demandeur pour garantir le respect de ces prescriptions ; / 9° Les éléments permettant au préfet d'apprécier, s'il y a lieu, la compatibilité du projet avec les plans, schémas et programmes mentionnés aux 4°, 5°, 17° à 20°, 23° et 24° du tableau du I de l'article R. 122-17 ainsi qu'avec les mesures fixées par l'arrêté prévu à l'article R. 222-36 ; / 10° Lorsque les installations sont soumises à l'autorisation mentionnée au premier alinéa de l'article L. 229-6 : / a) Une description des matières premières, combustibles et auxiliaires susceptibles d'émettre des gaz à effet de serre ; / b) Une description des différentes sources d'émissions de gaz à effet de serre de l'installation ; / c) Une description des mesures de surveillance prises en application de l'article L. 229-6. Ces mesures peuvent être actualisées par l'exploitant dans les conditions prévues par ce même article sans avoir à modifier son enregistrement ; / 11° Pour les installations d'une puissance thermique supérieure à 20 MW générant de la chaleur fatale non valorisée à un niveau de température utile ou celles faisant partie d'un réseau de chaleur ou de froid, une analyse coûts-avantages afin d'évaluer l'opportunité de valoriser de la chaleur fatale notamment à travers un réseau de chaleur ou de froid. Un arrêté du ministre chargé des installations classées et du ministre chargé de l'énergie, pris dans les formes prévues à l'article L. 512-5, définit les installations concernées ainsi que les modalités de réalisation de l'analyse coûts-avantages ; / 12° Pour les installations de combustion de puissance thermique supérieure ou égale à 20MW, une description des mesures prises pour limiter la consommation d'énergie de l'installation. Sont fournis notamment les éléments sur l'optimisation de l'efficacité énergétique, tels que la récupération secondaire de chaleur. "
14. Les obligations relatives à la composition du dossier de demande d'enregistrement d'une installation classée relèvent des règles de procédure. Il appartient au juge du plein contentieux des installations classées pour la protection de l'environnement d'apprécier le respect des règles de procédure régissant la demande d'autorisation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date de délivrance de l'autorisation. Les inexactitudes, omissions ou insuffisances affectant ce dossier ne sont susceptibles de vicier la procédure et ainsi d'entacher d'irrégularité l'autorisation que si elles ont eu pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative. En outre, eu égard à son office, le juge du plein contentieux des installations classées peut prendre en compte la circonstance, appréciée à la date à laquelle il statue, que de telles irrégularités ont été régularisées, sous réserve qu'elles n'aient pas eu pour effet de nuire à l'information complète de la population.
15. En premier lieu, contrairement à ce que soutiennent les requérants, il ne résulte pas des dispositions précitées que la société pétitionnaire était tenue de justifier de la pertinence du choix du site retenu pour l'implantation de l'installation de méthanisation en litige et de l'absence d'une alternative à l'emplacement retenu.
16. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction, notamment de l'étude de dangers jointe au dossier d'enregistrement que six entreprises, situées dans la zone industrielle du Mafay qui se trouve à environ 200 mètres des limites du site, au sud de la route départementale n° 48, sont recensées. En outre, les photographies aériennes incluses dans le dossier d'enregistrement montrent que les parcelles d'assiette du projet s'inscrivent, au nord de la route départementale n° 48, dans un vaste espace agricole comptant de nombreux hameaux. Dans ces conditions, le dossier d'enregistrement comporte des informations complètes concernant le contexte économique et démographique dans lequel le projet de la société Agri-Bioénergies doit s'implanter.
17. En troisième lieu, le dossier d'enregistrement mentionne que l'accès au site s'effectuera " via la RD 48, sans programme public de renforcement de la voirie à envisager ". Il résulte de l'instruction que l'accès au site sera aménagé sur l'emprise des parcelles d'assiette du projet et s'effectuera par la route départementale n° 48 et la voie communale n° 34. Les requérants se prévalent d'un extrait du bulletin municipal faisant état d'une décision prise entre juin et juillet 2022 par la commune de Bourg-des-Comptes indiquant qu'une convention a été passée avec la société Agri-Bioénergies pour la prise en charge financière par cette dernière des travaux d'aménagement de la voie communale n° 34, compte tenu de ce que l'activité de méthanisation entraînera une dégradation des voies provoquée par le passage des engins. Cet extrait du bulletin municipal ne contredit pas les informations contenues dans le dossier d'enregistrement quant à l'accessibilité du site.
18. En quatrième lieu, contrairement à ce que soutiennent les requérants, le dossier d'enregistrement justifie de la compatibilité du projet avec les documents d'urbanisme, notamment avec le plan local d'urbanisme de la commune de Bourg-des-Comptes approuvé le 18 février 2020.
19. En cinquième lieu, il résulte de l'instruction que le dossier d'enregistrement évalue l'investissement total pour la mise en œuvre du projet à la somme de 7 831 800 euros. Les requérants se prévalent de la convention signée entre la société pétitionnaire et l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) le 25 mai 2020 en vue d'obtenir le bénéfice d'aides en faveur de la transition énergétique et écologique et, plus précisément, de son article 4 faisant état d'un montant prévisionnel de 5 718 023 euros. Toutefois ce montant correspond aux dépenses éligibles pour obtenir les aides de l'ADEME et ne représente pas nécessairement l'investissement total du projet. De plus, l'enveloppe financière prévisionnelle est présentée sous la forme d'un tableau détaillé recensant tous les postes de dépenses. Si tous les postes ne sont pas chiffrés individuellement, ils sont toutefois inclus dans des lots qui sont pour leur part évalués. Ainsi, contrairement à ce que soutiennent les requérants, le chiffrage de l'investissement prévisionnel intègre les postes de dépenses énumérés que sont la pré-fosse des intrants, le système d'incorporation des solides, le réseau chaleur process, le post-traitement du digestat brut, le stockage du digestat liquide, les armoires de commandes, de supervision et de raccordements des équipements et enfin le stockage du digestat liquide délocalisé.
20. En sixième lieu, il ne résulte pas de l'instruction que le chiffrage des résultats avant imposition, qui n'intègre pas au titre des variations le coût de l'électricité et des carburants, et l'évaluation des coûts d'exploitation seraient entachés d'inexactitudes ou d'insuffisances ayant eu pour effet de nuire à l'information complète de la population ou ayant été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.
21. En septième lieu, il résulte de l'instruction que le dossier d'enregistrement comprend un pré-diagnostic écologique réalisé en mars 2021. Ce document présente les enjeux écologiques en raison de la présence, non pas sur le site d'implantation lui-même mais dans l'aire d'étude éloignée, de zones naturelles d'intérêt faunistique et floristique, de continuités écologiques et d'espaces naturels sensibles. Le pré-diagnostic met également en évidence les enjeux liés aux habitats naturels et à la flore, aux chiroptères, à l'avifaune et à la faune terrestre. Il en ressort que la parcelle constitue une prairie à fourrage des plaines, bordée au sud par un fossé, à l'ouest par un important boisement et au nord par des alignements d'arbres et des haies multistrates. De plus, aucune zone humide n'est présente sur le site et les abords du site présentent une mosaïque d'habitats plus favorables à l'activité des chiroptères, le site lui-même ne présentant aucun cours d'eau ni réserve d'eau stagnante, ce qui implique une quantité d'insectes relativement faible et une ressource alimentaire peu élevée pour les chiroptères. Le pré-diagnostic énonce également que le boisement situé à l'ouest des parcelles d'assiette du projet et les linéaires de haies peuvent constituer des zones de chasse et de transit pour les chiroptères et que les haies doivent être préservées. Enfin, il retient que l'enjeu pour l'avifaune, particulièrement les espèces qui nichent en milieu ouvert comme l'alouette des champs ou la caille des blés, est faible. Si les requérants se prévalent de l'avis rendu par la mission régionale d'autorité environnementale de Bretagne, le 20 mai 2021, faisant état de la présence de vingt-deux espèces patrimoniales protégées, cet avis porte sur un projet distinct de création d'une zone d'aménagement concerté pour l'extension de la zone d'activités du Mafay, sur des terrains différents, sur le territoire de la commune de Bourg-des-Comptes et les espèces protégées ont été repérées sur des parcelles situées de l'autre côté de la route départementale 48 et comptant des espaces boisés classés et des zones humides.
22. En huitième lieu, il résulte des règles de procédure prévues par les dispositions précitées de l'article L. 512-7-3 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable au litige, qu'un dossier de demande d'enregistrement n'a pas à comporter des indications précises et étayées sur les capacités techniques et financières exigées par l'article L. 181-27, mais doit seulement faire une présentation des capacités que le demandeur entend mettre en œuvre, si elles ne sont pas encore constituées.
23. Il résulte de l'instruction que le dossier d'enregistrement comprend des développements relatifs aux capacités techniques et financières tant du constructeur de l'installation que des associés de la société exploitante. S'agissant des capacités techniques, le dossier d'enregistrement énumère les compétences techniques individuelles des exploitants agricoles associés de la société Agri-Bioénergies ainsi que les fonctions précises de chacun dans l'organisation et le fonctionnement de l'installation. Une formation spécifique sera par ailleurs dispensée aux associés et salariés de l'installation. Le dossier d'enregistrement précise également que la construction du site et des installations sera encadrée par la société BTS Biogaz et l'offre technique et financière de cette société est jointe en annexe du dossier d'enregistrement. Enfin, le module d'épuration est confié à la société Prodeval, spécialisée depuis 1990 dans le traitement et la valorisation du biogaz issu de la méthanisation de déchets organiques et son offre technique et financière est également jointe au dossier d'enregistrement. S'agissant des capacités financières de la société pétitionnaire, le dossier d'enregistrement indique le budget d'investissement et la provenance des fonds, que ce soit des capitaux propres, des subventions ou d'un emprunt bancaire. Une analyse des produits et charges d'exploitation est par ailleurs présentée dans le dossier. Par suite, le dossier soumis à enregistrement comportait une présentation suffisante des modalités prévues pour établir les capacités financières dont la société pétitionnaire sera effectivement en mesure de disposer et n'avait pas, contrairement à ce que soutiennent les requérants, à justifier d'un engagement financier ferme d'un établissement bancaire.
24. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré du caractère incomplet du dossier d'enregistrement doit être écarté en toutes ses branches.
S'agissant de la procédure de consultation du public :
25. L'article 7 de la charte de l'environnement énonce : " Toute personne a le droit, dans les conditions et les limites définies par la loi, d'accéder aux informations relatives à l'environnement détenues par les autorités publiques et de participer à l'élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement ". Aux termes de l'article R. 512-46-12 du code de l'environnement : " Le préfet fixe, par arrêté, les jours et les heures où le dossier est à la consultation du public et en informe le demandeur. / La consultation du public débute au plus tard trente jours après la réception du dossier complet et régulier, sauf cas exceptionnel résultant par exemple de la nature, de la complexité, de la localisation ou de la dimension du projet. Dans ces cas exceptionnels, l'arrêté précise la motivation de la décision. (...) ".
26. Eu égard à ce qui a été exposé aux points 15 à 23, le caractère incomplet du dossier d'enregistrement allégué par les requérants n'est pas établi. Par suite, le moyen tiré du défaut d'information de la population lors de la procédure de consultation du public ne peut qu'être écarté.
En ce qui concerne le bien-fondé de l'arrêté préfectoral contesté :
S'agissant de l'appréciation des conditions de fond relatives aux capacités financières de la société pétitionnaire :
27. Aux termes de l'article L. 181-27 du code de l'environnement : " L'autorisation prend en compte les capacités techniques et financières que le pétitionnaire entend mettre en œuvre, à même de lui permettre de conduire son projet dans le respect des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 et d'être en mesure de satisfaire aux obligations de l'article L. 512-6-1 lors de la cessation d'activité ".
28. Il résulte des dispositions précitées de l'article L. 181-27 et de celles de l'article L. 512-7-3 du code de l'environnement citées au point 13, que lorsque le juge se prononce sur la légalité de l'autorisation avant la mise en service de l'installation, il lui appartient, si la méconnaissance de ces règles de fond est soulevée, de vérifier la pertinence des modalités selon lesquelles le pétitionnaire prévoit de disposer de capacités financières et techniques suffisantes pour assumer l'ensemble des exigences susceptibles de découler du fonctionnement, de la cessation éventuelle de l'exploitation et de la remise en état du site au regard des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement, ainsi que les garanties de toute nature qu'il peut être appelé à constituer à cette fin en application des articles L. 516-1 et L. 516-2 du même code.
29. Ainsi qu'il a été dit au point 19, le dossier soumis à enregistrement énonce que l'installation de méthanisation est portée par la société Agri-Bioénergies, composée de quatorze exploitants agricoles qui fourniront la totalité des intrants, à l'exception des issues de céréales provenant d'une entreprise agro-alimentaire locale. Le coût total des investissements est évalué à 7 831 800 euros, dont 4 % (300 000 euros) correspondent à une marge de financement, soit une marge permettant de faire face à des dépenses imprévues. En outre, le dossier précise que le plan de financement s'appuie sur des capitaux propres provenant à hauteur de 85 % des associés, à hauteur de 10 % de la société d'économie mixte Energ'iv et à hauteur de 5 % d'un mouvement de financement citoyen Energie Partagée. Par un constat en date du 10 février 2025, un commissaire de justice atteste que la société Agri-Bioénergies dispose d'un total d'avoir disponible constituant des fonds propres représentant un montant total de 1 415 179 euros. De plus, il résulte de l'instruction que le plan de financement s'appuie également sur des subventions accordées par le FEDER et par l'ADEME, à hauteur respectivement de 60 135 euros et 449 157 euros et qu'un emprunt bancaire sera souscrit à hauteur de 6 865 440 euros, dont 600 000 euros permettant de couvrir le besoin en fonds de roulement, les frais bancaires et le compte de réserve. Enfin, la simulation économique réalisée par le bureau d'études Ideo Environnement évalue le résultat annuel moyen avant imposition à 358 633 euros et le temps de retour sur investissement à 9,4 ans. Dans ces conditions, la société pétitionnaire a justifié de la pertinence des modalités selon lesquelles elle prévoit de disposer de capacités financières suffisantes, de sorte que le moyen tiré de ce que l'arrêté contesté a été pris en méconnaissance des dispositions de l'article L. 181-27 du code de l'environnement doit être écarté.
S'agissant de la méconnaissance des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement :
30. En premier lieu, en se bornant à soutenir que le dossier d'enregistrement est insuffisant s'agissant du diagnostic des zones humides et des espèces patrimoniales protégées, situées sur d'autres parcelles, insuffisance non établie ainsi qu'il a été dit, les requérants n'assortissent pas cette branche du moyen tiré de la méconnaissance des intérêts mentionnés de l'article L. 511-1 du code de l'environnement des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé.
31. En second lieu, il résulte de l'instruction que l'installation comprend de nombreux aménagements et constructions, notamment une plate-forme bétonnée destinée au stockage des intrants solides, une pré-fosse de stockage pour les lisiers et les jus collectés sur le site, une cuve de traitement des intrants, une cuve de stockage de digestat liquide, deux hangars, un bâtiment à usage de locaux sociaux, des conteneurs pour le traitement du biogaz brut et l'injection du biométhane, une torchère et un bassin d'orage. Il résulte de l'instruction que la présence tant de l'oléoduc exploité par la société Total que de la canalisation de gaz à haute pression de GRDF est mentionnée dans de nombreux documents du dossier d'enregistrement, notamment dans l'étude de dangers et l'étude d'implantation détaillée comparant les sites d'implantation envisagés et justifiant du choix arrêté. En outre, sont également mentionnées dans le dossier d'enregistrement les servitudes d'utilité publique instituées par un arrêté du préfet d'Ille-et-Vilaine du 6 février 2018 liées à la présence de l'oléoduc et celles attachées aux parcelles traversées par le gazoduc, notamment l'existence d'une zone non aedificandi dont la largeur est de 7 mètres à droite et de 3 mètres à gauche.
32. D'une part, il résulte de l'instruction que l'étude de dangers du dossier d'enregistrement évalue les risques pour la sécurité publique liés à la présence de l'oléoduc exploité par la société Total à proximité du site et de la canalisation de gaz à haute pression traversant le site. L'étude de dangers comprend ainsi une analyse des effets dominos en cas de rupture de la canalisation de gaz (phénomène de jet enflammé) impactant une zone de 155 mètres de part et d'autre de la canalisation et qui aurait pour effet de provoquer des incendies et des explosions de biogaz ainsi qu'une pollution locale du sol. L'étude de dangers évalue la probabilité d'avoir des effets dominos provenant de la canalisation de gaz à très faible (( 5,3 10-5) et négligeable devant les causes d'incendie et/ou d'explosion pouvant provenir de l'exploitation de ces installations. De plus, s'agissant de l'oléoduc, celui-ci passe à 90 m de l'angle le plus proche de la parcelle d'assiette de l'unité de méthanisation. La servitude d'utilité publique créée pour cette canalisation couvre une très faible partie des installations de l'unité de méthanisation, à savoir la tuyauterie de biogaz épuré rejoignant le réseau de gaz naturel. Selon l'étude de dangers, les effets dominos susceptibles d'être entraînés par l'oléoduc iraient jusqu'à 130 m pour le tronçon 3 dans le cas majorant de la " rupture guillotine ". Dans ce cas, seul le local d'épuration situé à 127 m serait touché mais sans effet s'agissant d'un conteneur métallique. Les effets dominos iraient jusqu'à 100 m pour une brèche majorante de 70 mm. Dans ce cas, aucune installation ne serait touchée. Par ailleurs, la probabilité d'une rupture totale est considérée comme nulle. Enfin, il résulte de l'instruction que l'étude de dangers consacre de longs développements à l'accidentologie et retient qu'il existe, s'agissant de la route départementale 48, un risque en cas d'explosion de biogaz dans les digesteurs, la route étant comprise alors dans la zone délimitée par le seuil des effets irréversibles sur la vie humaine. Cependant, la grille de criticité considère cet évènement comme improbable.
33. D'autre part, il résulte de l'instruction que l'aménagement de l'unité de méthanisation permet de préserver l'environnement de tout rejet dans le milieu naturel de pollutions organiques. C'est ainsi que les plateformes couvertes et les silos destinés au stockage des matières premières sont en béton armé avec récupération des jus et écoulements souillés des produits. Les silos extérieurs sont construits en pente pour permettre un écoulement gravitaire des eaux et des jus vers des regards de collecte. Il résulte également du dossier d'enregistrement que les eaux pluviales souillées seront récupérées par le réseau de collecte des jus de silos pour être réintégrées dans le process. La pré-fosse à lisier et à jus destinée à stocker les lisiers et jus, les eaux pluviales souillées, les jus de fumière et de ressuyage du digestat solide, avant incorporation dans le process, est d'un dimensionnement supérieur de 50 % par rapport au volume utile minimal à prévoir afin d'anticiper tout imprévu. Un bassin d'orage reçoit quant à lui les eaux propres avant infiltration dans le milieu naturel. Enfin, une zone de rétention étanche et délimitée par un merlon est prévue pour assurer la retenue des pollutions en cas de rupture de cuve ou de débordement et le bassin d'orage est inclus dans cette zone et prendra le relais dans l'hypothèse où la zone de rétention serait insuffisante.
34. En conséquence des points précédents, il résulte de l'instruction que le projet ainsi soumis au préfet pour enregistrement ne présente pas, pour les intérêts protégés par l'article L. 511-1, des dangers ou inconvénients qui auraient justifié de refuser l'enregistrement sollicité de cette demande.
S'agissant du respect du principe de précaution :
35. Aux termes de l'article L. 110-1 du code de l'environnement : " I. - Les espaces, ressources et milieux naturels terrestres et marins, les sons et odeurs qui les caractérisent, les sites, les paysages diurnes et nocturnes, la qualité de l'air, la qualité de l'eau, les êtres vivants et la biodiversité font partie du patrimoine commun de la nation. Ce patrimoine génère des services écosystémiques et des valeurs d'usage. / (...). II. - Leur connaissance, leur protection, leur mise en valeur, leur restauration, leur remise en état, leur gestion, la préservation de leur capacité à évoluer et la sauvegarde des services qu'ils fournissent sont d'intérêt général et concourent à l'objectif de développement durable qui vise à satisfaire les besoins de développement et la santé des générations présentes sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs. Elles s'inspirent, dans le cadre des lois qui en définissent la portée, des principes suivants : / 1° Le principe de précaution, selon lequel l'absence de certitudes, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment, ne doit pas retarder l'adoption de mesures effectives et proportionnées visant à prévenir un risque de dommages graves et irréversibles à l'environnement à un coût économiquement acceptable (...). ".
36. Les requérants soutiennent que le principe de précaution, tel qu'il résulte des dispositions précitées, est méconnu eu égard aux lacunes du projet s'agissant de la prévention de la survenance des risques et des conséquences sur la population, la faune et la flore liés à la proximité du projet avec un oléoduc exploité par Total, une canalisation de gaz, la route départementale 48, une zone humide et la présence d'espèces protégées. Eu égard toutefois à ce qui est énoncé aux points précédents, il ne résulte pas de l'instruction que l'installation en litige présenterait un risque de dommage grave et irréversible à l'environnement au sens de la disposition précitée. Il s'ensuit que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 110-1 du code de l'environnement doit être écarté.
37. Il résulte de tout ce qui précède que Mme M... et autres ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.
Sur les frais liés au litige :
38. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement aux requérants de la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de M. E... D... et autres le versement à la société Agri-Bioénergies d'une somme globale de 1 500 euros au titre des mêmes frais.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme M... et autres est rejetée.
Article 2 : M. D... et M. Q..., Mme M..., M. I..., M. P..., M. et Mme H..., M. et Mme N... et l'association " Comité de protection du cadre de vie de Bourg-des-Comptes " verseront ensemble à la société Agri-Bioénergies une somme globale de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... D... et à M. G... Q..., premiers requérants dénommés en application de l'article R. 751-3 du code de justice administrative, à la société Agri-Bioénergies et à la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.
Copie en sera adressée pour information au préfet d'Ille-et-Vilaine.
Délibéré après l'audience du 10 avril 2025, à laquelle siégeaient :
- M. Degommier, président de chambre,
- M. Rivas, président assesseur,
- Mme Ody, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 mai 2025.
La rapporteure,
C. ODY
Le président,
S. DEGOMMIER Le greffier,
C. GOY
La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 24NT01582