Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... D... et Mme C... D... ont demandé au tribunal administratif de Nantes de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de contributions sociales et de taxe sur les plus-values de cessions immobilières mises à leur charge au titre de l'année 2014, ainsi que des majorations correspondantes à hauteur d'un montant de 184 609 euros.
Par un jugement n° 2003597 du 17 mars 2023, le tribunal administratif de Nantes a prononcé un non-lieu à statuer, à hauteur de la somme de 20 751 euros, sur les conclusions aux fins de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de contributions sociales et de taxe sur les plus-values de cessions immobilières auxquelles M. et Mme D... ont été assujettis au titre de l'année 2014, ainsi que des majorations correspondantes et a rejeté le surplus de leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 29 mai 2023 et le 22 février 2024, M. et Mme D..., représentés par Me Obadia, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de leur demande ;
2°) de prononcer la décharge sollicitée des impositions restant en litige ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 6 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- des dépenses de travaux supplémentaires, correspondant aux factures émises par la société Piou pour un montant de 13 674,68 euros, la société Multitravaux pour des montants de 175 773,42 euros et 232,36 euros, l'entreprise Piou pour un montant de 13 674,68 euros, la société Beaugendre pour un montant de 13 892,92 euros, la société Pichon pour un montant de 19 521,49 euros doivent être prises en compte au titre des dépenses majorant le prix d'acquisition de leur ensemble immobilier en application des dispositions du 4° du II de l'article 150 VB du code général des impôts.
- ils contestent la méthode des millièmes appliquée par l'administration et propose une autre méthode s'attachant à la nature des travaux réalisés tels que portés sur les factures des entreprises ;
- ils sont fondés à se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des commentaires administratifs publiés sous les références BOI-RFPI-PVI-20-10-20-20 n° 140 à 160, n° 210 du 20 décembre 2013 ;
- ils sont fondés à se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de la réponse ministérielle A... du 25 novembre 2008 ;
- ils sont fondés à se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des commentaires administratifs publiés sous les références BOI-RFPI-PVI-20-10-20-10 n° 130 du 12 septembre 2012.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 24 novembre 2023 et 25 mars 2024, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au non-lieu à statuer à hauteur des dégrèvements prononcés en cours d'instance et au rejet du surplus des conclusions de la requête.
Il soutient que :
- par une décision du 27 novembre 2023, l'administration a prononcé un dégrèvement, en droits et pénalités, de 84 897 euros au titre de l'année 2014 ;
- pour le surplus, les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Penhoat,
- et les conclusions de M. Brasnu, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme D... ont acquis, le 4 mars 2002, un ensemble immobilier situé à Angers (Maine-et-Loire), constitué d'une maison d'habitation, désignée comme bâtiment A, et d'un ancien entrepôt, désigné comme bâtiment B, sur lesquels ils ont entrepris des travaux en vue de procéder au réaménagement du bâtiment A en sept appartements et à la transformation du bâtiment B pour y créer six appartements ainsi que des places de parkings. Par un acte du 21 février 2011, M. et Mme D... ont cédé à un tiers un appartement avec terrasse et cave situé dans le bâtiment A. Ils ont cédé le surplus de l'ensemble immobilier à une société civile immobilière, dont ils sont associés avec leurs deux filles, par un acte du 21 août 2014. M. et Mme D... ont fait l'objet d'un contrôle sur pièces à l'issue duquel l'administration fiscale a remis en cause le montant de la plus-value de cession immobilière qu'ils ont déclaré avoir réalisée à l'occasion de cette dernière cession à hauteur d'un montant brut de 129 825 euros, en particulier en tant qu'il tenait compte d'un prix d'acquisition majoré du coût des travaux réalisés à hauteur d'une somme de 823 685 euros. Le service leur a par conséquent notifié, par une proposition de rectification du 12 décembre 2017, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de contributions sociales et de taxe sur les plus-values de cessions immobilières au titre de l'année 2014. L'administration fiscale ayant partiellement fait droit à leurs réclamations préalables des 19 juin 2018 et 17 avril 2019 par une décision du 30 janvier 2019, puis par une décision implicite à laquelle s'est substituée, en cours de première instance, une décision expresse du 4 mai 2020, M. et Mme D... ont demandé au tribunal administratif de Nantes la décharge des impositions supplémentaires auxquelles ils ont été assujettis, ainsi que des majorations correspondantes, à hauteur d'un montant de 184 609 euros. Par un jugement du 17 mars 2023, dont M. et Mme D... relèvent appel, le tribunal administratif de Nantes a prononcé un non-lieu à statuer, à hauteur de la somme de 20 751 euros, sur les conclusions aux fins de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de contributions sociales et de taxe sur les plus-values de cessions immobilières auxquelles M. et Mme D... ont été assujettis au titre de l'année 2014, ainsi que des majorations correspondantes et a rejeté le surplus de leur demande. M. et Mme D... relèvent appel de ce jugement.
Sur l'étendue du litige :
2. Par une décision du 27 novembre 2023, postérieure à l'introduction de la requête, l'administration a prononcé un dégrèvement, en droits et pénalités, de 84 897 euros au titre de l'année 2014. Les conclusions de la requête de M. et Mme D... sont, dans cette mesure, devenues sans objet. Il n'y a, par suite, pas lieu d'y statuer.
Sur le bien-fondé des impositions supplémentaires :
En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :
3. Aux termes de l'article 150 U du code général des impôts : " I. - (...) les plus-values réalisées par les personnes physiques (...) lors de la cession à titre onéreux de biens immobiliers bâtis ou non bâtis ou de droits relatifs à ces biens, sont passibles de l'impôt sur le revenu dans les conditions prévues aux articles 150 V à 150 VH. ". Aux termes de l'article 150 V du même code : " La plus ou moins-value brute réalisée lors de la cession de biens ou droits mentionnés aux articles 150 U à 150 UC est égale à la différence entre le prix de cession et le prix d'acquisition par le cédant. ". L'article 150 VA du même code dispose que : " I. - Le prix de cession à retenir est le prix réel tel qu'il est stipulé dans l'acte. (...) / II. - Le prix de cession est majoré de toutes les charges et indemnités mentionnées au deuxième alinéa du I de l'article 683. (...) / III. - Le prix de cession est réduit, sur justificatifs, du montant de la taxe sur la valeur ajoutée acquittée et des frais, définis par décret, supportés par le vendeur à l'occasion de cette cession. ". Et aux termes de l'article 150 VB du même code : " I. - Le prix d'acquisition est le prix effectivement acquitté par le cédant, tel qu'il est stipulé dans l'acte (...) / II. - Le prix d'acquisition est, sur justificatifs, majoré : / 1° De toutes les charges et indemnités mentionnées au deuxième alinéa du I de l'article 683 ; (...) / 3° Des frais afférents à l'acquisition à titre onéreux définis par décret (...) / 4° Des dépenses de construction, de reconstruction, d'agrandissement ou d'amélioration, supportées par le vendeur et réalisées par une entreprise depuis l'achèvement de l'immeuble ou son acquisition si elle est postérieure, lorsqu'elles n'ont pas été déjà prises en compte pour la détermination de l'impôt sur le revenu et qu'elles ne présentent pas le caractère de dépenses locatives. Lorsque le contribuable, qui cède un immeuble bâti plus de cinq ans après son acquisition, n'est pas en état d'apporter la justification de ces dépenses, une majoration égale à 15 % du prix d'acquisition est pratiquée. (...) ".
4. Il résulte des dispositions précitées du 4° du II de l'article 150 VB du code général des impôts qu'il appartient au contribuable qui, pour la détermination de l'assiette d'une plus-value immobilière, entend majorer le prix d'acquisition de dépenses supportées par lui, d'établir que lesdites dépenses ont été engagées et " réalisées " par une entreprise, qu'elles sont justifiées par la réalité des travaux entrepris, qu'elles n'ont pas été antérieurement déduites de ses revenus imposables et qu'elles ne présentent pas le caractère de dépenses locatives.
5. En vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf dispositions contraires, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits nécessaires au succès de ses prétentions. Toutefois, les éléments de preuve que seule une partie est en mesure de détenir, ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci. En l'espèce, il appartient à M. et Mme D... d'apporter la preuve qu'ils ont personnellement et effectivement supporté les dépenses des travaux qu'ils estiment être déductibles de la plus-value imposable.
6. En premier lieu, M. et Mme D... soutiennent que des dépenses de travaux supplémentaires, correspondant aux factures émises par la société Piou pour un montant de 13 674,68 euros, la société Multitravaux pour des montants de 175 773,42 euros et 232,36 euros, l'entreprise Piou pour un montant de 13 674,68 euros, la société Beaugendre pour un montant de 13 892,92 euros, la société Pichon pour un montant de 19 521,49 euros doivent être prises en compte au titre des dépenses majorant le prix d'acquisition de leur ensemble immobilier en application des dispositions du 4° du II de l'article 150 VB du code général des impôts.
7. Toutefois, d'une part, l'administration fiscale fait valoir que les intéressés, qui ont mis en location une partie des logements existants du bâtiment A au cours des années 2002 et 2003, ont porté une partie des sommes en cause en déduction de leurs revenus fonciers déclarés à ce titre pour ces deux années, un précédent contrôle fiscal, initié en 2007, l'ayant alors conduite à vérifier le bien-fondé de ces déductions à partir des factures établies par les sociétés Piou, Multitravaux et Beaugendre qui lui avaient été produites pour des montants s'établissant respectivement à 13 674,68 euros, 81 663,72 euros et 36 779,31 euros et s'étant clos sans qu'aucune rectification ne soit prononcée.
8. Si les requérants produisent une facture d'honoraires établie par la société Piou le 5 novembre 2002, portant sur le même montant de 13 674,68 euros que celui correspondant au montant cumulé de trois factures émises les 11 novembre 2001, 30 novembre 2001 et 5 janvier 2002 pour des montants toutes taxes comprises respectifs de 3 646,58 euros, de
4 558,22 euros et de 5 469,87 euros et qui ont été déduites de leurs revenus fonciers des années 2002 et 2003, les requérants n'établissent pas en tout état de cause s'être acquittés de cette facture par une attestation établie par la société Piou se bornant à préciser que les requérants sont à jour de leurs paiements au titre des prestations de maîtrise d'œuvre réalisées sans préciser le montant perçu. Ainsi, les requérants ne peuvent pas légalement majorer à concurrence de la somme de 13 674, 28 euros le prix d'acquisition du bien immobilier qu'ils ont vendu pour le calcul de la plus-value réalisée.
9. S'agissant des factures émises par la société Beaugendre, le service rappelle que sur un montant total de 74 161,02 euros de travaux de plomberie et de chauffage, les requérants ont déduit 36 779,31 euros de leurs revenus fonciers des années 2002 et 2003 et qu'il a admis dans une décision du 30 janvier 2019 que le solde d'un montant de 37 381,31 euros soit pris en compte en majoration du prix d'acquisition de l'ensemble immobilier pour la détermination de la plus-value. En se bornant à produire les factures de l'entreprise Beaugendre comportant des mentions manuscrites chiffrant les sommes devant majorer le prix d'acquisition de l'ensemble immobilier pour la détermination de la plus-value et un tableau d'affectation des travaux établis pour les besoins de la cause, les requérants n'établissent pas que le montant des travaux susceptibles de majorer le prix d'acquisition de l'ensemble immobilier pour la détermination de la plus-value était de 50 672,23 euros au lieu de
37 381,71 euros initialement retenu.
10. S'agissant des factures émises par la société Multitravaux, le service admet qu'une somme de 151 080,16 euros peut être rattachée à des travaux pouvant être retenus pour le calcul du prix d'acquisition de l'ensemble immobilier pour la détermination de la plus-value en conséquence de la prise en compte de travaux pour 6 logements dans le bâtiment vide à hauteur de 139 107,48 euros, de travaux dans l'appartement n° 7 à hauteur de 1 730,83 euros, de travaux réalisés pour EDF/GDF/PTT dans le bâtiment B et d'une mission de maitrise d'œuvre et suivi de chantier à hauteur de 5 141,28 euros. Si les requérants font valoir qu'une somme complémentaire de 24 693,26 euros doit être prise en compte en majoration du prix d'acquisition pour le calcul de la plus-value de cession immobilière réalisée, ils n'en justifient pas alors que le service fait valoir sans être contesté qu'elle porte sur la partie du bâtiment A qui comportait déjà des logements d'habitation.
11. D'autre part, il résulte de l'instruction que les factures établies par la société Pichon et la société Multitravaux pour des montants respectivement de 19 521,49 euros et de 232,36 euros qui consistent en des travaux de remises en état de trois appartements et en des travaux de maintenance électrique sont des travaux de réparation et d'entretien qui ne revêtent pas la nature de travaux indissociables des dépenses de construction, reconstruction, agrandissement et amélioration par ailleurs exposées et ne doivent pas être pris en compte pour le calcul de la plus-value. Par suite, le moyen doit être écarté.
12. En deuxième lieu, aux termes de l'article 74 SD de l'annexe II au code général des impôts : " Lorsque la cession porte sur une partie seulement d'un bien, le prix d'acquisition à retenir pour la détermination de la plus-value imposable est celui de cette seule partie. ". Aux termes de l'article 74 SF de cette même annexe : " Dans les cas prévus aux articles 74 SD et 74 SE, la fraction des charges et indemnités et des frais d'acquisition à retenir pour la détermination de la plus-value imposable est la même que celle retenue pour la détermination du prix d'acquisition. ".
13. Il résulte de l'instruction qu'afin de prendre en compte les dépenses de construction, reconstruction, agrandissement et amélioration exposées par M. et Mme D... au titre des travaux réalisés sur les seules parties de leur bien cédées le 21 août 2014 et en l'absence de désignation par certaines factures du bâtiment dans lequel les travaux ont été réalisés, l'administration pour déterminer la plus-value réalisée en 2014 a procédé à une répartition des montants fondée sur les tantièmes de copropriété. Elle a toutefois extourné des montants entrant dans la majoration du prix d'acquisition des sommes représentant 679/10000èmes des parties communes générales correspondant à l'appartement avec terrasse tout en admettant, par ailleurs, que la cave n'était pas concernée par les travaux en cause (charpente, couverture, fenêtre, façade, muret). Cette méthode est pertinente et n'est pas valablement contestée par les requérants qui se bornent à revendiquer une méthode s'attachant à la nature des travaux réalisées tels que portés sur les factures des entreprises sans toutefois démontrer que les travaux en cause qui par leur nature concernaient l'ensemble des appartements n'étaient pas rattachables à celui situé au rez-de-chaussée de l'ensemble immobilier. Compte tenu de ce qui vient d'être dit, les requérants ne contestent pas valablement l'extourne des sommes représentant 679/10000èmes des parties communes générales correspondant à l'appartement avec terrasse.
En ce qui concerne l'interprétation administrative de la loi fiscale :
14. M. et Mme D... ne sont pas fondés à se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des énonciations des commentaires administratifs publiés sous les références BOI-RFPI-PVI-20-10-20-20 n° 140 à 160, n° 210, BOI-RFPI-PVI-20-10-20-10 n° 130 ainsi que de la réponse ministérielle faite au député M. A..., AN 25 novembre 2008 n° 27539 qui ne comportent aucune interprétation de la loi fiscale différente de celle dont il vient d'être fait application.
15. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme D... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté le surplus de leur demande.
Sur les frais liés au litige :
16. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat qui est partie perdante pour l'essentiel, une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. et Mme D... et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions aux fins de décharge dans la mesure du dégrèvement de 84 897 euros prononcé en cours d'instance.
Article 2 : L'Etat versera à M. et Mme D... une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions de M. et Mme D... est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... D..., à Mme C... D... et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Délibéré après l'audience du 6 décembre 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Quillévéré, président de chambre,
- M. Geffray président-assesseur,
- M. Penhoat, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 décembre 2024.
Le rapporteur
A. PENHOATLe président
G. QUILLÉVÉRÉ
La greffière
H. DAOUD
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23NT01587