Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 17 janvier 2024 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination vers lequel il pourra être reconduit d'office ou tout pays vers lequel il est légalement admissible et lui a interdit de retourner sur le territoire français pendant une durée de trois ans.
Par un jugement n° 2300843 du 6 février 2024, le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a renvoyé les conclusions de la requête n° 2400843 de M. A... tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Loire-Atlantique du 17 janvier 2024 en tant qu'il porte refus de titre de séjour et les conclusions à fin d'injonction y afférentes devant une formation collégiale du tribunal, a annulé l'arrêté du 17 janvier 2024 du préfet de la Loire-Atlantique en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire français sans délai, fixe le pays de destination de la mesure d'éloignement et interdit à M. A... de retourner sur le territoire français pour une durée de trois années et enfin, a annulé l'arrêté du 17 janvier 2024 par lequel préfet de la Loire-Atlantique a assigné M. A... à résidence pour une durée de quarante-cinq jours.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 28 février 2024, le préfet de la région des Pays de la Loire, préfet de la Loire-Atlantique, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 6 février 2024 du tribunal administratif de Nantes ;
2°) de rejeter la requête de M. A... présentée devant ce tribunal.
Il soutient que :
S'agissant du motif d'annulation de l'arrêté du 17 janvier 2024 :
- le premier juge a entaché son jugement d'un défaut d'examen ayant conduit à une erreur de fait ainsi qu'à une erreur manifeste d'appréciation ; M. A... n peut justifier d'aucune inscription pour l'année 2023-2024 ;
- le comportement de M. A... constitue une menace pour l'ordre public ;
- M. A... ne bénéficie d'aucun accompagnement psychologique.
Par un mémoire en défense enregistré le 5 juin 2024, M. D... A..., représenté par Me Pasteur conclut au rejet de la requête et à ce que l'Etat soit condamné à verser à son conseil une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761- du code de justice administrative et de la loi du 10 juillet 1991 sous réserve de son renoncement à percevoir la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.
Il fait valoir que les moyens soulevés doivent être écartés.
Par décision du 18 septembre 2024, la décision 22 janvier 2024 octroyant le bénéfice de l'aide juridictionnelle à M. A... a été maintenue.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et son décret d'application n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Viéville,
- et les observations de Me Pasteur représentant M. A....
Considérant ce qui suit :
1. M. D... A..., ressortissant tunisien, né le 7 mai 2005, entré sur le territoire français en octobre 2021 a été placé auprès de l'aide sociale à l'enfance. Il a conclu un contrat jeune majeur avec le président du conseil départemental de la Loire-Atlantique. Il a sollicité du préfet de Loire-Atlantique la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions des articles L. 435-3 et L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Sa demande a été rejetée par un arrêté du 17 janvier 2024 et le préfet de la Loire-Atlantique lui a en outre fait obligation de quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays de destination vers lequel il pourra être reconduit d'office et lui a interdit de retourner sur le territoire français pendant une durée de trois ans. Par une seconde décision du même jour, le préfet de la Loire-Atlantique l'a assigné à résidence pour une durée de 45 jours. M. A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler ces deux décisions. Par un jugement du 6 février 2024, le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a renvoyé les conclusions de la requête n° 2400843 de M. A... tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Loire-Atlantique du 17 janvier 2024 en tant qu'il porte refus de titre de séjour et les conclusions à fin d'injonction y afférentes devant une formation collégiale du tribunal, a annulé l'arrêté du 17 janvier 2024 du préfet de la Loire-Atlantique en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire français sans délai, fixe le pays de destination de la mesure d'éloignement et interdit à M. A... de retourner sur le territoire français pour une durée de trois années et enfin, a annulé l'arrêté du 17 janvier 2024 par lequel préfet de la Loire-Atlantique a assigné M. A... à résidence pour une durée de quarante-cinq jours. Le préfet de la région des Pays de la Loire, préfet de la Loire-Atlantique relève appel de ce jugement.
Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'article 1er du jugement attaqué :
2. En demandant à la cour de prononcer l'annulation du jugement du 6 février 2024 " sur l'ensemble de ses dispositions ", le préfet de la Loire -Atlantique doit être regardé comme contestant également l'article 1er de ce jugement renvoyant à la formation collégiale l'examen des conclusions tendant à l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour. Toutefois, le préfet de la Loire-Atlantique ne soulève aucun moyen contre le renvoi par le magistrat désigné devant une formation collégiale du tribunal administratif de Nantes des conclusions tendant à l'annulation de la décision portant refus de séjour. En outre, en tout état de cause, pour les motifs mentionnés au point 2 du jugement attaqué, c'est à bon droit que le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a jugé qu'il n'était compétent que pour statuer sur les conclusions à fin d'annulation des décisions obligeant M. A... à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination et qu'il a renvoyé à une formation collégiale du tribunal les conclusions à fin d'annulation des décisions leur refusant la délivrance d'un titre de séjour. Par suite, les conclusions du préfet de la Loire-Atlantique doivent être rejetées en tant qu'elles visent à l'annulation de l'article 1er du jugement contesté.
Sur les conclusions tendant à l'annulation des articles 2, 3 et 4 du jugement attaqué :
3. Aux termes de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A titre exceptionnel, l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance ou à un tiers digne de confiance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle peut, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ", sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil ou du tiers digne de confiance sur l'insertion de cet étranger dans la société française. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. ".
4. Il est constant qu'à la date de la décision attaquée, M. A... ne pouvait justifier d'aucune inscription dans un établissement dispensant une formation destinée à lui donner une qualification professionnelle et ne pouvait donc prétendre à la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et droit d'asile. Par suite, le préfet est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a annulé la décision portant obligation de quitter le territoire français ainsi que par voie de conséquence des décisions fixant le pays de destination, refusant de lui accorder un délai de départ volontaire, lui interdisant de retourner sur le territoire français et l'arrêté du 17 janvier 2024 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a assigné M. A... à résidence.
5. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par M. A... devant le tribunal administratif de Nantes et la cour à l'encontre des décisions portant obligation de quitter le territoire français, fixant le pays de destination, refusant d'accorder un délai de départ volontaire, portant interdiction de retour sur le territoire français et portant assignation à résidence.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
S'agissant de la compétence de l'auteur de la décision :
6. En premier lieu, l'arrêté attaqué a été signé par M. E... C..., adjoint à la directrice des migrations et de l'intégration de la préfecture de la Loire-Atlantique. Par un arrêté du 13 septembre 2023, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture du même jour, le préfet de la Loire-Atlantique a donné délégation à ce dernier à l'effet de signer notamment les décisions portant refus de titre de séjour assorties de décisions portant obligation de quitter le territoire français, fixation du pays de renvoi et fixation du délai de départ, en cas d'absence ou d'empêchement de la directrice des migrations et de l'intégration, dont il n'est pas établi qu'elle n'aurait pas été absente ou empêchée. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté attaqué doit être écarté.
S'agissant de l'exception d'illégalité de la décision portant refus de séjour :
7. M. A... soutient que l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour prive de base légale la décision portant obligation de quitter le territoire français.
8. En premier lieu, il y a lieu d'écarter le moyen tenant à l'incompétence du signataire de la décision portant refus de séjour pour le motif exposé au point 6.
9. En deuxième lieu, la décision de refus de séjour comporte l'énoncé des raisons de droit comme de fait pour lesquelles leur auteur a décidé de faire obligation à M. A... de quitter le territoire français. Il en résulte que cette décision est régulièrement motivée.
10. En troisième lieu, pour le motif exposé au point 4, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
11. En quatrième lieu, pour établir que la décision portant refus de séjour méconnait les dispositions des articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, porte une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale tel que protégé par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, M. A... soutient qu'un retour en Tunisie n'est pas envisageable compte tenu de sa durée de séjour en France et de sa volonté d'intégration et qu'il lui sera impossible de poursuivre ses études. Cependant, le requérant ne se prévaut d'aucune attache familiale sur le territoire français suffisamment ancienne stable et durable alors qu'il ne conteste pas disposer d'attaches familiales dans son pays d'origine. Par suite, il n'est pas fondé à soutenir que la décision portant refus de séjour méconnait les dispositions de l'article L 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et porte une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale tel que protégé par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme.
12. Par ailleurs, s'il ressort des pièces du dossier que M. A... est entré en France en octobre 2021 à l'âge de 16 ans et a été confié par l'autorité judiciaire à l'aide sociale à l'enfance à compter du mois de novembre 2021 après que sa minorité ait été confirmée, puis a effectué plusieurs stages en boulangerie, domaine dans lequel il affirme vouloir travailler en intégrant une formation adaptée, il est constant que l'intéressé n'était inscrit dans aucune formation diplômante à la date de la décision attaquée. De plus, M. A... qui avait déjà fait l'objet d'un signalement le 6 septembre 2022 pour violence avec usage ou menace d'une arme sans incapacité a été condamné le 20 novembre 2023 à six mois d'emprisonnement pour vol par ruse, usage illicite de stupéfiants et détention non autorisée de stupéfiants. Dans ces conditions le requérant, qui ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, n'est pas fondé à soutenir que le préfet de la Loire-Atlantique a commis une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle.
S'agissant de l'erreur manifeste d'appréciation et la violation des dispositions de l'article L 423-23 du code de l'entrée te du séjour des étrangers et du droit d'asile et du droit protégé par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme :
13. Il y a lieu d'écarter ces moyens pour les motifs mentionnés aux points 11 et 12.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
14. Aux termes de l'article L. 612-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La décision portant obligation de quitter le territoire français mentionne le pays, fixé en application de l'article L. 721-3, à destination duquel l'étranger est renvoyé en cas d'exécution d'office ". Aux termes de l'article L. 721-3 du même code : " L'autorité administrative fixe, par une décision distincte de la décision d'éloignement, le pays à destination duquel l'étranger peut être renvoyé en cas d'exécution d'office d'une décision portant obligation de quitter le territoire français (...) ". Aux termes de l'article L. 721-4 : " L'autorité administrative peut désigner comme pays de renvoi : 1° Le pays dont l'étranger a la nationalité (...) ; 2° Un autre pays pour lequel un document de voyage en cours de validité a été délivré en application d'un accord ou arrangement de réadmission européen ou bilatéral ; 3° Ou, avec l'accord de l'étranger, tout autre pays dans lequel il est légalement admissible. / Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". L'article 3 de cette convention stipule que : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ".
15. En premier lieu, pour décider que la mesure d'éloignement prononcée à l'encontre de M. A... pourra être exécutée à l'encontre du pays dont il a la nationalité, à savoir la Tunisie, ou de tout autre pays non membre de l'Union européenne ou avec lequel ne s'applique pas l'acquis de Schengen où elle est légalement admissible, l'arrêté attaqué vise et mentionne les dispositions des articles L. 721-3 à 5, L. 722-1 et L. 722-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, rappelle que M. A... a la nationalité tunisienne, et qu'il n'établit pas y être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Cette motivation, en droit et en fait, a ainsi mis à même M. A... de comprendre les motifs de la décision prise à son encontre. Le moyen tiré de ce que la décision attaquée ne serait pas motivée doit, dès lors, être écarté.
16. En deuxième lieu, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'étant pas annulée, le requérant n'est pas fondé à demander l'annulation par voie de conséquence de la décision fixant le pays de destination.
17. En troisième lieu, si le requérant soutient que la décision fixant le pays de destination viole les dispositions de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et le droit protégé par les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et soutient que le préfet s'est contenté de mentionner qu'il n'avait pas formulé de demande de protection internationale et qu'il ne peut être éloigné que vers son pays d'origine, il ne fait état d'aucun élément susceptible de venir utilement à l'appui de ce moyen.
En ce qui concerne la décision refusant le délai de départ volontaire :
18. En premier lieu, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision attaquée doit être écarté pour les motifs exposés au point 6.
19. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 613-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Les décisions relatives au refus et à la fin du délai de départ volontaire prévues aux articles L. 612-2 et L. 612-5 et les décisions d'interdiction de retour et de prolongation d'interdiction de retour prévues aux articles L. 612-6, L. 612-7, L. 612-8 et L. 612-11 sont distinctes de la décision portant obligation de quitter le territoire français. Elles sont motivées. ".
20. L'arrêté attaqué vise l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers, précise que M. A... est très défavorablement connu des services de police et a été condamné à six mois d'emprisonnement avec un sursis probatoire de deux ans le 20 novembre 2023 pour des faits de vol aggravé par deux circonstances qui sont la détention de stupéfiants et le vol par ruse effraction ou escalade dans un local d'habitation ou un lieu d'entrepôt aggravé par une circonstance. Cet arrêté énonce ainsi les considérations de droit et de faits sur lesquelles est fondé le refus de lui accorder un délai de départ volontaire. Le moyen tiré de ce que ce refus serait insuffisamment motivé ne peut dès lors être accueilli.
21. En troisième lieu, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'étant pas annulée, le requérant n'est pas fondé à demander l'annulation par voie de conséquence de la décision lui refusant le délai de départ volontaire.
22. En quatrième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet se serait cru en situation de compétence liée pour refuser d'accorder un délai de départ volontaire après avoir constaté que M. A... se trouvait dans un des cas définis à l'article L 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
23. En cinquième lieu, en faisant valoir que le préfet ne motive pas la décision de refus d'accorder un délai de départ volontaire et en faisant état de sa situation personnelle sans plus de précision, le requérant n'établit pas l'erreur manifeste dont serait entachée la décision de refus d'un délai de départ volontaire.
En ce qui concerne la décision d'interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans :
24. En premier lieu, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision attaquée doit être écarté pour les motifs exposés au point 6.
25. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 612-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut prolonger l'interdiction de retour pour une durée maximale de deux ans dans les cas suivants : 1° L'étranger s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français alors qu'il était obligé de le quitter sans délai (...) Compte tenu des prolongations éventuellement décidées, la durée totale de l'interdiction de retour ne peut excéder cinq ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, sauf menace grave pour l'ordre public ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. / Il en est de même pour l'édiction et la durée de l'interdiction de retour mentionnée à l'article L. 612-8 ainsi que pour la prolongation de l'interdiction de retour prévue à l'article L. 612-11 ".
26. Il ressort de la combinaison de ces dispositions qu'une décision d'interdiction de retour doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse à sa seule lecture en connaître les motifs. Si cette motivation doit attester de la prise en compte par l'autorité compétente, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères prévus par la loi, aucune règle n'impose que le principe et la durée de l'interdiction de retour fassent l'objet de motivations distinctes, ni que soit indiquée l'importance accordée à chaque critère. Il incombe ainsi à l'autorité compétente qui prend une décision d'interdiction de retour d'indiquer dans quel cas susceptible de justifier une telle mesure se trouve l'étranger. Elle doit par ailleurs, faire état des éléments de la situation de l'intéressé au vu desquels elle a arrêté, dans son principe et dans sa durée, sa décision, eu égard notamment à la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France et, le cas échéant, aux précédentes mesures d'éloignement dont il a fait l'objet. Elle doit aussi, si elle estime que figure au nombre des motifs qui justifie sa décision une menace pour l'ordre public, indiquer les raisons pour lesquelles la présence de l'intéressé sur le territoire français doit, selon elle, être regardée comme une telle menace. En revanche, si, après prise en compte de ce critère, elle ne retient pas cette circonstance au nombre des motifs de sa décision, elle n'est pas tenue, à peine d'irrégularité, de le préciser expressément.
27. En l'espèce, le préfet a mentionné au visa de l'article L. 612-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la durée de présence sur le territoire français de M. A..., sa situation personnelle au regard de la nature et de l'ancienneté des liens qu'il a tissé en France, ainsi que ses antécédents judiciaires. La décision portant interdiction de retour comporte ainsi l'ensemble des considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement et est dès lors suffisamment motivée.
28. En troisième lieu, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'étant pas annulée, le requérant n'est pas fondé à demander l'annulation par voie de conséquence de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans.
29. En quatrième lieu, il ressort des termes mêmes des dispositions de l'article L 612-10 précitées au point 25 que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'elles énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi d'un moyen en ce sens, de rechercher si les motifs qu'invoque l'autorité compétente sont de nature à justifier légalement dans son principe et sa durée la décision d'interdiction de retour et si la décision ne porte pas au droit de l'étranger au respect de sa vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. En revanche, lorsqu'il est saisi d'un moyen le conduisant à apprécier les conséquences de la mesure d'interdiction de retour sur la situation personnelle de l'étranger et que sont invoquées des circonstances étrangères aux quatre critères posés par les dispositions précitées de l'article L. 612-11, il incombe seulement au juge de l'excès de pouvoir de s'assurer que l'autorité compétente n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation.
30. Si M. A... soutient que le préfet ne s'est pas prononcé expressément sur chacun des critères mentionnés par les dispositions de l'article L. 612-11, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Loire-Atlantique n'aurait pas pris en compte avant de prendre la décision la circonstance que M A... n'avait fait l'objet d'aucune mesure d'éloignement. Par suite, le moyen doit être écarté.
31. En dernier lieu, le requérant qui est célibataire et sans enfant ne se prévaut d'aucune attache familiale sur le territoire suffisamment ancienne stable et durable alors qu'il ne conteste pas disposer d'attaches familiales dans son pays d'origine. Dans ces conditions, la décision portant interdiction de retour sur le territoire français ne peut être regardée comme portant une atteinte disproportionnée à son droit au respect de la vie privée et familiale tel que protégé par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme.
En ce qui concerne la décision portant assignation à résidence :
32. En premier lieu, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision attaquée doit être écarté pour les motifs exposés au point 6.
33. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 731-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut assigner à résidence l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, dans les cas suivants : 1° L'étranger fait l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français, prise moins d'un an auparavant, pour laquelle le délai de départ volontaire est expiré ou n'a pas été accordé ; / (...) ". Aux termes de l'article L. 732-1 du même code : " Les décisions d'assignation à résidence (...) sont motivées ".
34. L'arrêté du 17 janvier 2024 portant assignation à résidence vise l'article L. 731-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, rappelle que M. A... justifie d'une adresse, a été interpellé le 16 janvier 2024, détient un passeport valide et indique que si l'intéressé ne peut quitter immédiatement le territoire français, son éloignement demeure une perspective raisonnable. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que l'assignation à résidence est insuffisamment motivée.
36. En troisième lieu, les décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français n'étant pas annulées, le requérant n'est pas fondé à demander l'annulation par voie de conséquence de la décision d'assignation à résidence.
37. En quatrième lieu, M A... soutient que le préfet a commis une erreur de droit en ne vérifiant pas les conditions relatives à l'impossibilité de quitter immédiatement le territoire et la possibilité d'exécution prochaine de la mesure d'éloignement. Contrairement à ce que soutient le requérant, il ressort des termes mêmes de la décision attaquée que si l'intéressé ne peut quitter immédiatement le territoire français, son éloignement demeure une perspective raisonnable. Par suite, le moyen tiré de droit doit être écarté.
38. En dernier lieu, en faisant valoir que l'obligation quotidienne de rester à son domicile de 17 à 20 heures est disproportionnée alors qu'il est sur le point de signer un contrat de travail, le requérant n'établit cependant pas l'atteinte à son droit au respect de la vie privée et familiale ni que la décision serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
39. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Loire-Atlantique est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a annulé l'arrêté du 17 janvier 2024 du préfet de la Loire-Atlantique en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire français sans délai, fixe le pays de destination de la mesure d'éloignement et interdit à M. A... de retourner sur le territoire français pour une durée de trois années et enfin, a annulé l'arrêté du 17 janvier 2024 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a assigné M. A... à résidence pour une durée de quarante-cinq jours.
Sur les frais liés au litige :
40. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme à verser au conseil de M. A... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : Les articles 2 à 4 du jugement n° 2300843 du 6 février 2024 du magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes sont annulés.
Article 2 : Les conclusions présentées par M. A... devant le tribunal administratif de Nantes tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 janvier 2024 du préfet de la Loire-Atlantique en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire français sans délai, fixe le pays de destination de la mesure d'éloignement et interdit à M. A... de retourner sur le territoire français pour une durée de trois années et enfin et de l'arrêté du 17 janvier 2024 par lequel préfet de la Loire-Atlantique a assigné M. A... à résidence pour une durée de quarante-cinq jours ainsi que les conclusions de M. A... présentées en appel sont rejetées.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête n° 24NT00632 est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à M. A....
Une copie en sera adressée, pour information, au préfet de la Loire-Atlantique.
Délibéré après l'audience du 6 décembre 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Quillévéré, président de chambre,
- M. Geffray, président assesseur,
- M. Viéville, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 décembre 2024.
Le rapporteur
S. VIÉVILLELe président de chambre
G. QUILLÉVÉRÉ
La greffière
H. DAOUD
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision
N° 24NT0063202