Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... a demandé au tribunal administratif de F... d'annuler l'arrêté du
13 juillet 2021 par lequel le recteur C... a refusé de prononcer sa titularisation en qualité d'adjointe administrative principale de 2ème classe.
Par un jugement n° 2104645 du 24 octobre 2023, le tribunal administratif de F... a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 28 novembre 2023, Mme B..., représentée par Me Marras, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de F... du 24 octobre 2023 ;
2°) d'annuler la décision du 13 juillet 2021 ;
3°) d'enjoindre au recteur de E... de F..., sous astreinte de 150 euros par jour de retard, de lui permettre d'effectuer un stage d'une année complète sans période de télétravail et de prononcer sa réintégration au grade d'adjoint administratif principal de 2ème classe stagiaire au sein du ..., dans un délai de quinze jours ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 2 000 euros au titre des dispositions des articles L.761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du
10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé et révèle un défaut d'examen de sa situation par les premiers juges ;
- la décision contestée, prise en considération de la personne, aurait dû être précédée d'une procédure contradictoire en vertu des dispositions de l'article L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration ;
- cette décision, qui a été prise avant la fin de son stage, et non à la fin de celui-ci, est entachée d'illégalité à raison de ce motif ;
- son stage s'est déroulé dans des conditions qui ne lui ont pas permis de faire la preuve de ses capacités professionnelles ;
- le recteur n'a pas pu prendre sa décision au vu de l'avis de la commission administrative paritaire dès lors que le procès-verbal de la réunion du 25 juin 2021 n'a été établi que le
7 septembre suivant, soit postérieurement à la décision contestée.
Par un mémoire en défense, enregistré le 18 juin 2024, le ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche précise que seul le recteur est compétent dans cette affaire.
Par un mémoire en défense, enregistré le 20 juin 2024, le D..., représenté par Me Collet, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de Mme B... sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 2 septembre 2024, le recteur de E... de F... conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée ;
- le décret n° 94-874 du 7 octobre 1994 ;
- le décret n° 2016-580 du 11 mai 2016 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Gélard,
- les conclusions de M. Catroux, rapporteur public,
- et les observations de Me Marie, pour le ....
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., qui bénéficie du statut de travailleuse handicapée, a été reçue au concours externe d'adjoint administratif de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur principal de 2ème classe organisé au titre de l'année 2020. Elle a été nommée adjointe administrative principale de 2ème classe stagiaire au D... pour une durée d'un an à compter du 1er septembre 2020 et affectée à la direction de l'économie et des finances en qualité de gestionnaire - référente viabilisation. Après consultation de la commission administrative paritaire académique qui s'est réunie le 25 juin 2021, le recteur C... a, par un arrêté du 13 juillet 2021, décidé de ne pas titulariser Mme B... au grade d'adjoint administratif de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur principal de 2ème classe et de la licencier au 1er septembre 2021. L'intéressée relève appel du jugement du 24 octobre 2023 par lequel le tribunal administratif de F... a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article R. 741-2 du code de justice administrative : " La décision mentionne que l'audience a été publique, sauf s'il a été fait application des dispositions de l'article L. 731-1. Dans ce dernier cas, il est mentionné que l'audience a eu lieu ou s'est poursuivie hors la présence du public. / Elle contient le nom des parties, l'analyse des conclusions et mémoires ainsi que les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elle fait application. / Mention y est faite que le rapporteur et le rapporteur public et, s'il y a lieu, les parties, leurs mandataires ou défenseurs ainsi que toute personne entendue sur décision du président en vertu du troisième alinéa de l'article R. 732-1 ont été entendus (...) ".
3. Le jugement attaqué comporte l'indication erronée que la SCP d'avocats Delarue Varela Marras défendait le ... alors que le conseil de cet établissement était Me Collet de la Selarl Ares, auquel s'est substitué Me Marie lors de l'audience qui s'est tenue le 12 octobre 2023. Ce jugement précise également que la requérante était défendue par Me Guerreiro. Or, si ce dernier représentait initialement Mme B... et si les deux mémoires déposés au soutien des intérêts de cette requérante l'ont été par cet avocat, la procédure a été communiquée le 4 mai 2023 au cabinet Luzarches Delarue Varela Marras, qui s'est constitué pour la requérante et s'est donc substitué à son premier conseil. Le mémoire du ... présenté le
7 septembre 2023 ainsi que l'avis d'audience ont d'ailleurs été adressés à ce cabinet d'avocats. Toutefois, ces différentes inexactitudes, pour regrettables qu'elles soient, ne constituent que de simples erreurs matérielles qui, de surcroît, ne font pas grief à l'appelante. Par suite, celle-ci n'est pas fondée à soutenir qu'elles seraient de nature à entacher d'irrégularité le jugement attaqué.
Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision du 13 juillet 2021 :
4. Aux termes de l'article 7 du décret du 7 octobre 1994 fixant les dispositions communes applicables aux stagiaires de l'Etat et de ses établissements publics : " Le fonctionnaire stagiaire peut être licencié pour insuffisance professionnelle lorsqu'il est en stage depuis un temps au moins égal à la moitié de la durée normale du stage. / La décision de licenciement est prise après avis de la commission administrative paritaire prévue à l'article 29 du présent décret, sauf dans le cas où l'aptitude professionnelle doit être appréciée par un jury. (...) ". Aux termes de l'article 3-9 du décret du 11 mai 2016 relatif à l'organisation des carrières des fonctionnaires de catégorie C de la fonction publique de l'Etat dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision contestée : " Les fonctionnaires recrutés après avis de la commission de sélection compétente dans le grade relevant de l'échelle de rémunération C1 et les fonctionnaires recrutés dans le grade relevant de l'échelle de rémunération C2, au titre du concours externe ou au titre du troisième concours sont nommés stagiaires et accomplissent un stage d'une durée d'un an. / A l'issue de ce stage, les stagiaires dont les services ont donné satisfaction sont titularisés. Les autres stagiaires peuvent, après avis de la commission administrative paritaire, être autorisés à effectuer un stage complémentaire d'une durée maximale d'un an. Si le stage complémentaire a été jugé satisfaisant, les intéressés sont titularisés. / Lorsque des fonctionnaires ne sont pas titularisés à l'issue du stage initial ou à l'issue du stage complémentaire, ils sont soit licenciés, s'ils n'avaient pas préalablement la qualité de fonctionnaire, soit réintégrés dans leur corps ou cadre d'emplois d'origine, selon les dispositions qui leur sont applicables (...) ".
5. En premier lieu, un agent public ayant, à la suite de son recrutement ou dans le cadre de la formation qui lui est dispensée, la qualité de stagiaire se trouve dans une situation probatoire et provisoire. Il en résulte qu'alors même que la décision de ne pas le titulariser en fin de stage est fondée sur l'appréciation portée par l'autorité compétente sur son aptitude à exercer les fonctions auxquelles il peut être appelé et, de manière générale, sur sa manière de servir, et se trouve ainsi prise en considération de sa personne, elle n'est pas - sauf à revêtir le caractère d'une mesure disciplinaire - au nombre des mesures qui ne peuvent légalement intervenir sans que l'intéressé ait été mis à même de faire valoir ses observations ou de prendre connaissance de son dossier, et n'est soumise qu'aux formes et procédures expressément prévues par les lois et les règlements.
6. La décision litigieuse indique qu'il a été décidé de ne pas titulariser Mme B... compte tenu de son incapacité à assurer les missions relevant de son grade en dépit des aménagements mis en place au cours de son stage. Il ne ressort ni des termes de cette décision, ni des autres pièces du dossier, que l'arrêté contesté présenterait en outre un caractère disciplinaire. Par suite, et en dépit de la circonstance que cette décision a été prise en considération de sa personne, l'administration n'était pas tenue d'inviter au préalable Mme B... à prendre connaissance de son dossier administratif et à présenter ses observations. Le moyen tiré de la méconnaissance de ces règles de procédure ne peut dès lors qu'être écarté.
7. En deuxième lieu, si tout fonctionnaire stagiaire a le droit d'accomplir son stage dans des conditions lui permettant d'acquérir une expérience professionnelle et de faire la preuve de ses capacités pour les fonctions auxquelles il est destiné et si son licenciement ne peut être prononcé, avant l'issue de la période probatoire, que pour insuffisance professionnelle, l'autorité administrative peut l'informer, dans un délai raisonnable avant la fin du stage, de son intention de ne pas le titulariser. Il est constant que la décision contestée, qui a été prise le 13 juillet 2021, prononce le licenciement de Mme B... avec effet au 1er septembre 2021. Si l'intéressée soutient qu'elle n'a pas bénéficié de l'intégralité de sa période probatoire d'un an, qui s'achevait le 31 août 2021, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle n'aurait pas été en mesure de démontrer sa capacité à exercer les fonctions correspondant au grade d'adjoint administratif de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur principal de 2ème classe jusqu'au terme de son stage. Par suite, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que cette décision, qui a été prise dans un délai raisonnable par rapport à la fin de son stage compte tenu de la période estivale, constituerait un licenciement en cours de stage et non en fin de stage.
8. En troisième lieu, la requérante met en avant le fait qu'en raison de la crise sanitaire liée au Covid, elle a été placée en télétravail du 6 avril au 2 juillet 2021, soit durant près d'un quart de la durée de son stage. L'intéressée, qui bénéficiait d'un bureau individuel et de l'assistance d'un tuteur en raison de sa qualité de travailleuse handicapée, ne conteste toutefois pas que les outils informatiques mis à sa disposition pour travailler à son domicile lui permettaient de rester en contact avec ses collègues, et notamment son tuteur, et d'assurer correctement l'ensemble de ses missions. A cet égard, le ... fait valoir que les conditions d'organisation du télétravail communes à tous ses agents étaient proches de l'environnement de travail sur site. Il indique par ailleurs, que dès ses premières évaluations réalisées avant la crise sanitaire, l'intéressée, en dépit de sa formation initiale en comptabilité et des aménagements réalisés pour réduire ses tâches, avait montré des insuffisances professionnelles. Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, Mme B... n'est pas fondée à soutenir qu'elle n'aurait pas été mise à même de prouver ses capacités à exercer les fonctions relevant de son grade.
9. En dernier lieu, la circonstance que le procès-verbal de la commission administrative paritaire qui s'est réunie le 25 juin 2021, sous la présidence du secrétaire général adjoint du rectorat de F..., et qui s'est prononcée en faveur de la non titularisation de Mme B..., n'a été rédigé que le 7 septembre 2021, est sans incidence sur la légalité de la décision contestée dès lors que la garantie prévue par les textes que constitue l'examen de la situation de la candidate par la commission administrative paritaire a bien été respectée avant que son licenciement ne soit prononcé.
10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de F... a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
11 Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à Mme B... de la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de Mme B... le versement à l'Etat de la somme qu'il demande au titre des mêmes frais.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête présentée par Mme B... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions du ... Bretagne tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B..., au ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, et à la ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.
Une copie en sera adressée, pour information au recteur de E... de F... et au ....
Délibéré après l'audience du 7 novembre 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Vergne, président,
- Mme Marion, première conseillère,
- Mme Gélard, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 décembre 2024.
La rapporteure,
V. GELARDLe président,
G-V. VERGNE
Le greffier,
R. MAGEAU
La République mande et ordonne à la ministre de l'éducation nationale en ce qui la concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 23NT03524