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17/12/2024 | FRANCE | N°22NT03568

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 5ème chambre, 17 décembre 2024, 22NT03568


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 31 janvier 2020 par lequel le maire de Vern-sur-Seiche a délivré à la SCI Murail un permis de construire pour l'aménagement d'un hangar existant en deux chambres funéraires et un espace de vente d'articles funéraires sur une parcelle cadastrée AK 6, située 12 rue de la Motte, ainsi que la décision du 19 mai 2020 rejetant son recours gracieux.



Par un jugement n° 2002665 du

26 septembre 2022, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.



Procédure de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 31 janvier 2020 par lequel le maire de Vern-sur-Seiche a délivré à la SCI Murail un permis de construire pour l'aménagement d'un hangar existant en deux chambres funéraires et un espace de vente d'articles funéraires sur une parcelle cadastrée AK 6, située 12 rue de la Motte, ainsi que la décision du 19 mai 2020 rejetant son recours gracieux.

Par un jugement n° 2002665 du 26 septembre 2022, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 17 novembre 2022 et 29 mars 2023, M. B... A..., représenté par Me Camous, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes ;

2°) d'annuler l'arrêté du maire de Vern-sur-Seiche du 31 janvier 2020 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Vern-sur-Seiche le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'une irrégularité ; les premiers juges n'ont pas répondu au moyen tiré de ce que le permis de construire contesté ne respecte pas l'article UI 12 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune Vern-sur-Seiche ;

- l'arrêté contesté a été pris en violation des dispositions de l'article UI 1 du règlement du plan local d'urbanisme de Vern-sur-Seiche ;

- il méconnaît les dispositions de l'article UI 11 du règlement du plan local d'urbanisme ;

- il ne respecte pas les dispositions de l'article UI 12 du règlement du plan local d'urbanisme ;

- il a été pris en violation de l'article D. 2223-80 du code général des collectivités territoriales ;

- la société Alpha Murail n'a pas l'autorisation de gérer une chambre funéraire ;

- l'arrêté contesté est de nature à porter atteinte à la sécurité publique et se trouve entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 23 janvier et 6 juin 2023 (ce dernier n'ayant pas été communiqué), la commune de Vern-sur-Seiche, représentée par Me Varnoux, conclut au rejet de la requête ou, à titre subsidiaire, à la mise en œuvre des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme et demande à la cour de mettre à la charge de M. A... le versement de la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le requérant ne justifie pas d'un intérêt à agir à l'encontre du permis de construire contesté ;

- aucun des moyens invoqués par le requérant n'est fondé.

La requête a été communiquée à la SCI Murail, qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Ody,

- les conclusions de M. Frank, rapporteur public,

- et les observations de Me Le Pallabre, substituant Me Camous, représentant M. A... en sa présence.

Considérant ce qui suit :

1. Par un jugement du 26 septembre 2022, le tribunal administratif de Rennes a rejeté la demande de M. A... tendant à l'annulation de l'arrêté du 31 janvier 2020 par lequel le maire de Vern-sur-Seiche a délivré à la SCI Murail un permis de construire pour l'aménagement d'un hangar existant en deux chambres funéraires et un espace de vente d'articles funéraires sur une parcelle cadastrée AK 6, située 12 rue de la Motte, ainsi que la décision du 19 mai 2020 rejetant son recours gracieux. M. A... relève appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il ressort des termes du jugement attaqué que le tribunal administratif a répondu au moyen tiré de la violation des dispositions de l'article UI 12 du règlement du plan local d'urbanisme de Vern-sur-Seiche aux points 8 à 10 du jugement attaqué. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le jugement serait entaché d'un défaut de réponse à un moyen.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. En premier lieu, aux termes de l'article R. 151-27 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au litige : " Les destinations de constructions sont : / (...) 3° Commerce et activités de service ; / 4° Equipements d'intérêt collectif et services publics ; / 5° Autres activités des secteurs secondaire ou tertiaire. ". Aux termes de l'article R. 151-28 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " Les destinations de constructions prévues à l'article R. 151-27 comprennent les sous-destinations suivantes : / (...) 3° Pour la destination " commerce et activités de service " : artisanat et commerce de détail, restauration, commerce de gros, activités de services où s'effectue l'accueil d'une clientèle, cinéma, hôtels, autres hébergements touristiques ; 4° Pour la destination " équipements d'intérêt collectif et services publics " : locaux et bureaux accueillant du public des administrations publiques et assimilés, locaux techniques et industriels des administrations publiques et assimilés, établissements d'enseignement, de santé et d'action sociale, salles d'art et de spectacles, équipements sportifs, autres équipements recevant du public ; 5° Pour la destination " autres activités des secteurs secondaire ou tertiaire " : industrie, entrepôt, bureau, centre de congrès et d'exposition. ". Aux termes de l'article R. 151-29 du même code : " Les définitions et le contenu des sous-destinations mentionnées à l'article R. 151-28 sont précisées par arrêté du ministre chargé de l'urbanisme. / Les locaux accessoires sont réputés avoir la même destination et sous-destination que le local principal. "

4. Aux termes de l'article UI 1 du règlement du plan local d'urbanisme de Vern-sur-Seiche applicable au terrain d'assiette du projet litigieux : " Occupations ou utilisations du sol interdites / (...) 2 - En secteur UI1, les constructions, ouvrages ou travaux destinés aux nouvelles implantations commerciales et à d'autres usages que les activités industrielles, artisanales, tertiaires ou de services, de restauration et équipements collectifs d'intérêt général. (...) ". En outre, le lexique du règlement du plan local d'urbanisme définit les équipements collectifs d'intérêt général comme étant " des équipements publics ou privés destinés à accueillir des fonctions à caractère d'intérêt général, notamment dans les domaines hospitalier, sanitaire, social, enseignement et services annexes, culturel, sportif, cultuel, défense et sécurité, ainsi que les services publics administratifs divers ".

5. Il ressort des pièces du dossier notamment du formulaire de demande que le permis de construire contesté a été délivré à la SCI Murail pour restructurer un hangar existant à usage d'entrepôts et de bureaux, en vue de créer deux chambres funéraires et un espace de vente d'articles funéraires emportant changement de destination. En outre, le procès-verbal de la sous-commission départementale de sécurité ERP-IGH précise que le projet comporte également une aire de stockage de véhicules, un laboratoire et des sanitaires. La construction projetée dont la vocation est d'abriter l'activité de l'entreprise de pompes funèbres bénéficiaire du permis de construire entre dans la destination des équipements collectifs d'intérêt général, autorisés par l'article UI 1 précité du règlement du plan local d'urbanisme de Vern-sur-Seiche. De plus, si la construction comprend un espace de vente d'articles funéraires, la surface de cet espace est de 75 m² pour une surface totale de 266 m² et l'activité commerciale qui s'y tient est étroitement liée à celle des pompes funèbres dans la mesure où cet espace permet de recevoir les proches des défunts aux fins d'organiser les obsèques. Dans ces conditions, l'espace de vente d'articles funéraires constitue un local accessoire au local principal au sens des dispositions précitées de l'article R. 151-29 du code de l'urbanisme et a la même destination que ce dernier. Dès lors que l'article UI 1 du règlement du plan local d'urbanisme de Vern-sur-Seiche autorise en zone UI 1 les constructions d'équipements collectifs d'intérêt général, le permis de construire litigieux ne méconnaît pas ces dispositions en autorisant l'aménagement du bâtiment existant en chambres funéraires et espace de vente. Le moyen tiré de la violation de ces dispositions ne peut dès lors qu'être écarté.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article UI 11 du règlement du plan local d'urbanisme de Vern-sur-Seiche : " (...) 1 - Aspect extérieur des constructions / Tout projet de construction devra présenter un volume, une implantation et un aspect permettant une bonne intégration dans le site au regard notamment des constructions avoisinantes et de la végétation existante. (...) / 1.4 Ravalement / la couleur des façades doit prendre en compte les facteurs suivants : / - l'environnement direct de la construction, / la surface des façades et leur impact dans la rue ou le quartier (...) ".

7. Il ressort des pièces du dossier que le projet litigieux s'implante dans une zone artisanale comprenant quelques maisons d'habitation, dont celle de M. A..., et surtout de nombreuses entreprises dont les bâtiments sont de grandes dimensions, de volumes simples et couverts pour l'essentiel de tôle de teintes beige, gris clair, gris foncé ou encore rouge pour ce qui concerne le bâtiment situé en face du terrain d'assiette. Le projet portant sur l'aménagement d'un hangar existant, dont le volume et la superficie ne sont pas modifiés, prévoit le traitement des façades en tôle noire incluant des menuiseries en bois. La seule circonstance que le projet prévoit une façade noire visible depuis la voie publique, alors que le bâtiment comportait déjà des façades teintées pour partie en noir, ne permet pas de regarder le projet comme ne respectant pas les dispositions précitées de l'article UI 11 du règlement du plan local d'urbanisme. Le moyen tiré de la violation des dispositions précitées doit dès lors être écarté.

8. En troisième lieu, aux termes de l'article UI 12 du règlement du plan local d'urbanisme de Vern-sur-Seiche : " Aires de stationnement / 1 - Obligations imposées aux constructeurs en matière de réalisation d'aires de stationnement pour les véhicules automobiles / Dans les limites définies aux articles L. 123-1-12 et L. 123-1-13 du code de l'urbanisme, afin d'assurer en dehors des voies, le stationnement des véhicules correspondant aux besoins des constructions et installations, le nombre d'emplacements doit répondre aux normes minimales définies ci-après : / 1.1 Normes à respecter / (...) / services, bureaux et autres activités : / (...) surface de plancher créée ) à 150 m² : 1 emplacement par tranche complète de 50 m² de surface de plancher créée. / (...) 1.3 Modalités de calcul / (...) Pour les changements de destination autres que la création de logements, la suppression éventuelle des places existantes ne pourra concerner que les places dont le nombre est supérieur à la norme exigée par la destination future. (...) ".

9. Il ressort des pièces du dossier que le projet contesté de création de deux chambres funéraires et d'un espace de vente d'articles funéraires se rattache à la catégorie " services, bureaux et autres activités " énoncée par les dispositions précitées de l'article UI 12 du règlement du plan local d'urbanisme de Vern-sur-Seiche. Ainsi qu'il a été exposé, le projet porte sur une surface de plancher de 266 m² et nécessite dès lors un minimum de cinq places de stationnement. Il ressort du dossier de demande de permis de construire que le projet prévoit sept places de stationnement dont deux réservées aux personnes à mobilité réduite. Par suite, le projet respecte les dispositions précitées et le moyen tiré de la méconnaissance de l'article UI 12 du règlement du plan local d'urbanisme de Vern-sur-Seiche ne peut qu'être écarté.

10. En quatrième lieu, aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. " Il appartient à l'autorité d'urbanisme compétente et au juge de l'excès de pouvoir, pour apprécier si les risques d'atteintes à la salubrité ou à la sécurité publique justifient un refus de permis de construire sur le fondement de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, de tenir compte tant de la probabilité de réalisation de ces risques que de la gravité de leurs conséquences, s'ils se réalisent. Les considérations relatives à la commodité du voisinage ne relèvent pas de la salubrité publique au sens de ces dispositions.

11. Il ressort des pièces du dossier, ainsi qu'il a été exposé au point 9, que le projet prévoit un nombre de places de stationnement supérieur à ce qu'impose le règlement du plan local d'urbanisme de Vern-sur-Seiche. De plus, si le procès-verbal de la sous-commission départementale de sécurité ERP-IGH du 21 janvier 2020 mentionne que la capacité du bâtiment est de cinquante-trois personnes pouvant être reçues en même temps, il s'agit toutefois d'un nombre maximal théorique qui ne reflète pas nécessairement le nombre réel de personnes présentes simultanément dans le bâtiment. De plus, il ressort des pièces du dossier qu'une partie du bâtiment est réservée au stationnement des véhicules de l'entreprise elle-même. Compte tenu de l'activité de l'entreprise bénéficiaire du permis de construire et du nombre restreint de chambres funéraires créées, l'affluence restera limitée et le nombre de places de stationnement, suffisant au regard des dispositions du règlement du plan local d'urbanisme, est de nature à permettre à tous les visiteurs de stationner sur le terrain d'assiette du projet et en dehors des voies publiques. Dans ces conditions, l'existence d'un risque pour la sécurité publique, invoqué par M. A..., lié au stationnement des véhicules des visiteurs sur le domaine public n'est pas démontrée. Enfin, si le requérant soutient également que le projet litigieux pourrait entraîner des nuisances liées à l'augmentation de la circulation et aux visites nocturnes des chambres funéraires, ces arguments relèvent de la commodité du voisinage et des conditions d'utilisation du bâtiment litigieux et n'établissent pas davantage le risque pour la sécurité publique allégué. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme doit dès lors être écarté.

12. En cinquième et dernier lieu, aux termes de l'article D. 2223-80 du code général des collectivités territoriales : " (...) L'accès à la chambre funéraire des corps avant mise en bière ou du cercueil s'effectue par la partie technique à l'abri des regards (...) ". Eu égard au principe d'indépendance des législations, M. A... ne peut utilement soutenir, ni que le projet méconnaît ces dispositions, ni que la société Alpha Murail, qui n'est au demeurant pas la bénéficiaire du permis de construire contesté, n'aurait pas obtenu l'autorisation du préfet d'Ille-et-Vilaine de gérer une chambre funéraire. Ce double moyen doit dès lors être écarté comme inopérant.

13. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par la commune de Vern-sur-Seiche, que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Vern-sur-Seiche, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à M. A... la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de M. A... le versement à la commune de Vern-sur-Seiche d'une somme de 1 500 euros au titre des mêmes frais.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : M. A... versera à la commune de Vern-sur-Seiche la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à la société civile immobilière Murail et à la commune de Vern-sur-Seiche.

Délibéré après l'audience du 28 novembre 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Degommier, président de chambre,

- M. Rivas, président assesseur,

- Mme Ody, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 décembre 2024.

La rapporteure,

C. ODY

Le président,

S. DEGOMMIER

Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au préfet d'Ille-et-Vilaine en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22NT03568


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NT03568
Date de la décision : 17/12/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DEGOMMIER
Rapporteur ?: Mme Cécile ODY
Rapporteur public ?: M. FRANK
Avocat(s) : SELARL VALADOU JOSSELIN & ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 22/12/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-12-17;22nt03568 ?
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