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02/05/2025 | FRANCE | N°23NT02724

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 2ème chambre, 02 mai 2025, 23NT02724


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La Ligue pour la protection des oiseaux de la Loire-Atlantique a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la délibération du 18 décembre 2019 par laquelle le conseil communautaire de la communauté de communes d'Erdre et Gesvres a approuvé le plan local d'urbanisme intercommunal, ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux à l'encontre de cette délibération.



Par un jugement n° 2008496 du 11 juillet 2023, le tribunal adminis

tratif de Nantes a annulé la délibération du 18 décembre 2019 du conseil communautaire de la comm...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La Ligue pour la protection des oiseaux de la Loire-Atlantique a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la délibération du 18 décembre 2019 par laquelle le conseil communautaire de la communauté de communes d'Erdre et Gesvres a approuvé le plan local d'urbanisme intercommunal, ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux à l'encontre de cette délibération.

Par un jugement n° 2008496 du 11 juillet 2023, le tribunal administratif de Nantes a annulé la délibération du 18 décembre 2019 du conseil communautaire de la communauté de communes d'Erdre et Gesvres en tant que le plan local d'urbanisme intercommunal approuvé par cette délibération :

- classe en zone à urbaniser 1AU ou 2AU les zones à urbaniser situées le long de la limite sud-est entre Grandchamp-des-Fontaines et Treillères, à la limite sud entre Saint-Mars-du-Désert et Sucé-sur-Erdre sur le site de la Jacopière, au nord de Saint-Mars-du-Désert ainsi qu'au sud-ouest de Vigneux-de-Bretagne ;

- classe en zone 2AUe une partie du site de la Jacopière ;

- comporte des orientations d'aménagement et de programmation sectorielles B 02 et B 04 ;

- dispense de déclaration préalable certains travaux portant sur des haies identifiées au titre de l'article L. 151-23 du code de l'urbanisme.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 11 septembre 2023, 12 juillet 2024, 27 septembre 2024, 24 octobre 2024 et 12 novembre 2024, la communauté de communes d'Erdre et Gesvres, représentée par Me Rouhaud, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes, en tant qu'il a annulé la délibération du 18 décembre 2019 du conseil communautaire de la communauté de communes d'Erdre et Gesvres, en ce que le plan local d'urbanisme intercommunal approuvé par cette délibération, d'une part, classe en zone à urbaniser 1AU ou 2AU les zones situées le long de la limite sud-est entre Grandchamp-des-Fontaines et Treillères, à la limite sud entre Saint-Mars-du-Désert et Sucé-sur-Erdre sur le site de la Jacopière, ainsi qu'au nord de Saint-Mars-du-Désert, d'autre part, classe en zone 2AUe une partie du site de la Jacopière et, enfin, comporte une orientation d'aménagement et de programmation sectorielle B 04 ;

2°) de rejeter, dans la même mesure, la demande présentée par la Ligue pour la protection des oiseaux de la Loire-Atlantique devant le tribunal administratif de Nantes ;

3°) de mettre à la charge de la Ligue pour la protection des oiseaux de la Loire-Atlantique le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les premiers juges ont statué ultra petita en faisant droit à un moyen que la Ligue de la protection des oiseaux de la Loire-Atlantique avait abandonné dans son mémoire, enregistré au greffe du tribunal administratif le 7 juin 2022 ;

- le rapport de présentation du plan local d'urbanisme intercommunal n'analyse pas de manière insuffisante l'état initial de l'environnement des zones à urbaniser du premier et du second secteurs et du site de la Jacopière ;

- le rapport de présentation du plan local d'urbanisme intercommunal ne présente pas de manière insuffisante les solutions de substitution raisonnables à l'urbanisation du site de la Jacopière ;

- l'orientation d'aménagement et de programmation B 04 n'est pas incohérente avec les orientations du projet d'aménagement et de développement durables.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 19 avril 2024, 2 août 2024, 10 octobre 2024 et 4 novembre 2024, la Ligue pour la protection des oiseaux de la Loire-Atlantique, représentée par Me Dubreuil, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la communauté de communes d'Erdre et Gesvres une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens invoqués par l'association requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Mas,

- les conclusions de M. Le Brun, rapporteur public,

- et les observations de Me Oueslati, substituant Me Rouhaud, représentant la communauté de communes d'Erdre et Gesvres, et de Me Dubreuil, représentant la Ligue pour la protection des oiseaux de la Loire-Atlantique.

Une note en délibéré présentée pour la Ligue pour la protection des oiseaux de la Loire-Atlantique a été enregistrée le 3 avril 2025.

Des notes en délibérés ont été présentée pour la communauté de communes d'Erdre et Gesvres et ont été enregistrée le 8 avril 2025 et le 10 avril 2025.

Considérant ce qui suit :

1. Par un jugement du 11 juillet 2023, le tribunal administratif de Nantes a annulé, à la demande de la Ligue pour la protection des oiseaux de la Loire-Atlantique, la délibération du 18 décembre 2019 du conseil communautaire de la communauté de communes d'Erdre et Gesvres, en tant que le plan local d'urbanisme intercommunal approuvé par cette délibération classe en zone à urbaniser 1AU ou 2AU les zones situées le long de la limite sud-est entre Grandchamp-des-Fontaines et Treillères, à la limite sud entre Saint-Mars-du-Désert et Sucé-sur-Erdre sur le site de la Jacopière, au nord de Saint-Mars-du-Désert ainsi qu'au sud-ouest de Vigneux-de-Bretagne, classe en zone 2AUe une partie du site de la Jacopière, comporte des orientations d'aménagement et de programmation sectorielles B 02 et B 04 et dispense de déclaration préalable certains travaux portant sur des haies identifiées au titre de l'article L. 151-23 du code de l'urbanisme. La communauté de communes d'Erdre et Gesvres relève appel de ce jugement, en tant seulement qu'il annule la délibération du 18 décembre 2019 du conseil communautaire de la communauté de communes d'Erdre et Gesvres, en ce que le plan local d'urbanisme intercommunal approuvé par cette délibération classe en zone à urbaniser 1AU ou 2AU les zones situées le long de la limite sud-est entre Grandchamp-des-Fontaines et Treillères, à la limite sud entre Saint-Mars-du-Désert et Sucé-sur-Erdre sur le site de la Jacopière, ainsi qu'au nord de Saint-Mars-du-Désert, classe en zone 2AUe une partie du site de la Jacopière et comporte une orientation d'aménagement et de programmation sectorielle B 04.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. D'une part, la Ligue pour la protection des oiseaux de la Loire-Atlantique ayant sollicité l'annulation totale de la délibération du 18 décembre 2019 du conseil communautaire de la communauté de communes d'Erdre et Gesvres, les premiers juges, qui ont procédé à l'annulation partielle de cette délibération, n'ont pas statué au-delà des conclusions de la requête de cette association.

3. D'autre part, il ne résulte pas du mémoire, présenté pour la Ligue pour la protection des oiseaux de la Loire-Atlantique et enregistré au greffe du tribunal administratif de Nantes le 7 juin 2022, que cette association aurait renoncé sans équivoque à son moyen, présenté au soutien de sa requête introductive d'instance, tiré de l'insuffisance du rapport de présentation dans la description de l'état initial des zones à urbaniser du premier secteur. En accueillant ce moyen pour procéder à une annulation partielle de la délibération contestée, les premiers juges n'ont dès lors pas soulevé d'office un moyen qui n'était pas d'ordre public, sans en avertir au préalable les parties.

4. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que les premiers juges auraient entaché leur jugement d'irrégularité doit, par suite, être écarté dans ses deux branches.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne le caractère suffisant du rapport de présentation, en ce qu'il analyse l'état initial de l'environnement :

5. L'article L. 151-4 du code de l'urbanisme dispose : " Le rapport de présentation explique les choix retenus pour établir le projet d'aménagement et de développement durables, les orientations d'aménagement et de programmation et le règlement ". Aux termes de l'article R. 151-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au litige : " Pour l'application de l'article L. 151-4, le rapport de présentation : / (...) 3° Analyse l'état initial de l'environnement, expose la manière dont le plan prend en compte le souci de la préservation et de la mise en valeur de l'environnement ainsi que les effets et incidences attendus de sa mise en œuvre sur celui-ci. " Par ailleurs, aux termes de l'article R. 151-3 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au litige : " Au titre de l'évaluation environnementale lorsqu'elle est requise, le rapport de présentation : / (...) / 4° Explique les choix retenus mentionnés au premier alinéa de l'article L. 151-4 au regard notamment des objectifs de protection de l'environnement établis au niveau international, communautaire ou national, ainsi que les raisons qui justifient le choix opéré au regard des solutions de substitution raisonnables tenant compte des objectifs et du champ d'application géographique du plan (...). "

6. Il ressort des pièces du dossier, et notamment de l'annexe 1.5.3 intitulée " Rapport zones humides sur les futures zones à urbaniser et cartographie du réseau hydrographique " du rapport de présentation du plan local d'urbanisme intercommunal, que les zones à urbaniser ont fait l'objet d'un recensement des zones humides s'appuyant sur trois inventaires spécifiques et complémentaires : un inventaire selon la méthodologie prévue par le schéma d'aménagement et de gestion des eaux effectué par le bureau EF Etudes en 2012, une étude d'identification et de fonctionnalités des zones humides sur le site de l'ancien projet d'aéroport - effectué à partir d'analyses pédologiques en 2011 - et une étude d'identification et de fonctionnalités des zones humides sur les sites de projet potentiellement ouverts à l'urbanisation, réalisée à partir d'analyses pédologiques en 2017. Ce recensement des zones humides dans les zones à urbaniser est cohérent avec le projet d'aménagement et de développement durables, dont une des orientations a pour objet la préservation des zones humides, ainsi qu'avec le rapport de présentation, qui précise que la présence d'une zone humide a été, dans la hiérarchie des priorités, le deuxième critère pris en compte pour décider du classement d'une parcelle en zone à urbaniser.

7. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que, comme l'ont d'ailleurs relevé dans leurs avis respectifs sur le projet de plan local d'urbanisme intercommunal la direction départementale des territoires et de la mer et la mission régionale de l'autorité environnementale, les zones à urbaniser situées le long de la limite sud-est entre Grandchamp-des-Fontaines et Treillères et à la limite sud entre Saint-Mars-du-Désert et Sucé-sur-Erdre sur le site de la Jacopière, n'ont pas fait l'objet d'une telle étude. Si la communauté de communes soutient que la recherche de zones humides n'était prévue que sur les " secteurs d'étude " et non sur l'ensemble des zones à urbaniser définies par le plan local d'urbanisme intercommunal, il ressort du rapport sur les zones humides, mentionné au point précédent, que les " secteurs d'étude " présentent une superficie de 595 hectares, identique à celle des " futures zones à urbaniser ".

8. En outre, si les secteurs 3 et 4 de la zone d'aménagement concerté de Vireloup et de la zone d'aménagement concerté de Belle-Etoile, correspondant aux zones à urbaniser du 1er secteur situées le long de la limite sud-est entre Grandchamp-des-Fontaines et Treillères, ont fait l'objet d'autorisations préfectorales au titre de la loi sur l'eau délivrées respectivement par des arrêtés du 25 janvier 2023 et du 27 décembre 2018, il ne ressort pas des pièces du dossier que les études réalisées en vue de l'obtention de ces autorisations auraient été mises à la disposition des rédacteurs du plan local d'urbanisme. En outre, la communauté de communes, qui ne produit pas ces études, ne justifie pas que leurs résultats, qui n'ont pas été repris dans le rapport de présentation, auraient été correctement reportés dans les orientations d'aménagement et de programmation relatives à ces secteurs. Par ailleurs, si la communauté de communes soutient que le projet de zone d'aménagement concerté de la Noé Frais à Saint-Mars-du-Désert, qui correspond à la zone à urbaniser du 2ème secteur - à la limite sud entre Saint-Mars-du-Désert et Sucé-sur-Erdre - a fait l'objet d'une étude de faisabilité par le bureau GC infrastructures qui a conclu à l'absence de zone humide sur le site, elle ne produit qu'un résumé de cette étude qui ne permet pas d'en déterminer la méthodologie, le périmètre ni les résultats exacts. Enfin, il n'est pas contesté que le secteur de la Jacopière sur lequel est prévue la création d'une zone d'aménagement concerté, classé en zone 2AUe, n'a fait l'objet d'aucune étude afin d'y rechercher la présence de zones humides. La circonstance qu'une telle étude a été réalisée postérieurement à la délibération contestée est sans incidence sur le caractère insuffisant sur ce point du rapport de présentation du plan local d'urbanisme intercommunal en litige.

9. Il résulte de ce qui précède que le rapport de présentation est entaché d'insuffisance quant à l'analyse de l'état initial de l'environnement de ces zones d'urbanisation future, sans qu'ait d'incidence à cet égard la circonstance que les zones classées en zone d'urbanisation future 2AU ne pourront être ouvertes à l'urbanisation sans une modification ou une révision ultérieure du plan local d'urbanisme.

En ce qui concerne le caractère suffisant du rapport de présentation, en ce qu'il justifie le choix de classer en zone 2AUe une partie du site de la Jacopière :

10. Conformément au a) du 1° de l'article L. 104-2 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable à la date de la délibération contestée, font l'objet d'une évaluation environnementale dans les conditions prévues par la directive 2001/42/CE du Parlement européen et du Conseil, du 27 juin 2001, relative à l'évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l'environnement, ainsi que ses annexes, et par le chapitre IV du titre préliminaire du livre Ier du code de l'urbanisme, les plans locaux d'urbanisme " qui sont susceptibles d'avoir des effets notables sur l'environnement, au sens de l'annexe II à la directive 2001/42/CE du Parlement européen et du Conseil du 27 juin 2001, compte tenu notamment de la superficie du territoire auquel ils s'appliquent, de la nature et de l'importance des travaux et aménagements qu'ils autorisent et de la sensibilité du milieu dans lequel ceux-ci doivent être réalisés ". Aux termes de l'article L. 104-4 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " Le rapport de présentation des documents d'urbanisme mentionnés aux articles L. 104-1 et L. 104-2 : / (...) 3° Expose les raisons pour lesquelles, notamment du point de vue de la protection de l'environnement, parmi les partis d'aménagement envisagés, le projet a été retenu. " Aux termes du premier alinéa de l'article L. 151-4 de ce code, dans sa rédaction applicable au litige : " Le rapport de présentation explique les choix retenus pour établir le projet d'aménagement et de développement durables, les orientations d'aménagement et de programmation et le règlement ". Enfin, aux termes de l'article R. 151-3 dudit code, dans sa rédaction applicable au litige : " Au titre de l'évaluation environnementale lorsqu'elle est requise, le rapport de présentation : / (...) 4° Explique les choix retenus mentionnés au premier alinéa de l'article L. 151-4 au regard notamment des objectifs de protection de l'environnement établis au niveau international, communautaire ou national, ainsi que les raisons qui justifient le choix opéré au regard des solutions de substitution raisonnables tenant compte des objectifs et du champ d'application géographique du plan (...). "

11. Les inexactitudes, omissions ou insuffisances d'une évaluation environnementale ne sont susceptibles de vicier la procédure, et donc d'entraîner l'illégalité de la décision prise au vu de cette évaluation, que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.

12. Le rapport de présentation du plan local d'urbanisme intercommunal litigieux comporte un volet dédié à la justification des choix retenus pour l'élaboration du projet au regard des enjeux environnementaux, lequel identifie neuf enjeux environnementaux majeurs et en détermine l'importance pour chacune des trois grandes parties du territoire couvert par le plan. Il examine les conséquences environnementales, par grandes thématiques, d'un prolongement des tendances actuelles en matière de développement urbain, ainsi que de la mise en œuvre de trois scénarios alternatifs et conclut que le scénario n° 2, dénommé " cœur intercommunal ", dans lequel les activités économiques sont situées dans des pôles intermédiaires du " cœur intercommunal ", dont la commune de Sucé-sur-Erdre - qualifiée de " pôle secondaire " - " offre de meilleures réponses aux enjeux identifiés en matière de consommation d'espaces notamment et d'étalement urbain ". Le rapport de présentation comporte également une évaluation des incidences environnementales du projet de création d'une zone d'urbanisation future sur le site de la Jacopière.

13. Si, ce faisant, les auteurs du plan local d'urbanisme intercommunal ont justifié leurs choix, au regard de solutions de substitution raisonnables, à l'échelle de l'ensemble du territoire couvert par le plan, aucune justification n'est apportée quant à l'emplacement précis des deux secteurs classés en zone 2AUe en vue de la création d'une zone d'aménagement concerté sur le site de la Jacopière, alors qu'il ressort des pièces du dossier que la réalisation d'un tel projet à cet emplacement est susceptible d'avoir des incidences notables sur l'environnement, ainsi que l'ont d'ailleurs reconnu les auteurs du plan lorsqu'ils ont évalué les incidences environnementales de ce projet de zone d'activités au titre des " sites susceptibles de porter atteinte aux enjeux environnementaux majeurs ". Toutefois, ainsi que le rappelle le rapport de présentation, la création d'une telle zone d'activités sur le site de la Jacopière et à proximité de la route départementale 178 est prévue par le schéma de cohérence territoriale de Nantes Saint-Nazaire, qui s'impose au plan local d'urbanisme intercommunal dans un rapport de compatibilité. Les autres emplacements envisagés par les auteurs du plan local d'urbanisme intercommunal pour la création d'une zone d'activités, abandonnés précisément en raison de leur incompatibilité avec le schéma de cohérence territoriale, ne constituent dès lors pas des solutions de substitution possibles au zonage 2AUe litigieux. L'association pour la défense du cadre de vie et de l'environnement de la Jacopière et autres n'allèguent pas qu'un autre emplacement, compatible avec le schéma de cohérence territoriale, aurait pu être retenu. Dans ces conditions, la communauté de communes d'Erdre et Gesvres est fondée à soutenir qu'il n'existait pas de solutions de substitution raisonnables à l'emplacement retenu pour ce zonage 2AUe. Est sans incidence à cet égard la circonstance alléguée que le schéma de cohérence territoriale n'a pas lui-même été précédé d'une évaluation environnementale portant sur le choix d'implanter une zone d'activités sur le site de la Jacopière au regard de solutions de substitution raisonnables, qui n'est pas de nature à exempter le plan local d'urbanisme de son obligation de compatibilité avec le schéma de cohérence territoriale. Enfin, dès lors que le classement en zone 2AUe litigieux ne permet pas une ouverture à l'urbanisation du site sans qu'intervienne préalablement une modification ou une révision du plan local d'urbanisme intercommunal - laquelle devra, le cas échéant, être précédée d'une évaluation des incidences de cette ouverture à l'urbanisation sur l'environnement - le rapport de présentation et l'évaluation des incidences qui lui est jointe justifient suffisamment la création de cette zone d'urbanisation future, notamment du point de vue de la protection de l'environnement, alors même qu'ils renvoient à des études futures la définition du périmètre exact de la zone d'activités et le détail de ses aménagements. Ainsi, la circonstance que le rapport de présentation n'explicite pas l'absence de solutions de substitution raisonnables au choix effectué par les auteurs du plan local d'urbanisme intercommunal quant à l'emplacement du zonage 2AUe défini sur le site de la Jacopière en vue de la création d'une zone d'activités est demeurée sans incidence sur le contenu de ce rapport et n'a dès lors pu ni nuire à l'information complète de la population, ni exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.

En ce qui concerne la cohérence entre le projet d'aménagement et de développement durables et l'orientation d'aménagement et de programmation sectorielle B 04 :

14. Aux termes de l'article L. 151-6 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au litige : " Les orientations d'aménagement et de programmation comprennent, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, des dispositions portant sur l'aménagement, l'habitat, les transports, les déplacements et, en zone de montagne, sur les unités touristiques nouvelles (...). "

15. Pour apprécier la cohérence exigée au sein du plan local d'urbanisme entre les orientations d'aménagement et de programmation et le projet d'aménagement et de développement durables, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle du territoire couvert par le document d'urbanisme, si les orientations d'aménagement et de programmation ne contrarient pas les orientations générales et objectifs que les auteurs du document ont définis dans le projet d'aménagement et de développement durables, compte tenu de leur degré de précision. Par suite, l'inadéquation de dispositions d'une orientation d'aménagement et de programmation à une orientation ou à un objectif du projet d'aménagement et de développement durables ne suffit pas nécessairement, compte tenu de l'existence d'autres orientations ou objectifs au sein de ce projet, à caractériser une incohérence entre ces dispositions et ce projet.

16. L'orientation d'aménagement et de programmation sectorielle B 04 tend à la réalisation d'un minimum de 160 logements sur un périmètre de 8,02 hectares, au sud-ouest du bourg de la commune d'Héric. Elle précise que " les zones humides étant présentes sur une partie du site, l'opération devra prévoir un aménagement minimisant l'impact sur l'environnement. " Sur le document graphique associé sont représentés les terrains dont il est présumé qu'ils peuvent accueillir des zones humides, qui occupent la majeure partie de la moitié sud du périmètre de l'orientation d'aménagement et de programmation.

17. Ainsi que le fait valoir la Ligue pour la protection des oiseaux de la Loire-Atlantique, la réalisation des aménagements et constructions prévus dans le cadre de cette orientation d'aménagement et de programmation aura nécessairement pour conséquence un empiètement sur des zones humides, compte tenu de l'importance du recouvrement - par le secteur couvert par l'orientation d'aménagement et de programmation - des zones humides présumées renseignées sur le document graphique associé, de l'objectif de densité des logements prévu par l'orientation d'aménagement et de programmation et de l'emplacement des aménagements prévus pour assurer la desserte des futures constructions et leur connexion avec le centre-bourg d'Héric. Toutefois, si le point 2.5 de l'axe 2 du projet d'aménagement et de développement durables prévoit de " veiller à la préservation des zones humides et intégrer cet enjeu dans les projets d'aménagements " en " protége[ant] les zones humides sur l'ensemble du territoire en lien avec les dispositions des deux schémas d'aménagement et de gestion de l'eau (SAGE) en vigueur ", le projet d'aménagement et de développement durables n'exclut pas tout empiètement sur une zone humide, dès lors que sont respectées les dispositions des schémas d'aménagement et de gestion de l'eau qui subordonnent, notamment, la destruction d'une zone humide à des mesures de compensation. En outre, la zone humide concernée ne représente qu'une infime proportion des zones humides existant sur l'ensemble du territoire couvert par le plan local d'urbanisme intercommunal. Enfin, l'orientation d'aménagement et de programmation sectorielle B 04 contribue à l'atteinte d'autres objectifs du projet d'aménagement et de développement durables, notamment l'axe 2 de ce projet, qui prévoit la création de 530 logements par an à l'horizon 2030, dont 30 à 40 % dans les " pôles intermédiaires ", au nombre desquels est la commune de Héric, " en prévoyant une part supérieure sur Héric et Sucé-sur-Erdre compte tenu de leur accessibilité, de leur desserte et de leur offre de services ". Ainsi, à l'échelle de l'ensemble du territoire couvert par le plan local d'urbanisme intercommunal litigieux et au regard de l'ensemble des objectifs du projet d'aménagement et de développement durables, l'orientation d'aménagement et de programmation sectorielle B 04 n'est pas incohérente avec ce projet.

18. Aucun des autres moyens invoqués par la Ligue pour la protection des oiseaux de la Loire-Atlantique en première instance ou en appel, dont la cour administrative d'appel serait saisie par l'effet dévolutif de l'appel, n'est susceptible de justifier l'annulation partielle de la délibération du 18 décembre 2019 contestée, en tant qu'elle approuve les dispositions du plan relatives à l'orientation d'aménagement et de programmation B 04.

19. Il résulte de tout ce qui précède que la communauté de communes d'Erdre et Gesvres est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé la délibération du 18 décembre 2019 de son conseil communautaire en tant que le plan local d'urbanisme intercommunal, approuvé par cette délibération, comporte une orientation d'aménagement et de programmation sectorielle B 04.

Sur les frais liés au litige :

20. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de la Ligue pour la protection des oiseaux de la Loire-Atlantique le versement de la somme demandée par la communauté de communes d'Erdre et Gesvres au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

21. Les dispositions du même article font obstacle à ce que soit mis à la charge de la communauté de communes d'Erdre et Gesvres, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme demandée par la Ligue pour la protection des oiseaux de la Loire-Atlantique.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 11 juillet 2023 du tribunal administratif de Nantes est annulé en tant qu'il a annulé la délibération du 18 décembre 2019 du conseil communautaire de la communauté de communes d'Erdre et Gesvres, en ce que le plan local d'urbanisme intercommunal approuvé par cette délibération comporte l'orientation d'aménagement et de programmation B 04.

Article 2 : La demande présentée par la Ligue pour la protection des oiseaux de la Loire-Atlantique devant le tribunal administratif de Nantes, en ce qu'elle tend à l'annulation de la délibération du 18 décembre 2019 du conseil communautaire de la communauté de communes d'Erdre et Gesvres, en tant que le plan local d'urbanisme intercommunal approuvé par cette délibération comporte l'orientation d'aménagement et de programmation B 04, est rejetée.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la communauté de communes d'Erdre et Gesvres est rejeté.

Article 4 : Les conclusions présentées par la Ligue pour la protection des oiseaux de la Loire-Atlantique au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la communauté de communes d'Erdre et Gesvres et à la Ligue pour la protection des oiseaux de la Loire-Atlantique.

Délibéré après l'audience du 1er avril 2025, à laquelle siégeaient :

- Mme Montes-Derouet, présidente,

- M. Dias, premier conseiller,

- M. Mas, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 mai 2025.

Le rapporteur,

B. MASLa présidente,

I. MONTES-DEROUET

La greffière,

A. MARCHAND

La République mande et ordonne au préfet de la Loire-Atlantique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23NT02724


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NT02724
Date de la décision : 02/05/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MONTES-DEROUET
Rapporteur ?: M. Benoît MAS
Rapporteur public ?: M. LE BRUN
Avocat(s) : DUBREUIL

Origine de la décision
Date de l'import : 04/05/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-05-02;23nt02724 ?
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