Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme E..., d'une part, et M. A... B..., d'autre part, ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision implicite née le 18 octobre 2022 par laquelle la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé contre les décisions du 16 février 2022 de l'autorité consulaire de l'ambassade de France en République démocratique du Congo refusant de leur délivrer un visa d'entrée et de long séjour au titre de la réunification familiale.
Par un jugement n°s 2211005 et 2211007 du 20 juin 2023, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision implicite de la commission de recours née le 18 octobre 2022 en tant qu'elle concerne Mme D..., a enjoint au ministre de l'intérieur de délivrer le visa sollicité par Mme D..., a mis à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions des demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 27 juillet 2023, le ministre de l'intérieur demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes en tant qu'il a annulé une décision implicite de la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France née le 18 octobre 2022 en ce qui concerne Mme D..., lui a enjoint de délivrer le visa sollicité par l'intéressée et a mis à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 000 euros au profit de Mme D... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme E... devant le tribunal administratif de Nantes.
Il soutient que la demande présentée par Mme D... devant le tribunal administratif de Nantes était irrecevable, du fait de la tardiveté de son recours administratif préalable obligatoire devant la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France.
Par un mémoire en défense, enregistré le 24 octobre 2024, Mme D..., représentée par Me Muland de Lik, conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que :
- elle a formé un recours la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France le 17 avril 2022, dans le délai de recours ouvert à l'encontre de la décision de refus de visa de l'autorité consulaire du 16 février 2022 ;
- le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision contestée était recevable.
Les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt à intervenir était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de ce que, en redirigeant les conclusions de la demande de première instance comme tendant à l'annulation d'une décision implicite née le 18 octobre 2022 de la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France, et en annulant une telle décision, alors que le président de la commission de recours avait statué sur le recours de Mme D... par une décision expresse du 9 septembre 2022, le tribunal administratif de Nantes a entaché son jugement d'une irrégularité.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Mas a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Par un jugement du 20 juin 2023, le tribunal administratif de Nantes, statuant sur une requête présentée par Mme D... enregistrée sous le n° 2211005, a annulé, à la demande de Mme D..., une décision implicite née le 18 octobre 2022 par laquelle la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé contre la décision du 16 février 2022 de l'autorité consulaire de l'ambassade de France en République démocratique du Congo refusant de lui délivrer un visa d'entrée et de long séjour au titre de la réunification familiale, a enjoint au ministre de l'intérieur de délivrer le visa sollicité et a mis à la charge de l'Etat le versement à Mme D... d'une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et, statuant sur une requête présentée par M. A... B..., enregistrée sous le n° 2211007, a rejeté la demande tendant à l'annulation du refus de visa d'entrée et de long séjour sollicité au titre de la réunification familiale opposé à l'intéressé. Le ministre de l'intérieur relève appel de ce jugement en tant qu'il a annulé le refus de visa opposé à Mme D..., lui a enjoint de délivrer le visa sollicité par l'intéressée et a mis à la charge de l'Etat le versement à Mme D... d'une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Sur la régularité du jugement attaqué en tant qu'il a statué sur la requête n° 2211005 de Mme D... :
2. Aux termes de l'article D. 312-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version applicable au litige : " Une commission placée auprès du ministre des affaires étrangères et du ministre chargé de l'immigration est chargée d'examiner les recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France prises par les autorités diplomatiques ou consulaires. La saisine de cette commission est un préalable obligatoire à l'exercice d'un recours contentieux, à peine d'irrecevabilité de ce dernier. ". Aux termes de l'article D. 312-5-1 du même code : " (...) Le président de la commission peut rejeter, sans réunir la commission, les recours manifestement irrecevables ou mal fondés. ".
3. Lorsque le silence gardé par l'administration sur une demande dont elle a été saisie a fait naître une décision implicite de rejet, une décision explicite de rejet intervenue postérieurement se substitue à la première décision. Dans ce cas, des conclusions à fin d'annulation de cette première décision doivent être regardées comme dirigées contre la seconde.
4. Il en résulte que les conclusions à fin d'annulation dirigées par Mme D... dans sa demande de première instance contre la décision implicite de la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France née le 18 octobre 2022 devaient être regardées comme dirigées contre la décision du 9 septembre 2022, mentionnée par le ministre dans ses écritures, par laquelle le président de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a explicitement rejeté le recours formé par Mme D... à l'encontre de la décision de refus de visa de l'autorité consulaire du 16 février 2022. Le tribunal qui a annulé une décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France, née le 18 octobre 2022, alors que celle-ci n'avait pu naître, le recours de Mme D... ayant déjà été expressément rejeté, s'est donc mépris sur la portée des conclusions dont il était saisi par Mme D... et a ainsi entaché son jugement d'irrégularité. Le jugement doit par suite être annulé en tant qu'il a statué sur la requête n° 2211005 présentée par Mme D....
5. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions de la demande présentée par Mme D... devant le tribunal administratif de Nantes tendant à l'annulation du refus de visa d'entrée et de long séjour sollicité au titre de la réunification familiale qui lui a été opposé.
Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision 9 septembre 2022 du président de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France en tant qu'elle concerne Mme D... :
6. Aux termes de l'article D. 312-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Les recours devant la commission mentionnée à l'article D. 312-3 doivent être formés dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision de refus de visa. (...). Ils sont seuls de nature à conserver le délai de recours contentieux jusqu'à l'intervention des décisions prévues à l'article D. 312-7. (...) ". Enfin, aux termes de l'article R. 421-5 du code de justice administrative : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ".
7. D'une part, il ressort des pièces du dossier que la décision de refus de visa de l'autorité consulaire du 16 février 2022 a été notifiée à Mme D..., avec l'indication du délai et des voies de recours contre cette décision, le 2 mars 2022.
8. D'autre part, si Mme D... soutient avoir, dans le délai de recours de deux mois courant à compter de cette notification, formé le recours prévu par l'article D. 312-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile par courrier daté du 17 avril 2022, elle ne justifie aucunement de la réception de ce courrier par la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France avant le 18 août 2022, date à laquelle ce courrier daté du 17 avril 2022 a été joint à un autre courrier daté du 16 août 2022. A la date d'introduction de ce recours, le délai de deux mois prévu à l'article D. 312-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, courant à compter de la date du 2 mars 2022 de notification de la décision de refus de visa de l'autorité consulaire, était expiré.
9. En l'absence de recours administratif préalable exercé dans le délai indiqué à l'article D. 312-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la demande présentée par Mme D... est irrecevable et doit être rejetée.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du 20 juin 2023 du tribunal administratif de Nantes est annulé en tant qu'il a annulé la décision implicite de la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France née le 18 octobre 2022 en ce qui concerne Mme D..., a enjoint au ministre de l'intérieur de délivrer le visa sollicité par l'intéressée et a mis à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 2 : La demande, enregistrée sous le n° 2211005, de Mme D..., présentée devant le tribunal administratif de Nantes est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et à Mme E....
Délibéré après l'audience du 18 mars 2025, à laquelle siégeaient :
- Mme Buffet, présidente de chambre,
- Mme Montes-Derouet, présidente-assesseure,
- M. Mas, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 avril 2025.
Le rapporteur,
B. MASLa présidente,
C. BUFFET
La greffière,
M. C...
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23NT02298