La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/04/2025 | FRANCE | N°24NT01456

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 1ère chambre, 08 avril 2025, 24NT01456


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Caen de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2015.



Par un jugement n° 2200672 du 15 mars 2024, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête et un mémoire enregist

rés les 15 mai et 22 novembre 2024, M. A... B..., représenté par Me Lucie de Mellis, demande à la cour :



1°) d'annul...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Caen de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2015.

Par un jugement n° 2200672 du 15 mars 2024, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 15 mai et 22 novembre 2024, M. A... B..., représenté par Me Lucie de Mellis, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée ;

3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de condamner l'Etat aux entiers frais et dépens de l'instance.

Il soutient que :

- l'examen contradictoire de situation fiscale personnelle dont ils ont fait l'objet a excédé la durée prévue à l'article L. 12 du livre des procédures fiscales ;

- les dispositions de l'article L. 50 du livre des procédure fiscales, qui interdisent à l'administration fiscale de procéder à des rectifications successives pour la même période et pour le même impôt, n'ont pas été respectées ;

- il entend se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, du paragraphe n° 8 de l'instruction administrative publiée sous la référence 13 L 1325 repris au paragraphe n° 90 de la documentation administrative de base publiée sous la référence BOI-CF-PGR-30-30 ;

- l'envoi d'une seconde proposition de rectification du 3 octobre 2018 qui tentait de rouvrir l'examen de l'année 2015 sans nouvelles informations justificatives a méconnu le principe de confiance légitime ainsi que le principe de sécurité juridique ;

- les trois crédits bancaires dont le montant s'élève à 11 000 euros ne peuvent être qualifiés de revenus d'origine indéterminée puisqu'ils correspondent à une vente de matériel d'occasion qui relève de la catégorie des bénéficies industriels et commerciaux ;

- c'est à tort que les virements provenant de la société Cryo Jet à hauteur de 38 900 euros ont été imposés dans la catégorie des revenus distribués sur le fondement du 2° de l'article 109-1 du code général des impôts dès lors qu'ils correspondent à des remboursements de frais et des versements de rémunérations dont la déduction n'a pas été remise en cause dans le cadre de la vérification de comptabilité de la société ;

- en l'absence de vérification de comptabilité de la société Hydro Jet System France, l'administration ne pouvait imposer à son nom la somme de 107 262 euros en tant que revenus distribués, faute d'avoir pu démontrer que ces derniers se rapportaient aux bénéfices de la société ; la détermination du résultat de la société Hydro Jet System France au moyen de la procédure du contrôle sur pièces l'a privé des garanties propres à la vérification de comptabilité et relève du détournement de procédure qui vicie son imposition ; il entend se prévaloir du paragraphe 50 de la documentation administrative référencée BOI-CF-DG-40-20 ; les dispositions de l'article 111 c du code général des impôts ne permettent d'assujettir à l'impôt que des sommes individualisées et non le résultat global d'une société.

Par un mémoire en défense enregistré le 22 octobre 2024 et un mémoire enregistré le 17 décembre 2024 (non communiqué), le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Penhoat,

- les conclusions de M. Brasnu, rapporteur public,

- et les observations de Me De Mellis, pour M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. B... a fait l'objet d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle au titre des années 2014 et 2015. Il a été destinataire d'une proposition de rectification du 26 décembre 2017 puis d'une seconde le 3 octobre 2018 en raison notamment de l'intégration dans son revenu imposable de revenus distribués par les sociétés Hydro Jet System France et Cryo Jet dont M. B... détenait 100 % du capital soit directement soit par l'intermédiaire de la société SC SFBV. Les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux au titre de l'année 2015 et les pénalités correspondantes ont été mises en recouvrement le 31 janvier 2019 pour un montant de 178 327 euros. M. B... a saisi l'administration d'une première réclamation le 21 mars 2019 qui a fait l'objet d'une décision de rejet le 15 avril 2019. Il a saisi l'administration fiscale de trois autres réclamations les 15 juin 2019, 25 septembre 2019 et 3 février 2020 qui ont été successivement rejetées les 25 juillet 2019, 3 décembre 2019 et 8 février 2022. Par un jugement du 15 mars 2024 dont M. B... relève appel, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa requête tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2015.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 12 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable : " Dans les conditions prévues au présent livre, l'administration des impôts peut procéder à l'examen contradictoire de la situation fiscale des personnes physiques au regard de l'impôt sur le revenu, qu'elles aient ou non leur domicile fiscal en France, lorsqu'elles y ont des obligations au titre de cet impôt (...) Sous peine de nullité de l'imposition, un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle ne peut s'étendre sur une période supérieure à un an à compter de la réception de l'avis de vérification (...) Cette période est prorogée du délai accordé, le cas échéant, au contribuable et, à la demande de celui-ci, pour répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications pour la partie qui excède les deux mois prévus à l'article L. 16 A. Elle est également prorogée des trente jours prévus à l'article L. 16 A et des délais nécessaires à l'administration pour obtenir les relevés de compte lorsque le contribuable n'a pas usé de sa faculté de les produire dans un délai de soixante jours à compter de la demande de l'administration ou pour recevoir les renseignements demandés aux autorités étrangères, lorsque le contribuable a pu disposer de revenus à l'étranger ou en provenance directe de l'étranger (...) ". Les comptes visés par cet article sont non seulement les comptes bancaires mais aussi tous les comptes au crédit desquels sont susceptibles d'être inscrites des sommes constitutives de revenus dont le contribuable aurait disposé au cours de la période vérifiée, notamment les comptes courants d'associés. La prorogation du délai prévue à cet article suppose dans ce cas que l'administration fiscale ait indiqué dans sa demande que les comptes dont elle demandait les relevés ne se limitaient pas aux seuls comptes bancaires.

3. Le caractère distinct des procédures de contrôle visant une société et ses associés ne fait pas, par lui-même, obstacle à ce que l'administration fiscale exploite, dans le cadre de l'examen de la situation fiscale personnelle d'un contribuable, des informations obtenues dans le cadre de la vérification de comptabilité de la société dont il est associé, dès lors qu'elle respecte les droits et garanties du contribuable, notamment les exigences énoncées à l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales. Pour autant, il reste loisible à l'administration, à l'occasion de l'examen de la situation fiscale personnelle du contribuable, de demander à ce dernier qu'il produise les comptes visés à l'article L. 12 du livre des procédures fiscales, quand bien même elle aurait pu en prendre connaissance par ailleurs voire en disposerait déjà, du fait notamment de la vérification de comptabilité de la société.

4. Il résulte de l'instruction que, par un avis d'examen de situation fiscale personnelle présenté le 18 novembre 2016, l'administration a demandé à M. B... la totalité des relevés (en original ou en copie) des comptes financiers de toute nature et des comptes courants sur lesquels lui-même et les membres de son foyer fiscal ont réalisé des opérations de nature personnelle'au cours des années 2014 et 2015, formulation incluant les comptes courants d'associés détenus par M. B... au sein des sociétés Hydro Jet System France et Cryo Jet et dont l'administration pouvait demander la production alors même qu'elle en aurait eu connaissance à l'occasion de la vérification de comptabilité de la société Cryo Jet. Il résulte également de l'instruction et, notamment, de la proposition de rectification adressée à M. B... le 3 octobre 2018, que ce dernier n'a pas fourni au vérificateur la copie des comptes courant d'associés détenus en 2015 au sein des sociétés Hydro Jet System France et Cryo Jet que le 27 novembre 2017 soit 314 jours après l'expiration du délai de 60 jours prévu par les dispositions, rappelées au point précédent, de l'article L. 12 du livre des procédures fiscales. Par ailleurs, il résulte des mêmes éléments qu'ayant eu connaissance de ce que M. B... était titulaire, en Suisse, d'un compte bancaire non déclaré, le vérificateur a adressé le 13 juin 2017, en application de l'article L. 188 A du livre des procédures fiscales, une demande d'assistance internationale à l'administration fiscale suisse, qui a abouti le 7 décembre 2017, à l'expiration d'un délai supplémentaire de 10 jours, à la communication, par l'établissement bancaire détenteur de ce compte, des relevés de ce compte. L'administration était ainsi fondée à proroger d'une durée totale de 324 jours la période d'une année débutée le 18 novembre 2016 prévue à l'article L. 12 du livre des procédures fiscales soit jusqu'au 8 octobre 2018. Il résulte de l'instruction que la seconde proposition de rectification du 3 octobre 2018 a été notifié au requérant le 4 octobre 2018. Il suit de là que le moyen tiré de ce que l'examen contradictoire de situation fiscale personnelle serait irrégulier au regard des dispositions, mentionnées au point précédent, de l'article L. 12 du livre des procédures fiscales et entaché d'un détournement de procédure doit être écarté.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 50 du livre des procédures fiscales : " Lorsqu'elle a procédé à un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle d'un contribuable au regard de l'impôt sur le revenu, l'administration des impôts ne peut plus procéder à des rectifications pour la même période et pour le même impôt, à moins que le contribuable ne lui ait fourni des éléments incomplets ou inexacts ou que l'administration n'ait dressé un procès-verbal de flagrance fiscale dans les conditions prévues à l'article L. 16-0 BA, au titre d'une période postérieure. / Il est fait exception à cette règle dans les cas prévus aux articles L. 188 A et L. 188 B ". Aux termes de l'article L. 188 A du même livre : " Lorsque l'administration a, dans le délai initial de reprise, demandé à l'autorité compétente d'un autre Etat ou territoire des renseignements concernant un contribuable, elle peut réparer les omissions ou les insuffisances d'imposition afférentes à cette demande, même si le délai initial de reprise est écoulé, jusqu'à la fin de l'année qui suit celle de la réception de la réponse et, au plus tard, jusqu'au 31 décembre de la troisième année suivant celle au titre de laquelle le délai initial de reprise est écoulé. / Le présent article s'applique dans la mesure où le contribuable a été informé de l'existence de la demande de renseignements dans le délai de soixante jours suivant son envoi ainsi que de l'intervention de la réponse de l'autorité compétente de l'autre Etat ou territoire dans le délai de soixante jours suivant sa réception par l'administration ".

6. En vertu de l'article L. 50 du livre des procédures fiscales, lorsqu'elle a procédé à un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle d'un contribuable au regard de l'impôt sur le revenu, l'administration des impôts ne peut plus procéder à des rectifications pour la même période et pour le même impôt, à moins que le contribuable ne lui ait fourni des éléments incomplets ou inexacts. Le même article précise qu'il est fait cependant exception à cette règle dans les cas prévus aux articles L. 188 A et L. 188 B du même livre.

7. S'il est constant que l'administration, après avoir, comme il a été dit au point 1, adressé, le 17 juin 2014, à M. B... une première proposition de rectification pour lui faire connaître les rehaussements qu'elle envisageait d'apporter, à la suite de l'examen contradictoire de situation fiscale personnelle dont ils avaient fait l'objet, à ses revenus imposables de l'année 2015, a adressé à l'intéressé, le 4 octobre 2018, une nouvelle proposition de rectification concernant la même année d'imposition et le même impôts, il résulte de l'instruction, d'une part, que M. B... n'avait fait aucune mention, dans sa déclaration afférente à l'année d'imposition en litige, du compte bancaire ouvert auprès d'une banque suisse, alors que ce compte était utilisé par lui, d'autre part, qu'en l'absence de production par l'intéressé au cours de la procédure des relevés dudit compte, l'administration a fait application, ainsi qu'il a été dit au point 4, de l'article L. 188 A en sollicitant l'assistance des autorités administratives suisses et dont la première proposition de rectification faisait d'ailleurs mention. Par ailleurs, il résulte de l'instruction que les renseignements délivrés par les autorités fiscales suisses ont été reçues par le service le 7 décembre 2017 soit postérieurement au dernier entretien organisé le 27 novembre 2017 précédant l'envoi de la première proposition de rectification du 26 décembre. Par suite, pour notifier à M. B..., le 4 octobre 2018, ces nouvelles rectifications en complément de celles précédemment portées à leur connaissance et consécutive à l'utilisation par le requérant du compte bancaire ouvert auprès d'une banque suisse, l'administration n'a pas méconnu les dispositions, rappelées au point précédent, de l'article L. 50 du livre des procédures fiscales. Par suite, en notifiant une seconde proposition de rectification incluant dans la base d'imposition les revenus distribués des sociétés Hydro Jet System France et Cryo Jet dont M. B... était le dirigeant et l'associé unique, l'administration fiscale n'a pas méconnu la garantie prévue à l'article L. 50 du livre des procédures fiscales ni entaché la procédure d'irrégularité. Ce moyen doit ainsi être écarté.

8. En troisième lieu, M. B... ne peut se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, du paragraphe n° 8 de l'instruction administrative publiée sous la référence 13 L-1325 repris au paragraphe n° 90 de la documentation administrative de base publiée sous la référence BOI-CF-PGR-30-30, dès lors que ces paragraphes traitent de questions relatives à la procédure d'imposition et ne peuvent dès lors être regardés comme comportant une interprétation de la loi fiscale.

9. En dernier lieu, si M. B... soutient que l'administration a méconnu le principe de sécurité juridique et le principe de confiance légitime en lui adressant une seconde proposition de rectification au titre de l'année 2015, il résulte de ce qui a été indiqué au point 7 que le principe de sécurité juridique n'a pas été méconnu. En tout état de cause, le principe de confiance légitime, qui fait partie des principes généraux du droit de l'Union européenne, ne trouve à s'appliquer dans l'ordre juridique national que dans le cas où la situation juridique dont a à connaître le juge administratif français est régie par le droit de l'Union européenne, ce qui n'est pas le cas en l'espèce. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des principes de confiance légitime et de sécurité juridique doivent être écartés.

Sur le bien-fondé des impositions supplémentaires :

En ce qui concerne la charge de la preuve :

10. Aux termes de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition ". Les impositions supplémentaires au titre de l'année 2015 ont été régulièrement établies suivant la procédure de taxation d'office sur le fondement des articles L. 66 et L. 67 du livre des procédures fiscales, faute pour M. B... d'avoir souscrit leurs déclarations de revenus dans les trente jours suivant la notification d'une mise en demeure. Par suite, M. B... supporte la charge de la preuve de l'exagération des impositions ainsi mises à sa charge.

En ce qui concerne les revenus d'origine indéterminée :

11. L'administration a imposé en tant que revenus d'origine indéterminée au titre de l'année 2015 une somme globale de 11 000 euros créditée sur un compte bancaire du requérants et constituée de trois remises de chèques émanant notamment de la SARL MG Form qui a produit en réponse à la demande d'information que lui a adressée l'administration une facture émise par la société Hydro Jet System France pour une vente de matériel médical d'un montant de 2 500 euros. En appel, M. B... persiste à soutenir que cette somme correspond à la vente de matériel d'occasion en se référant à la facture obtenue par le service dans le cadre du contrôle. Toutefois, en l'absence de concordance entre le montant de cette facture et la somme en litige et en l'absence de toute autre explication, M. B..., qui ne peut utilement se prévaloir de l'avis rendu par la commission départementale des impôts sur les impositions établies au titre de l'année 2014, n'apporte pas la preuve que la somme en litige relèverait de la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux.

En ce qui concerne les revenus de capitaux mobiliers :

12. En premier lieu, aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : (...) 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices. (...) ". Les sommes mises à la disposition des associés non prélevées sur les bénéfices ont, sauf preuve contraire apportée par les associés, le caractère de revenus distribués, imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers.

13. Il résulte de l'instruction que le compte bancaire de M. B... ouvert auprès de BNP Paribas a été crédité de plusieurs virements et remise de chèques provenant des sociétés Hydro Jet System France et Cryo Jet pour un montant total de 98 750 euros. Cette somme a été identifiée comme représentative de salaires pour 40 000 euros, de bénéfices relevant de l'article 92 du code général des impôts pour 10 200 euros. Le solde de cette somme dont 38 900 euros provenant de la société Cryo Jet a été considéré comme présentant le caractère de distributions irrégulières imposables à l'impôt sur le revenu entre les mains de M. B... sur le fondement du 2° de l'article 109-1 du code général des impôts.

14. Si M. B..., auquel il revient de rapporter la preuve que les sommes mises à sa disposition par la société Cryo Jet sous forme de versements sur ses comptes bancaires ne sont pas imposables, soutient que les crédits sur ses comptes bancaires représentent des remboursements de frais professionnels ainsi que des rémunérations, il ne produit aucun élément de nature à l'établir. Enfin, la circonstance que ces sommes n'ont pas été réintégrées dans les résultats imposables de la société est sans incidence sur leur imposition à l'impôt sur le revenu au nom de l'associé compte tenu du fondement légal retenu, à bon droit, par l'administration, pour taxer ces sommes mises à sa disposition.

15. En second lieu, aux termes de l'article 111 c du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : / (...) c) Les rémunérations et avantages occultes (...) ".

16. Il résulte de l'instruction que l'administration a obtenu des autorités suisses et de M. B... lui-même des informations concernant le compte bancaire que celui-ci possédait dans ce pays, desquelles il ressort que les opérations portées au débit et au crédit de ce compte concernaient l'activité de vente de matériels d'hydrothérapie exercée par la société Hydro Jet System France. Le service a donc considéré que ces opérations étaient constitutives de revenus distribués à son nom pour un montant de 107 262 euros correspondant au bénéfice reconstitué de la société Hydro Jet System France déterminé à la suite d'un contrôle fiscal sur pièces de celle-ci en application des dispositions de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales. Toutefois, les bénéfices reconstitués à raison de l'activité d'une société ne peuvent, de ce seul fait, être regardés comme distribués au maître de l'affaire sur le fondement du c) de l'article 111 du code général des impôts, en l'absence d'opérations individualisées et indentifiables en comptabilité à même d'établir l'existence d'une rémunération ou d'un avantage occulte. Ainsi, la seule circonstance que la reconstitution du chiffre d'affaires d'une société a conduit l'administration à mettre en évidence une insuffisance des bénéfices déclarés ne permet pas de qualifier les bénéfices non déclarés comme constituant par nature des avantages ou rémunérations occultes pour le maître de l'affaire sur le fondement du c) de l'article 111 du code général des impôts. Par suite, c'est à tort que l'administration a pu regarder ces sommes comme correspondant à des avantages occultes et les a taxées entre les mains de M. B... sur le fondement des dispositions précitées.

17. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen ne lui a pas accordé la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2015, à raison d'une réduction en base de 107 262 euros imposée dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers sur le fondement du c) de l'article 111 du code général des impôts.

Sur les frais liés à l'instance :

18. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État le versement à M. B... d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Les revenus de capitaux mobiliers imposables entre les mains de M. B... au titre de l'année 2015 sont réduits du montant, en base, de 107 262 euros.

Article 2 : M. B... est déchargé, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2015 résultant de la réduction en base prononcée à l'article 1er..

Article 3 : Le jugement n° 2200672 du 15 mars 2024 du tribunal administratif de Caen est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : L'État versera une somme de 1 500 euros à M. B... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête d'appel de M. B... est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 21 mars 2025, à laquelle siégeaient :

- M. Quillévéré, président,

- M. Penhoat, premier conseiller,

- M. Vieville, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 avril 2025.

Le rapporteur

A. PENHOATLe président

G. QUILLÉVÉRÉ

La greffière

H. DAOUD

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 24NT01456


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 24NT01456
Date de la décision : 08/04/2025
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. QUILLÉVÉRÉ
Rapporteur ?: M. Anthony PENHOAT
Rapporteur public ?: M. BRASNU
Avocat(s) : CONCORDIA AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 13/04/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-04-08;24nt01456 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award