Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Viéville,
- et les conclusions de M. Brasnu, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., dessinateur projeteur au sein de la société Alidade a fait l'objet d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle qui a porté sur les années 2013, 2014 et 2015. Il a été informé de ce contrôle par un avis du 30 juin 2016. Un droit de communication a été exercé le 20 juillet 2016 auprès des établissements bancaires dans lesquels M. A... possédait un compte ouvert. L'examen de ces comptes ayant mis en évidence une disproportion marquée entre les sommes versées sur ces comptes et les revenus déclarés au titre des années 2013, 2014 et 2015, le service a invité M. A..., par une lettre modèle n° 2172 du 9 décembre 2016 à justifier l'origine et la nature des crédits inexpliqués. La réponse du 7 février 2017 ayant été jugée insuffisante, une seconde demande d'éclaircissements a été adressée le 6 mars 2017. M A... a répondu à cette nouvelle demande par une lettre 4 avril 2017. Le service a adressé une proposition de rectification à M. A... le 12 juin 2017 portant sur les années 2014 et 2015. Les observations de M. A... ont été rejetées le 8 septembre 2017 par le service. Lors de sa séance du 11 octobre 2018, la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires de la Loire-Atlantique a émis un avis favorable au maintien des rappels. Les rappels d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux, assortis de l'intérêt de retard et de la majoration de 40 % prévue au a de l'article 1729 du code général des impôts ont été mis en recouvrement le 31 octobre 2019. La réclamation présentée par M. A... le 6 décembre 2019 a été rejetée le 18 mai 2020. La requête présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Nantes a été rejetée par un jugement de ce tribunal du 12 avril 2024.
M. A... relève appel de ce jugement.
Sur les conclusions aux fins de décharge :
En ce qui concerne la régularité de la procédure :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 12 du livre des procédures fiscales : " Dans les conditions prévues au présent livre, l'administration des impôts peut procéder à l'examen contradictoire de la situation fiscale des personnes physiques au regard de l'impôt sur le revenu (...) Sous peine de nullité de l'imposition, un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle ne peut s'étendre sur une période supérieure à un an à compter de la réception de l'avis de vérification. (...) Elle est également prorogée des trente jours prévus à l'article L. 16 A et des délais nécessaires à l'administration pour obtenir les relevés de compte lorsque le contribuable n'a pas usé de sa faculté de les produire dans un délai de soixante jours à compter de la demande de l'administration (...) ". Ces dispositions ne font pas obstacle à ce que l'administration, après avoir demandé au contribuable de lui communiquer ses relevés de compte, exerce, avant même l'expiration du délai de soixante jours impartis au contribuable, son droit de communication auprès des organismes bancaires pour obtenir ces mêmes documents.
3. Il résulte de l'instruction que l'avis d'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle de l'appelant lui a été adressé en recommandé avec avis de réception par le service le 30 juin 2016 et que le requérant en a été avisé à son domicile le 1er juillet 2016. Cet avis l'invitait à présenter dans un délai de soixante jours la totalité des relevés des comptes financiers de toute nature et des comptes courants sur lesquels M. A... ou les membres de son foyer fiscal ont réalisé des opérations de nature personnelle. Le pli a été retourné au service vérificateur avec la mention " pli avis et non réclamé " faute d'avoir été retiré. Il s'ensuit que le service pouvait dès le 20 juillet 2016, avant même l'expiration du délai de soixante jours, exercer son droit de communication auprès des organismes bancaires pour obtenir la production des mêmes documents. Le moyen est écarté.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales : " En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements. (...) / Elle peut également lui demander des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés, notamment lorsque le total des montants crédités sur ses relevés de compte représente au moins le double de ses revenus déclarés ou excède ces derniers d'au moins
150 000 euros. (...) ". Aux termes de l'article L. 69 du même livre : " Sous réserve des dispositions particulières au mode de détermination des bénéfices industriels et commerciaux, des bénéfices agricoles et des bénéfices non commerciaux, sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications prévues à l'article L. 16 ".
5. D'une part, les dispositions précitées autorisent l'administration à adresser au contribuable des demandes de justifications, à peine de taxation d'office pour absence de réponse, dans tous les cas où elle a réuni des éléments de nature à établir la possibilité d'une insuffisance de déclaration, et où cette insuffisance ne concerne pas les revenus d'une activité professionnelle exercée par le contribuable, imposables dans les catégories des bénéfices industriels et commerciaux, des bénéfices non commerciaux ou des bénéfices agricoles.
6. D'autre part, la différence constatée entre les sommes portées au crédit des comptes bancaires ouverts au nom du contribuable, sous réserve de la neutralisation, s'il y a lieu, des virements opérés entre les comptes du contribuable, et le montant brut de ses revenus déclarés dont l'importance doit justifier la mise en œuvre de la procédure de demande de justifications, s'entend de celle que l'administration constate avant tout examen critique, préalable à cette mise en œuvre, des crédits qu'elle a recensés, quelles que soient les premières justifications que le contribuable a pu spontanément apporter postérieurement à l'engagement de la vérification, et qui peuvent être de nature à réduire le montant des crédits sur lesquels il sera effectivement interrogé.
7. Il résulte de l'instruction que le total des crédits portés sur les comptes bancaires de
M. A... au titre de l'année 2015 s'élevait à la somme de 81 734 euros. Après avoir neutralisé les virements de compte à compte qu'il avait identifié pour un montant de 4 800 euros sur les relevés avant tout examen critique et pris en compte les demandes du requérant concernant la prise en compte d'autres virements pour porter cette somme à 11 984 euros, le service vérificateur a retenu un montant total de crédits bancaires détenus de 69 750 euros. En ce qui concerne le deuxième terme de comparaison, l'administration ne pouvait se fonder que sur le montant des revenus bruts déclarées par M. A... soit 24 505 euros au titre de l'année 2015. Il s'ensuit que la différence constatée, avant tout examen critique préalable des sommes portées au crédit des comptes bancaires de M. A... et qui représente plus du double des revenus déclarés par l'intéressé en 2015, justifiait la mise en œuvre de la procédure de demande de justifications des dispositions précitées de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales. Si l'appelant soutient que les crédits bancaires provenant de versements de son employeur comprenaient des remboursements de frais professionnels qui n'auraient pas dû être pris être pris en compte dans l'appréciation de la règle du double, il ressort de l'examen des relevés que les versements de l'employeur de M. A... étaient globaux et ne permettaient pas d'identifier des sommes ayant la nature de remboursement de frais. Par suite, le moyen tiré de ce que le service aurait méconnu les dispositions de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales pour établir l'imposition de
M. A... au titre de l'année 2015 doit être écarté.
8. En troisième lieu, il ne résulte pas de l'instruction que l'administration détenait des informations ou documents fondant les rehaussements dont elle n'aurait pas fait part au cours de la procédure et dont le requérant sollicite la communication en invoquant le respect du principe d'égalité des armes.
Sur le bien-fondé des impositions :
9. Aux termes de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition ". L'administration ayant eu recours à la procédure de taxation d'office de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales pour réintégrer les revenus d'origine indéterminée dans les revenus imposables de M. A..., ce dernier supporte la charge de la preuve du caractère exagéré des impositions supplémentaires mises à sa charge à raison de ces rectifications, en application des dispositions de l'article L. 193 précitées.
10. M. A... soutient qu'il a encaissé les chèques émis par les sociétés Villy Protection et Security Groupe pour le compte d'un ami à qui il a restitué les fonds sous la forme de retraits d'espèces, voire de dépenses payées par carte bancaire et par chèques (eau, électricité, équipements). Cependant, il ne produit pas plus en appel qu'en première instance de pièces au soutien de ses affirmations tant pour l'année 2014 que pour l'année 2015.
11. Si M. A... soutient que certaines sommes versées sur ses comptes bancaires correspondraient à des remboursements de frais professionnels par son employeur, il résulte de l'instruction que le service vérificateur a retenu que les salaires versés par son employeur et les remboursements de frais représentaient une somme totale justifiée de 46 638 euros au titre de l'année 2015, soit un montant supérieur à celui revendiqué par l'appelant. S'agissant de l'année 2014, le service vérificateur a admis que les salaires et remboursement de frais justifiés représentaient une somme globale de 43 117 euros et le requérant n'établit aucunement que cette somme aurait dû être portée à un montant supérieur.
12. Dans ces conditions, M. A... ne rapporte pas la preuve qui lui incombe de ce que les sommes litigieuses de 62 171 euros et 18 914 euros ont été imposées à tort comme revenus d'origine indéterminée au titre des années 2014 et 2015.
Sur les pénalités :
13. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré ; (...). ".
14. Pour justifier l'application de la majoration pour manquement délibéré, l'administration fait état de l'importance au regard des revenus déclarés des sommes ayant fait l'objet d'une taxation au titre des revenus d'origine indéterminée, de l'absence de justification sérieuse de l'origine des sommes taxées et du caractère répété des infractions sur les deux années en litige. Par suite, elle justifie le caractère délibéré de l'insuffisance de déclaration et donc l'application de la majoration pour manquement délibéré.
15. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa requête.
Par suite, les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré après l'audience du 31 janvier 2025, à laquelle siégeaient :
- M. Quillévéré, président de chambre,
- M. Geffray, président assesseur,
- M. Viéville, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 février 2025.
Le rapporteur
S. VIÉVILLELe président
G. QUILLÉVÉRÉ
La greffière
A. MARCHAIS
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 24NT0186002