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19/11/2024 | FRANCE | N°23NT00731

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 5ème chambre, 19 novembre 2024, 23NT00731


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. AB... G..., M. et Mme V... et AC... M..., M. et Mme AE... et AJ... AM..., M. et Mme W... et AH... H..., M. et Mme R... et J... U..., Mmes AH... N... et K... P..., M. et Mme AG... et AI... X..., M. et Mme AN... et F... Y..., M. et Mme L... et AL... C..., M. et Mme Z... et Mme AA... AK... I..., M. et Mme O... et T... Q..., M. et Mme E... et F... D..., M. et Mme A... et AF... AD... ainsi que M. B... S... ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 23 févri

er 2021 par lequel le maire d'Acigné (Ille-et-Vilaine) a délivré à la société ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. AB... G..., M. et Mme V... et AC... M..., M. et Mme AE... et AJ... AM..., M. et Mme W... et AH... H..., M. et Mme R... et J... U..., Mmes AH... N... et K... P..., M. et Mme AG... et AI... X..., M. et Mme AN... et F... Y..., M. et Mme L... et AL... C..., M. et Mme Z... et Mme AA... AK... I..., M. et Mme O... et T... Q..., M. et Mme E... et F... D..., M. et Mme A... et AF... AD... ainsi que M. B... S... ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 23 février 2021 par lequel le maire d'Acigné (Ille-et-Vilaine) a délivré à la société civile immobilière (SCI) Pavillon Noir un permis de construire en vue de la construction d'un garage automobile et la décision du 20 mai 2021 par laquelle il a rejeté leur recours gracieux, ainsi que l'arrêté du 14 janvier 2022 portant permis de construire modificatif.

Par un jugement n° 2103729 du 16 janvier 2023, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 16 mars 2023 et 27 mai 2024, Mme K... P..., Mme AH... N..., M. et Mme A... et AF... AD..., M. AB... G..., M. et Mme V... et AC... M..., M. et Mme E... et F... D..., M. et Mme R... et J... U..., M. et Mme AG... et AI... X..., M. et Mme AE... et AJ... AM..., M. et Mme AN... et F... Y..., M. et Mme L... et AL... C..., M. et Mme W... et AH... H..., M. et Mme O... et T... Q..., M. et Mme Z... et Mme AA... AK... I..., ainsi que M. B... S..., représentés par Me Balloul, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 16 janvier 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 23 février 2021 par lequel le maire d'Acigné a délivré à la SCI Pavillon Noir un permis de construire en vue de la construction d'un garage automobile et la décision du 20 mai 2021 par laquelle il a rejeté leur recours gracieux, ainsi que l'arrêté du 14 janvier 2022 portant permis de construire modificatif ;

3°) de mettre à la charge de la commune d'Acigné le versement de la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le dossier de permis de construire est insuffisant ; les éléments permettant d'apprécier l'insertion du projet dans son environnement sont insuffisants ; la description de l'état initial est lacunaire ; il n'est pas fait mention de la végétation qui sera supprimée ; aucun titre ne permet d'établir l'existence d'une servitude consentie par la SCI Tholeo ; la mention de la destination de la construction est erronée ;

- l'arrêté contesté méconnait le règlement du plan local d'urbanisme intercommunal dès lors que l'activité projetée est prohibée dans la zone UI1g ;

- l'arrêté contesté méconnait les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme s'agissant du risque d'incendie dès lors que le risque au titre de sa qualité d'établissement recevant du public n'a pas été pris en compte en méconnaissance des dispositions du règlement départemental de défense extérieure contre l'incendie d'Ille-et-Vilaine , l'implantation de l'aire d'aspiration méconnait les dispositions du règlement départemental de défense extérieure contre l'incendie d'Ille-et-Vilaine ; les conditions de desserte du projet sont dangereuses ; le projet génère des nuisances sonores et olfactives ainsi qu'un risque de pollution des propriétés voisines ;

- par la voie de l'exception, le règlement du plan local d'urbanisme intercommunal est illégal dès lors qu'il définit les garages comme appartenant, sans distinction par rapport à leur importance, à la sous-destination industrie ; le classement en zone UI1g des parcelles est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ; ce classement est incohérent avec le projet d'aménagement et de développement durables du plan local d'urbanisme intercommunal et est incompatible avec les orientations d'aménagement et de programmation de la commune.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 juillet 2023, la commune d'Acigné représentée par la SELARL Cabinet Coudray, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge des requérants une somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par Mme P... et autres ne sont pas fondés.

Par des mémoires en défense enregistrés les 21 novembre 2023 et 3 mai 2024, la SCI Pavillon Noir, représentée par Me Coirier, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge solidaire des requérants une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- l'arrêté du 10 novembre 2016 définissant les destinations et sous-destinations de constructions pouvant être règlementées par le règlement national d'urbanisme et les règlements des plans locaux d'urbanisme ou les documents en tenant lieu ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dubost,

- les conclusions de M. Frank, rapporteur public,

- puis les observations de Me Cadic, substituant Me Balloul, représentant les requérants et celles de Me Coirier, représentant la SCI Pavillon Noir.

Considérant ce qui suit :

1. La SCI Pavillon Noir a déposé le 5 octobre 2020 une demande de permis de construire ayant pour objet la construction d'un garage automobile sur les parcelles cadastrées section B nos 541, 542 et 1188 à Acigné (Ille-et-Vilaine). Par un arrêté du 23 février 2021, le maire d'Acigné a délivré le permis de construire sollicité. M. et Mme U... et d'autres demandeurs ont formé un recours gracieux à son encontre qui a été rejeté le 20 mai 2021. Par un arrêté du 14 janvier 2022, le maire de la commune a délivré un permis de construire modificatif à la SCI Pavillon Noir. M. et Mme U... et d'autres demandeurs ont alors demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler ces décisions. Mme P... et d'autres requérants relèvent appel du jugement du 16 janvier 2023 par lequel ce tribunal a rejeté leur demande.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Lorsqu'une autorisation d'urbanisme a été délivrée en méconnaissance des dispositions législatives ou réglementaires relatives à l'utilisation du sol ou sans que soient respectées des formes ou formalités préalables à la délivrance de l'autorisation, l'illégalité qui en résulte peut être régularisée par la délivrance d'une autorisation modificative dès lors que celle-ci assure le respect des règles de fond applicables au projet en cause, répond aux exigences de forme ou a été précédée de l'exécution régulière de la ou des formalités qui avaient été omises. Elle peut, de même, être régularisée par une autorisation modificative si la règle relative à l'utilisation du sol qui était méconnue par l'autorisation initiale a été entretemps modifiée ou si cette règle ne peut plus être regardée comme méconnue par l'effet d'un changement dans les circonstances de fait de l'espèce. Les irrégularités ainsi régularisées ne peuvent plus être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre l'autorisation initiale.

En ce qui concerne le moyen tiré du caractère incomplet et insuffisant de la demande de permis de construire :

3. La circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

4. En premier lieu, aux termes de l'article R. 431-4 du code de l'urbanisme : " La demande de permis de construire comprend : a) Les informations mentionnées aux articles R. 431- 5 à R. 431-12 ; (...). " et aux termes de l'article R. 431-8 du même code : " Le projet architectural comprend une notice précisant : 1° L'état initial du terrain et de ses abords indiquant, s'il y a lieu, les constructions, la végétation et les éléments paysagers existants ; 2° Les partis retenus pour assurer l'insertion du projet dans son environnement et la prise en compte des paysages, faisant apparaître, en fonction des caractéristiques du projet : a) L'aménagement du terrain, en indiquant ce qui est modifié ou supprimé ; b) L'implantation, l'organisation, la composition et le volume des constructions nouvelles, notamment par rapport aux constructions ou paysages avoisinants ; c) Le traitement des constructions, clôtures, végétations ou aménagements situés en limite de terrain ; d) Les matériaux et les couleurs des constructions ; e) Le traitement des espaces libres, notamment les plantations à conserver ou à créer ; f) L'organisation et l'aménagement des accès au terrain, aux constructions et aux aires de stationnement. ".

5. D'une part, il ressort de la demande de permis de construire que la notice architecturale mentionne s'agissant de l'état initial du terrain et de ses abords que " le projet se situe sur la ZA Le Boulais (...). Les parcelles (...) se situent à l'extrémité est de la zone, et forment ainsi une parcelle d'angle entre la route départementale et la communale n°18. (...) A l'ouest nous trouvons un bâtiment de bureaux (...), une maison d'habitation et ses dépendances. " Par ailleurs, les photographies jointes à la demande de permis modificatif font état de la présence de maisons d'habitation situées à proximité des parcelles d'implantation du projet. Dans ces conditions, la demande de permis de construire n'est pas insuffisante s'agissant des précisions fournies sur l'état initial.

6. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que la notice architecturale jointe à la demande de permis de construire modificatif précise notamment les éléments relatifs à l'implantation, à l'organisation, au traitement et aux matériaux des constructions et clôtures. Par ailleurs, des documents photographiques joints à la demande, qui représentent la construction projetée dans son environnement, permettent d'apprécier l'insertion du projet dans son environnement. Ainsi, les pièces de la demande ont permis à l'autorité administrative d'apprécier l'insertion du projet par rapport aux constructions avoisinantes.

7. Enfin, les plans de bornage et de division joints à la demande de permis de construire font figurer les arbres existants et les plans de masse de l'opération projetée mentionnent les arbres conservés et à planter. Ainsi, la comparaison de ces documents permettait d'identifier les arbres qui ne seraient pas conservés au terme de l'opération projetée. Par suite, la circonstance que les arbres à abattre ne seraient pas mentionnés au sein des pièces des demandes de permis de construire n'a pas été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

8. En deuxième lieu, le permis de construire, qui est délivré sous réserve des droits des tiers, a pour seul objet d'assurer la conformité des travaux qu'il autorise avec la réglementation d'urbanisme. Dès lors, si l'administration et le juge administratif doivent, pour l'application des règles d'urbanisme relatives à la desserte et à l'accès des engins d'incendie et de secours, s'assurer de l'existence d'une desserte suffisante de la parcelle par une voie ouverte à la circulation publique et, le cas échéant, de l'existence d'un titre créant une servitude de passage donnant accès à cette voie, il ne leur appartient de vérifier ni la validité de cette servitude ni l'existence d'un titre permettant l'utilisation de la voie qu'elle dessert, si elle est privée, dès lors que celle-ci est ouverte à la circulation publique.

9. Il ressort des pièces du dossier que la société Tholeo, est propriétaire des parcelles voisines de l'opération, et sur lesquelles sera aménagée la voie de desserte de l'opération contestée. D'une part, il ressort de l'attestation sur l'honneur établie le 11 octobre 2021 par les sociétés Pavillon Noir et Tholeo que celles-ci s'accordent mutuellement des servitudes de passage et de réseaux notamment afin de permettre l'aménagement de la voie de desserte de l'opération projetée. Une telle attestation, en l'absence de toute allégation de fraude, était de nature à permettre à l'autorité administrative de s'assurer de l'existence d'une desserte suffisante de la parcelle et de l'existence d'une servitude de passage donnant accès à cette voie. D'autre part, les dispositions du code de l'urbanisme sur la composition de la demande de permis de construire n'ont ni pour objet ni pour effet d'imposer aux pétitionnaires de justifier des autorisations éventuellement nécessaires sur le fondement du droit privé pour assurer le raccordement aux réseaux publics de l'opération projetée. Dès lors, la circonstance que les demandes de permis de construire ne comportent aucun titre créant la servitude de passage n'est pas de nature à entacher celles-ci d'insuffisance.

10. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 431-5 du code de l'urbanisme : " La demande de permis de construire précise : (...) e) La destination des constructions, par référence aux différentes destinations et sous-destinations définies aux articles R. 151-27 et R. 151-28 ; (...) ". Aux termes de l'article R. 151-27 de ce code dans sa rédaction applicable au litige : " Les destinations de constructions sont : (...) 3° Commerce et activités de service ; (...) 5° Autres activités des secteurs secondaire ou tertiaire. " et aux termes de l'article R. 151-28 du même code : " Les destinations de constructions prévues à l'article R. 151-27 comprennent les sous-destinations suivantes : (...) 3° Pour la destination " commerce et activités de service " : artisanat et commerce de détail, restauration, commerce de gros, activités de services où s'effectue l'accueil d'une clientèle, cinéma, hôtels, autres hébergements touristiques ; (...) 5° Pour la destination " autres activités des secteurs secondaire ou tertiaire " : industrie, entrepôt, bureau, centre de congrès et d'exposition. ".

11. Le plan local d'urbanisme intercommunal (PLUi) de Rennes Métropole, à laquelle appartient la commune d'Acigné, précise que la sous-destination " industrie " recouvre notamment les activités de production, de construction ou de réparation susceptible de générer des nuisances et indique à ce titre que l'activité de garagiste relève de cette catégorie. Ainsi, le formulaire Cerfa, qui mentionne que la construction projetée portant sur la construction d'un bâtiment destiné à une activité de garage automobile, relève de la sous-destination " industrie ", n'est pas entaché d'erreur.

12. Il résulte de ce qui a été dit aux points 4 à 11 que le moyen tiré de l'insuffisance et de l'incomplétude de la demande de permis de construire doit être écarté.

En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance du règlement du plan local d'urbanisme intercommunal :

13. Le PLUi de Rennes Métropole classe pour l'essentiel les parcelles d'implantation de l'opération contestée au sein de la zone UI1g laquelle autorise les constructions relevant de la destination " autres activités des secteurs secondaires ou tertiaire " et de la sous-destination " industrie ".

14. L'opération projetée porte sur la construction d'un garage automobile. Comme il a été dit au point 11, cette activité appartient, aux termes du PLUi, à la sous-destination " industrie ", laquelle est autorisée au sein de la zone UI1g. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que la construction projetée ne serait pas autorisée au sein la zone UI1g du règlement du PLUi doit être écarté.

En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme :

15. Aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. ". Il appartient à l'autorité d'urbanisme compétente et au juge de l'excès de pouvoir, pour apprécier si les risques d'atteintes à la salubrité ou à la sécurité publique justifient un refus de permis de construire sur le fondement de ces dispositions, de tenir compte tant de la probabilité de réalisation de ces risques que de la gravité de leurs conséquences, s'ils se réalisent.

16. En premier lieu, les dispositions du règlement départemental de défense extérieure contre l'incendie (RDDECI) d'Ille-et-Vilaine ne sont pas directement opposables aux autorisations d'urbanisme. Par suite, la circonstance que l'opération contestée méconnaitrait les dispositions de ce règlement s'agissant de l'appréciation du risque incendie au titre de sa qualité d'établissement recevant du public est sans incidence sur la légalité de la décision contestée.

17. En deuxième lieu, comme il a été dit au point précédent, les requérants ne peuvent utilement soutenir que, s'agissant de l'aire d'aspiration, celle-ci méconnaitrait les dispositions du RDDECI d'Ille-et-Vilaine. En tout état de cause, la collectivité eau bassin rennais a émis, au titre de la défense extérieure contre l'incendie, un avis favorable avec prescriptions qui ont été reprises par l'arrêté du 14 janvier 2022 contesté.

18. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier que la desserte de l'opération sera assurée exclusivement par une voie interne à la zone d'activité du Boulais, aucun accès n'étant aménagé depuis les routes départementale et communale. En outre, la voie de desserte, aménagée pour partie sur le terrain de la société Tholeo par la constitution d'une servitude de passage, sera d'une largeur comprise entre 5,50 et 6 mètres et présentera à son débouché une largeur suffisante de 6,62 mètres, pour assurer la visibilité des usagers qui l'emprunteront. La circonstance que des parkings soient implantés à proximité de cette voie, et que cette dernière présente un angle, ne permet pas, en l'espèce, d'établir que cet accès présenterait des risques pour la sécurité publique dès lors notamment que la voie présente une largeur suffisante et que la vitesse, s'agissant d'une voie interne à une zone d'activité, y sera nécessairement réduite. Enfin, alors que l'opération projetée sera implantée en retrait de la route départementale, il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet gênerait la visibilité des usagers souhaitant emprunter la route départementale depuis la voie communale bordant les parcelles en cause.

19. En quatrième lieu, les requérants soutiennent que le projet serait de nature à engendrer des nuisances sonores et olfactives pour les riverains et qu'il aurait dû, pour cette raison, être refusé. Il ressort toutefois des pièces du dossier, que le projet s'implantera dans une zone d'activités destinée aux activités industrielles et artisanales. Par ailleurs, il n'est pas contesté que le projet en litige a pris en compte les nuisances que l'activité pourrait générer. Ainsi, il ressort des plans de l'opération projetée que la cabine de peinture et le local du compresseur seront implantés à l'intérieur des bâtiments afin de limiter les nuisances sonores et olfactives. En outre, la zone de stockage de déchets, située en limite de propriété, sera abritée par un local couvert et son sol sera constitué d'une dalle de béton.

20. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme doit donc être écarté.

En ce qui concerne l'illégalité du plan local d'urbanisme intercommunal invoquée par la voie de l'exception :

21. Aux termes de l'article L. 600-12 du code de l'urbanisme : " Sous réserve de l'application des articles L. 600-12-1 et L. 442-14, l'annulation ou la déclaration d'illégalité d'un schéma de cohérence territoriale, d'un plan local d'urbanisme, d'un document d'urbanisme en tenant lieu ou d'une carte communale a pour effet de remettre en vigueur le schéma de cohérence territoriale, le plan local d'urbanisme, le document d'urbanisme en tenant lieu ou la carte communale immédiatement antérieur. ". Aux termes de l'article L. 600-12-1 du même code : " L'annulation ou la déclaration d'illégalité d'un schéma de cohérence territoriale, d'un plan local d'urbanisme, d'un document d'urbanisme en tenant lieu ou d'une carte communale sont par elles-mêmes sans incidence sur les décisions relatives à l'utilisation du sol ou à l'occupation des sols régies par le présent code délivrées antérieurement à leur prononcé dès lors que ces annulations ou déclarations d'illégalité reposent sur un motif étranger aux règles d'urbanisme applicables au projet. (...) ". Lorsqu'un motif d'illégalité non étranger aux règles d'urbanisme applicables au projet est susceptible de conduire à remettre en vigueur tout ou partie du document local d'urbanisme immédiatement antérieur, le moyen tiré de l'exception d'illégalité du document local d'urbanisme à l'appui d'un recours en annulation d'une autorisation d'urbanisme ne peut être utilement soulevé que si le requérant soutient également que cette autorisation méconnaît les dispositions pertinentes ainsi remises en vigueur.

22. En premier lieu, aux termes de l'article L. 151-9 du code de l'urbanisme : " Le règlement (...) peut définir, en fonction des situations locales, les règles concernant la destination et la nature des constructions autorisées ". Aux termes de l'article 5 de l'arrêté du 10 novembre 2016 définissant les destinations et sous-destinations de constructions pouvant être règlementées par le règlement national d'urbanisme et les règlements des plans locaux d'urbanisme ou les documents en tenant lieu : " La destination de construction " autres activités des secteurs secondaire ou tertiaire " prévue au 5° de l'article R. 151-27 du code de l'urbanisme comprend les quatre sous-destinations suivantes : industrie, entrepôt, bureau, centre de congrès et d'exposition. La sous-destination " industrie " recouvre les constructions destinées à l'activité extractive et manufacturière du secteur primaire, les constructions destinées à l'activité industrielle du secteur secondaire ainsi que les constructions artisanales du secteur de la construction ou de l'industrie. Cette sous-destination recouvre notamment les activités de production, de construction ou de réparation susceptibles de générer des nuisances. (...) ".

23. Le PLUi de Rennes Métropole a classé les garages dans la sous-destination " industrie " telle que définie au point 11 du présent arrêt.

24. Alors qu'il résulte des dispositions précitées que la sous-destination industrie recouvre les activités de réparation susceptibles de générer des nuisances, les auteurs du PLUi n'ont pas méconnu les dispositions citées au point 22 en considérant que l'activité de garage de réparation automobile, dont il n'est pas contesté qu'elle est susceptible de générer des nuisances, relevait de cette catégorie. La circonstance que les auteurs du PLUi n'aient pas tenu compte des moyens mis en œuvre pour l'exercice de l'activité est à cet égard sans incidence. Le moyen doit donc être écarté.

25. En deuxième lieu, en vertu de l'article L. 151-5 du code de l'urbanisme, le projet d'aménagement et de développement durables du plan local d'urbanisme définit notamment " Les orientations générales des politiques d'aménagement, d'équipement, d'urbanisme, de paysage, de protection des espaces naturels, agricoles et forestiers, et de préservation ou de remise en bon état des continuités écologiques " et " fixe des objectifs chiffrés de modération de la consommation de l'espace et de lutte contre l'étalement urbain ". Aux termes de l'article L. 151-8 du code de l'urbanisme : " Le règlement fixe, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols permettant d'atteindre les objectifs mentionnés aux articles L. 101-1 à L. 101-3 ". En vertu de l'article L. 151-9 du même code : " Le règlement délimite les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger. / Il peut préciser l'affectation des sols selon les usages principaux qui peuvent en être faits ou la nature des activités qui peuvent y être exercées et également prévoir l'interdiction de construire. / Il peut définir, en fonction des situations locales, les règles concernant la destination et la nature des constructions autorisées ".

26. Pour apprécier la cohérence ainsi exigée au sein du plan local d'urbanisme entre le règlement et le projet d'aménagement et de développement durables, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle du territoire couvert par le document d'urbanisme, si le règlement ne contrarie pas les orientations générales et objectifs que les auteurs du document ont définis dans le projet d'aménagement et de développement durables, compte tenu de leur degré de précision. Par suite, l'inadéquation d'une disposition du règlement du plan local d'urbanisme à une orientation ou un objectif du projet d'aménagement et de développement durables ne suffit pas nécessairement, compte tenu de l'existence d'autres orientations ou objectifs au sein de ce projet, à caractériser une incohérence entre ce règlement et ce projet.

27. Il ressort du projet d'aménagement et de développement durable (PADD) du PLUi, que ses auteurs ont entendu renforcer et accompagner le dynamisme économique et favoriser une variété d'activités, citant, parmi les " forces vives du territoire ", l'industrie automobile. Ils ont également entendu construire une métropole du " bien-être " au service de ses habitants intégrant la santé et la gestion des risques dans les projets, et en limitant les nuisances. Comme il a été dit au point 13, les parcelles cadastrées section B nos 541, 542 et 1188 sont classées pour l'essentiel en zone UI1g du PLUi de Rennes Métropole.

28. Les requérants font valoir que le classement des parcelles en litige en zone UI1g du PLUi sont incohérentes avec le PADD. Toutefois, il résulte du PADD que si le PLUi a entendu intégrer la santé et la gestion des risques dans les projets, il a également entendu préserver le dynamisme économique du territoire notamment s'agissant de l'industrie automobile. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que les parcelles de l'opération contestée sont situées en continuité de la zone d'activités " Le Boulais " existante et qui supporte déjà une dizaine de constructions. Par ailleurs, le seul classement en zone UI1g du PLUi des parcelles en cause n'est pas, par lui-même, de nature à caractériser un risque de nuisance pour la santé et le bien être des riverains. Le moyen tiré de l'incohérence entre le règlement et le PADD du PLUi doit donc être écarté.

29. En troisième lieu, en vertu de l'article L. 152-1 du code de l'urbanisme : " L'exécution par toute personne publique ou privée de tous travaux, constructions, aménagements, plantations, affouillements ou exhaussements des sols, et ouverture d'installations classées appartenant aux catégories déterminées dans le plan sont conformes au règlement et à ses documents graphiques. / Ces travaux ou opérations sont, en outre, compatibles, lorsqu'elles existent, avec les orientations d'aménagement et de programmation. ".

30. Une autorisation d'urbanisme ne peut être légalement délivrée si les travaux qu'elle prévoit sont incompatibles avec les orientations d'aménagement et de programmation d'un plan local d'urbanisme et, en particulier, en contrarient les objectifs.

31. D'une part, il ne ressort pas des pièces du dossier que les parcelles de l'opération contestée seraient couvertes par une orientation d'aménagement et de programmation (OAP). D'autre part, la circonstance que les OAP à l'échelle de la commune d'Acigné prévoient l'extension future de la zone d'activité du Boulais au nord, sans toutefois circonscrire son périmètre, ne permet pas d'établir l'incompatibilité du règlement du PLUi en ce qu'il classe les parcelles en litige, situées à l'ouest de la zone d'activité du Boulais, au sein de la zone UI1g, avec ces orientations. Le moyen doit par suite être écarté.

32. En quatrième lieu, il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Ce faisant, ils ne sont pas liés, pour déterminer l'affectation future des divers secteurs, par les modalités existantes d'utilisation des sols, dont ils peuvent prévoir la modification dans l'intérêt de l'urbanisme. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.

33. Le règlement du PLUi indique que sont classées en UI1 les secteurs et parcs d'activités dédiés aux activités artisanales et industrielles. Cette zone comprend sept secteurs qui se distinguent par les destinations et sous-destinations des constructions qui y sont possibles.

34. Il ressort des pièces du dossier que les parcelles d'implantation de l'opération projetée, bordées par des voies de circulation sur deux côtés, sont situées en continuité de la zone d'activités du Boulais existante à l'ouest qui supporte plus d'une dizaine de constructions et du hameau du Boulais lequel comporte une vingtaine d'habitations implantées sur de vastes parcelles et qui se développe au nord et à l'est de la parcelle en litige. Ces parcelles, d'une superficie de 5 329 m², sont en outre séparées d'une zone agricole par la route départementale et à cet égard la circonstance qu'elles supportent une activité agricole, n'est pas de nature à établir l'illégalité alléguée. Par suite, compte tenu des partis d'aménagement retenus et de la localisation des parcelles, le moyen tiré de ce que le classement des parcelles cadastrées section B nos 541, 542 et 1188 en zone UI1g est entaché d'erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.

35. Il résulte de tout ce qui précède que Mme P... et autres ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.

Sur les frais liés au litige :

36. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune d'Acigné et de la SCI Pavillon Noir qui ne sont pas dans la présente instance les parties perdantes, la somme demandée par les requérants au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de Mme P... et autres une somme de 750 euros à verser à la commune d'Acigné et une somme de 750 euros à verser à la SCI Pavillon Noir au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme P... et autres est rejetée.

Article 2 : Mme P... et autres verseront ensemble à la commune d'Acigné et à la SCI Pavillon Noir une somme de 750 euros chacune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme K... P..., désignée représentante unique des requérants en application de l'article R.751-3 du code de justice administrative, à la commune d'Acigné et à la SCI Pavillon Noir.

Délibéré après l'audience du 24 octobre 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Degommier, président de chambre,

- M. Rivas, président-assesseur,

- Mme Dubost, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 novembre 2024.

La rapporteure,

A.-M. DUBOST

Le président,

S. DEGOMMIER

Le greffier,

C. GOY La République mande et ordonne au préfet d'Ille-et-Vilaine en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23NT00731


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NT00731
Date de la décision : 19/11/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DEGOMMIER
Rapporteur ?: Mme Anne-Maude DUBOST
Rapporteur public ?: M. FRANK
Avocat(s) : COIRIER

Origine de la décision
Date de l'import : 24/11/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-11-19;23nt00731 ?
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