Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme M... B..., M. C... L..., Mme H... N..., Mme I... G..., Mme F... D..., M. J... O..., Mme K... E..., épouse O... ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 3 février 2021 par lequel le préfet des Côtes-d'Armor a accordé à la SAS Verts Sapins un permis de construire portant sur la construction d'une unité de méthanisation sur un terrain d'une superficie de 29 855 m², situé au lieu-dit les " Petites villes Roland " à Languenan ainsi que les décisions implicites de rejet de leurs recours gracieux et l'arrêté du 14 avril 2022 par lequel le préfet a accordé à la même société un permis de construire modificatif n°1 portant sur la modification de certains ouvrages et équipements périphériques du site.
Par un jugement n° 2103532 du 21 décembre 2023, le tribunal administratif de Rennes a annulé ces décisions en tant que le projet d'unité de méthanisation méconnait les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme au regard du risque incendie généré par l'aménagement de la voie spécifique réservée aux pompiers et en tant qu'il prévoit une hauteur des clôtures supérieure à celle prévue au plan local d'urbanisme intercommunal de Dinan Agglomération.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires enregistrés les 20 février, 17 juillet et 26 août 2024, Mme M... B..., M. C... L..., Mme H... N..., Mme I... G..., Mme F... D..., M. J... O..., Mme K... E..., épouse O..., représentés par Me Bon-Julien, demandent à la cour dans le dernier état de leurs écritures :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 21 décembre 2023 en tant qu'il a rejeté leurs conclusions tendant à l'annulation totale des arrêtés contestés ;
2°) d'annuler les arrêtés des 3 février 2021, 4 avril 2022 et 21 mai 2024 du préfet des Côtes-d'Armor portant permis de construire et permis de construire modificatifs ainsi que les décisions implicites de rejet de leurs recours gracieux ;
3°) de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
S'agissant du permis de construire initial et du permis de construire modificatif n°1 :
- les dossiers de permis de construire initial et modificatif sont incomplets ; les imprécisions et inexactitudes du dossier de permis de construire ont été de nature à fausser l'appréciation portée sur la demande par l'autorité administrative concernant l'état initial du terrain et l'environnement proche et lointain dès lors que l'inventaire des zones humides est incomplet ; aucune étude d'impact n'a été produite alors que le projet contesté relevait du régime de l'autorisation ;
- les décisions contestées méconnaissent les dispositions des articles A1 et A2 du règlement du plan local d'urbanisme intercommunal dès lors que le projet s'implante sur des parcelles supportant des zones humides ; le projet contesté n'est pas nécessaire à l'activité agricole et ne peut être regardé comme constituant un équipement d'intérêt collectif ;
- les décisions contestées méconnaissent les dispositions de l'article A6 du règlement du plan local d'urbanisme intercommunal dès lors que le projet prévoit de nombreux déblais et remblais du terrain ; le projet ne maintient pas de rapport d'échelle avec l'environnement notamment avec les constructions voisines en termes de hauteur ;
- le projet contesté méconnait les dispositions des articles A7 et A9 du règlement du plan local d'urbanisme intercommunal ; la clôture à l'est ne sera pas doublée d'une haie ; le projet porte atteinte à l'environnement dans lequel il s'inscrit compte tenu des matériaux utilisés et de l'absence d'intégration paysagère ;
- les décisions contestées méconnaissent les dispositions de l'article A11 du règlement du plan local d'urbanisme intercommunal ; le projet prévoit la création de nouveaux accès sur la route départementale n°26 ; il n'existe aucune impossibilité technique de création des accès sur la voirie communale nécessitant l'ouverture de nouveaux accès sur la route départementale ;
- le permis de construire contesté méconnait l'article L. 101-2 du code de l'urbanisme compte tenu de l'importante artificialisation des sols induite par le projet ;
- ce permis de construire méconnait le principe de précaution et les dispositions de l'article R. 111-26 du code de l'urbanisme ; le projet induit une importante artificialisation des sols et se situe au sein d'un milieu sensible ;
- ce permis de construire méconnait le principe de précaution et les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ; le projet contesté s'implante au sein d'un milieu sensible ; le projet contesté présente un risque de pollution ; le projet contesté ne prévoit aucun élément permettant d'éviter le risque identifié de pollution de l'environnement ou d'en limiter les conséquences ; le projet ne prévoit aucun traitement des eaux souillées et les aménagements hydrauliques ne sont pas adaptés au terrain ;
S'agissant du permis de construire modificatif n°2 :
- ce permis de construire n'a pas pour effet de régulariser le vice tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 7 du règlement du plan local d'urbanisme intercommunal ; la clôture implantée en limite de propriété ne sera pas doublée d'une haie ;
- le dossier de permis de construire modificatif est incomplet ; les documents mentionnés comme annexés à la demande n'y ont pas été joints ;
- le service départemental d'incendie et de secours n'a pas été consulté ;
- ce permis de construire méconnait le principe de précaution et les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ; la localisation de la voie dédiée aux engins de secours est insusceptible d'assurer la sécurité et la salubrité du site ; une partie du stockage est situé à plus de 100 mètres des réserves d'incendie ;
- ce permis de construire méconnait le principe de précaution et les dispositions de l'article R. 111-26 du code de l'urbanisme ; la rétention des polluants n'est pas assurée.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 13 juin et 8 août 2024, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme B... et autres ne sont pas fondés.
Par des mémoires en défense enregistrés les 25 juillet et 19 septembre 2024, ce dernier n'ayant pas été communiqué, la société par actions simplifiée (SAS) Verts Sapins, représentée par Me Gandet, conclut, à titre principal au rejet de la requête, à titre subsidiaire à ce que la cour fasse application des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme et à ce qu'il soit mis à la charge solidaire des requérants une somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par Mme B... et autres ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code de l'urbanisme ;
- l'arrêté du 12 août 2010 relatif aux prescriptions générales applicables aux installations classées de méthanisation relevant du régime de l'enregistrement au titre de la rubrique n° 2781 de la nomenclature des installations classées pour la protection de l'environnement ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Dubost,
- les conclusions de M. Frank, rapporteur public,
- et les observations de Me Le Rouge de Guerdavid, substituant Me Bon-Julien, représentant les requérants et celles de Me Giorno substituant Me Gandet, représentant la SAS Verts Sapins.
Considérant ce qui suit :
1. Le 25 septembre 2020, la SAS Verts Sapins a déposé en mairie de Languenan (Côtes-d'Armor) une demande de permis de construire portant sur la construction d'une usine de méthanisation en injection de gaz avec une production de 150 normo m3/heure de biométhane, équipée de panneaux photovoltaïques installés sur les toitures du hangar et de la fumière, sur un terrain d'une superficie de 29 855 m2 situé au lieu-dit Les " Petites villes Roland " en zone agricole (A) du plan local d'urbanisme intercommunal (PLUi) de Dinan Agglomération. Par un arrêté du 3 février 2021, le préfet des Côtes-d'Armor a accordé ce permis de construire assorti de prescriptions. Mme B... et d'autres demandeurs ont formé des recours gracieux à l'encontre de cet arrêté, lesquels ont été implicitement rejetés. Par un arrêté du 14 avril 2022, le préfet des Côtes-d'Armor a accordé à la même société un permis de construire modificatif n°1 portant sur la modification de certains ouvrages et équipements périphériques du site. Mme B... et autres ont alors demandé au tribunal administratif de Rennes l'annulation de ces décisions. Par un jugement du 21 décembre 2023, ce tribunal a annulé partiellement ces décisions, en tant que le projet d'usine de méthanisation méconnait les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme au regard du risque incendie généré par l'aménagement de la voie spécifique réservée aux pompiers et en tant qu'il prévoit une hauteur des clôtures supérieure à celle prévue au plan local d'urbanisme intercommunal de Dinan Agglomération, et a rejeté le surplus de la demande. Mme B... et autres relèvent appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de leur demande. Par un arrêté du 21 mai 2024, le préfet des Côtes-d'Armor a délivré à la société Verts Sapins un permis de construire modificatif n°2 dont Mme B... et autres demandent également l'annulation.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Lorsqu'un permis de construire a été délivré en méconnaissance des dispositions législatives ou réglementaires relatives à l'utilisation du sol ou sans que soient respectées des formes ou formalités préalables à la délivrance des permis de construire, l'illégalité qui en résulte peut être régularisée par la délivrance d'un permis modificatif dès lors que celui-ci assure le respect des règles de fond applicables au projet en cause, répond aux exigences de forme ou a été précédé de l'exécution régulière de la ou des formalités qui avaient été omises. Les irrégularités ainsi régularisées ne peuvent plus être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre le permis initial.
En ce qui concerne l'insuffisance de la demande de permis de construire :
3. Aux termes de l'article R. 431-4 du code de l'urbanisme : " La demande de permis de construire comprend : a) Les informations mentionnées aux articles R. 431-5 à R. 431-12 ; b) Les pièces complémentaires mentionnées aux articles R. 431-13 à R. 431-33-1 ; (...) ".
4. La circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.
5. En premier lieu, aux termes de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural comprend une notice précisant : 1° L'état initial du terrain et de ses abords indiquant, s'il y a lieu, les constructions, la végétation et les éléments paysagers existants ; (...) ".
6. D'une part, il ressort du diagnostic zones humides réalisé par la société Set Environnement sur le terrain de l'opération, qui est cultivé, après réalisation de trente-trois sondages, que trois zones humides y ont été identifiées. Ces zones humides sont mentionnées sur les plans de masse à l'état initial et à l'état futur de la demande de permis de construire modificatif n°1. D'autre part, si les requérants soutiennent que le projet va s'implanter sur des zones humides qui n'ont pas été identifiées par la pétitionnaire, toutefois, les constats d'huissier mentionnant uniquement la présence d'eau en surface de la parcelle, des photographies issues du site " Google Earth " ainsi que la cartographie figurant sur le site internet GéoBretagne indiquant le terrain de l'opération comme ayant une probabilité assez forte de supporter une zone humide, ne sont pas de nature à l'établir. Par suite, le moyen tiré de ce que l'état initial de l'environnement de la demande de permis de construire est incomplet faute de mentionner l'ensemble des zones humides doit être écarté.
7. En second lieu, d'une part, en vertu l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme le dossier joint à la demande de permis de construire comprend en outre, selon les cas l'étude d'impact ou la décision de l'autorité chargée de l'examen au cas par cas dispensant le projet d'évaluation environnementale ou, lorsqu'il s'agit d'une installation classée pour la protection de l'environnement pour laquelle une demande d'enregistrement a été déposée en application de l'article L. 512-7 du même code, le récépissé de la demande d'enregistrement.
8. D'autre part, aux termes de l'article L. 512-7 du code de l'environnement : " I. - Sont soumises à autorisation simplifiée, sous la dénomination d'enregistrement, les installations qui présentent des dangers ou inconvénients graves pour les intérêts mentionnés à l'article L. 511-1, lorsque ces dangers et inconvénients peuvent, en principe, eu égard aux caractéristiques des installations et de leur impact potentiel, être prévenus par le respect de prescriptions générales édictées par le ministre chargé des installations classées. (...) ". Aux termes de l'article L. 512-7-2 du même code : " Le préfet peut décider que la demande d'enregistrement sera instruite selon les règles de procédure prévues par le chapitre unique du titre VIII du livre Ier pour les autorisations environnementales : 1° Si, au regard de la localisation du projet, en prenant en compte les critères mentionnés à l'annexe III de la directive 2011/92/UE du 13 décembre 2011 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement, la sensibilité environnementale du milieu le justifie ; 2° Ou si le cumul des incidences du projet avec celles d'autres projets d'installations, ouvrages ou travaux situés dans cette zone le justifie ; (...) ". En vertu de l'annexe 4 de l'article R. 511-9 de ce code, les installations de méthanisation de matière végétale brute, effluents d'élevage, matières stercoraires, lactosérum et déchets végétaux d'industries agroalimentaires traitant des quantités de matières supérieures à 30 tonnes par jour mais inférieures à 100 tonnes par jour sont soumises au régime de l'enregistrement.
9. Il ressort des pièces du dossier, que l'opération projetée porte sur la construction d'une installation collective de méthanisation agricole avec production de biométhane de 77,3 t/j qui a fait l'objet, en application des dispositions précitées, d'une demande d'enregistrement le 18 janvier 2022 et il n'est pas contesté que le récépissé de cette demande était joint au dossier de permis de construire modificatif n°1. Par ailleurs, par un arrêté du 5 juillet 2022, le préfet des Côtes-d'Armor a enregistré l'installation sans l'instruire selon les règles relatives aux autorisations environnementales. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que la demande de permis de construire était incomplète faute de comprendre une étude d'impact ne peut qu'être écarté comme qu'inopérant.
En ce qui concerne la méconnaissance des dispositions des articles A1 et A2 du règlement du plan local d'urbanisme intercommunal (PLUi) de Dinan Agglomération :
10. Aux termes des articles 1 et 2 du règlement des zones agricoles du PLUi de Dinan Agglomération : " Dans l'ensemble des zones : / Les constructions, installations et ouvrages ne doivent ni porter atteinte au développement des activités agricoles ni à l'environnement. Ils doivent également respecter les conditions de distances réglementaires. / Les constructions et installations d'intérêt collectif et/ou nécessaires à des équipements et/ou services publics sont admises sous réserve de leur bonne intégration paysagère et dès lors : - qu'elles ne sont pas incompatibles avec l'exercice d'une activité agricole, pastorale ou forestière du terrain sur lequel elles sont implantées, - qu'elles ne portent pas atteinte à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages (...) / En zones A - Les usines de méthanisation sont autorisées sous réserve conformément au code de l'urbanisme : - que l'usine de méthanisation soit assimilée à un équipement d'intérêt collectif ( en cas d'énergie destinée à la vente) - d'être nécessaire à l'activité agricole (en cas d'autoconsommation) ".
11. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-1 du code de l'environnement : " I.-Les dispositions des chapitres Ier à VII du présent titre ont pour objet une gestion équilibrée et durable de la ressource en eau ; cette gestion prend en compte les adaptations nécessaires au changement climatique et vise à assurer : / 1° La prévention des inondations et la préservation des écosystèmes aquatiques, des sites et des zones humides ; on entend par zone humide les terrains, exploités ou non, habituellement inondés ou gorgés d'eau douce, salée ou saumâtre de façon permanente ou temporaire, ou dont la végétation, quand elle existe, y est dominée par des plantes hygrophiles pendant au moins une partie de l'année ; / (...) ". Il ressort de ces dispositions, éclairées par les travaux préparatoires de la loi sur l'eau du 3 janvier 1992 dont elles sont issues, qu'une zone humide ne peut être caractérisée, lorsque de la végétation y existe, que par la présence simultanée de sols habituellement inondés ou gorgés d'eau et, pendant au moins une partie de l'année, de plantes hygrophiles.
12. Les constructions projetées ne s'implanteront pas sur les trois zones humides identifiées sur le terrain et il ne ressort pas des pièces du dossier que ces ouvrages conduiraient à leur porter atteinte. Par ailleurs, et comme il a été dit au point 6, les pièces du dossier ne permettent pas d'établir la présence de zones humides telles que définies au point précédent et autres que celles qui ont été identifiées par la société Set Environnement. Le moyen tiré de ce que le projet porterait atteinte à des zones humides doit donc être écarté.
13. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que l'unité de méthanisation litigieuse a pour objectif de produire de l'énergie à partir de la valorisation de déchets d'origine biologique et d'injecter cette énergie sur le réseau public de distribution. Elle constitue donc un service d'intérêt collectif au sens des dispositions du PLUi précitées. Si les requérants font valoir à cet égard que la totalité du biométhane produit par la société Verts Sapins ne sera pas injectée sur le réseau, toutefois, en tout état de cause, il ressort de la conclusion du rapport d'étude détaillée réalisée par la société GRDF que " le débit projeté de 150 Nm3/h est compatible sur toute l'année avec les consommations sur le réseau de gaz naturel ". Ainsi, le moyen tiré de ce que le projet contesté serait prohibé en zone A faute de constituer un service d'intérêt collectif doit être écarté.
En ce qui concerne la méconnaissance des dispositions de l'article A6 du règlement du PLUi :
14. Aux termes de l'article A 6 du règlement du PLUi : " Règle générale / - en zone A / - Pour les bâtiments agricoles. / La hauteur des constructions agricoles n'est pas réglementée. Toutefois, un rapport d'échelle est à maintenir avec l'environnement. Les déblais et remblais doivent être limités et profilés en fonction de l'environnement. Pour les bâtiments à usage d'habitation, les extensions : / La hauteur maximale des constructions à usage d'habitation (tiers et logement de fonction) ne peut excéder 6 mètres à l'égout du toit ou à l'acrotère et 9 mètres au faîtage. / Pour les constructions existantes qui auraient une hauteur supérieure, la hauteur maximale autorisée pour les extensions est celle du bâtiment existant. (...) / Dispositions particulières : / Les dispositions de cet article ne s'appliquent pas aux équipements d'intérêt collectif et services publics qui peuvent disposer de hauteurs différentes à condition de respecter l'harmonie générale et d'assurer une parfaite intégration du projet dans son environnement bâti. ".
15. D'une part, comme il a été dit au point 13, le projet contesté constitue un équipement d'intérêt collectif. Dès lors, les dispositions citées au point précédent, relatives à la hauteur des constructions, ne s'appliquent pas sous réserve que le projet respecte l'harmonie générale et qu'il soit parfaitement intégré dans son environnement bâti. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que l'opération projetée s'implante au sein d'une vaste zone agricole, qui supporte des constructions à usage agricole et d'habitation. Le projet, qui comprend notamment un hangar de stockage, une fumière et des cuves, sera d'une hauteur maximale de 13,93 mètres, supérieure aux constructions les plus proches, d'une hauteur de 10 mètres au faîtage. Toutefois, les ouvrages seront de teintes bleu-gris, grises et vertes et le bardage sera en bois naturel. En outre, il ressort de la notice architecturale que le projet sera, à terme, dissimulé par une haie bocagère sur talus planté et par une ligne d'arbres de haute et de moyenne tige au sud-ouest, au nord-ouest et au sud-est du projet et que les arbres existants et maintenus sont d'une hauteur supérieure de 2 à 6 mètres aux ouvrages projetés. Dans ces conditions, l'opération contestée ne méconnait pas les dispositions de l'article A 6 du règlement du PLUi et le moyen doit être écarté.
En ce qui concerne la méconnaissance des dispositions des articles A7 et A9 du règlement du PLUi :
16. Aux termes de l'article A7 du règlement des zones agricoles du PLUi applicable au litige : " Les dispositions de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme sont opposables à tout projet : / Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions par leur situation leur architecture leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales (...) / Clôtures (...) / A l'alignement des voies et emprises, les clôtures devront être constituées : / • soit d'un dispositif minéral (pierre, parement, gabion, muret enduit,...) d'une hauteur maximale de 1.8 mètre sous condition de s'inscrire en continuité de murs patrimoniaux préexistants / • soit d'une haie seule d'une hauteur maximale de 1.5 mètre / • soit d'un grillage doublé d'une haie d'une hauteur maximale de 1.5 mètre / • soit d'un dispositif minéral (pierre, parement, gabion, muret enduit,...) d'une hauteur maximale de 1,5 mètre / • soit d'un dispositif minéral (pierre, parement, gabions, muret enduit,...) d'une hauteur maximale de 1.1 mètre, surmonté : • soit d'un dispositif grillagé doublé d'une haie • soit d'un dispositif à claire voie, / L'ensemble ne dépassant pas 1,5 mètre. Ces dispositifs peuvent être doublés ou non d'une haie (...) / La hauteur maximale des clôtures en limites séparatives est fixée 1,80 m, exceptés les murs enduits limités à 1,50 mètre. / En limites séparatives pourront également être admis les grillages simples d'une hauteur maximale de 1.80 mètre ". Aux termes de l'article A 9 du même règlement : " les installations indispensables susceptibles de nuire à l'aspect des lieux tels que réservoirs, citernes... devront faire l'objet de mesures d'intégration paysagère (ex : écran végétal constitué d'essences variées locales) (...) ".
17. Pour rechercher l'existence d'une atteinte de nature à fonder le refus de permis de construire ou les prescriptions spéciales accompagnant la délivrance de ce permis, il appartient à l'autorité administrative d'apprécier, dans un premier temps, la qualité du site sur lequel la construction est projetée et d'évaluer, dans un second temps, l'impact que cette construction, compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur le site. Les dispositions de cet article excluent qu'il soit procédé, dans le second temps du raisonnement, à une balance d'intérêts divers en présence, autres que ceux mentionnés par cet article et, le cas échéant, par le plan local d'urbanisme de la commune.
18. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet se situe en zone agricole du PLUi, sur une parcelle agricole cultivée, dans un paysage dominé par des parcelles agricoles et quelques bâtiments d'exploitations agricoles et maisons d'habitation qui ne présentent pas d'intérêt architectural particulier. Si le projet en litige s'implante à proximité de talus et de haies protégées ainsi que d'un espace boisé classé par le PLUi, il n'empiète pas sur ces espaces et il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il leur porterait atteinte. Comme il a été dit précédemment, si le projet comporte des bâtiments d'une hauteur supérieure aux constructions existantes, il sera dissimulé à terme par un écran végétal de haies ainsi que d'arbres de moyennes et hautes tiges. En outre, les installations seront en murs en béton gris surmontés de bardages bois à claire-voie et les teintes des toitures et membranes seront bleu-gris et grises. Ces dispositions sont de nature à faciliter l'intégration des constructions dans le paysage. Si le poste d'injection et le transformateur sont situés en bordure de voirie afin de permettre leur accès sans pénétrer sur le site d'exploitation, ces bâtiments de faible surface et d'une hauteur respective de 2,59 et 2,50 mètres, sont de couleur blanche et grise et ne portent ainsi pas davantage atteinte à l'environnement dans lequel ils s'insèrent, qui comporte également des constructions de couleur blanche. Il ne ressort ainsi pas des pièces du dossier que le projet en litige porterait atteinte au paysage existant et le moyen doit être écarté.
19. En second lieu, aux termes de l'article L. 152-3 du code de l'urbanisme : " Les règles et servitudes définies par un plan local d'urbanisme : 1° Peuvent faire l'objet d'adaptations mineures rendues nécessaires par la nature du sol, la configuration des parcelles ou le caractère des constructions avoisinantes ; (...) ".
20. Les adaptations aux règles prescrites par le plan local d'urbanisme ne peuvent être légalement décidées que pour autant qu'elles sont rendues nécessaires par l'une des causes limitativement énumérées par la loi et qu'en outre, elles n'aménagent que de manière limitée les règles normalement applicables.
21. Il est constant que le grillage clôturant l'opération projetée, situé à l'est du projet, à l'alignement de la voie publique, ne sera pas doublé d'une haie en méconnaissance des dispositions de l'article A 7 précité. Si la société Verts Sapins fait valoir que l'implantation d'une haie dans cet espace qui constitue une aire de retournement d'engins est de nature à porter atteinte à la sécurité publique, cette circonstance ne peut conduire à autoriser une adaptation mineure aux règles prescrites par le PLUi dès lors que cette adaptation n'est pas rendue nécessaire par la nature du sol, la configuration des parcelles ou le caractère des constructions avoisinantes.
22. Il résulte de ce qui précède que le permis de construire initial et le permis de construire n°1 méconnaissent les dispositions de l'article A 7 du règlement du PLUi en ce qui concerne l'absence de haie à l'alignement de la voie publique à l'est du projet.
En ce qui concerne la méconnaissance de l'article A 11 du règlement du PLUi :
23. Aux termes de l'article A 11 du règlement des zones agricoles du PLUi, qui renvoie aux dispositions générales : " Pour être constructible, un terrain doit comporter un accès automobile à une voie publique ou privée, soit directement, soit par l'intermédiaire d'un passage aménagé sur fond voisin ou éventuellement obtenu par l'application de l'article 682 du Code Civil. / Les accès doivent être adaptés à l'opération et aménagés de façon à apporter la moindre gêne à la circulation publique. Les caractéristiques des accès devront répondre à l'importance et à la destination de l'immeuble ou de l'ensemble d'immeubles qu'ils desservent pour satisfaire aux exigences de la sécurité, de la protection civile et de la défense contre l'incendie. / Lorsque le terrain est riverain de deux ou plusieurs voies, les accès doivent, sauf impossibilité technique, s'effectuer à partir de la voie présentant le moindre risque pour la circulation générale. Le nombre des accès sur les routes départementales peut être limité en vue de garantir la sécurité du site. De manière générale, aucun accès ne pourra être créé sur route départementale dès lors qu'il existe une autre possibilité de desserte ".
24. D'une part, il ne ressort pas des pièces du dossier que le chemin communal, d'une largeur inférieure à 5 mètres, permettrait un accès aux installations dans des conditions de sécurité suffisantes notamment s'agissant des véhicules de dimensions importantes et présenterait ainsi un moindre risque pour la circulation générale. Ainsi, l'aménagement d'un accès adapté à l'opération sur la voie communale n'était pas possible dans des conditions de sécurité suffisantes comme l'exigent les dispositions précitées. D'autre part, les requérants font valoir que l'aménagement d'un accès sur la route départementale 26 sera dangereux. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que la route départementale 26 est d'une largeur de plus de 6 mètres, permettant l'accès des véhicules les plus importants, et que l'aménagement de l'accès sera réalisé de manière à ne pas créer de danger pour la sécurité des usagers. A cet effet, l'accès sera réalisé perpendiculairement à la voie afin de permettre l'accès des véhicules de taille importante et une zone de stockage de véhicules est prévue en amont du portail afin de ne pas gêner la circulation. Par ailleurs, la direction départementale des territoires et de la mer des Côtes-d'Armor a émis le 10 décembre 2020 un avis favorable à l'aménagement de cet accès sous réserve de prescriptions tenant notamment à l'aménagement de conditions de visibilité suffisantes de 200 mètres minimum, lesquelles ont été reprises par les arrêtés contestés. Par suite, le moyen doit être écarté.
En ce qui concerne la méconnaissance de l'article L. 101-2 du code de l'urbanisme :
25. Aux termes de l'article L. 101-2 du code de l'urbanisme : " Dans le respect des objectifs du développement durable, l'action des collectivités publiques en matière d'urbanisme vise à atteindre les objectifs suivants : (...) 6° bis La lutte contre l'artificialisation des sols, avec un objectif d'absence d'artificialisation nette à terme ; (...) ".
26. Il résulte de ces dispositions qu'elles définissent exclusivement les principes que les collectivités doivent mettre en œuvre lorsqu'en matière de réglementation d'urbanisme, elles planifient et définissent des règles d'utilisation du sol notamment à travers les plans locaux d'urbanisme. Dès lors, les requérants ne sauraient utilement invoquer cet article à l'encontre du permis de construire attaqué.
En ce qui concerne la méconnaissance du principe de précaution et des dispositions de l'article R. 111-26 du code de l'urbanisme :
27. Selon l'article 5 de la Charte de l'environnement : " Lorsque la réalisation d'un dommage, bien qu'incertaine en l'état des connaissances scientifiques, pourrait affecter de manière grave et irréversible l'environnement, les autorités publiques veillent, par application du principe de précaution et dans leurs domaines d'attributions, à la mise en œuvre de procédures d'évaluation des risques et à l'adoption de mesures provisoires et proportionnées afin de parer à la réalisation du dommage. ". Aux termes de l'article R. 111-26 du code de l'urbanisme : " Le permis ou la décision prise sur la déclaration préalable doit respecter les préoccupations d'environnement définies aux articles L. 110-1 et L. 110-2 du code de l'environnement. Le projet peut n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si, par son importance, sa situation ou sa destination, il est de nature à avoir des conséquences dommageables pour l'environnement. Ces prescriptions spéciales tiennent compte, le cas échéant, des mesures mentionnées à l'article R. 181-43 du code de l'environnement. ".
28. D'abord, comme il a été dit au point 12, il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet contesté porterait atteinte à des zones humides. Ensuite, si ce projet conduit à l'artificialisation des sols nécessaires à sa réalisation, cette seule circonstance n'est pas de nature à caractériser, par elle-même, une atteinte environnementale au sens des dispositions précitées. Le moyen doit par suite être écarté.
En ce qui concerne la méconnaissance des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme :
29. Aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. ".
30. Il appartient à l'autorité d'urbanisme compétente et au juge de l'excès de pouvoir, pour apprécier si les risques d'atteintes à la salubrité ou à la sécurité publique justifient un refus de permis de construire sur le fondement de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, de tenir compte tant de la probabilité de réalisation de ces risques que de la gravité de leurs conséquences, s'ils se réalisent. Les considérations relatives à la commodité du voisinage ne relèvent pas de la salubrité publique au sens de ces dispositions.
31. En premier lieu, comme il a été dit aux points 12 et 18, il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet porterait atteinte à des zones humides ni aux haies et espaces boisés protégés par le PLUi. Par ailleurs, si un cours d'eau est situé à 123 mètres du terrain du projet, cette distance n'est pas par elle-même de nature à démontrer que le projet induirait un risque à son égard alors que les installations comportent des dispositifs destinés à prévenir tout risque de pollution. A cet égard, il ressort des pièces du dossier que la construction des ouvrages de stockage et des digesteurs sera réalisée en béton banché posé sur une géomembrane étanche et associée à un détecteur de fuite. En outre, une zone de rétention étanche sera également créée autour des cuves, afin de prévenir toute pollution accidentelle. Il n'est pas démontré que de telles mesures seraient insuffisantes et la seule circonstance selon laquelle la pente naturelle du terrain serait en direction du cours d'eau n'est pas de nature à établir le risque allégué.
32. En deuxième lieu, la circonstance que des accidents soient survenus sur des installations de méthanisation n'est pas non plus de nature à établir un risque particulier à l'égard du projet en cause, alors comme il a été dit au point précédent, que le projet comporte des mesures destinées à prévenir toute pollution dont il n'est pas établi qu'elles seraient insuffisantes.
33. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier, notamment des demandes de permis de construire, que le réseau de collecte des eaux pluviales est de type séparatif et permet ainsi de traiter de manière différenciée les eaux pluviales souillées des eaux pluviales non souillées. A cet égard, les eaux pluviales de l'aire de chargement seront dirigées vers un bassin de confinement avant d'être traitées par l'installation de méthanisation, et celles des voiries seront acheminées vers un séparateur débourbeur d'hydrocarbures avant d'être rejetées vers un bassin tampon étanche. Les eaux pluviales non souillées, qui sont seulement issues des toitures, convergeront vers un bassin de gestion des eaux pluviales étanche. Si les eaux pluviales issues des voiries seront acheminées, après traitement, vers le même bassin étanche que les eaux pluviales issues des toitures avant leur valorisation par irrigation et infiltration sur bande enherbée, un poste de pompage commandé par une sonde conductimétrique permettra le transfert des eaux uniquement si la concentration du milieu est inférieure à la valeur programmée. L'eau en sortie du bassin de gestion de eaux pluviales devra ainsi respecter les valeurs limites de rejet. Par ailleurs, les eaux pluviales pouvant s'accumuler dans la zone de rétention sont reprises en point bas par un poste de pompage pour être dirigées vers le bassin de gestion des eaux pluviales et, en cas de survenance d'une pollution, la rétention des eaux sera assurée par l'arrêt automatique du poste de pompage.
34. Il résulte de ce qui précède qu'en accordant le permis de construire modifié en litige, le préfet des Côtes-d'Armor n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation dans l'application combinée du principe de précaution et de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.
Sur la légalité du permis de construire modificatif du 21 mai 2024 :
En ce qui concerne la régularisation des vices entachant le permis de construire initial et le permis de construire modificatif n°1 :
35. Lorsqu'un tribunal administratif, après avoir écarté comme non fondés les autres moyens de la requête, a retenu l'existence d'un ou plusieurs vices entachant la légalité du permis de construire, de démolir ou d'aménager dont l'annulation lui était demandée et, après avoir estimé que ce ou ces vices étaient régularisables par un permis modificatif, a décidé de faire usage des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme en prononçant une annulation partielle du permis attaqué et en fixant, le cas échéant, le délai dans lequel le titulaire du permis en cause pourra en demander la régularisation, l'auteur du recours formé contre le permis est recevable à faire appel du jugement en tant qu'en écartant certains de ses moyens et en faisant usage de l'article L. 600-5, il a rejeté sa demande d'annulation totale du permis, le titulaire du permis et l'autorité publique qui l'a délivré étant pour leur part recevables à contester le jugement en tant qu'en retenant l'existence d'un ou plusieurs vices entachant la légalité du permis attaqué, il n'a pas complètement rejeté la demande du requérant. Lorsque le juge d'appel est saisi dans ces conditions d'un appel contre le jugement du tribunal administratif et qu'un permis modificatif a été délivré aux fins de régulariser les vices du permis relevés par ce jugement, il résulte des dispositions de l'article L. 600-5-2 du code de l'urbanisme précité que le bénéficiaire ou l'auteur de cette mesure de régularisation la lui communique sans délai, les parties de première instance comme les tiers, en application des dispositions de l'article R. 345-1 du code de justice administrative, ne pouvant contester cette mesure que devant lui tant que l'instance d'appel est en cours. Par suite, si un recours pour excès de pouvoir a été formé contre cette mesure de régularisation devant le tribunal administratif, ce dernier la transmet, en application des articles R. 351-3 et, le cas échéant, R. 345-2 du code de justice administrative, à la cour administrative d'appel saisie de l'appel contre le permis initial.
36. Il appartient alors au juge d'appel de se prononcer, dans un premier temps, sur la légalité du permis initial tel qu'attaqué devant le tribunal administratif. S'il estime qu'aucun des moyens dirigés contre ce permis, soulevés en première instance ou directement devant lui, n'est fondé, le juge d'appel doit annuler le jugement, rejeter la demande d'annulation dirigée contre le permis et, s'il est saisi de conclusions en ce sens, statuer également sur la légalité de la mesure de régularisation. Si au contraire, il estime fondés un ou plusieurs des moyens dirigés contre le permis initial mais que les vices affectant ce permis ne sont pas régularisables, le juge d'appel doit annuler le jugement en tant qu'il ne prononce qu'une annulation partielle du permis et annuler ce permis dans son ensemble, alors même qu'une mesure de régularisation est intervenue postérieurement au jugement de première instance, cette dernière ne pouvant alors, eu égard aux vices affectant le permis initial, avoir pour effet de le régulariser. Il doit par suite également annuler cette mesure de régularisation par voie de conséquence.
37. Dans les autres cas, c'est à dire lorsque le juge d'appel estime que le permis initialement attaqué est affecté d'un ou plusieurs vices régularisables, il statue ensuite sur la légalité de ce permis en prenant en compte les mesures prises le cas échéant en vue de régulariser ces vices, en se prononçant sur leur légalité si elle est contestée. Au terme de cet examen, s'il estime que le permis ainsi modifié est régularisé, le juge rejette les conclusions dirigées contre la mesure de régularisation. S'il constate que le permis ainsi modifié est toujours affecté d'un vice, il peut faire application des dispositions de l'article L. 600-5 ou de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme pour permettre sa régularisation.
38. Il ressort des termes du jugement du tribunal administratif de Rennes, non contesté sur ce point, que le permis de construire initial et le permis de construire modificatif n°1 méconnaissent les dispositions de l'article A 7 du règlement du PLUi relatif aux clôtures en ce qui concerne leur hauteur. Par ailleurs, il résulte de ce qui a été dit aux points 21 et 22 que ces arrêtés méconnaissent également l'article A 7 du règlement du PLUi relatif également aux clôtures s'agissant de l'absence de haie à l'alignement de la voie publique à l'est du projet. De tels vices, peuvent être régularisés, dès lors que les modifications à envisager, qui concernent toutes les deux les clôtures et sont limitées à une partie identifiable du projet, ne lui apportent pas un bouleversement tel qu'il en changerait la nature même.
39. Par un arrêté du 21 mai 2024, le préfet des Côtes-d'Armor a délivré un permis de construire modificatif n°2 à la société Verts Sapins.
40. Il ressort des pièces du dossier que par une délibération du 27 février 2023, Dinan Agglomération a approuvé la modification de son PLUi. Aux termes de l'article 7 du PLUi dans sa version modifiée, applicable à l'arrêté du 21 mai 2024 contesté : " Clôtures : / (...) Pour les constructions et installations d'intérêt collectif et/ou nécessaires à des équipements et/ou services publics, d'autres dispositifs et hauteurs de clôtures pourront être admis pour des raisons de sécurité et/ou de salubrité publique (...). "
41. D'abord, il ressort des pièces du dossier que le permis de construire modificatif n°2 a entendu faire application, à l'opération projetée, des dispositions de l'article A7 du PLUi dans leur rédaction applicable à compter du 27 février 2023 s'agissant des clôtures. Ensuite, comme il a été dit au point 13, le projet contesté doit être regardé comme une construction d'intérêt collectif. Enfin, il ressort des pièces du dossier que la hauteur des clôtures, destinée à éviter toute intrusion sur le site de méthanisation et l'absence de haies à l'est du projet, de nature à permettre la manœuvre des engins de secours sur l'aire de retournement, sont nécessitées par des considérations relatives à la sécurité publique du projet. Dans ces conditions, le permis de construire modificatif n°2 a régularisé les vices mentionnés au point 38 et le permis de construire en litige ne méconnait pas les dispositions de l'article A 7 du PLUi.
En ce qui concerne les vices propres du permis de construire modificatif du 21 mai 2024 :
S'agissant de la complétude du dossier :
42. En premier lieu, d'une part, il ressort de l'attestation du 24 juillet 2024 du maire de la commune de Languenan que le dossier de permis de construire modificatif n° 2 comportait le porter à connaissance au titre des installations classées pour la protection de l'environnement, la notice d'incidence révisée, la note relative à la hauteur des clôtures et la note relative aux observations du service départemental d'incendie et de secours. D'autre part, il ressort de la notice explicative du projet que seul le bureau d'une surface de 49 m² sera chauffé et est en conséquence soumis à la règlementation thermique. Alors que les modifications apportées au projet ne portent pas sur cet ouvrage, la circonstance qu'une nouvelle attestation relative au respect de la règlementation thermique n'ait pas été produite à son soutien est sans incidence sur la légalité du permis de construire délivré.
43. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que la société Verts Sapins a transmis le 13 février 2024 au service départemental d'incendie et de secours (SDIS) des Côtes-d'Armor une synthèse des modifications projetées s'agissant de l'accès des services de secours et de la défense contre l'incendie ainsi qu'un plan de masse modifié de l'opération. En réponse à cette communication, le SDIS a indiqué que ces éléments n'appelaient pas d'observation particulière. Par suite, le moyen tiré de ce que le SDIS n'aurait pas émis d'avis sur les modifications projetées doit, en tout état de cause, être écarté.
En ce qui concerne la méconnaissance des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme :
44. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que trois voies engins seront aménagées, dont l'une s'implantera dans la zone de rétention, afin de desservir l'ensemble des points de l'installation à moins de 60 m. A... les requérants font valoir qu'il existe une incompatibilité de fonctions entre la voie dédiée aux engins de secours et la zone de rétention, toutefois, il ressort du plan de masse de l'opération projetée qu'une deuxième voie dédiée aux engins de secours, en périmétrie, permettra de desservir les mêmes installations notamment dans le cas où la zone de rétention ne pourrait être accessible. A cet égard, comme il a été dit au point 43, le SDIS a indiqué que ces aménagements n'appelaient pas d'observation particulière. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'aménagement de cette voie serait par principe incompatible avec la perméabilité limitée nécessaire de la zone de rétention au sein de laquelle elle va s'implanter. Par ailleurs, la faible perméabilité de la zone de rétention sera obtenue par traitement ou par compactage des sols en place pour atteindre la perméabilité requise de 10-7 m/s, une géomembrane pouvant également être posée pour atteindre cet objectif. Les pièces du dossier ne permettent pas de démontrer que l'empierrement nécessaire à l'aménagement de la voie engins ferait obstacle à la faible perméabilité requise au sein de la zone.
45. En second lieu, aux termes de l'article 23 de l'arrêté du 12 août 2010 relatif aux prescriptions générales applicables aux installations classées de méthanisation relevant du régime de l'enregistrement au titre de la rubrique n°2781 de la nomenclature des installations classées pour la protection de l'environnement : " Moyens d'alerte et de lutte contre l'incendie. / L'installation est dotée de moyens nécessaires d'alerte des services d'incendie et de secours ainsi que de moyens de lutte contre l'incendie appropriés aux risques et conformes aux normes en vigueur, notamment : - d'un ou plusieurs appareils d'incendie (prises d'eau, poteaux par exemple) d'un réseau public ou privé implantés de telle sorte que tout point de la limite du stockage se trouve à moins de 100 mètres d'un appareil permettant de fournir un débit minimal de 60 m³/h pendant une durée d'au moins deux heures ; (...) A défaut de ces appareils d'incendie et robinets d'incendie armés, une réserve d'eau destinée à l'extinction est accessible en toutes circonstances à proximité du stock de matières avant traitement. Son dimensionnement et son implantation doivent avoir l'accord des services départementaux d'incendie et de secours avant la mise en service de l'installation. (...) ".
46. Si les requérants se prévalent de l'arrêté du 12 août 2010 relatif aux prescriptions générales applicables aux installations classées de méthanisation relevant du régime de l'enregistrement, toutefois, en raison de l'indépendance des législations, les requérants ne peuvent utilement invoquer un tel arrêté, adopté sur le fondement des dispositions du code de l'environnement, relatifs aux installations classées pour la protection de l'environnement. En tout état de cause, il ressort des pièces du dossier que le terrain de l'opération contestée ne comporte pas d'appareils d'incendie de types poteaux ou prises d'eau. En revanche, ce projet comporte deux réserves d'eau de 120 m3 chacune situées à proximité du stock de matières avant traitement comme le prescrivent les dispositions citées au point précédent.
47. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme doit être écarté.
En ce qui concerne la méconnaissance des dispositions de l'article R. 111-26 du code de l'urbanisme :
48. Comme il a été dit au point 44, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'aménagement d'une voie pour les engins de secours au sein de la zone de rétention serait de nature à comporter des conséquences dommageables pour l'environnement. Le moyen doit par suite être écarté.
49. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... et autres ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté le surplus de leurs conclusions à fin d'annulation, ni à demander l'annulation de l'arrêté du préfet des Côtes-d'Armor du 21 mai 2024 portant permis de construire modificatif n° 2.
Sur les frais liés au litige :
50. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge des requérants la somme que la société Verts Sapins demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Les dispositions du même article font par ailleurs obstacle à ce que la somme demandée à ce titre par les requérants soient mises à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... et autres est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la société Verts Sapins au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme M... B..., désignée représentante unique au titre des dispositions de l'article R. 411-5 du code de justice administrative, à la ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques et à la SAS Verts Sapins.
Copie en sera adressée au préfet des Côtes-d'Armor.
Délibéré après l'audience du 24 octobre 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Degommier, président de chambre,
- M. Rivas, président-assesseur,
- Mme Dubost, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 novembre 2024.
La rapporteure,
A.-M. DUBOST
Le président,
S. DEGOMMIER
Le greffier,
C. GOY La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques en ce qui la concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 24NT00507