Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2016 et 2017.
Par un jugement n° 2201673 du 15 mai 2024, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 5 juillet 2024, M. B..., représenté par Me Denoel, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer la décharge sollicitée ;
3°) de prononcer la restitution, assortie des intérêts moratoires, de la somme de
67 005 euros mise à sa charge ;
3°) de mettre à la charge de l'État les frais irrépétibles dont le montant sera indiqué au cours de l'instruction.
Il soutient que :
- le tribunal a omis sur le moyen tiré de ce que la remise en cause à concurrence de 2/12èmes de la déduction des charges de ses revenus fonciers de l'année 2016 ne repose sur aucune base légale ;
- il n'a retrouvé la libre disposition de son appartement qu'en mars 2017 ;
- le délai qui s'est ensuite écoulé avant la remise en location du logement est dû à des circonstances indépendantes de sa volonté constitutives d'un cas de force majeure ;
- la remise en cause à concurrence de 2/12èmes de la déduction des charges de ses revenus fonciers de l'année 2016 ne repose sur aucune base légale et est injustifiée dès lors qu'il n'a retrouvé la disposition de son appartement qu'en 2017 ; la remise en cause de la déduction des charges de l'année 2017 n'est pas justifiée pour les mêmes motifs ; l'administration a remis en cause la déduction des charges mais a maintenu l'imposition des recettes encaissées.
Par un mémoire en défense, enregistré le 29 novembre 2024, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code des procédures civiles ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Penhoat,
- et les conclusions de M. Brasnu, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... a acquis, le 21 décembre 2009, un logement à Larmor-Plage, afin de le proposer à la location dans le cadre du dispositif dit " C... intermédiaire ". Il s'est engagé à louer ce logement achevé le 23 décembre 2009 pour une durée de neuf ans à compter de la date de prise d'effet du premier bail, soit à compter du 1er mars 2010. M. B... a ainsi bénéficié de réductions d'impôt sur le revenu au titre des années 2009 à 2017 en application des dispositions de l'article 199 septvicies du code général des impôts. En décembre 2018, le pôle de contrôle des revenus du patrimoine de Lorient lui a adressé une demande de renseignement relative aux revenus fonciers des années 2015 à 2017. Compte tenu de la réponse apportée par M. B... et plus particulièrement de la vacance du logement en cause depuis le mois d'octobre 2016, l'administration a estimé qu'il avait rompu son engagement de le louer pendant neuf ans. Elle l'a ainsi informé, par une proposition de rectification du 7 mars 2019 et selon la procédure contradictoire, de son intention de remettre en cause au titre de l'année 2016, l'ensemble des réductions d'impôt obtenues de 2009 à 2016 à raison de la location de ce logement et, au titre de l'année 2017, la réduction d'impôt obtenue en 2017 pour le même motif. Le service a également remis en cause la déduction des charges afférentes à ce logement à hauteur de 2/12èmes pour l'année 2016 et de la totalité de leur montant pour 2017. M. B... a contesté ces rectifications dans des observations, auxquelles l'administration a répondu en maintenant sa position, comme elle l'a fait ensuite à l'issue du recours hiérarchique formé par le contribuable et en rejetant, le 7 février 2022, sa réclamation contentieuse. M. B... relève appel du jugement du 15 mai 2024 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2016 et 2017.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Si M. B... soutient que le tribunal administratif a omis de se prononcer sur le moyen tiré de ce que la remise en cause à concurrence de 2/12ème de la déduction des charges de ses revenus fonciers de l'année 2016 ne repose sur aucune base légale, le tribunal, qui a considéré que ce chef redressement était fondé au regard des dispositions de l'article 199 septvicies du code général des impôts n'était pas tenu de répondre à cet argument de l'intéressé. Le jugement attaqué n'est donc pas entaché d'irrégularité sur ce point.
Sur la réduction d'impôt :
3. D'une part, aux termes de l'article 199 septvicies du code général des impôts dans sa version applicable au litige : " I. - 1. Les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B qui acquièrent, entre le 1er janvier 2009 et le 31 décembre 2012, un logement neuf ou en l'état futur d'achèvement bénéficient d'une réduction d'impôt sur le revenu à condition qu'ils s'engagent à le louer nu à usage d'habitation principale pendant une durée minimale de neuf ans. (...) III. - L'engagement de location mentionné au I doit prendre effet dans les douze mois qui suivent la date d'achèvement de l'immeuble ou de son acquisition si elle est postérieure. (...) Au titre d'une même année d'imposition, le contribuable ne peut bénéficier de la réduction d'impôt qu'à raison de l'acquisition, de la construction ou de la transformation d'un seul logement. / La réduction d'impôt est répartie sur neuf années. Elle est accordée au titre de l'année d'achèvement du logement ou de son acquisition si elle est postérieure et imputée sur l'impôt dû au titre de cette même année puis sur l'impôt dû au titre de chacune des huit années suivantes à raison d'un neuvième de son montant total au titre de chacune de ces années. / VII. - La réduction d'impôt obtenue fait l'objet d'une reprise au titre de l'année au cours de laquelle intervient : 1° La rupture de l'engagement de location ou de l'engagement de conservation des parts mentionné aux I, IV ou VIII ; (...) ".
4. Il résulte de ces dispositions qu'en cas de vacance du logement, du fait du départ du locataire au cours de la période d'engagement de location de neuf ans qu'elles prévoient, le maintien de l'avantage fiscal est subordonné à la condition que le contribuable justifie avoir accompli sans délai toutes les diligences nécessaires pour que son bien puisse être reloué.
5. D'autre part, aux termes de l'article 433-1 du code des procédures civiles : " Si des biens ont été laissés sur place ou déposés par l'huissier de justice en un lieu approprié, le procès-verbal d'expulsion contient, en outre, à peine de nullité : 1° Inventaire de ces biens, avec l'indication qu'ils paraissent avoir ou non une valeur marchande ; 2° Mention du lieu et des conditions d'accès au local où ils ont été déposés ; (..) ".
6. Il résulte de l'instruction que l'administration fiscale a remis en cause au titre de l'année 2016 l'ensemble des réductions d'impôt obtenues de 2009 à 2016 ainsi qu'en 2017 en application des dispositions précitées concernant l'appartement en litige au motif qu'à la suite de l'expulsion du locataire de l'appartement en octobre 2016, l'appartement n'avait pas été reloué à la date de la proposition de rectification soit le 7 mars 2019.
7. Tout d'abord, le requérant conteste que la reprise de possession de son appartement soit intervenue dès le 20 octobre 2016, lors de l'expulsion par huissier de justice du locataire indélicat en place dès lors que ce dernier avait laissé des meubles dans ce logement et que le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Lorient n'a statué sur leur sort que par un jugement du 28 février 2017, les clés de l'appartement lui ayant été remis par l'huissier de justice le 14 mars 2017. Toutefois, il est constant que l'huissier mandaté par M. B... a lors de l'expulsion du locataire constaté l'existence de biens laissés par ce dernier dans l'appartement mais n'a pas fait usage de la possibilité ouverte par les dispositions précitées de l'article 433-1 du code des procédures civiles de les déposer en un lieu approprié. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a considéré que le requérant avait repris possession de son appartement en octobre 2016. Par suite, le moyen susanalysé doit être écarté.
8. M. B... soutient ensuite que l'impossibilité de louer l'appartement après l'expulsion du locataire résulte d'un cas de force majeure qui est de nature à l'exonérer du respect des conditions posées par les dispositions précitées du code général des impôts compte tenu du coût des travaux des remise en état pour un montant d'environ 30 000 euros toutes taxes comprises et de la nécessité de faire participer la personne s'étant portée caution du locataire qui a été condamnée solidairement avec le locataire par un jugement du tribunal d'instruction de Lorient du 26 mai 2016 à lui payer la somme de 6 298 euros au titre des loyers, charges et indemnités d'occupation impayés. Toutefois M. B..., qui ainsi qu'il a été dit au point précédent doit être regardé comme ayant repris possession de son appartement en octobre 2016, ne justifie pas de diligences suffisantes pour la relocation de son appartement avant l'intervention de la proposition de rectification du 2 mars 2019 par la seule production d'un constat de mandat de gestion signé le 2 octobre 017 avec une agence immobilière ainsi que de devis relatifs aux travaux nécessaires pour réhabiliter l'appartement établis fin 2017 et en 2018. Il n'établit pas davantage qu'il ne pouvait pas engager les travaux nécessaires à la remise en location de l'appartement, qui n'est intervenu au final qu'en novembre 2021, avant même d'avoir obtenu la participation de la personne s'étant portée caution du locataire. Dans ces conditions, c'est à bon droit que l'administration a remis en cause le bénéfice à M. B... des dispositions de l'article 199 septvicies du code général des impôts.
Sur la remise en cause de la déduction des charges locatives :
9. Aux termes de l'article 13 du code général des impôts : "1. Le bénéfice ou revenu imposable est constitué par l'excédent du produit brut, y compris la valeur des profits et avantages en nature, sur les dépenses effectuées en vue de l'acquisition et de la conservation du revenu. ". Aux termes du II de l'article 15 du code général des impôts : " Les revenus des logements dont le propriétaire se réserve la jouissance ne sont pas soumis à l'impôt sur le revenu (...) ".
10. Aux termes de l'article 28 du code général des impôts : " Le revenu net foncier est égal à la différence entre le montant du revenu brut et le total des charges de la propriété. ". Aux termes de l'article 31 du code général des impôts : " I. - Les charges de la propriété déductibles pour la détermination du revenu net comprennent : / 1° Pour les propriétés urbaines : /a) Les dépenses de réparation et d'entretien effectivement supportées par le propriétaire ; / a bis) Les primes d'assurance ; / a ter) Le montant des dépenses supportées pour le compte du locataire par le propriétaire dont celui-ci n'a pu obtenir le remboursement, au 31 décembre de l'année du départ du locataire ; / a quater) Les provisions pour dépenses, comprises ou non dans le budget prévisionnel de la copropriété, prévues à l'article 14-1 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, supportées par le propriétaire, diminuées du montant des provisions déduites l'année précédente qui correspond à des charges non déductibles ; / b) Les dépenses d'amélioration afférentes aux locaux d'habitation, à l'exclusion des frais correspondant à des travaux de construction, de reconstruction ou d'agrandissement, ainsi que des dépenses au titre desquelles le propriétaire bénéficie du crédit d'impôt sur le revenu prévu à l'article 200 quater ou de celui prévu à l'article 200 quater A ; / (...) ".
11. D'une part, il résulte de ces dispositions que les dépenses mentionnées au I de l'article 31 du code général des impôts précité ne peuvent être déduites du revenu foncier brut que dans la mesure où les charges alléguées sont dûment justifiées, se rapportent à des immeubles dont les revenus sont imposables dans la catégorie des revenus fonciers, sont effectivement supportées par le propriétaire et sont engagées en vue de l'acquisition et de la conservation du revenu.
12. D'autre part, il résulte également de ces dispositions que les charges afférentes aux logements dont le propriétaire se réserve la jouissance ne peuvent pas venir en déduction pour la détermination du revenu foncier compris dans le revenu global soumis à l'impôt sur le revenu. La réserve de jouissance est établie, notamment, par l'accomplissement ou non de diligences ayant pour objet de donner le bien en location. Il appartient donc au propriétaire d'apporter la preuve qu'il a offert à la location pendant l'année en cause le logement resté vacant au titre duquel il demande la déduction de charges foncières et qu'il a pris toutes les dispositions nécessaires pour le louer.
13. Ainsi qu'il a été dit au point 8 du présent arrêt, M. B... n'établit pas avoir accompli sans délai toutes les diligences nécessaires à la relocation du logement en cause après l'expulsion du locataire intervenue en octobre 2016. C'est donc à juste titre qu'en application des dispositions précitées du code général des impôts, que l'administration a remis en cause la déductibilité des charges de la propriété de l'appartement en litige qu'il avait déclarées au titre de l'année 2016, à concurrence de 2/12ème de leur montant, et de celles déclarées au titre de l'année 2017, pour la totalité de leur montant. Si le requérant fait valoir que l'administration a maintenu l'imposition des recettes encaissées, il n'assortit pas son moyen des précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé.
14. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions relatives aux frais irrépétibles, au demeurant non chiffrées, doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré après l'audience du 21 mars 2025, à laquelle siégeaient :
- M. Quillévéré, président,
- M. Penhoat, premier conseiller,
- M. Viéville, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 avril 2025.
Le rapporteur
A. PENHOATLe président
G. QUILLÉVÉRÉ
La greffière
H. DAOUD
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 24NT02084