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07/02/2025 | FRANCE | N°24NT00896

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 4ème chambre, 07 février 2025, 24NT00896


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... C..., M. D... B... et Mme E... Jardin ont demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler le contrat que la commune de Tilly-sur-Seulles a conclu avec la société Jones TP pour un montant de 72 934,58 euros toutes taxes comprises en vue de la réalisation de travaux de voirie.



Par un jugement n° 2201185 du 22 janvier 2024, le tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête et un mémoire, enregistrés les 26 mars et 27 août 2024, M. A... C..., Mme E... Jardin et M. D... B....

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C..., M. D... B... et Mme E... Jardin ont demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler le contrat que la commune de Tilly-sur-Seulles a conclu avec la société Jones TP pour un montant de 72 934,58 euros toutes taxes comprises en vue de la réalisation de travaux de voirie.

Par un jugement n° 2201185 du 22 janvier 2024, le tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 26 mars et 27 août 2024, M. A... C..., Mme E... Jardin et M. D... B..., représentés par Me Berkovicz, demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Caen du 22 janvier 2024 ;

2°) de faire droit à leur demande d'annulation présentée devant le tribunal administratif de Caen ;

3°) de mettre solidairement à la charge de la commune de Tilly-sur-Seulles et de la société Jones TP le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le contrat en cause a été conclu en méconnaissance des règles de publicité et de mise en concurrence applicables à la procédure adaptée à laquelle la commune s'est spontanément soumise alors qu'elle n'y était pas tenue ;

- la commune a méconnu le principe de transparence des procédures et le principe d'égalité de traitement des candidats ;

- la commune n'a pas mis en œuvre la procédure de détection des offres anormalement basses au regard de la différence significative de prix de l'entreprise retenue avec les autres candidats.

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 18 juillet et 3 octobre 2024, la société Jones Travaux Publics, représentée par Me Vermont, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise solidairement à la charge des requérants la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- solliciter des devis d'entreprise ne consiste pas à contacter plusieurs opérateurs économiques ; il s'agit de définir le besoin et sa valeur en amont d'un contact ;

- les travaux de voirie constituent une activité bien spécifique et ainsi des prestations très techniques justifiant l'évaluation du besoin par la transmission de devis.

Par un mémoire en défense, enregistré le 31 juillet 2024, la commune de Tilly-sur-Seulles, représentée par Me Solassol-Archambau, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise solidairement à la charge des requérants la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le marché en cause a été conclu en application des dispositions générales des articles L. 2123-1 et R. 2123-4 du code de la commande publique et des dispositions dérogatoires de l'article 142 de la loi n° 2020-1525 du 7 décembre 2020 autorisant les acheteurs à conclure, jusqu'au 31 décembre 2022, un marché de travaux sans publicité ni mise en concurrence préalables pour répondre à un besoin dont la valeur estimée est inférieure à 100 000 euros hors taxes ;

- quand bien même elle a fait le choix de consulter préalablement trois entreprises, elle restait dans le cadre légalement précisé par l'article 142 de la loi du 7 décembre 2020 à raison du montant du marché à conclure inférieur au seuil de 100 000 euros hors taxes et elle était de ce fait légalement dispensée du respect des principes de mise en concurrence ; un acheteur est libre de contacter plusieurs entreprises dans le cadre d'une procédure dispensée de publicité et de mise en concurrence préalables.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la commande publique ;

- la loi n° 2020-1525 du 7 décembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Picquet,

- les conclusions de Mme Rosemberg, rapporteur public.

- et les observations de Me Balzac, substituant Me Berkovicz, représentant M. C..., Mme Jardin et M. B..., et de Me Solassol-Archambau, représentant la commune de Tilly-sur-Seulles.

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 5 avril 2022, la commune de Tilly-sur-Seulles a décidé de conclure un marché public avec l'entreprise Jones Travaux publics, dite " Jones TP ", afin de réaliser des travaux de voirie pour un montant de 72 934,58 euros toutes taxes comprises. M. C..., M. B... et Mme Jardin, conseillers municipaux de la commune, ont demandé au tribunal administratif de Caen l'annulation du contrat ainsi conclu. Par un jugement du 22 janvier 2024, le tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande. Ils font appel de ce jugement.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article 142 de la loi du 7 décembre 2020 d'accélération et de simplification de l'action publique visée ci-dessus : " I. - Jusqu'au 31 décembre 2022 inclus, les acheteurs peuvent conclure un marché de travaux sans publicité ni mise en concurrence préalables pour répondre à un besoin dont la valeur estimée est inférieure à 100 000 € hors taxes. / (...) / Les acheteurs veillent à choisir une offre pertinente, à faire une bonne utilisation des deniers publics et à ne pas contracter systématiquement avec un même opérateur économique lorsqu'il existe une pluralité d'offres susceptibles de répondre au besoin. (...) ".

3. Il est constant que le maire de la commune de Tilly-sur-Seulles a sollicité des devis, pour effectuer les travaux de voirie ayant fait l'objet du marché litigieux, de la part de trois entreprises, qu'il a ensuite soumis au conseil municipal, ce dernier ayant finalement retenu le devis de la société Jones TP. Toutefois, cette circonstance n'implique pas que la commune de Tilly-sur-Seulles ait entendu se placer dans le cadre d'une procédure adaptée impliquant une mise en concurrence. La consultation de différents devis avait uniquement pour but de respecter les critères posés par l'article 142 de la loi du 7 décembre 2020 tirés du choix d'une offre pertinente, en faisant une bonne utilisation des deniers publics. Ainsi, la commune de Tilly-sur-Seulles bénéficiant du dispositif dérogatoire cité au point 2, le moyen tiré de ce que le contrat en cause a été conclu en méconnaissance des règles de publicité et de mise en concurrence applicables à la procédure adaptée à laquelle la commune se serait spontanément soumise alors qu'elle n'y était pas tenue doit être écarté. Par conséquent, les requérants ne peuvent davantage utilement soutenir que la commune aurait dû communiquer aux entreprises contactées pour produire des devis les critères de choix des offres et les solliciter tous au même moment. Enfin, M. C..., M. B... et Mme Jardin ne peuvent davantage utilement soutenir que la commune aurait dû mettre en œuvre la procédure de détection des offres anormalement basses, alors qu'ils ne développent aucun argument sur l'absence de pertinence de l'offre retenue, la mauvaise utilisation des deniers publics ou l'interdiction de contracter systématiquement avec un même opérateur économique, seuls critères posés par l'article 142 de la loi du 7 décembre 2020. En tout état de cause, le simple écart entre le prix proposé par la société Jones TP et celui des deux autres entreprises sollicitées ne suffit pas à établir le caractère anormalement bas du devis retenu.

4. Il résulte de tout ce qui précède que M. C..., M. B... et Mme Jardin ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Caen a, par le jugement attaqué, rejeté leur demande.

Sur les frais liés au litige :

5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Tilly-sur-Seulles et de la société Jones TP, qui ne sont pas, dans la présente instance, parties perdantes, le versement d'une somme au titre des frais exposés par M. C..., M. B... et Mme Jardin et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre solidairement à la charge de M. C..., M. B... et Mme Jardin la somme de 1 500 euros à verser à la commune de Tilly-sur-Seulles et la même somme à la société Jones TP au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C..., M. B... et Mme Jardin est rejetée.

Article 2 : M. C..., M. B... et Mme Jardin verseront solidairement à la commune de Tilly-sur-Seulles la somme de 1 500 euros et la même somme à la société Jones TP en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C..., représentant unique, à la société Jones Travaux Publics et à la commune de Tilly-sur-Seulles.

Délibéré après l'audience du 21 janvier 2025, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- M. Derlange, président assesseur,

- Mme Picquet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 février 2025.

La rapporteure,

P. PICQUET

Le président,

L. LAINÉ

La greffière,

A. MARTIN

La République mande et ordonne au préfet du Calvados en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 24NT00896


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 24NT00896
Date de la décision : 07/02/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINÉ
Rapporteur ?: Mme Pénélope PICQUET
Rapporteur public ?: Mme ROSEMBERG
Avocat(s) : SELARL GB2A

Origine de la décision
Date de l'import : 16/02/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-02-07;24nt00896 ?
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