La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/04/2025 | FRANCE | N°24NT00417

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 4ème chambre, 11 avril 2025, 24NT00417


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



L'office public de l'habitat Côtes-d'Armor Habitat, devenu Terres d'Armor Habitat, a demandé au tribunal administratif de Rennes, à titre principal, de condamner la société MMA IARD Assurances Mutuelles à lui verser la somme de 184 898,80 euros toutes taxes comprises (TTC), au titre des désordres affectant le programme de construction de logements situé sur le territoire de la commune de Binic, la somme de 217 558,91 euros TTC au titre des préjudices consécutifs subis et la s

omme de 26 328,24 euros au titre des frais d'expertise, à titre subsidiaire, de cond...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'office public de l'habitat Côtes-d'Armor Habitat, devenu Terres d'Armor Habitat, a demandé au tribunal administratif de Rennes, à titre principal, de condamner la société MMA IARD Assurances Mutuelles à lui verser la somme de 184 898,80 euros toutes taxes comprises (TTC), au titre des désordres affectant le programme de construction de logements situé sur le territoire de la commune de Binic, la somme de 217 558,91 euros TTC au titre des préjudices consécutifs subis et la somme de 26 328,24 euros au titre des frais d'expertise, à titre subsidiaire, de condamner in solidum ou à défaut, chacun pour son fait ou sa faute, la Selarl TCA, en qualité de mandataire ad hoc de la société Ferreira, et D..., en la personne de Me Pauline Collin, en qualité de mandataire liquidateur de la société B... et associés, à lui verser ces mêmes sommes.

Par un jugement n° 2100318 du 14 décembre 2023, le tribunal administratif de Rennes, d'une part, a condamné la société MMA IARD Assurances Mutuelles à verser à Terres d'Armor Habitat la somme de 218 475 euros TTC en réparation de ses préjudices, avec intérêts au taux légal à partir du 21 janvier 2021 et capitalisation, ainsi que la somme de 21 063 euros TTC au titre des frais d'expertise, d'autre part, a également condamné la Selarl TCA, mandataire ad hoc de la société Ferreira père et fils, à verser à la société MMA IARD Assurances Mutuelles la somme de 141 868 euros TTC au titre du coût des travaux réparatoires des ouvrages et a rejeté le surplus des conclusions des parties.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 14 février et 5 décembre 2024, la société MMA IARD Assurances Mutuelles, représentée par Me Guillois, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rennes du 14 décembre 2023 en tant, d'une part, qu'il l'a condamnée à indemniser Terres d'Armor Habitat des désordres litigieux ainsi que des frais d'expertise et a mis à sa charge la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, d'autre part, qu'il a limité la condamnation de la SELARL TCA à lui verser la somme de 141 868 euros TTC, enfin, qu'il a rejeté son recours subrogatoire contre D..., en qualité de mandataire liquidateur de la société B..., et qu'il l'a condamnée à verser à cette dernière la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) à titre principal, de rejeter les conclusions de Terres d'Armor Habitat dirigées contre elle ;

3°) à titre subsidiaire :

- de rejeter les conclusions de Terres d'Armor Habitat dirigées contre elle au titre des préjudices consécutifs aux désordres en litige ou, à titre encore plus subsidiaire, les ramener à de plus juste proportion ;

- de ramener à la somme de 39 528,62 euros HT ou, a minima, à la somme de 69 623,17 euros HT, le montant des condamnations qui pourraient être prononcées au titre du coût des travaux réparatoires ;

- de mettre à la charge de Terres d'Armor Habitat les frais de l'expertise ;

4°) de condamner in solidum D... en sa qualité de mandataire ad hoc de la société B... et la SELARL TCA en qualité de mandataire ad hoc de la société Ferreira père et fils, à lui verser une somme de 251 551,90 euros ;

5°) de mettre à la charge de Terres d'Armor Habitat ou de toute autre partie perdante la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la juridiction administrative n'est pas compétente pour statuer sur les conclusions de Terres d'Armor Habitat dirigées contre elle ; en effet, les contrats conclus par un établissement public industriel et commercial pour les besoins de ses activités relèvent de la compétence de la juridiction judiciaire ; le contrat d'assurance dommages-ouvrage en litige ne comporte aucune clause exorbitante du droit commun et n'a pas pour objet de faire participer l'assureur à l'exécution d'un service public ;

- sa responsabilité contractuelle ne peut être engagée, en particulier en ce qui concerne les pertes locatives ; en effet, il résulte des stipulations du contrat qu'elle était tenue de recourir à une expertise préliminaire pour constater et évaluer les dommages déclarés par Terres d'Armor Habitat et qu'elle ne pouvait pas garantir son assuré sans ce rapport d'expertise ; elle n'a pas été en mesure d'instruire le sinistre en raison des manquements de l'office public qui ne l'a pas autorisée à accéder au chantier pour constater la matérialité des désordres et leur caractère décennal ;

- il y a lieu de retenir que les désordres constatés résultent des fautes du maître de l'ouvrage ;

- le tribunal n'a pas répondu au moyen tiré du caractère limitatif et exclusif des sanctions applicables aux manquements de l'assureur à ses obligations ; en vertu des dispositions de l'article L. 242-1 du code des assurances, l'assureur " dommages ouvrage " ne peut être condamné à supporter le préjudice immatériel subi par le maître d'ouvrage ; par ailleurs, les dommages immatériels n'étaient pas garantis puisque la garantie en litige n'a été souscrite que pour les dommages survenus après la réception de l'ouvrage ;

- le préjudice lié aux pertes locatives sera encore ramené à de plus justes proportions ; Terres d'Armor Habitat n'est pas fondé à demander une indemnité au titre de la perte des subventions ; ses demandes indemnitaires au titre des dommages immatériels en cause d'appel dépassent le montant du plafond de garantie de l'assurance souscrite ; il n'est pas fondé à demander le remboursement d'un préjudice lié à l'augmentation du montant des travaux du fait du passage d'un taux de TVA à 10 % au lieu de 5,5 % ;

- pour retenir un montant d'indemnisation de 177 335 euros TTC au titre des travaux réparatoires, le tribunal a considéré à tort que les désordres ne pouvaient pas être repris et que des travaux de déconstruction puis de reconstruction étaient préférables ; les travaux de reprise sont de 39 528, 62 € HT ;

- le tribunal n'a pas répondu au moyen tiré du caractère manifestement excessif du coût des travaux de démolition-reconstruction retenu par l'expert ; ce coût doit être limité à la somme de 69 623,17 euros HT ;

- elle est fondée à demander, à titre reconventionnel, la condamnation in solidum des constructeurs, dès lors que les désordres affectant les ouvrages sont imputables à des défauts de surveillance du chantier par la société B... et sont de nature à engager sa responsabilité contractuelle ;

- les constructeurs ne peuvent se prévaloir des fautes de l'assureur " dommages ouvrage " ; ils ne peuvent donc pas rechercher la responsabilité quasi-délictuelle de l'assureur au motif que ce dernier n'aurait pas préfinancé en temps utile la réparation des désordres ;

- les frais liés aux opérations d'expertise résultent de la volonté de Terres d'Armor Habitat de ne pas poursuivre le règlement amiable de ce sinistre et devront être mis à sa charge.

Par des mémoires, enregistrés les 27 mai et 4 juillet 2024, la société Bureau Veritas Construction, représentée par la Selarl d'avocats GVB, conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) à titre principal, au rejet de l'appel en garantie de la société GOPMJ et de toute demande formée à son encontre ;

3°) à titre subsidiaire, à la condamnation de la société MMA IARD Assurances Mutuelles, de la Selarl TCA, en sa qualité de mandataire ad hoc de la société Ferreira père et fils, de la société Areas Dommages et de Terres d'Armor Habitat à la garantir de toute condamnation qui serait prononcée à son encontre ;

4°) à ce que soit mis à la charge de la société GOPMJ et de Terres d'Armor Habitat les dépens de l'instance ;

5°) à ce que soit mis à la charge de Terres d'Armor Habitat ou de toute autre partie perdante la somme de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

6°) à ce que soit mis à la charge de la société GOPMJ la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- seule la société GOPMJ formule des demandes à son encontre, sans en préciser le fondement juridique ; il n'est pas établi qu'elle aurait commis une faute ayant donné lieu à la survenance d'un préjudice direct et certain, comme l'a d'ailleurs relevé l'expert ;

- à titre subsidiaire, elle est fondée à demander que la société MMA IARD Assurances Mutuelles, la Selarl TCA, en sa qualité de mandataire ad hoc de la société Ferreira père et fils, la société Areas Dommages et Terres d'Armor Habitat soient condamnées à la garantir de toute condamnation qui serait prononcée à son encontre.

Par un mémoire, enregistré le 7 juin 2024, D..., en qualité de mandataire liquidateur de la société B... et associés, représentée par Me Groleau, conclut :

1°) à titre principal, au rejet de la requête et de toute demande formée contre elle ;

2°) à titre subsidiaire, à ce que sa condamnation soit limitée à sa quote-part de responsabilité, sans solidarité, et à ce que la Selarl TCA, en sa qualité de mandataire liquidateur de la société Ferreira père et fils, la société Bureau Véritas et la société MMA IARD Assurances Mutuelles soient condamnées à la garantir de toutes les condamnations qui seraient prononcées à son encontre ;

3°) à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de toute partie succombante au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le contrat d'assurance dommages-ouvrage litigieux présente le caractère d'un contrat administratif ; par suite, la juridiction administrative est bien compétente ;

- aucune faute ne peut être reprochée au maître d'œuvre, qui a été particulièrement diligent dans le cadre de sa mission de direction de l'exécution des travaux (DET) ; les malfaçons constatées sont uniquement de la responsabilité de la société Ferreira père et fils, ainsi que de son sous-traitant, la société A Roj ; le maître d'ouvrage a commis une faute en attribuant les marchés ;

- aucune solidarité ne peut être retenue entre l'architecte, l'entreprise attributaire et le contrôleur technique ;

- dans l'hypothèse où M. B... serait considéré comme partiellement responsable du sinistre, il devra être garanti et relevé indemne par les autres intervenants sur le chantier en raison de leurs fautes respectives ;

- le préjudice invoqué par Terres d'Armor Habitat n'est pas caractérisé au-delà de l'évaluation opérée par M. C... dans sa note à l'expert judiciaire du 6 avril 2020.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 novembre 2024, l'office public de l'habitat Terres d'Armor Habitat, représenté par Me Fekri, conclut :

1°) à titre principal, au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la société MMA IARD Assurances Mutuelles au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) à titre subsidiaire, à la condamnation de la société MMA IARD Assurances Mutuelles à lui verser la somme de 184 898,80 euros TTC au titre des désordres, la somme de 217 558,91 euros TTC au titre des préjudices consécutifs à ces désordres et la somme de 26 328,24 euros au titre des frais d'expertise judiciaire ;

3°) à titre infiniment subsidiaire, à la condamnation in solidum ou à défaut, chacun pour son fait ou sa faute, de la Selarl TCA, en qualité de mandataire ad hoc de la société Ferreira père et fils, et de D..., en qualité de mandataire liquidateur de la société B... et associés, à lui verser les sommes précitées ;

4°) à ce que ces sommes portent intérêt au taux légal à compter de l'enregistrement de sa requête et que les intérêts soient capitalisés chaque année à la date anniversaire de l'enregistrement ;

5°) à ce que soit mis à la charge, in solidum ou à défaut, chacun pour son fait ou sa faute, de la société MMA IARD Assurances Mutuelles, de la Selarl TCA, en qualité de mandataire ad hoc de la société Ferreira père et fils et de D..., en qualité de mandataire judiciaire de la société B... et associés, une somme de 10 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- à titre principal, il y a lieu de rejeter la requête ; le contrat d'assurance dommages-ouvrage litigieux présente le caractère d'un contrat administratif ; par suite, la juridiction administrative est bien compétente ; la société MMA IARD Assurances Mutuelles a commis une faute en s'abstenant de lui faire part de sa position, dans le délai imparti, à la suite de sa déclaration de sinistre du 9 mai 2016 ; la société MMA IARD Assurances Mutuelles a manqué à ses obligations contractuelles en refusant sa garantie pour des désordres manifestement de nature décennale et en ne permettant pas, en conséquence, un préfinancement rapide des travaux de reprise, alors même que l'entreprise attributaire du lot de travaux faisait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire ; le recours à la procédure de référé expertise ne saurait valoir renoncement à la procédure d'expertise amiable ; son refus de garantie est insuffisamment motivé et ne repose sur aucun motif légitime ; la procédure de liquidation judiciaire emporte nécessairement résiliation du contrat et exclut toute mise en demeure du constructeur, qui serait en effet superfétatoire ; les désordres ont fait l'objet de déclarations régulières de sa part ; le jugement attaqué est régulier ; les indemnisations octroyées par le tribunal sont fondées ;

- à titre subsidiaire, il est fondé à demander la condamnation, au titre de sa responsabilité contractuelle, de la société MMA IARD Assurances Mutuelles à lui verser la somme de 184 898,80 euros TTC au titre des désordres, la somme de 217 558,91 euros TTC au titre des préjudices consécutifs à ces désordres et la somme de 26 328,24 euros au titre des frais d'expertise judiciaire ;

- à titre infiniment subsidiaire, il est fondé à demander la condamnation in solidum ou à défaut, chacun pour son fait ou sa faute, de la Selarl TCA, en qualité de mandataire de la société Ferreira père et fils, et de D..., en qualité de mandataire liquidateur de la société B... et associés, à lui verser les sommes précitées ; la responsabilité contractuelle des constructeurs doit être engagée du fait des graves non-conformités affectant la solidité de l'ouvrage, ayant conduit à l'ajournement des travaux qui n'ont pu être ni achevés, ni réceptionnés ; les prestations réalisées par la société Ferreira père et fils ne respectent ni les prescriptions du marché, ni les règles de l'art ; le maître d'œuvre a commis des manquements à sa mission de surveillance de l'exécution des travaux (DET), ainsi qu'à son devoir de conseil ; les désordres en litige trouvent leur origine dans des fautes conjointes et communes des différents participants à l'opération de travaux qui devront être condamnés conjointement et solidairement à l'indemniser des préjudices subis ; aucune faute ne peut lui être reprochée dans la procédure de passation du marché de travaux litigieux ; si la nullité du marché était caractérisée par la cour de céans, le présent litige pourrait naturellement se régler sur un terrain extracontractuel ; la société Areas Dommages ne justifie pas d'un intérêt à intervenir dans la présente instance, dans la mesure où le litige est sans incidence directe sur ses droits et obligations, par ailleurs, ses demandes sont infondées.

Par un mémoire enregistré le 3 décembre 2024, la société Areas Dommages, représentée par Me Collet, conclut :

1°) à titre principal, à ce que le jugement attaqué soit annulé en tant qu'il n'a pas admis son intervention volontaire, au rejet de la requête de la société MMA IARD Assurances Mutuelles et à ce qu'il soit mis à sa charge la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) à titre subsidiaire, au rejet des demandes de Terres d'Armor Habitat et de l'ensemble des demandes des parties formées contre elle et à ce que soit mise à sa charge la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- son intervention est recevable, en sa qualité d'assureur de la société Ferreira père et fils, dès lors que le litige a une incidence directe sur ses droits et obligations ;

- à titre principal, les moyens invoqués par la société MMA IARD Assurances Mutuelles sont infondés ;

- à titre subsidiaire, il y a lieu de retenir que les désordres constatés résultent des fautes du maître de l'ouvrage ;

- les conclusions à fin d'appel en garantie dirigées contre elle par la société Bureau Veritas Construction concernent un contrat de droit privé et ressortissent, dès lors, à la compétence de la juridiction judiciaire.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code des assurances ;

- le code de la construction et de l'habitation ;

- la loi n° 2001-1168 du 11 décembre 2001 ;

- l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 ;

- le décret n° 2005-1742 du 30 décembre 2005 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Chabernaud,

- les conclusions de Mme Rosemberg, rapporteure publique,

- et de Me Guillois, représentant MMA IARD Assurances Mutuelles, Me Guillon-Coudray, représentant Terre d'Armor Habitat, Me Groleau, représentant D..., Me Marie, substituant Me Collet, représentant la société Areas Dommages, et de Me Bourdeaux, représentant Bureau Veritas construction.

Considérant ce qui suit :

1. En 2012, Côtes-d'Armor Habitat, office public de l'habitat (OPH), a décidé d'entreprendre la construction de dix-huit logements au sein du lotissement " La Vigie " situé sur le territoire de la commune de Binic. La maîtrise d'œuvre de l'opération a été confiée à un groupement d'entreprises composé de la société B... et associés, architecte et mandataire, de la société Bati-structure et de la société ACF. Le marché de travaux a été attribué à un groupement d'entreprises, dont la société Ferreira père et fils, chargée des prestations de gros œuvre, voies et réseaux divers (VRD) et enduits, était le mandataire. Pour l'exécution de ces travaux, la société Ferreira père et fils a souscrit un contrat d'assurances auprès de la société Areas Dommages. Côtes-d'Armor Habitat a, pour sa part, contracté une assurance dommages-ouvrage auprès de la société MMA IARD Assurances Mutuelles le 18 février 2016 avec prise d'effet au 6 juillet 2015, date à laquelle le chantier a débuté. Celui-ci a ensuite été arrêté le 26 octobre 2015, la société Bureau Véritas, chargée d'une mission de contrôle technique, ayant formulé un avis défavorable sur la structure des bâtiments, compte tenu des malfaçons constatées sur les constructions en cours. Côtes-d'Armor Habitat a, en conséquence, saisi le président du tribunal administratif de Rennes d'une demande d'expertise. Désigné le 11 octobre 2016, M. A... a remis son rapport d'expertise le 23 juillet 2020.

2. Côtes-d'Armor Habitat, devenu Terres d'Armor Habitat, a alors demandé au tribunal administratif de Rennes, à titre principal, de condamner la société MMA IARD Assurances Mutuelles à lui verser la somme de 184 898,80 euros toutes taxes comprises (TTC), au titre des désordres affectant le programme de construction de logements situé sur le territoire de la commune de Binic, la somme de 217 558,91 euros TTC au titre des préjudices consécutifs subis et la somme de 26 328,24 euros au titre des frais d'expertise, à titre subsidiaire, de condamner in solidum ou à défaut, chacun pour son fait ou sa faute, la Selarl TCA, en qualité de mandataire ad hoc de la société Ferreira, et D..., en la personne de Me Pauline Collin, en qualité de mandataire liquidateur de la société B... et associés, à lui verser ces mêmes sommes. Par un jugement du 14 décembre 2023, le tribunal administratif de Rennes, d'une part, a condamné la société MMA IARD Assurances Mutuelles à verser à Terres d'Armor Habitat la somme de 218 475 euros TTC en réparation de ses préjudices, avec intérêts au taux légal à partir du 21 janvier 2021 et capitalisation, ainsi que la somme de 21 063 euros TTC au titre des frais d'expertise, d'autre part, a également condamné la Selarl TCA, mandataire ad hoc de la société Ferreira père et fils, à verser à la société MMA IARD Assurances Mutuelles, en sa qualité d'assureur subrogé, la somme de 141 868 euros TTC au titre du coût des travaux réparatoires des ouvrages, et a rejeté le surplus des conclusions des parties. La société MMA IARD Assurances Mutuelles fait appel de ce jugement.

Sur l'intervention volontaire de la société Areas Dommages :

3. La société Areas Dommages demande l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il n'a pas admis son intervention volontaire. Toutefois, une intervention ne peut être admise que si son auteur s'associe soit aux conclusions du requérant, soit à celles du défendeur. La société Areas Dommages entend s'associer aux conclusions de son assuré, la société Ferreira père et fils, qui est désormais représentée par la Selarl TCA, son mandataire ad hoc à la suite de sa liquidation judiciaire. Or, la Selarl TCA n'a produit aucun mémoire devant le tribunal administratif, ni d'ailleurs devant la cour. C'est donc à bon droit que le tribunal n'a pas admis l'intervention volontaire de la société Areas Dommages. Il y a lieu, également, de ne pas l'admettre dans la présente instance d'appel.

Sur l'appel principal de la société MMA IARD Assurances Mutuelles :

En ce qui concerne la régularité du jugement attaqué :

4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 421-1 du code de la construction et de l'habitation : " Les offices publics de l'habitat sont des établissements publics locaux à caractère industriel et commercial. (...). ". Selon l'article L. 421-26 de ce code, dans sa rédaction issue de la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 de simplification et d'amélioration de la qualité du droit applicable au litige : " Les marchés des offices publics de l'habitat sont régis par les dispositions applicables aux marchés des personnes publiques ou privées soumises aux règles fixées par l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics. ". Aux termes de l'article 2 de la loi du 11 décembre 2001 dite MURCEF : " I. - Les marchés passés en application du code des marchés publics ont le caractère de contrats administratifs. (...) ".

5. D'une part, sauf disposition législative contraire, la nature juridique d'un contrat s'apprécie à la date à laquelle il a été conclu. Il résulte de l'instruction, en particulier de l'attestation d'assurance du 18 février 2016 établie par la société MMA IARD Assurances Mutuelles et de la déclaration de sinistre du même jour adressée par l'OPH Terres d'Armor Habitat, que le contrat d'assurance " dommages-ouvrage " litigieux doit être regardé comme ayant été conclu par les parties à cette date. Conformément aux dispositions précitées de l'article L. 421-26 du code de la construction et de l'habitation alors applicables, ce contrat constituait ainsi un marché régi par les règles fixées par l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics, dont aucune n'a pour objet ou pour effet de le qualifier de contrat administratif. En outre, dès lors qu'il n'était pas soumis au code des marchés publics, il n'avait pas le caractère de contrat administratif en application des dispositions précitées de l'article 2 de la loi du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier (MURCEF).

6. D'autre part, il ne résulte pas de l'instruction, notamment des documents contractuels " conditions particulières et " conditions générales ", que le contrat d'assurance " dommages-ouvrage " en cause comporte des clauses exorbitantes du droit commun. Par ailleurs, ce dernier ne porte pas sur l'exécution de travaux publics et ne fait pas participer la société MMA IARD Assurances Mutuelles à l'exécution même d'un service public, dès lors que son objet principal est seulement de garantir au maître d'ouvrage le paiement des travaux de réparation des dommages à l'ouvrage résultant de la responsabilité des constructeurs. Dans ces conditions, il ne répond pas aux critères de définition du contrat administratif. Compte tenu de ce qu'il est un contrat de droit privé, le litige né de son exécution ressortit ainsi à la compétence de la juridiction judiciaire. C'est donc à tort que le tribunal administratif de Rennes a estimé que la juridiction administrative était compétente pour statuer sur l'action en responsabilité contractuelle présentée par l'OPH Terres d'Armor Habitat contre la société MMA IARD Assurances Mutuelles. Dès lors, il y a lieu d'annuler le jugement attaqué du 14 décembre 2023, qui est irrégulier, en tant que le tribunal a statué sur les conclusions de l'OPH dirigées contre son assureur et a condamné la société MMA IARD Assurances Mutuelles à verser à Terres d'Armor Habitat la somme de 218 475 euros TTC, assortie des intérêts au taux légal et de leur capitalisation, au titre de sa responsabilité contractuelle. En conséquence, il y a lieu pour la cour statuant par voie d'évocation, de rejeter cette demande comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître, ce qui n'a pas pour effet de porter atteinte au principe de sécurité juridique ou au droit au recours de l'OPH Terres d'Armor habitat, contrairement à ce que ce dernier fait valoir en défense.

7. En second lieu, compte tenu de l'annulation, par le présent arrêt, de la condamnation prononcée par le tribunal administratif de Rennes de la société MMA IARD Assurances Mutuelles à indemniser l'OPH Terres d'Armor Habitat, il y a lieu d'annuler le jugement attaqué en tant que le tribunal a également condamné cette société, d'une part, à verser à l'OPH la somme de 21 063 euros TTC au titre des frais d'expertise, d'autre part, à verser respectivement à l'OPH et à D..., en qualité de mandataire liquidateur de la société B... et associés, les sommes de 2 000 euros et de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

En ce qui concerne le bien-fondé du jugement attaqué :

8. Il résulte des dispositions des articles L. 242-1 et L. 121-12 du code des assurances que l'assurance de dommages souscrite pour son compte ou pour celui des propriétaires successifs par toute personne physique ou morale qui, agissant en qualité de propriétaire de l'ouvrage, de vendeur ou de mandataire du propriétaire de l'ouvrage, fait réaliser des travaux de bâtiment, est une assurance de choses bénéficiant au maître de l'ouvrage et aux propriétaires successifs ou à ceux qui sont subrogés dans leurs droits. L'assureur qui a pris en charge la réparation de dommages ayant affecté l'ouvrage de la nature de ceux dont sont responsables les constructeurs au sens de l'article 1792-1 du code civil se trouve subrogé dans les droits et actions du propriétaire à l'encontre des constructeurs.

9. La société MMA IARD Assurances Mutuelles a présenté devant le tribunal administratif, au titre des dispositions de l'article L. 121-12 du code des assurances et au cas où elle serait condamnée à indemniser son assuré, des conclusions subrogatoires à l'encontre de D..., mandataire liquidateur de la société B..., qui était maître d'œuvre, et de la SELARL TCA, mandataire liquidateur de la société Ferreira père et fils, qui était chargée des prestations de gros œuvre et VRD de l'opération, sur le terrain de leur responsabilité contractuelle. Un tel litige est relatif à l'exécution de marchés de travaux publics et il ne résulte pas de l'instruction que les parties en cause seraient unies par un contrat de droit privé. Il ressortit ainsi à la compétence de la juridiction administrative.

10. La société MMA IARD Assurances Mutuelles demande l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il a limité à la somme de 141 868 euros TTC la condamnation de la SELARL TCA à son profit et qu'il a rejeté son recours subrogatoire contre D.... Toutefois, la société MMA IARD Assurances Mutuelles n'étant plus subrogée dans les droits de son assuré du fait de l'annulation par le présent arrêt du jugement attaqué en tant qu'il prononce sa condamnation au bénéfice de l'OPH, et dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'elle aurait été condamnée par le juge judiciaire à indemniser l'OPH Terres d'Armor Habitat sur le fondement de la garantie assurantielle des dommages à l'ouvrage, elle n'est pas recevable à rechercher la responsabilité des constructeurs à son bénéfice. Dans ces conditions, d'une part, il y a lieu d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rennes en tant qu'il condamne, par l'article 6 de son dispositif, la SELARL TCA, mandataire ad hoc de la société Ferreira, à lui verser la somme de 141 868 euros TTC au titre du coût des travaux réparatoires des ouvrages, et d'autre part les conclusions qu'elle présente sur ce point devant la cour doivent être rejetées.

Sur l'appel incident de l'OPH Terres d'Armor Habitat :

11. L'OPH Terres d'Armor Habitat demande la condamnation, aux termes de conclusions d'appel incident, de la société MMA IARD Assurances Mutuelles sur le terrain du contrat précité " dommages-ouvrage " conclu le 18 février 2016. Toutefois, ainsi qu'il a été dit aux points 4 à 6 ci-dessus, seule la juridiction judiciaire est compétente pour statuer sur de telles conclusions, qui doivent donc être rejetées comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître.

Sur l'appel provoqué de l'OPH Terres d'Armor Habitat :

En ce qui concerne la responsabilité contractuelle des constructeurs :

S'agissant des fautes des constructeurs :

12. En premier lieu, il résulte de l'instruction, en particulier du rapport d'expertise du 23 juillet 2020, que les bâtiments de la partie sud du lotissement en construction, devant à terme comporter dix-huit logements, dont Terres d'Armor Habitat est maître d'ouvrage, présentent d'importants désordres résultant de défauts généralisés d'exécution, en particulier des linteaux et maillages non conformes et une absence de chaînage et d'harpage des parpaings, imputables à la société Ferreira père et fils qui était chargée des travaux de gros œuvre, et de façon très accessoire à son sous-traitant, la société A Roj Bâtiment, qui sont de nature à porter atteinte à la solidité de l'ouvrage une fois qu'il sera achevé, ce qui a justifié l'arrêt du chantier prononcé par l'OPH Terres d'Armor Habitat suivant ordre de service du 26 octobre 2015. En raison des manquements aux règles de l'art qu'elle a commis, la société Ferreira père et fils, qui doit répondre également de son sous-traitant, a donc engagé sa responsabilité contractuelle à l'égard de l'OPH Terres d'Armor Habitat.

13. En second lieu, si l'expert met également en cause, en qualité de maître d'œuvre, la société B... et Associés pour défaut de surveillance du chantier, qui a débuté le 6 juillet 2015 puis a été interrompu le 26 octobre suivant, il n'a toutefois pas motivé son rapport sur ce point. En outre, il résulte des comptes-rendus de chantier, notamment des 23 juillet, 3 septembre et 29 octobre 2015, que le maître d'œuvre a émis des réserves quant à la qualité de l'exécution du gros œuvre opérée par la société Ferreira père et fils et lui a enjoint d'y remédier, en définissant des travaux de reprise à ce titre mais aussi en procédant à leur suivi. Il n'est donc pas établi qu'il aurait commis une faute dans la surveillance du chantier. L'OPH Terres d'Armor Habitat n'est dès lors pas fondé à rechercher sa responsabilité contractuelle mais seulement celle de la société Ferreira père et fils qui est en effet responsable de la totalité des désordres litigieux.

S'agissant de la faute du maître d'ouvrage :

14. Le rapport d'expertise, invoqué sur ce point par D..., mandataire liquidateur de la société B..., constate que l'OPH Terres d'Armor Habitat a attribué simultanément à la société Ferreira père et fils plusieurs marchés de travaux, engendrant pour elle une activité inhabituelle dépassant ses capacités, ce qui a pu participer à la survenance des désordres apparus pendant le chantier. Toutefois, une telle circonstance ne révèle pas une faute du maître d'ouvrage, dès lors qu'il appartenait alors à la société de mobiliser les moyens nécessaires pour assumer l'exécution de ces contrats. Par ailleurs, il n'est pas établi que l'OPH aurait pu écarter l'offre de la société comme irrégulière au regard de ses capacités professionnelles, techniques et financières. Enfin, l'OPH ne peut être regardé comme ayant commis un manquement du seul fait que le prix était le seul critère dans le choix des offres des entreprises, ce qui était d'ailleurs permis par les dispositions du III de l'article 24 du décret susvisé du 30 décembre 2005. Dans ces conditions, aucune faute du maître d'ouvrage n'est de nature à exonérer totalement ou partiellement cette société de sa responsabilité contractuelle dans la survenue des désordres.

S'agissant des préjudices :

15. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 12 que l'OPH Terres d'Armor Habitat est fondé à demander la condamnation de la Selarl TCA, en qualité de mandataire ad hoc de la société Ferreira père et fils, à l'indemniser du coût des travaux nécessaires pour assurer la reprise des ouvrages en cours de construction au sein du lotissement " La Vigie " à Binic. Il résulte du rapport d'expertise que compte tenu de l'ampleur des désordres en cause, en particulier le fait que la totalité des linteaux et des armatures sur dallages mis en œuvre ne sont pas conformes, il y a lieu de procéder à la déconstruction puis à la reconstruction à un état d'avancement identique des constructions en litige. Il n'est pas établi que la seule réparation localisée de celles-ci serait réalisable, l'expert ayant d'ailleurs exprimé des réserves quant à la pérennité d'une telle solution technique. Dans ces conditions, il y a lieu de mettre à la charge de la Selarl TCA, en qualité de mandataire ad hoc de la société Ferreira père et fils, la somme de 184 898,80 euros TTC, qui correspond au coût, qui n'est pas sérieusement contesté par les parties, des travaux de déconstruction/reconstruction précités des constructions situées au sud du lotissement, seules en cause dans la présente instance.

16. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, que les fautes commises par la société Ferreira père et fils dans l'exécution des travaux qui lui étaient confiés ont empêché l'OPH Terres d'Armor Habitat de jouir des logements qui auraient dû lui être livrés le 1er avril 2017, date à partir de laquelle il aurait pu les mettre en location et a donc subi des pertes de loyer, estimées par l'expert à la somme de 74 046,54 euros au 31 mars 2020, à parfaire ensuite à hauteur de 2057 euros par mois. Les pertes de loyer en cause doivent être regardées comme ayant pris fin à la remise du rapport d'expertise, soit le 23 juillet 2020, date à laquelle les travaux réparatoires pouvaient en effet être exécutés dès lors que les causes et l'étendue du dommage étaient alors connues. Il faut toutefois ajouter à cette période une durée de cinq mois correspondant à la durée estimée desdits travaux réparatoires. Il sera donc fait une juste appréciation des pertes locatives invoquées par l'OPH en les évaluant à la somme totale de 90 000 euros, dont ni le principe, ni le montant, ne sont sérieusement contestés par les parties.

17. En troisième lieu, il résulte de l'instruction, en particulier du rapport d'expertise, qu'en raison des fautes contractuelles de la société Ferreira père et fils, lesquelles ont eu pour conséquence de le priver de la livraison des ouvrages le 1er avril 2017, l'OPH Terres d'Armor Habitat a exposé des frais supplémentaires, en particulier de mise en sécurité du chantier, pour un montant de 3194 euros TTC, ce qui n'est d'ailleurs pas contesté en défense, qu'il y a donc lieu de mettre à la charge de la Selarl TCA, en qualité de mandataire ad hoc de la société Ferreira père et fils.

18. En dernier lieu, l'OPH n'établit pas, faute de produire des pièces actualisées à ce titre, qu'il aurait définitivement perdu le bénéfice d'une subvention d'un montant de 57 960 euros en raison de l'absence de livraison des logements du lotissement dans le délai initialement prévu, ou qu'il aurait subi un préjudice en raison du passage du taux de la TVA à 10 %. Ses demandes doivent donc être rejetées sur ces différents points.

19. Dans ces conditions, l'OPH Terres d'Armor Habitat est seulement fondé à demander la condamnation de la Selarl TCA, en qualité de mandataire ad hoc de la société Ferreira père et fils, à l'indemniser à hauteur de 278 093 euros TTC.

20. Il résulte de ce qui a été dit aux points 12 à 19 qu'il y a lieu d'annuler, par la voie de l'effet dévolutif, le jugement attaqué du tribunal administratif de Rennes du 14 décembre 2023 également en tant qu'il statue sur les conclusions subsidiaires de l'OPH Terres d'Armor Habitat recherchant la responsabilité contractuelle des constructeurs.

En ce qui concerne les intérêts et la capitalisation des intérêts :

21. En premier lieu, l'OPH Terres d'Armor Habitat a droit aux intérêts au taux légal sur la somme de 278 093 euros TTC, à compter du 21 janvier 2021, date d'enregistrement de sa requête devant le tribunal administratif de Rennes.

22. En second lieu, aux termes de l'article 1343-2 du code civil : " Les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produisent intérêt si le contrat l'a prévu ou si une décision de justice le précise. ". Pour l'application de ces dispositions, la capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond. Cette demande ne peut toutefois prendre effet que lorsque les intérêts sont dus au moins pour une année entière. Le cas échéant, la capitalisation s'accomplit à nouveau à l'expiration de chaque échéance annuelle ultérieure sans qu'il soit besoin de formuler une nouvelle demande. La demande de capitalisation d'intérêts formulée par l'OPH Terres d'Armor Habitat prend, dès lors, effet à compter du 21 janvier 2022, date à laquelle était due pour la première fois une année d'intérêts, ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date.

Sur les dépens :

23. Par une ordonnance du 24 septembre 2020, le président du tribunal administratif de Rennes a liquidé et taxé les frais et honoraires de l'expertise réalisée par M. A... à la somme de 26 328,24 euros TTC, mise à la charge provisoire de l'OPH Côtes-d'Armor Habitat. Dans les circonstances de l'espèce, et compte tenu du fait qu'elle est seule à l'origine de la survenue des désordres litigieux, il y a lieu de mettre à la charge de la Selarl TCA, en qualité de mandataire ad hoc de la société Ferreira père et fils, ces dépens.

Sur les frais liés au litige :

24. D'une part, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de la Selarl TCA, en qualité de mandataire ad hoc de la société Ferreira père et fils, le paiement d'une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par l'OPH Terres d'Armor Habitat et non compris dans les dépens. En revanche, les sociétés MMA IARD Assurances Mutuelles et GOPMJ, en qualité de mandataire judiciaire de la société B... et associés, n'étant pas les parties perdantes dans la présente instance, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de l'OPH au titre des frais non compris dans les dépens dirigées contre ces sociétés.

25. D'autre part, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de laisser aux sociétés MMA IARD Assurances Mutuelles, Bureau Veritas Construction, GOPMJ, en qualité de mandataire liquidateur de la société B... et associés et Areas Dommages, laquelle n'est en tout état de cause pas une partie au sens des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la charge des frais qu'elles ont exposés et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : L'intervention volontaire de la société Areas Dommages n'est pas admise.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Rennes du 14 décembre 2023 est annulé.

Article 3 : La demande présentée devant le tribunal administratif de Rennes par l'OPH Terres d'Armor Habitat et son appel incident dirigés contre la société MMA IARD Assurances Mutuelles au titre de la responsabilité contractuelle d'assureur " dommages-ouvrage " sont rejetés comme portés devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.

Article 4 : La Selarl TCA, en qualité de mandataire ad hoc de la société Ferreira père et fils, est condamnée à verser à l'OPH Terres d'Armor Habitat la somme de 278 093 euros TTC en réparation des préjudices résultant des désordres affectant le programme de construction situé à Binic.

Article 5 : La somme mentionnée à l'article 4 du présent arrêt portera intérêts au taux légal à compter du 21 janvier 2021. Les intérêts échus à la date du 21 janvier 2022 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 6 : La Selarl TCA, en qualité de mandataire ad hoc de la société Ferreira père et fils, versera à l'OPH Terres d'Armor Habitat la somme de 26 328,24 euros TTC au titre des frais d'expertise.

Article 7 : La Selarl TCA, en qualité de mandataire ad hoc de la société Ferreira père et fils, versera à l'OPH Terres d'Armor Habitat la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 8 : Le surplus des conclusions présentées par la société MMA IARD Assurances Mutuelles et l'OPH Terres d'Armor Habitat est rejeté.

Article 9 : Les conclusions des sociétés Bureau Veritas Construction, GOPMJ, en qualité de mandataire liquidateur de la société B... et associés et Areas Dommages présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 10 : Le présent arrêt sera notifié aux sociétés MMA IARD Assurances Mutuelles, TCA, en sa qualité de mandataire ad hoc de la société Ferreira, GOPMJ, en qualité de mandataire liquidateur de la société B... et associés, Areas Dommages, Bureau Veritas Construction et à l'OPH Terres d'Armor Habitat.

Délibéré après l'audience du 25 mars 2025, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- M. Derlange, président-assesseur,

- M. Chabernaud, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 avril 2025.

Le rapporteur,

B. CHABERNAUDLe président,

L. LAINÉ

La greffière,

A. MARTIN

La République mande et ordonne au préfet des Côtes d'Armor en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 24NT00417


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 24NT00417
Date de la décision : 11/04/2025
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LAINÉ
Rapporteur ?: M. Benjamin CHABERNAUD
Rapporteur public ?: Mme ROSEMBERG
Avocat(s) : GROLEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 16/04/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-04-11;24nt00417 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award