Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... a demandé au tribunal administratif de Rennes de condamner la commune de Plouégat-Guérand à réaliser les travaux préconisés par l'expert judiciaire afin de canaliser l'écoulement des eaux en provenance de la voie publique, de remplacer la plaque d'acier installée au droit de sa propriété par une plaque permettant l'écoulement des eaux et un accès sécurisé à sa propriété. Il a demandé au tribunal de condamner la commune à lui verser la somme globale de 42 778,24 euros en réparation de ses préjudices résultant des inondations qu'il subit depuis 2007 ainsi que la somme de 7 173,73 euros au titre des investigations complémentaires sollicitées par l'expert judiciaire. Il a enfin présenté des conclusions tendant à ce que soient mis à la charge de la commune les frais d'expertise s'élevant à 13 875,05 euros ainsi que la somme de 10 000 euros en remboursement des frais exposés et non compris dans les dépens.
Par un jugement n° 2102717 du 19 décembre 2023, le tribunal administratif de Rennes a condamné la commune de Plouégat-Guérand à verser à M. A... la somme de 11 949,70 euros, a enjoint à la collectivité de réaliser dans un délai de six mois les travaux décrits au point 19 du jugement, et a mis à sa charge les frais d'expertise ainsi que le versement à l'intéressé de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 13 février et 28 novembre 2024, M. A..., représenté par Me Leroux, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 19 décembre 2023 en tant qu'il a limité à 11 949,70 euros la somme que la commune de Plouégat-Guérand a été condamnée à lui verser, a rejeté ses conclusions tendant à ce que l'injonction prononcée soit assortie d'une astreinte, et a limité à 1 500 euros la somme mise à la charge de la commune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
2°) de condamner la commune de Plouégat-Guérand à lui verser la somme de 24 778,24 euros TTC, actualisée sur la base de l'indice BT01 à compter du 7 janvier 2021, et d'assortir cette somme des intérêts au taux légal ;
3°) de condamner la commune à lui verser, pour les travaux de reprise du carrelage, la somme de 6 068,15 euros TTC, actualisée sur la base de l'indice BT01 à compter du 7 janvier 2021, et d'assortir cette somme des intérêts au taux légal ;
4°) de condamner la commune à lui verser 7 173,70 euros au titre des frais nécessaires à la réalisation des investigations complémentaires sollicitées par l'expert judiciaire ;
5°) de condamner la commune à lui verser 15 000 euros en réparation de son préjudice moral ;
6°) d'enjoindre à la commune, sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, de réaliser les travaux préparatoires préconisés par l'expert et de remplacer la plaque d'acier au droit de sa propriété par une plaque conforme à la législation, permettant l'écoulement des eaux et un accès sécurisé à sa propriété ;
7°) de mettre les frais d'expertise à la charge de la commune ;
8°) de mettre la somme de 10 000 euros à la charge de la commune au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé et a omis de répondre à ses moyens ;
- c'est à tort que le tribunal administratif a retenu une faute de la victime ; la fragilité ou la vulnérabilité de la construction ne peuvent atténuer la responsabilité de la commune ;
- les principes qui gouvernent la responsabilité sans faute et le droit à l'indemnisation intégrale des préjudices subis ne sauraient conduire à une obligation de préfinancement des travaux de reprise des désordres, d'autant que les dommages perdurent tant que la commune n'a pas réalisé les travaux préconisés par l'expert ; il justifie d'un devis de 24 778,24 euros ;
- s'agissant des frais d'investigation, le tribunal administratif a omis de prendre en compte une facture de 324 euros, de sorte que la condamnation de la commune doit être portée à 7 173,70 euros ;
- l'évaluation de son préjudice moral doit être portée à 15 000 euros compte tenu de l'ancienneté des faits et de l'attitude " dilatoire " de la commune ;
- il doit être " indemnisé " à hauteur de 12 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens dès lors qu'il a dû saisir le juge des référés, assurer sa défense lors des opérations d'expertise et engager une procédure juridictionnelle jusqu'en appel ;
- l'inaction fautive de la commune justifie que l'injonction prononcée par le tribunal administratif soit assortie d'une astreinte.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 25 juin et 23 décembre 2024, la commune de Plouégat-Guérand, représentée par Me Lahalle, conclut au rejet de la requête. Par la voie de l'appel incident, elle demande à la cour d'annuler le jugement attaqué en tant qu'il l'a condamné à verser à M. A... la somme de 11 949,70 euros, lui a enjoint de réaliser dans un délai de six mois les travaux décrits au point 19 du jugement, et a mis à sa charge les frais d'expertise ainsi que le versement à M. A... de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et de rejeter la requête présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Rennes et sollicite le versement par le requérant de la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés ;
- ce sont les travaux réalisés par M. A... sans autorisation qui seuls sont à l'origine des dommages qu'il a subis ;
- les travaux réalisés en 2020 consistant en la pose d'une plaque d'acier à l'entrée de la propriété de M. A... doivent être déduits du montant des préjudices retenus ; à tout le moins, l'expert a évalué le coût des réparations à 16 700 euros TTC de sorte que la somme mise à la charge de la commune ne saurait excéder 8 501,66 euros ;
- les préjudices nés plus de 4 ans avant le dépôt du rapport d'expertise sont prescrits, de sorte que l'intéressé ne peut solliciter une somme de 15 000 euros correspondant à son préjudice moral depuis 2006 ; il ne justifie pas du stress invoqué ;
- la demande présentée par M. A..., tendant à titre principal à ce qu'il soit enjoint à la commune de réaliser des travaux est irrecevable ; aucune injonction ne saurait être prononcée à son encontre dès lors que la cause principale des désordres résulte des travaux effectués par M. A... ; à tout le moins, le montant de l'astreinte sollicité sera ramené à de plus justes proportions ;
- les frais d'investigation et d'expertise devront être mis à la charge de la commune à concurrence de sa part de responsabilité.
Le mémoire présenté le 23 janvier 2025, après la clôture de l'instruction fixée au 17 janvier 2025 par une ordonnance du même jour, pour M. A..., n'a pas été communiqué.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Gélard,
- les conclusions de M. Catroux, rapporteur public,
- les observations de Me Reinhardt, substituant Me Leroux, représentant M. A...,
- et les observations de Me Vautier, substituant Me Lahalle, représentant la commune de Plouégat-Guérand.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... est propriétaire, depuis 1975, d'une maison située au lieu-dit " Pont ar Vinihy " sur la commune de Plouégat-Guérand (Finistère). A l'époque, l'habitation était accessible par une voie communale en terre. Cette voie a été recouverte d'un enrobé dans les années 1980. En 2006, la commune a décidé de refaire ce revêtement. Depuis 2007, M. A... subit régulièrement d'importantes inondations. A sa demande, un expert judiciaire a été désigné par une ordonnance du 28 novembre 2018 du juge des référés du tribunal administratif de Rennes, afin de constater les désordres affectant sa propriété et d'en déterminer les causes. Le rapport d'expertise définitif a été déposé le 30 décembre 2020. A cette occasion, la commune a réalisé quelques travaux de voirie, qui se sont néanmoins avérés insuffisants. Le 20 janvier 2021, M. A... a présenté auprès de la commune de Plouégat-Guérand une nouvelle réclamation préalable tendant à la réparation de ses préjudices. Il relève appel du jugement du 19 décembre 2023, par lequel le tribunal administratif de Rennes a condamné la commune à lui verser la somme globale de 11 949,70 euros, a enjoint à la commune de réaliser des travaux dans un délai de six mois, et a mis à la charge cette dernière les frais d'expertise dont le montant a été taxé et liquidé à la somme de 13 975,05 euros ainsi que 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Le requérant demande à la cour de majorer les sommes allouées par le tribunal administratif. Pour sa part, la commune conteste, par la voie de l'appel incident, sa responsabilité ainsi que le quantum de sa condamnation.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Contrairement à ce que soutient M. A..., il ne résulte pas de l'instruction que les premiers juges, qui ont suffisamment motivé le jugement attaqué, auraient omis de répondre à certains de ses moyens. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que ce jugement serait entaché d'irrégularité pour ce motif. Ce moyen ne peut dès lors qu'être écarté.
Sur la responsabilité sans faute de la commune et la faute de la victime :
3. Le maître d'ouvrage est responsable, même en l'absence de faute, des dommages que les ouvrages publics dont il a la garde peuvent causer aux tiers tant en raison de leur existence que de leur fonctionnement. Il ne peut dégager sa responsabilité que s'il établit que ces dommages résultent de la faute de la victime ou d'un cas de force majeure. Dans le cas d'un dommage causé à un immeuble, la fragilité ou la vulnérabilité de celui-ci ne peuvent être prises en compte pour atténuer la responsabilité du maître de l'ouvrage, sauf lorsqu'elles sont elles-mêmes imputables à une faute de la victime. En dehors de cette hypothèse, de tels éléments ne peuvent être retenus que pour évaluer le montant du préjudice indemnisable.
4. Il n'est pas contesté que, depuis 2007, l'habitation de M. A..., située au bord d'une route communale, subit régulièrement des dégradations résultant de l'écoulement des eaux pluviales provenant de cette voie et que l'intéressé, qui a la qualité de tiers par rapport à cet ouvrage public, est victime de dommages présentant un caractère grave et spécial. Selon l'expert judiciaire désigné par le tribunal, les travaux de voirie réalisés en 2007 par la commune de Plouégat-Guérand ont modifié l'écoulement des eaux de pluies qui, compte tenu de la pente du sol, se trouvent dirigées vers la maison de M. A.... Si, au décours des opérations d'expertise, la commune a réalisé en 2019 quelques aménagements destinés à résorber le volume des eaux déversées en direction de la propriété du requérant, ces travaux se sont avérés insuffisants. Par suite, c'est à juste titre que les premiers juges ont estimé que la responsabilité sans faute de la commune était engagée à raison de ces dommages.
5. Les premiers juges ont cependant estimé que M. A..., qui avait également entrepris des travaux sur sa propriété depuis son acquisition, avait contribué à la réalisation de ces dommages. Ils ont en outre considéré que le mode de construction inadapté de cette habitation était de nature à exonérer partiellement la commune de sa responsabilité. Il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise que l'intéressé a notamment installé un bardage sur la façade de sa maison au cours des années 2002-2003. Or, l'expert a constaté que cet équipement en bois n'avait pas été posé selon les règles de l'art. Il ne respecte pas une garde au sol suffisante et ne comporte pas de ventilation. De plus, un lit de graviers apposé par M. A... a enterré le pied du bardage. Ces travaux imputables au requérant doivent être regardés comme constituant une faute de la victime. Ils sont de nature à exonérer la commune de sa responsabilité à hauteur des 2/3 en ce qui concerne les dommages affectant ce bardage extérieur.
6. Le tribunal administratif a également considéré, sur la base des conclusions d'expertise, que le mode de construction de l'habitation au regard du risque " humidité ", notamment l'absence de protection des murs enterrés contre les transferts d'humidité de l'extérieur vers l'intérieur, avait contribué à la dégradation de l'habitation de l'intéressé. Toutefois, si cette considération peut être retenue pour évaluer le montant du préjudice indemnisable de M. A..., la fragilité ou la vulnérabilité de sa maison d'habitation ne peut être regardée comme une faute de la victime de nature à atténuer la responsabilité de la commune. Par suite, le requérant est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a jugé qu'il avait contribué à hauteur de 50 % aux désordres affectant le parquet de la chambre et le carrelage du séjour de sa maison affectés par les infiltrations litigieuses. Pour ces deux dommages, comme pour ceux concernant la cave de l'habitation, la responsabilité de la commune de Plouégat-Guérand est pleine et entière.
Sur les préjudices :
En ce qui concerne le devis de 24 778,24 euros TTC (22 525,67 euros HT) :
S'agissant du bardage extérieur de la maison :
7. Le devis n°DE01441 établi le 16 juin 2020 par la société Scouarnec correspond à hauteur de 6 719 euros HT aux travaux de reprise des désordres affectant la façade de la maison de M. A.... L'intéressé se prévaut également d'un devis n°DE00795 du 19 juin 2020 de la société Le Roux dont le montant s'élève à 838.95 euros HT. Si l'expert judiciaire a estimé que la somme de 8 313,75 euros TTC devait ainsi être retenue pour l'évaluation de ce préjudice, il n'a cependant pas tenu compte de la vétusté du bardage en bois posé en 2002-2003. Par suite, compte tenu de l'ancienneté de ces matériaux, dont la durée de vie est nécessairement limitée dans le temps, et de la faute commise par M. A..., exonérant la commune de sa responsabilité à concurrence des 2/3, il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en condamnant la commune de Plouégat-Guérand à lui verser une somme de 1 000 euros.
S'agissant des travaux concernant la dalle extérieure :
8. Il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise que les travaux de reprise des désordres impliquent la démolition de la terrasse en béton située en façade de la maison de M. A... et sa réfection avec une pente dirigée vers le caniveau. Le devis de la société Scouarnec évalue le coût de ces travaux à 828,75 euros HT, soit 911,63 euros TTC. En conséquence, et alors même que l'intéressé ne justifierait pas à la date du présent arrêt de la réalisation de ces travaux, il y a lieu de mettre à la charge de la commune cette somme arrondie à 912 euros TTC.
S'agissant des travaux de reprise de la cave :
9. Le devis précité de la société Scouarnec fait apparaître des travaux de réfection de la cave de M. A... à hauteur de 4 180.65 euros HT. Ainsi que l'a relevé l'expert judiciaire, certaines prestations incluses dans cette somme constitueraient toutefois une amélioration de l'ouvrage et ne peuvent donc être prises en compte. Par suite, cette dépense doit être ramenée à 2 793.75 euros HT, soit 3 073.13 euros TTC, retenue par l'expert. En conséquence, il y a lieu de mettre cette somme arrondie à 3 075 euros TTC à la charge de la commune de Plouégat-Guérand.
S'agissant des travaux concernant le parquet de la chambre :
10. Le devis de la société Scouarnec évalue les travaux de reprise des désordres affectant la chambre de l'habitation de M. A..., impactée par les désordres, à 2 733.50 euros HT, soit 3 006.85 euros TTC. En conséquence, la responsabilité de la commune étant pleine et entière, il y a lieu de mettre cette somme arrondie à 3 010 euros TTC à sa charge.
S'agissant des désordres affectant le carrelage du séjour :
11. M. A... se prévaut du devis de la société Scouarnec pour la réfection du support du carrelage, affecté de tassements liés à l'humidité sous-jacente, pour un montant de 8 063.77 euros HT, duquel il y a lieu de retirer le coût de démontage de la cheminée, qui n'est pas lié au litige. Seule la somme de 7 483.77 euros HT peut en conséquence être prise en compte. Le requérant a également produit un devis n°DE01241 de la société Seite du 14 août 2020 pour la réfection du carrelage, pour un montant de 5 516.50 euros HT (6 068,15 euros TTC). S'il soutient que cette somme doit également être prise en compte, outre le fait que ce devis intègre une natte de marque Kerdi destinée à une pièce d'eau, ne relevant pas du présent litige, il résulte des mentions de ces deux devis qu'ils ont été établis pour une surface de 82 m². Or, dans son rapport, l'expert a expressément indiqué que la déformation du carrelage de cette pièce, en lien avec les infiltrations d'eau, n'affectait qu'une surface de 10 m². Dans ces conditions, en prenant en compte le coût de 143 euros HT/m² pour le devis Scouarnec et de 66,25 euros HT/m² pour le devis Seite, la somme mise à la charge de la commune au titre de ces désordres doit être ramenée à 2 300 euros TTC.
12. Il résulte de ce qui vient d'être dit ci-dessus que M. A... est fondé à solliciter la condamnation de la commune à lui verser la somme globale de 10 297 euros TTC (1 000 + 912 + 3 075 + 3 010 + 2 300 euros) en réparation de ces désordres.
En ce qui concerne les autres dommages matériels :
13. Dans sa requête introductive d'instance, M. A... a indiqué que les infiltrations d'eaux en provenance de la voie publique avaient également causé des dommages matériels évalués à 3.000 euros par son assureur. Si, dans son rapport, l'expert a estimé que les travaux de reprise devaient inclure la réfection des doublages dans les placards sous les fenêtres, le requérant ne produit aucune évaluation de ces travaux. Il sera fait une juste appréciation du coût de ceux-ci en les évaluant à la somme de 500 euros TTC qui sera mise à la charge de la commune.
En ce qui concerne le préjudice moral :
14. Le préjudice moral que M. A... indique subir, à raison des arrivées d'eau, et infiltrations dans sa propriété revêt un caractère continu et évolutif. Par ailleurs, rien ne fait obstacle à ce que ce préjudice soit mesuré dès qu'il a été subi. Il s'ensuit que la créance indemnitaire qui résulte de ce préjudice doit être rattachée, dans la mesure où il s'y rapporte, à chacune des années au cours desquelles il a été subi. M. A... soutient dans ses écritures avoir subi des nuisances à partir des travaux effectués par la commune en 2006 et avoir alerté cette collectivité depuis de nombreuses années sur cette situation, sans toutefois en justifier. Il a toutefois introduit devant le tribunal administratif de Rennes le 21 septembre 2018, une requête en référé expertise n°1804458 mettant en cause les travaux de voirie effectués par la commune de Plouégat-Guérand. Cette requête, qui a interrompu le délai de prescription à l'encontre de cette collectivité, avait été précédée de démarches amiables dont il est attesté par la production d'un rapport d'expertise dommages de la société Texa Expertises faisant état de contacts et d'un rendez-vous d'expertise dès les mois de novembre et décembre 2016, ayant donné lieu à un procès-verbal de constatation dressé contradictoirement le 25 janvier 2017. Il s'ensuit que l'exception de prescription quadriennale opposée en défense par la commune de Plouégat-Guérand ne peut être accueillie, s'agissant de la créance dont l'appelant se prévaut sur la commune du fait des troubles et nuisances qu'il a subis, que pour la période antérieure au 1er janvier 2012.
15. Il est constant que M. A... subit régulièrement et depuis longtemps des inondations ou infiltrations en lien avec l'insuffisance des dispositifs d'évacuation des eaux de pluie provenant de la voie publique, sans qu'une solution permettant de mettre un terme à ces désordres persistants ait été mise en œuvre. Par ailleurs, le requérant justifie avoir sollicité à de multiples reprises la commune pour qu'elle réalise des travaux de voirie afin de canaliser les eaux pluviales et d'éviter qu'elles ne se déversent au pied de son habitation. Ainsi qu'il a été rappelé ci-dessus, les aménagements réalisés en 2019 par la commune ne suffisent pas à résorber le surplus d'eaux pluviales qui, en raison de la pente naturelle, convergent vers le mur de façade de la maison de M. A.... Dans ces conditions, l'intéressé ayant été contraint de saisir le juge des référés puis le juge du fond du tribunal administratif de Rennes, et la présente cour, justifie d'un préjudice moral certain. Compte tenu de l'ampleur des dommages et de la durée de la procédure en cours il y a lieu de porter à 7 000 euros la somme que le tribunal administratif a mis à la charge de la commune en réparation de ce préjudice.
16. Il résulte de tout ce qui précède, que M. A... est fondé à demander que la somme mise à charge de la commune de Plouégat-Guérand en réparation de ses préjudices soit portée à une somme de 17 797 euros (10 297 + 500 + 7 000) qui sera assortie des intérêts au taux légal à compter du 17 février 2021 date de réception de sa réclamation préalable du 20 janvier 2021. En revanche, l'intéressé n'établit pas avoir été dans l'impossibilité financière ou matérielle d'engager les travaux de réparation dès le dépôt du rapport d'expertise. Par suite, il n'est pas fondé à demander l'actualisation du coût des travaux sur la base de l'indice BT01.
En ce qui concerne les frais des investigations sollicitées par l'expert judiciaire :
17. Le tribunal administratif a estimé que la somme de 6 949,70 euros devait être mise à la charge de la commune de Plouégat-Guérand en remboursement des frais d'investigations exposés par M. A... à la demande de l'expert judiciaire et justifiés par des factures. Le requérant se prévaut toutefois de cinq factures ou justificatifs, et non quatre, correspondant à des dépenses payées à la société de géomètres-experts Quarta pour un montant global de 2 160 euros. Par suite, il y a lieu de porter à 7 173,70 euros TTC la somme que la commune a été condamnée à lui verser au titre de ces dépenses. Cette somme sera assortie des intérêts au taux légal à compter du 17 février 2021.
Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :
18. La personne qui subit un préjudice direct et certain du fait du comportement fautif d'une personne publique peut former devant le juge administratif une action en responsabilité tendant à ce que cette personne publique soit condamnée à l'indemniser des conséquences dommageables de ce comportement. Elle peut également, lorsqu'elle établit la persistance du comportement fautif de la personne publique responsable et du préjudice qu'elle lui cause, assortir ses conclusions indemnitaires de conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint à la personne publique en cause de mettre fin à ce comportement ou d'en pallier les effets. De telles conclusions à fin d'injonction ne peuvent être présentées qu'en complément de conclusions indemnitaires. De la même façon, le juge administratif ne peut être saisi, dans le cadre d'une action en responsabilité sans faute pour dommages de travaux publics, de conclusions tendant à ce qu'il enjoigne à la personne publique de prendre les mesures de nature à mettre fin au dommage ou à en pallier les effets, qu'en complément de conclusions indemnitaires.
19. M. A... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'enjoindre à la commune de réaliser des travaux destinés de mettre fin aux désordres litigieux. Ces conclusions doivent être regardées comme accessoires à ses conclusions indemnitaires, et sont par suite recevables, contrairement à ce que soutient la commune. Le tribunal administratif de Rennes a estimé qu'il y avait lieu d'enjoindre à la commune de Plouégat-Guérand de procéder aux travaux tels que préconisés par l'expert, à savoir la réalisation d'un caniveau le long de la propriété de M. A..., avec un rejet vers un fossé ou un busage afin de gérer et de canaliser l'écoulement des eaux, la dépose de la plaque d'acier au droit de l'accès de sa propriété et son remplacement par une plaque conforme, ou tous autres travaux équivalents de nature à mettre fin aux inondations récurrentes subies par la propriété de M. A... dans un délai de six mois à compter de sa notification. M. A... demande à la cour d'assortir cette injonction d'une astreinte, au vu du manque de diligence de la commune. Il ne résulte pas de l'instruction, toutefois, que M. A... aurait saisi le président du tribunal administratif de Rennes d'une demande d'exécution de l'injonction ordonnée par la juridiction dans son jugement du 19 décembre 2023 à l'encontre de la commune de Plouégat-Guérand, ni qu'au vu du présent arrêt, cette commune d'un peu plus de 1 000 habitants refuserait de réaliser les travaux prescrits dans le délai de six mois qui lui est imparti à compter de la notification du présent arrêt. Dans ces conditions, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les frais d'expertise :
20. Le tribunal administratif a mis l'intégralité des frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 13 875,05 euros, à la charge de la commune de Plouégat-Guérand. Dans les circonstances de l'espèce, et alors même que M. A... a contribué, ainsi qu'il a été dit au point 7, à la réalisation des dommages affectant le bardage de sa maison à concurrence des 2/3, il n'y a pas lieu de mettre une partie de ces frais à la charge de ce requérant.
Sur les frais liés au litige :
21. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de M. A..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante pour l'essentiel, le versement à la commune de Plouégat-Guérand de la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Plouégat-Guérand le versement à M. A... d'une somme de 2 000 euros au titre des mêmes frais.
DÉCIDE :
Article 1er : La somme que la commune de Plouégat-Guérand a été condamnée à verser à M. A... au titre de l'article 1er du jugement attaqué est portée à 24 970,70 euros. Elle sera assortie des intérêts au taux légal à compter du 17 février 2021.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête présentée par M. A... est rejeté.
Article 3 : Le jugement n° 2102717 du 19 décembre 2023 du tribunal administratif de Rennes est réformé en tant qu'il est contraire au présent arrêt.
Article 4 : Les conclusions d'appel incident présentées par la commune de Plouégat-Guérand ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La commune de Plouégat-Guérand versera à M. A... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la commune de Plouégat-Guérand.
Délibéré après l'audience du 30 janvier 2025, à laquelle siégeaient :
- M. Vergne, président,
- Mme Marion, première conseillère,
- Mme Gélard, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 14 février 2025.
La rapporteure,
V. GELARD
Le président,
G-V. VERGNE
Le greffier,
Y. MARQUIS
La République mande et ordonne au préfet du Finistère en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 24NT00393