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28/03/2025 | FRANCE | N°23NT03869

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 4ème chambre, 28 mars 2025, 23NT03869


Vu la procédure suivante :





Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Rosporden a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 20 mai 2021 par lequel le préfet du Finistère a fixé le montant du prélèvement visé à l'article L. 302-7 du code de la construction et de l'habitation au titre de l'année 2021 à 37 377 euros et l'a affecté à l'établissement public foncier de Bretagne

Par un jugement n° 2103912 du 30 novembre 2023, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.





Procédure devant la cour :



Par une requête, enregistrée le 22 décembre 2023, la commun...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Rosporden a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 20 mai 2021 par lequel le préfet du Finistère a fixé le montant du prélèvement visé à l'article L. 302-7 du code de la construction et de l'habitation au titre de l'année 2021 à 37 377 euros et l'a affecté à l'établissement public foncier de Bretagne

Par un jugement n° 2103912 du 30 novembre 2023, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 22 décembre 2023, la commune de Rosporden, représentée par Me Bluteau, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 30 novembre 2023 du tribunal administratif de Rennes ;

2°) d'annuler l'arrêté du 20 mai 2021 du préfet du Finistère ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle n'a disposé que d'un délai d'une dizaine de jours pour présenter ses observations, ce qui était manifestement insuffisant pour lui permettre d'apprécier l'étendue des éventuelles erreurs commises dans le calcul des logements sociaux ;

- le préfet du Finistère ne justifie, à aucun moment, avoir communiqué à la commune l'inventaire complémentaire sur le mode de financement des logements mis en service à compter du 1er janvier 2002, ce qui l'a privée d'une garantie ;

- le " dispositif SRU " ne saurait avoir, et n'a d'ailleurs jamais eu, pour objectif d'inclure dans son système la population comptée à part ;

- la population municipale de la communauté d'agglomération Concarneau Cornouaille, devant être prise en compte pour l'application de l'article L. 302-7 du code de la construction et de l'habitation, n'a jamais dépassé le seuil de 50 000 habitants entre 2009 et 2015 ; il ressort du porter à connaissance de l'Etat adressé par la préfecture du Finistère à la communauté d'agglomération Concarneau Cornouaille qu'au 1er janvier 2020, l'établissement public n'était toujours pas concerné par le " dispositif SRU " ; la commune n'y est entrée qu'en 2021 ;

- elle devait être exonérée du prélèvement sur ressources fiscales pendant une période de trois ans, en application de la dernière phrase du premier alinéa de l'article L. 302-7 du code de la construction et de l'habitation ;

- il résulte, en tout état de cause, des travaux parlementaires et du principe de sécurité juridique et de clarté et d'intelligibilité de la loi que le premier alinéa de l'article L. 302-7 du code de la construction et de l'habitation doit être compris en ce que les communes soumises pour la première fois au " dispositif SRU " à compter du 1er janvier 2015, sont exonérées de prélèvement sur ressources fiscales pendant une période de trois ans ;

- la commune, avant l'arrêté litigieux, et depuis le 1er janvier 2015, n'a pas été soumise aux obligations du " dispositif SRU ".

Par un mémoire en défense enregistré le 2 mai 2024, le préfet du Finistère conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la commune de Rosporden ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de la construction et de l'habitation ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Derlange, président assesseur,

- les conclusions de Mme Rosemberg, rapporteure publique,

- et les observations de Me Karim Zadeh, substituant Me Bluteau, pour la commune de Rosporden.

Considérant ce qui suit :

1. La commune de Rosporden, membre de la communauté d'agglomération Concarneau Cornouaille Agglomération (CCA), devait disposer d'un taux minimum de logements locatifs sociaux de 20% sur l'ensemble des résidences principales situées sur son territoire en application des dispositions de l'article L. 302-5 du code de la construction et de l'habitation et, pour l'année 2020, un objectif de réalisation de 710 logements locatifs sociaux lui a été assigné. N'en ayant réalisé que 540, le préfet du Finistère, par un arrêté du 8 mars 2021, a fixé le montant du prélèvement prévu à l'article L. 302-7 du même code au titre de l'année 2021 à 39 963 euros. Par un courrier du 19 mars 2021, le maire de la commune de Rosporden a formé un recours gracieux tendant au retrait de l'arrêté du 8 mars 2021 au motif notamment que la commune devait être exonérée de ce prélèvement. Par un courrier du 20 mai 2021 et un arrêté du même jour, le préfet a abrogé l'arrêté du 8 mars 2021 et a fixé le montant du prélèvement prévu à l'article L. 302-7 du code de la construction et de l'habitation sur les ressources fiscales de la commune de Rosporden, au titre de l'année 2021, à hauteur de 37 377 euros. La commune de Rosporden relève appel du jugement du 30 novembre 2023 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande d'annulation de ce dernier arrêté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 302-5 du code de la construction et de l'habitation, dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision contestée : " I. - Les dispositions de la présente section s'appliquent aux communes dont la population est au moins égale à 1 500 habitants dans l'unité urbaine de Paris et 3 500 habitants sur le reste du territoire qui sont comprises, au sens du recensement de la population, dans une agglomération ou un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre de plus de 50 000 habitants comprenant au moins une commune de plus de 15 000 habitants, et dans lesquelles le nombre total de logements locatifs sociaux représente, au 1er janvier de l'année précédente, moins de 25 % des résidences principales. (...) ". Aux termes de l'article L. 302-6 du même code : " (...) Le représentant de l'Etat dans le département communique chaque année à chaque commune susceptible d'être visée à l'article L. 302-5, avant le 1er septembre, les inventaires la concernant assortis du nombre de logements sociaux décomptés en application de l'article L. 302-5 sur son territoire au 1er janvier de l'année en cours, lorsque le nombre de logements sociaux décomptés représente moins que le taux mentionné, selon le cas, aux I ou II dudit article L. 302-5. La commune dispose de deux mois pour présenter ses observations. / Après examen de ces observations, le représentant de l'Etat dans le département notifie avant le 31 décembre le nombre de logements sociaux retenus pour l'application de l'article L. 302-5. (...) ". Aux termes de l'article L. 302-7 du même code, dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision contestée : " Il est effectué chaque année un prélèvement sur les ressources fiscales des communes visées à l'article L. 302-5, à l'exception de celles qui bénéficient de la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale prévue par l'article L. 2334-15 du code général des collectivités territoriales lorsque le nombre des logements sociaux y excède 20 % des résidences principales pour les communes mentionnées au I du même article L. 302-5, ou 15 % pour les communes mentionnées aux premier et dernier alinéas du II dudit article L. 302-5. A compter du 1er janvier 2015, toute commune soumise pour la première fois à l'application des I ou II de l'article L. 302-5 est exonérée de ce prélèvement pendant les trois premières années. (...) ".

3. En premier lieu, il est constant que le préfet du Finistère n'a pas communiqué à la commune de Rosporden, avant le 1er septembre 2020, les inventaires la concernant assortis du nombre de logements sociaux décomptés, en application de l'article L. 302-5 du code de la construction et de l'habitation, sur son territoire au 1er janvier 2020 et en tout cas avant qu'il lui notifie le nombre de logements sociaux retenus pour l'application de l'article L. 302-5 du même code. Il a ainsi méconnu les dispositions précitées de l'article L. 302-6 du même code. Toutefois, la méconnaissance du délai prévu par ces dispositions, qui n'est pas prescrit à peine de nullité, est sans incidence sur la légalité de l'arrêté préfectoral contesté. En tout état de cause, eu égard en particulier au fait qu'elle a pu contester précisément le montant du prélèvement mis à sa charge dans le cadre de son recours gracieux en faisant valoir les mêmes arguments que devant le tribunal, il résulte de l'instruction que cette irrégularité, est restée sans influence sur le sens de la décision contestée et n'a pas privé la commune de Rosporden d'une garantie, alors surtout que, contrairement à ce qu'elle soutient, il ressort des pièces du dossier que l'inventaire des logements sociaux de son territoire lui a été notifié par une lettre du préfet du 10 février 2021.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 2151-1 du code général des collectivités territoriales, relatif à la population de la commune : " II. - Les catégories de population sont : / 1. La population municipale ; / 2. La population comptée à part ; / 3. La population totale, qui est la somme des deux précédentes. (...) ".

5. La commune de Rosporden n'est pas fondée à soutenir que le seuil de 50 000 habitants relatif à la communauté d'agglomération Concarneau Cornouaille dont elle fait partie aurait dû être calculé sans tenir compte de la " population comptée à part " dès lors que les dispositions de l'article L. 302-5 du code de la construction et de l'habitation commandent de déterminer la population de cet établissement " au sens du recensement de la population " et qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'implique que le chiffre de la population qui sert de base à l'application de ces dispositions ne serait pas celui de la population totale, obtenu par addition au chiffre de la population municipale de celui de la population comptée à part.

6. En troisième et dernier lieu, il résulte clairement des dispositions précitées de l'article L. 302-7 du code de la construction et de l'habitation, exonérant de prélèvement pendant les trois premières années toute commune soumise pour la première fois à l'application des I ou II de l'article L. 302-5, que cette exonération est applicable à compter du 1er janvier 2015 dans ces conditions et non pas aux communes qui y seraient soumises pour la première fois à compter de cette date mais seraient également entrées dans son champ d'application avant celle-ci. Par suite, la commune de Rosporden n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le préfet du Finistère lui a refusé le bénéfice de cette exonération au motif qu'elle a relevé en 2010, pour la première fois, des dispositions de l'article L. 302-5 du code de la construction et de l'habitation. Il résulte de l'instruction que la communauté d'agglomération Concarneau Cornouaille comptait 51 166 habitants en 2010, ainsi que cela résulte du tableau des communes membres d'un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) au 1er janvier 2010 et situées hors agglomération établi par l'INSEE et la direction générale des collectivités locales, et que la commune de Rosporden a été soumise à l'application de l'article L. 302-5 du code de la construction et de l'habitation au titre de l'année 2010. Par suite, la commune de Rosporden n'est pas fondée à soutenir qu'elle pouvait bénéficier de l'exonération du prélèvement prévu à l'article L. 302-7 du code de la construction et de l'habitation pendant trois années à compter de 2020.

7. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Rosporden n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa requête.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, la somme demandée par la commune de Rosporden.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la commune de Rosporden est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Rosporden et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Une copie en sera transmise, pour information, au préfet du Finistère.

Délibéré après l'audience du 11 mars 2025, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- M. Derlange, président assesseur,

- Mme Picquet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 mars 2025.

Le rapporteur,

S. DERLANGE

Le président,

L. LAINÉ

Le greffier,

C. WOLF

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23NT03869


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NT03869
Date de la décision : 28/03/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINÉ
Rapporteur ?: M. Stéphane DERLANGE
Rapporteur public ?: Mme ROSEMBERG
Avocat(s) : BLUTEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 30/03/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-03-28;23nt03869 ?
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