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02/05/2025 | FRANCE | N°23NT02723

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 2ème chambre, 02 mai 2025, 23NT02723


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme B... E..., Mme D... O..., Mme K... Q..., M. A... F..., M. J... C..., Mme I... M..., M. G... H... et l'association Les amis de Bénerville-sur-Mer, Blonville-sur-Mer, Saint-Pierre-Azif, Tourgeville, Vauville et Villers-sur-Mer ont demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 2 novembre 2021 par lequel le maire de Bénerville-sur-Mer a délivré à la société SNC Bénerville Avenue du littoral un permis de construire un immeuble collectif de vingt-et-un logeme

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... E..., Mme D... O..., Mme K... Q..., M. A... F..., M. J... C..., Mme I... M..., M. G... H... et l'association Les amis de Bénerville-sur-Mer, Blonville-sur-Mer, Saint-Pierre-Azif, Tourgeville, Vauville et Villers-sur-Mer ont demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 2 novembre 2021 par lequel le maire de Bénerville-sur-Mer a délivré à la société SNC Bénerville Avenue du littoral un permis de construire un immeuble collectif de vingt-et-un logements et vingt-deux places de stationnement sur un terrain situé au lieu-dit " P... " ainsi que la décision du 12 janvier 2022 rejetant le recours gracieux formé contre cet arrêté.

Par un jugement avant dire droit n° 2200618 du 10 juillet 2023, le tribunal administratif a rejeté les conclusions de la demande en tant qu'elles émanent de M. H... et de Mme M... et, en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, a sursis à statuer sur le surplus des conclusions de la demande pendant une durée de quatre mois à compter de la notification de ce jugement pour permettre à la société SNC Bénerville Avenue du littoral de solliciter un permis modificatif en vue de la régularisation du vice tiré de ce que le permis litigieux autorise un projet dont l'emprise au sol dépasse la limite fixée par l'article UC 9.1 du règlement du plan local d'urbanisme intercommunal de la communauté de communes Cœur Côte Fleurie.

Par un arrêté du 1er décembre 2023, le maire de Bénerville-sur-Mer a délivré à la société SNC Bénerville Avenue du littoral un permis de régularisation.

Par un jugement n° 2200618 du 7 mai 2024, mettant fin à l'instance, le tribunal administratif de Caen a rejeté la demande de Mme E... et autres ainsi que les conclusions présentées par la commune de Bénerville-sur-Mer et par la société SNC Bénerville Avenue du Littoral sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête et des mémoires, enregistrés sous le n°23NT02723, les 7 septembre 2023 et 3 juin 2024, Mme B... E..., Mme D... O..., Mme K... Q..., M. A... F..., M. J... C..., et l'association Les amis de Bénerville-sur-Mer, Blonville-sur-Mer, Saint-Pierre-Azif, Tourgeville, Vauville et Villers-sur-Mer, représentés par Me Launay, demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement avant dire droit du 10 juillet 2023 du tribunal administratif de Caen ;

2°) d'annuler l'arrêté du 2 novembre 2021 du maire de Bénerville-sur-Mer ainsi que la décision du 12 janvier 2022 rejetant leur recours gracieux formé contre cet arrêté ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Bénerville-sur-Mer une somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Mme E... et autres soutiennent que :

- leurs conclusions n'ont pas perdu leur objet, en tant qu'elles critiquent le jugement attaqué, en ce qu'il a écarté comme non-fondés les moyens dirigés contre le permis contesté ; seules sont devenues sans objet les conclusions de leur requête d'appel en tant qu'elles sont dirigées contre le jugement, en ce qu'il met en œuvre les pouvoirs que le juge tient de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme ;

- le moyen tiré de ce que le permis contesté méconnaît l'article R. 431-24 du code de l'urbanisme a été écarté à tort par le tribunal administratif ;

- a également été écarté à tort le moyen tiré de ce que le permis contesté est illégal par voie d'exception d'illégalité du classement en zone urbanisée UCc de la parcelle cadastrée à la section AA sous le n°76 ; en ne classant pas en zone Naturelle N la parcelle AA 76, les auteurs du plan local d'urbanisme intercommunal ont commis une erreur manifeste d'appréciation ; le classement de la parcelle en zone UCc n'est pas cohérent avec les orientations du projet d'aménagement et de développement durables (PADD) ; du fait de ces illégalités, les dispositions du plan d'occupation des sols (POS) du district de Trouville-Deauville trouvent à s'appliquer ; ce POS classe en zone naturelle 3NDb la parcelle terrain d'assiette du projet ; le POS du district de Trouville-Deauville, approuvé le 17 février 1976, n'est pas devenu caduc le 1er janvier 2016, mais est resté en vigueur jusqu'à ce que le plan local d'urbanisme intercommunal de la communauté de communes Cœur Côte Fleurie s'y substitue, le 24 janvier 2020 ; le règlement applicable à cette zone interdit les bâtiments collectifs à usage d'habitation ;

- le moyen tiré de ce que le projet méconnaît le préambule des dispositions du règlement du plan local d'urbanisme intercommunal applicable à la zone UCc a été écarté à tort ; ce préambule, qui présente un caractère réglementaire, n'autorise dans le secteur UCc que les constructions pavillonnaires ; la construction d'immeubles collectifs n'y est pas admise ;

- le moyen tiré de ce que le permis contesté a été délivré en méconnaissance des dispositions de l'article UC 3.2.2 du règlement du plan local d'urbanisme intercommunal aurait dû être retenu ; la voie qui dessert la parcelle ne prévoit pas d'aire de retournement, alors qu'elle est en impasse ;

- c'est à tort que le tribunal a écarté le moyen tiré de ce que le permis contesté méconnaît l'article UC 10.1 du règlement du plan local d'urbanisme intercommunal ; les nombreuses fenêtres et baies vitrées du dernier niveau font obstacle à ce qu'il soit qualifié de combles ; au droit de ces fenêtres, le pied droit est nécessairement supérieur à 1 mètre ;

- le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme aurait dû être accueilli.

Par des mémoires, enregistrés les 23 octobre 2023 et 19 janvier 2024, la société Bénerville Avenue du Littoral, représentée par Me Durand, demande à la cour :

1°) de constater qu'il n'y a plus lieu de statuer sur la requête ;

2°) subsidiairement, de rejeter la requête ou de mettre en œuvre les dispositions des articles L. 600-5 ou L. 600-5-1 du code de l'urbanisme ;

3°) de mettre solidairement à la charge de Mme B... E..., de Mme D... O..., de Mme K... Q..., de M. A... F..., de M. J... C..., de Mme I... M..., de M. G... H... et de l'association Les amis de Bénerville-sur-Mer, Blonville-sur-Mer, Saint-Pierre-Azif, Tourgeville, Vauville et Villers-sur-Mer une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- dans le cadre du sursis à statuer ordonné par le jugement attaqué, un permis de régularisation lui a été délivré le 1er décembre 2023, de telle sorte qu'il n'y a plus lieu de statuer sur la requête ;

- le moyen tiré, par la voie de l'illégalité, de l'erreur manifeste d'appréciation commise par les auteurs du plan local d'urbanisme intercommunal en classant en zone UCc la parcelle AZ 76 est inopérant ; les requérants ne peuvent utilement invoquer les dispositions du POS du district de Trouville-Deauville, devenu caduc le 1er janvier 2016 et qui n'est donc pas le document d'urbanisme immédiatement antérieur au plan local d'urbanisme intercommunal de la communauté de commune Cœur Côte Fleurie ;

- les autres moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 mars 2024 et un mémoire enregistré, le 10 juin 2024, non communiqué, la commune de Bénerville-sur-Mer, représentée par la SELARL Juriadis, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge solidaire de Mme E... et autres.

Elle soutient que les moyens soulevés par Mme E... et autres ne sont pas fondés.

Par un mémoire, enregistré le 3 juin 2024, Mme E... déclare se désister purement et simplement de la requête.

Par une ordonnance du 17 mai 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 10 juin 2024 à 12 heures.

Un mémoire, présenté pour M. C... et autres, a été enregistré le 23 octobre 2024, postérieurement à la clôture de l'instruction et n'a pas été communiqué.

II. Par une requête et un mémoire, enregistrés sous le n°24NT01636, les 3 juin et 23 octobre 2024, M. J... C..., Mme D... O..., Mme K... Q..., M. A... F... et l'association Les amis de Bénerville-sur-Mer, Blonville-sur-Mer, Saint-Pierre-Azif, Tourgeville, Vauville et Villers-sur-Mer, représentés par Me Launay, demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 7 mai 2024 du tribunal administratif de Caen ;

2°) d'annuler l'arrêté du 2 novembre 2021 du maire de Bénerville-sur-Mer ainsi que la décision du 12 janvier 2022 rejetant leur recours gracieux formé contre cet arrêté ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Bénerville-sur-Mer une somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. C... et autres soutiennent que :

- le vice tiré de la méconnaissance de l'article UC 9.1 du règlement du plan local d'urbanisme intercommunal n'a pas été régularisé ;

- le jugement attaqué du 7 mai 2024 doit être annulé par voie de conséquence de l'annulation du jugement avant dire droit ;

- le permis de construire litigieux méconnaît l'article R. 431-24 du code de l'urbanisme ;

- il est illégal par voie d'exception de l'illégalité du classement du terrain d'assiette du projet en zone urbanisée UCc ;

- il méconnaît le préambule des dispositions du règlement du plan local d'urbanisme intercommunal applicable au secteur UCc ;

- il a été délivré en méconnaissance des dispositions de l'article UC 3.2.2 du règlement du plan local d'urbanisme intercommunal ;

- il méconnaît l'article UC 10.1 du règlement du plan local d'urbanisme intercommunal ;

- les dispositions de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme ont été méconnues.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 juillet 2024, la société Bénerville Avenue du Littoral, représentée par Me Durand, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge, solidairement, de M. J... C..., de Mme D... O..., de Mme K... Q..., de M. A... F..., de Mme I... M..., de M. G... H... et de l'association Les amis de Bénerville-sur-Mer, Blonville-sur-Mer, Saint-Pierre-Azif, Tourgeville, Vauville et Villers-sur-Mer.

Elle soutient que :

- il y a lieu de joindre les instances n°23NT02733 et 24NT01636 ;

- la requête d'appel, en ce qu'elle se fonde sur l'illégalité d'un permis de construire modificatif qui n'a jamais été contesté en première instance, est irrecevable ;

- le vice tiré de la méconnaissance de l'article UC 9.1 du règlement du plan local d'urbanisme intercommunal a été régularisé par le permis de construire modificatif ;

- les autres moyens soulevés par M. C... et autres ne sont pas fondés.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 29 août et 6 novembre 2024, la commune de Bénerville-sur-Mer, représentée par la SELARL Juriadis, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge, solidairement, de M. C... et autres.

Elle soutient que :

- le vice tiré de la méconnaissance de l'article UC 9.1 du règlement du plan local d'urbanisme intercommunal a été régularisé par le permis de construire modificatif ;

- le moyen tiré de ce que le jugement mettant fin à l'instance doit être annulé par voie de conséquence de l'annulation du jugement avant dire droit doit être écarté ;

- les autres moyens soulevés par M. C... et autres ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Dias,

- les conclusions de M. Le Brun, rapporteur public,

- et les observations de Me Launay, représentant M. C... et autres, et de Me Decroix, substituant Me Durand, représentant la société Bénerville Avenue du Littoral.

Considérant ce qui suit :

1. Le 5 août 2021, la société Bénerville Avenue du Littoral a déposé une demande de permis de construire un immeuble collectif de vingt-et-un logements et vingt-deux places de stationnement sur des parcelles cadastrées à la section AA sous les n°s 76 et 77 situées au lieu-dit " P... ", à Bénerville-sur-Mer (Manche). Par un arrêté du 2 novembre 2021, le maire de Bénerville-sur-Mer a délivré le permis de construire sollicité. Par une décision du 12 janvier 2022, le maire de Bénerville-sur-Mer a expressément rejeté le recours gracieux formé, le 29 décembre 2021, par Mme E..., Mme O..., Mme Q..., M. F... et M. C..., propriétaires de logements dans la résidence du Clos de Bénerville, voisine du terrain d'assiette du projet et l'association Les amis de Bénerville-sur-Mer, Blonville-sur-Mer, Saint-Pierre-Azif, Tourgeville, Vauville et Villers-sur-Mer et a rejeté implicitement le recours gracieux formé, le 7 janvier 2022, par Mme M... et M. H..., propriétaires de logements au sein de la résidence Nouvelle Vague, voisine du terrain d'assiette du projet. Mme E... et autres ont demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 2 novembre 2021 délivrant un permis de construire à la société Bénerville Avenue du Littoral ainsi que la décision du 12 janvier 2022 portant rejet de leur recours gracieux. Par un jugement avant dire droit du 10 juillet 2023, le tribunal administratif de Caen a rejeté comme irrecevables les conclusions de la demande de Mme E... et autres, en tant qu'elles émanent de M. H... et de Mme M... et, en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, a sursis à statuer sur leur demande d'annulation de l'arrêté du 2 novembre 2021 jusqu'à l'expiration d'un délai de quatre mois à compter de la notification de ce jugement, pour permettre à la société pétitionnaire de notifier au tribunal un permis de construire modificatif régularisant le vice tiré de ce que l'emprise au sol du projet autorisé par le permis litigieux dépasse la limite de 35 % de la superficie du terrain d'assiette du projet, en méconnaissance des dispositions de l'article UC 9.1 du règlement du plan local d'urbanisme intercommunal de la communauté de communes Cœur Côte Fleurie. Par un arrêté du 1er décembre 2023, le maire de Bénerville-sur-Mer a délivré un permis de régularisation à la société pétitionnaire. Par un jugement du 7 mai 2024 mettant fin à l'instance, le tribunal administratif de Caen a rejeté la demande de Mme E... et autres ainsi que les conclusions présentées par la commune de Bénerville-sur-Mer et par la société Bénerville Avenue du Littoral sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par une requête n°23NT02723, Mme E... et autres relèvent appel du jugement avant dire droit du 10 juillet 2023, en tant qu'il a écarté leurs moyens. Par une requête distincte n°24NT01636, M. C... et autres relèvent appel du jugement du 7 mai 2024 mettant fin à l'instance.

2. Les requêtes n°23NT02723 et n°24NT01636 sont relatives au même projet de construction et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur les conclusions de la requête dirigées contre le jugement avant dire droit du 10 juillet 2023 en tant qu'il a écarté leurs moyens :

En ce qui concerne le désistement de Mme E... :

3. Le désistement de Mme E... est pur et simple. Rien ne s'oppose à ce qu'il en soit donné acte.

En ce qui concerne l'exception de non-lieu à statuer opposée par la société Bénerville Avenue du Littoral :

4. Lorsqu'un tribunal administratif, après avoir écarté comme non fondés des moyens de la requête, a cependant retenu l'existence d'un vice entachant la légalité du permis de construire, de démolir ou d'aménager dont l'annulation lui était demandée et a alors décidé de surseoir à statuer en faisant usage des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme pour inviter l'administration à régulariser ce vice, l'auteur du recours formé contre ce jugement avant dire droit peut contester le jugement en tant qu'il a écarté comme non-fondés les moyens dirigés contre l'autorisation initiale d'urbanisme et également en tant qu'il a fait application de ces dispositions de l'article L 600-5-1. Toutefois, à compter de la délivrance du permis modificatif en vue de régulariser le vice relevé, dans le cadre du sursis à statuer prononcé par le jugement avant dire droit, les conclusions dirigées contre ce jugement en tant qu'il met en œuvre les pouvoirs que le juge tient de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme sont privées d'objet.

5. L'appel formé par les requérants contre le jugement avant dire droit du 10 juillet 2023 ne tend pas à l'annulation de ce jugement en tant qu'il a mis en œuvre les dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, mais en tant qu'il a écarté comme non fondés les moyens dirigés contre l'autorisation initiale, à l'exception du moyen tiré de la méconnaissance de l'article UC 9.1 du règlement du plan local d'urbanisme intercommunal de la communauté de communes Cœur Côte Fleurie. Par suite, la circonstance que, par un arrêté du 1er décembre 2023, le maire de Bénerville-sur-Mer a délivré à la société Bénerville Avenue du Littoral, dans le cadre du sursis à statuer ordonné par le jugement du 10 juillet 2023, un permis de construire modificatif en vue de régulariser le vice affectant le permis de construire initial du 2 novembre 2021, n'a pas privé de leur objet les conclusions de la demande. L'exception de non-lieu à statuer opposée par la société Bénerville Avenue du Littoral doit donc être écartée.

En ce qui concerne le bien-fondé du jugement attaqué :

S'agissant du moyen tiré de l'incomplétude du dossier de demande de permis :

6. Aux termes de l'article R. 431-24 du code de l'urbanisme : " Lorsque les travaux projetés portent sur la construction, sur une unité foncière ou sur plusieurs unités foncières contiguës, de plusieurs bâtiments dont le terrain d'assiette comprenant une ou plusieurs unités foncières contiguës, doit faire l'objet d'une division en propriété ou en jouissance avant l'achèvement de l'ensemble du projet, le dossier présenté à l'appui de la demande est complété par un plan de division et, lorsque des voies ou espaces communs sont prévus, le projet de constitution d'une association syndicale des acquéreurs à laquelle seront dévolus la propriété, la gestion et l'entretien de ces voies et espaces communs à moins que l'ensemble soit soumis au statut de la copropriété ou que le demandeur justifie de la conclusion avec la commune ou l'établissement public de coopération intercommunale compétent d'une convention prévoyant le transfert dans leur domaine de la totalité des voies et espaces communs une fois les travaux achevés. ".

7. La circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

8. Il n'est pas contesté que le projet litigieux, qui consiste à édifier - sur une même unité foncière - un immeuble de logements collectifs et ses garages, prévoit la mise à disposition, pour les propriétaires des logements du rez-de-chaussée de l'immeuble, de jardins privatifs sur lesquels ils auront un usage exclusif. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette division en jouissance du terrain d'assiette du projet doit intervenir avant l'achèvement de l'ensemble du projet. En tout état de cause, si le dossier de demande de permis de construire ne comporte pas de plan de division, les limites des jardins privatifs figurent sur le plan de masse joint au dossier de demande de permis, de telle sorte que l'absence de plan de division n'a pas pu fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable. Par suite, le moyen tiré de ce que le dossier de demande de permis de construire ne comportait pas le plan prévu par les dispositions de l'article R. 431-24 du code de l'urbanisme doit être écarté.

S'agissant des moyens tirés, par la voie de l'exception, de l'illégalité du règlement du plan local d'urbanisme intercommunal de la communauté de communes Cœur Côte Fleurie :

9. Si un permis de construire ne peut être délivré que pour un projet qui respecte la réglementation d'urbanisme en vigueur, il ne constitue pas un acte d'application de cette réglementation. Par suite, un requérant demandant l'annulation d'un permis de construire ne saurait utilement se borner à soutenir qu'il a été délivré sous l'empire d'un document d'urbanisme illégal, quelle que soit la nature de l'illégalité dont il se prévaut. Cependant, il résulte de l'article L. 125-5 devenu L. 121-8 du code de l'urbanisme que la déclaration d'illégalité d'un document d'urbanisme a, au même titre que son annulation pour excès de pouvoir, pour effet de remettre en vigueur le document d'urbanisme immédiatement antérieur. Dès lors, il peut être utilement soutenu devant le juge qu'un permis de construire a été délivré sous l'empire d'un document d'urbanisme illégal - sous réserve, en ce qui concerne les vices de forme ou de procédure, des dispositions de l'article L. 600-1 du même code -, à la condition que le requérant fasse en outre valoir que ce permis méconnaît les dispositions pertinentes ainsi remises en vigueur.

Quant au moyen tiré de ce que le classement de la parcelle en zone UCc n'est pas en cohérence avec les orientations du projet d'aménagement et de développement durables (PADD) du plan local d'urbanisme intercommunal (PLUI) :

10. Aux termes de l'article L. 151-2 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au litige : " Le plan local d'urbanisme comprend : 1° Un rapport de présentation ; 2° Un projet d'aménagement et de développement durables ; 3° Des orientations d'aménagement et de programmation ; 4° Un règlement ; 5° Des annexes. Chacun de ces éléments peut comprendre un ou plusieurs documents graphiques. (...)". Aux termes de l'article L. 151-5 du même code : " Le projet d'aménagement et de développement durables définit : 1° Les orientations générales des politiques d'aménagement, d'équipement, d'urbanisme, de protection des espaces naturels, agricoles et forestiers, et de préservation ou de remise en bon état des continuités écologiques. (...) ". Aux termes de l'article L. 151-8 de ce code : " Le règlement fixe, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols (...) ".

11. Pour apprécier la cohérence ainsi exigée au sein du plan local d'urbanisme entre le règlement et le projet d'aménagement et de développement durables, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle du territoire couvert par le document d'urbanisme, si le règlement ne contrarie pas les orientations générales et objectifs que les auteurs du document ont définis dans le projet d'aménagement et de développement durables, compte tenu de leur degré de précision. Par suite, l'inadéquation d'une disposition du règlement du plan local d'urbanisme à une orientation ou un objectif du projet d'aménagement et de développement durables ne suffit pas nécessairement, compte tenu de l'existence d'autres orientations ou objectifs au sein de ce projet, à caractériser une incohérence entre ce règlement et ce projet.

12. D'une part, le PADD du PLUI de la communauté de communes Cœur Côte Fleurie contient une orientation générale intitulée " Un aménagement encadré par la valorisation agricole environnementale et paysagère ", qui pose le principe de " la non-constructibilité des espaces agricoles en maîtrisant les changements de destination et en mettant en œuvre l'application de la loi Littoral concernant l'absence d'extension de l'urbanisation en dehors de la lisière urbaine ". Le PADD précise qu'il " convient de se reporter à la carte ci-après pour ce qui concerne la gestion de la lisière urbaine dans le cadre de l'application de la loi Littoral ainsi qu'à la quantification des espaces situés en extension de l'urbanisation ". Le PADD impose également " La prise en compte de la trame verte et bleue pour optimiser le fonctionnement environnemental et support à la mise en scène paysagère du territoire ".

13. D'autre part, le PADD comporte une orientation générale intitulée " Un aménagement cohérent et durable permettant de poursuivre la dynamique territoriale ", qui privilégie la mise en œuvre des projets dans le tissu urbain existant. Cette orientation prévoit, toutefois, qu'au-delà de l'optimisation du tissu, certains projets en extension s'avèrent néanmoins nécessaires, notamment en matière d'activités artisanales de proximité (a) et de développement résidentiel (b). Dans ce second cas, " il s'agit (...) davantage d'utiliser des opportunités de reconfiguration des lisières urbaines que de vrais développements à forts impacts quantitatifs ". Le PADD prévoit par ailleurs qu'" Outre quelques évolutions des lisières sur des surfaces ou des constructibilités ne générant aucun besoin d'aménagement global ", 3 projets d'extension feront l'objet d'orientations d'aménagement et de programmation (OAP), à savoir le parc artisanal de La Croix Sonnet, l'écoparc de Tourgeville et le village artisanal à Villers-sur-Mer.

14. Il ressort des pièces du dossier que le PLUI de la communauté de communes Cœur Côte Fleurie, approuvé le 22 décembre 2012, a classé en zone urbanisée UC, décrite par le règlement applicable à la zone comme " une zone mixte mais principalement pavillonnaire ", et plus précisément dans le secteur UCc accueillant " des constructions pavillonnaires plus basses ", la parcelle AA 76 formant le terrain d'assiette du projet, précédemment classé en zone naturelle 3NDb dans le plan d'occupation des sols (POS) du District de Deauville-Trouville. Il ressort des pièces du dossier que la parcelle concernée, d'une superficie de 2 180 m², est vierge de toute construction et qu'elle ouvre, au sud, sur de vastes espaces naturels comprenant le mont Canisy, identifié par le PADD comme un des " plus forts éléments d'attractivité du territoire ". Toutefois, il ressort des pièces du dossier que le PADD n'a pas identifié le terrain d'assiette du projet comme un espace agricole, qu'il le situe en dehors de la trame verte et bleue et le représente, dans la carte figurant à la page 43 relative à la gestion de la lisière urbaine, comme faisant partie intégrante de " l'enveloppe urbaine " de l'agglomération. Ainsi, le classement, par le zonage et le règlement du PLUI, de la parcelle litigieuse en zone urbanisée UCc n'est pas incohérent au regard des orientations du PADD qui affirment " la non-constructibilité des espaces agricoles ", imposent de tenir compte de la trame verte et bleue et admettent, pour le développement de l'offre résidentielle - à condition que ces développements n'aient pas un " fort impact quantitatif " - d'utiliser les opportunités de reconfiguration des lisières urbaines. Le moyen tiré, par voie d'exception, de la méconnaissance de l'article L. 151-8 du code de l'urbanisme doit, par suite, être écarté.

Quant au moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation à avoir classé la parcelle en cause en zone urbaine :

15. Aux termes de l'article R. 151-18, dans sa rédaction applicable au litige : " Les zones urbaines sont dites " zones U ". Peuvent être classés en zone urbaine, les secteurs déjà urbanisés et les secteurs où les équipements publics existants ou en cours de réalisation ont une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter. "

16. Il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet se situe à moins de 300 mètres à l'est du rivage et à moins de 200 mètres à l'ouest de l'hippodrome de Clairefontaine. Ainsi qu'il a été dit précédemment, ce terrain - d'une superficie d'environ 2 180 m² et dépourvu de construction - ouvre, à l'est, sur une zone naturelle NI englobant l'hippodrome et ses abords et, au sud, sur un vaste espace naturel, marqué par la proximité du Mont Canisy, identifié par le PADD du PLUI comme un élément structurant du paysage de l'agglomération. Toutefois, ce terrain jouxte, à l'ouest et au nord, une zone pavillonnaire qui comporte plusieurs immeubles collectifs, dont le plus proche est situé à une dizaine de mètres du terrain d'assiette du projet. Par ailleurs, il n'est pas établi ni même allégué que les équipements publics existants dans le secteur ou en cours de réalisation n'auraient pas une capacité suffisante pour desservir le bâtiment projeté. Si le terrain se situe dans un secteur identifié par la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement comme " prédisposé à la présence de zones humides ", il ressort tant du plan de servitudes annexé au règlement du PLUI que du diagnostic réalisé par un bureau d'études spécialisées qu'il n'est pas situé sur une zone humide. En outre, il ressort des pièces du dossier que le terrain ne s'inscrit pas dans un corridor écologique, qu'il n'empiète pas sur la trame verte et bleue de l'agglomération et qu'un vaste terrain agricole le sépare d'espaces classés en ZNIEFF. Compte tenu de l'intérêt écologique relatif de la parcelle litigieuse, de sa superficie limitée ainsi que du parti d'urbanisme retenu par les auteurs du PLUI d'utiliser les opportunités de reconfiguration des lisières urbaines pour permettre le développement de l'offre résidentielle n'ayant pas un fort impact quantitatif, les auteurs du PLUI n'ont pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en classant la parcelle en cause en zone urbaine et le moyen doit, par suite, être écarté.

En ce qui concerne les autres moyens écartés par le jugement avant dire droit du 10 juillet 2023 :

S'agissant de la méconnaissance du préambule des dispositions du règlement du PLUI applicables au secteur UCc :

17. En premier lieu, selon le préambule du règlement de la zone UC du PLU de la communauté de communes Cœur Côte Fleurie, la zone UC " est une zone mixte mais principalement pavillonnaire, avec quelques immeubles collectifs de faible gabarit, qui comprend 4 secteurs : / Le secteur Uca, correspondant aux secteurs dont la densité et l'emprise au sol sont légèrement plus élevées que dans la zone UC, avec la présence possible de construction mitoyennes, / - Le secteur Ucb, dont la superficie est assez restreinte, correspond aux quartiers occupés par de grandes propriétés, principalement édifiées au début du 20ème siècle à flanc de coteau. /- Le secteur Ucc, avec des constructions pavillonnaires plus basses. (...) ".

18. Ce préambule, qui se borne à une description des secteurs concernés, ne comporte aucune disposition de portée réglementaire dont la méconnaissance serait susceptible d'être utilement invoquée à l'encontre d'un permis de construire. Au surplus, en ce qu'il décrit la zone UC comme une zone mixte, mais principalement pavillonnaire avec quelques immeubles de faible gabarit et le secteur UCc comme comportant des constructions plus basses, ce préambule ne saurait s'analyser comme y interdisant la construction d'immeubles collectifs. Le moyen tiré de ce que le permis de construire contesté aurait été délivré en méconnaissance de ce préambule ne peut, par suite, qu'être écarté.

S'agissant du moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article UC 3.2.2 du règlement du PLUI :

19. En deuxième lieu, aux termes de l'article UC. 3.2.2 du règlement du PLUI, relatif aux voies nouvelles ouvertes à la circulation automobile publique : " Les voies en impasse ouvertes à la circulation automobile sont autorisées à condition : / (...) / Pour celles dont la longueur est supérieure à 50 mètres, de prévoir une aire de retournement ".

20. Il ressort des pièces du dossier que le projet contesté ne prévoit pas la création d'une voie nouvelle, ouverte à la circulation publique. Par suite, les dispositions de l'article 3.2.2 du règlement applicable à la zone UC ne peuvent être utilement invoquées à l'encontre du permis litigieux.

S'agissant du moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article UC 10.1 du règlement du PLUI :

21. En troisième lieu, aux termes de l'article UC. 10.1 du règlement du PLUI : " (...) Dans le secteur UCc, la hauteur plafond des constructions, hors souches de cheminées, est limitée à : / 9 mètres. / et 3 niveaux (R+1+1 comble ou attiques). ". Le lexique du PLUI précise : " Est qualifié de combles l'espace compris entre le plancher haut et la toiture du bâtiment, à condition que le pied droit ne dépasse pas un mètre. Si le pied droit présente une hauteur supérieure à un mètre, l'étage est considéré comme un niveau entier de construction. ". Il ressort du schéma explicatif figurant au lexique du PLUI que le pied droit correspond à la distance verticale entre, d'une part, la ligne de rupture de pente entre la sous face du toit et celle des murs, et d'autre part, le plancher haut du dernier niveau de la construction.

22. Il ressort des pièces du dossier que le troisième niveau du bâtiment litigieux se trouve entre le plancher haut et le toit à la Mansart et que les pieds droits, formés par la ligne de rupture de pente, sont d'une hauteur inférieure à un mètre. Par suite, ce niveau présente le caractère de combles. S'il est vrai que le projet prévoit, au dernier niveau de l'immeuble, plusieurs ouvertures verticales, d'une hauteur de plus d'un mètre, celles-ci sont en saillie par rapport à la toiture et restent ainsi sans incidence sur la mesure des pieds droits, qui s'effectue depuis l'intérieur du bâtiment. Ces ouvertures ne sont donc pas de nature à faire regarder le dernier niveau du bâtiment litigieux comme ne constituant pas des combles, au sens et pour l'application de l'article UC 10.1 du règlement du PLUI. Par suite, le bâtiment litigieux, qui comporte un rez-de-chaussée, un étage et des combles, est conforme à ces dispositions. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article UC. 10.1 du règlement du PLUI doit ainsi être écarté.

S'agissant du moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme :

23. En dernier lieu, aux termes de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales ".

24. S'il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet, situé dans le secteur dit P..., ouvre, au sud et au sud-est, sur de vastes espaces naturels, de type bocager et offre des vues directes sur le Mont Canisy, il borde également, au nord et à l'ouest, une zone pavillonnaire accueillant des villas de type balnéaire et jouxte un ensemble résidentiel de trois immeubles collectifs de type R + 1+ C. Implanté parallèlement à la pente du Côteau, face aux espaces naturels, ce bâtiment comportant un étage et des combles, couronné d'une toiture en ardoises mansardée et agrémentée de lucarnes à fronton droit, présente un gabarit modéré et un aspect classique qui ne déparent pas les constructions environnantes et s'insère harmonieusement dans le paysage existant. Par suite, en délivrant le permis contesté, le maire de Bénerville-sur-Mer n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions précitées de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme.

25. Il résulte de tout ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a écarté leurs moyens autres que celui tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article UC 9.1 du règlement du PLUI de la communauté de communes Cœur Côte Fleurie.

Sur les conclusions dirigées contre le jugement du 7 mai 2024 mettant fin à l'instance :

En ce qui concerne le bien fondé du jugement attaqué :

26. En premier lieu, compte tenu de ce qui a été dit au point 25 du présent arrêt, le moyen tiré de ce que le jugement attaqué devrait être annulé, par voie de conséquence de l'annulation du jugement avant dire droit du 10 juillet 2023, doit être écarté.

27. En deuxième lieu, lorsque le juge a fait usage de la faculté de surseoir à statuer ouverte par l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, qu'un permis modificatif a été délivré et que le juge a mis fin à l'instance par un second jugement, l'auteur d'un recours contre ce jugement peut contester la légalité du permis de construire modificatif par des moyens propres et au motif que le permis initial n'était pas régularisable.

28. Les moyens tirés de ce que le dossier de demande de permis de construire ne comportait pas de plan de division, de l'illégalité, par voie d'exception, du PLU de la communauté de communes Cœur Côte Fleurie et de la méconnaissance des articles UC 3.2.2 et UC 10.1 du règlement du PLUI ainsi que l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme sont dirigés contre le permis de construire initial et non contre le permis de construire modificatif. Par suite, ces moyens sont inopérants.

29. En troisième lieu, aux termes de l'article UC. 9.1 du règlement du PLUI : " Dans la zone UC, à l'exception de secteurs UCa et UCd : / L'emprise au sol ne peut excéder 35 %. ". Le lexique du PLUI définit l'emprise au sol comme " la projection verticale du volume de la construction, tous débords et surplombs inclus (y compris les terrasses et débords de toit). ".

30. Il ressort du formulaire de demande de permis de construire initial que le terrain d'assiette du projet présente une superficie de 2 180 m² de telle sorte que l'emprise au sol des constructions projetées ne peut, sans méconnaître la limite de 35 % fixée par les dispositions précitées, excéder 763 m². Il ressort des pièces du dossier, notamment de l'annexe 1 jointe au dossier de demande de permis de construire initial, que la société pétitionnaire a additionné les emprises au sol de l'immeuble, de 603,46 m², du garage et des parkings couverts, de 157,47 m², en omettant l'aire de stockage des poubelles, qui entourée d'un muret de clôture, présente une surface au sol en enrobé de 24 m².

31. Toutefois, il ressort des pièces du dossier, que dans le cadre du sursis à statuer prononcé par le jugement avant dire droit du 10 juillet 2023 du tribunal administratif de Caen, la société pétitionnaire a déposé, le 28 juillet 2023, une demande de permis de construire modificatif, complétée le 4 septembre suivant, portant sur la suppression des murets de clôture de l'aire de stockage des poubelles. Cette aire de stockage se limitant, désormais, à une surface en enrobé ne dépassant pas du sol et ne pouvant donner lieu à une projection verticale, n'a plus à être prise en compte dans le calcul de l'emprise au sol du projet. Dans l'état du projet ainsi modifié par l'arrêté du 1er décembre 2023, l'emprise au sol des constructions litigieuses se limite ainsi à la surface de l'immeuble de logements, des garages et du parking couvert, soit un total de 760,93 m² qui n'excède pas la limite de 35 % de la superficie du terrain d'assiette du projet, conformément aux dispositions de l'article UC 9.1 du règlement du PLUI. Ainsi, la délivrance, le 1er décembre 2023, à la société Bénerville Avenue du Littoral, de l'arrêté de permis de construire modificatif a régularisé le vice affectant l'arrêté de permis de construire initial du 2 novembre 2021.

32. Il résulte de tout ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande.

Sur les frais liés au litige :

33. En premier lieu, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Bénerville-sur-Mer et la société Bénerville Avenue du Littoral, qui n'ont pas la qualité de partie perdante, versent aux requérants la somme que ceux-ci réclament au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.

34. En deuxième lieu, M. H... et Mme M... ne sont pas parties dans la présente instance. Par suite, les conclusions présentées par la commune de Bénerville-sur-Mer et par la société Bénerville Avenue du Littoral tendant à ce que des sommes soient mises à leur charge au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

35. En troisième lieu, d'une part, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme E..., la somme que la société Bénerville Avenue du Littoral demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, dans l'instance n°23NT02723. D'autre part, Mme E... n'étant pas partie à l'instance n°24NT01636, les conclusions présentées par la commune de Bénerville-sur-Mer et par la société Bénerville Avenue du Littoral tendant à ce que des sommes soient mises à sa charge au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

36. En quatrième lieu, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre solidairement à la charge de M. J... C..., de Mme D... O..., de Mme K... Q..., de M. A... F... et de l'association Les amis de Bénerville-sur-Mer, Blonville-sur-Mer, Saint-Pierre-Azif, Tourgeville, Vauville et Villers-sur-Mer des sommes de 2 000 euros à verser respectivement à la société SNC Bénerville Avenue du Littoral et à la commune de Bénerville-sur-Mer au titre des frais exposées par ces dernières et non comprises dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : Il est donné acte du désistement de Mme B... E... dans l'instance n°23NT02723.

Article 2 : La requête n°23NT02723, en tant qu'elle émane de M. C... et autres est rejetée.

Article 3 : La requête n°24NT01636 est rejetée.

Article 4 : M. C..., Mme O..., Mme Q..., M. F... et l'association Les amis de Bénerville-sur-Mer, Blonville-sur-Mer, Saint-Pierre-Azif, Tourgeville, Vauville et Villers-sur-Mer verseront solidairement une somme de 2 000 euros à la société SNC Bénerville Avenue du Littoral.

Article 5 : M. C..., Mme O..., Mme Q..., M. F... et l'association Les amis de Bénerville-sur-Mer, Blonville-sur-Mer, Saint-Pierre-Azif, Tourgeville, Vauville et Villers-sur-Mer verseront solidairement une somme de 2 000 euros à la commune de Bénerville-sur-Mer.

Article 6 : Le surplus des conclusions présentées par la société Bénerville Avenue du Littoral et par la commune de Bénerville-sur-Mer sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative est rejeté.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... E..., à M. J... C..., à Mme D... O..., à Mme K... Q..., à M. A... F..., à l'association Les amis de Bénerville-sur-Mer, Blonville-sur-Mer, Saint-Pierre-Azif, Tourgeville, Vauville et Villers-sur-Mer, à la commune de Bénerville-sur-Mer et à la société Bénerville Avenue du Littoral.

Délibéré après l'audience du 1er avril 2025, à laquelle siégeaient :

- Mme Montes-Derouet, présidente,

- M. Dias, premier conseiller,

- M. Mas, conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 mai 2025.

Le rapporteur,

R. DIAS

La présidente,

I. MONTES-DEROUETLa greffière,

A. MARCHAND

La République mande et ordonne au préfet de la Manche en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°s 23NT02723, 24NT01636


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NT02723
Date de la décision : 02/05/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MONTES-DEROUET
Rapporteur ?: M. Romain DIAS
Rapporteur public ?: M. LE BRUN
Avocat(s) : SELARL CHRISTOPHE LAUNAY

Origine de la décision
Date de l'import : 11/05/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-05-02;23nt02723 ?
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