Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme M... V..., M. J... B..., M. Q... F..., M. U... L..., M. C... I..., M. et Mme O... Q..., M. S... N..., Mme E... W..., Mme R... H... et M. K... P... ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 25 novembre 2020 par lequel la maire de Rennes a délivré à M. G... D... un permis de construire valant permis de démolir en vue de la construction d'un immeuble, ainsi que la décision implicite de rejet de leur recours gracieux.
Par un jugement n° 2102491 du 28 novembre 2022, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés les 27 janvier, 5 juin et 10 août 2023, M. Q... F..., M. J... B..., M. U... L..., M. C... I..., M. et Mme T..., M. S... N..., Mme E... W..., Mme R... H... et M. K... P..., représentés par Me Collet, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 28 novembre 2022 du tribunal administratif de Rennes ;
2°) d'annuler l'arrêté du 25 novembre 2020 de la maire de Rennes, ainsi que la décision implicite rejetant leur recours gracieux ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Rennes la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- en leur qualité de voisins immédiats du projet ils justifient d'un intérêt leur donnant qualité pour agir ;
- l'arrêté méconnaît l'article 1 du titre IV du règlement du plan local d'urbanisme intercommunal de Rennes métropole eu égard aux constructions d'intérêt local proches, à la localisation du projet en zone UP, au fait que le projet ne participe pas à la mise en valeur de ces constructions mais porte atteinte au patrimoine bâti proche ; il ne respecte pas l'ordonnancement existant et la composition des constructions identifiées comme d'intérêt local et ne les prend pas en compte dans sa conception ;
- il méconnaît l'article 4 du même règlement faute de prendre en compte la construction contiguë de l'ancien hôtel Oudin, alors qu'il se substitue à une construction constituant les communs de cet hôtel, ainsi que les autres constructions d'intérêt patrimonial identifiées à proximité ;
- il méconnaît les dispositions du même règlement applicables à la zone UP et l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme eu égard à l'intérêt des lieux illustré par un classement en zone UP ;
- il méconnait l'article 6 de ce règlement ; le coefficient de végétalisation n'est pas respecté dès lors que la voie de circulation ne peut être prise en compte dans ce calcul ;
- il méconnaît l'article 7 du même règlement ; le garage du projet est desservi par une voie privée qui n'est pas ouverte à la circulation publique ; l'accord des propriétaires de cette voie n'a pas été recueilli et il n'existe pas de servitude de passage ; l'accès au parking présente un risque pour les personnes ;
- il méconnaît l'article 8 du même règlement dès lors que l'allée privée n'est pas ouverte à la circulation ;
- il méconnait l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme s'agissant de l'accès au parking eu égard à la dangerosité des lieux.
Par un mémoire en défense, enregistré le 24 juillet 2023, la commune de Rennes, représentée par Me Donias, conclut au rejet de la requête, subsidiairement à ce qu'il soit fait application des articles L. 600-5 et L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, et demande de mettre à la charge des consorts F... une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par les consorts F... ne sont pas fondés.
Par des mémoires enregistrés les 6 avril et 24 juillet 2023, M. G... D..., représenté par Me Le Derf-Daniel, conclut au rejet de la requête et demande de mettre à la charge des consorts F... une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient :
- que les requêtes d'appel et de première instance sont irrecevables ; certains des requérants ne sont pas des voisins immédiats du projet et il n'est pas justifié de l'atteinte à leurs biens ;
- les moyens soulevés par les consorts F... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Rivas,
- les conclusions de M. Frank, rapporteur public,
- les observations de Me Collet, représentant les consorts F..., de Me Le Guennec, substituant Me Donias, représentant la commune de Rennes et de Me Cadic représentant M. D....
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 25 novembre 2020, la maire de Rennes a délivré à M. G... D... un permis ayant pour objet la démolition totale du bâti existant et la construction d'un immeuble sur une parcelle cadastrée BN 1026 située 4 ter, rue de la Palestine à Rennes. Par un jugement du 28 novembre 2022 le tribunal administratif de Rennes a rejeté la demande de Mme M... V..., de M. J... B..., de M. Q... F..., de M. U... L..., de M. C... I..., de M. et Mme O... T..., de M. S... N..., de Mme E... W..., de Mme R... H... et de M. K... P... tendant à l'annulation de cet arrêté et du rejet de leur recours gracieux. M. Q... F..., M. J... B..., M. U... L..., M. C... I..., M. et Mme T..., M. S... N..., Mme E... W..., Mme R... H... et M. K... P... relèvent appel de ce jugement.
Sur la fin de non-recevoir opposée à la requête d'appel :
2. Aux termes de l'article R. 811-1 du code de justice administrative : " Toute partie présente dans une instance devant le tribunal administratif ou qui y a été régulièrement appelée, alors même qu'elle n'aurait produit aucune défense, peut interjeter appel contre toute décision juridictionnelle rendue dans cette instance. (...) ".
3. M. F..., M. B..., M. L..., M. I..., M. et Mme T..., M. N..., Mme W..., Mme H... et M. P... étaient parties présentes devant le tribunal administratif de Rennes. Par suite, ils ont qualité pour faire appel du jugement du tribunal administratif de Rennes et la fin-de non-recevoir opposée en défense par M. D... ne peut être accueillie.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la recevabilité de la demande de première instance :
4. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre une décision relative à l'occupation ou à l'utilisation du sol régie par le présent code que si la construction, l'aménagement ou le projet autorisé sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation. (...) ".
5. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction.
6. D'une part, il ressort des pièces du dossier que tous les demandeurs de première instance sont des voisins immédiats du projet de construction contesté lequel, eu égard à sa hauteur et à sa localisation, sera visible depuis leurs propriétés respectives. D'autre part, la desserte automobile de l'immeuble autorisé est prévue par l'allée Adolphe Orain, voie privée en impasse, dont certains de ces demandeurs sont également riverains. Par suite, la fin de non-recevoir tirée de leur absence d'intérêt à agir opposée par M. D... ne peut être accueillie.
En ce qui concerne la légalité du permis de construire :
7. En premier lieu, aux termes de l'article 1 du titre IV du règlement du plan local d'urbanisme intercommunal de Rennes métropole applicable à toutes les zones : " Les règles d'implantation s'appliquent dans toutes les zones. Des dispositions spécifiques à chaque zone viennent compléter les règles générales et alternatives par des normes ou des règles qualitatives. / L'implantation des constructions doit tenir compte à la fois des règles spécifiques à chaque zone et du contexte géographique et patrimonial dans lequel elles s'insèrent. / L'implantation des nouvelles constructions à proximité d'un bâtiment identifié au patrimoine bâti d'intérêt local ou d'un Monument historique doit participer à la mise en valeur des édifices identifiés au titre du patrimoine. (...) ". Au sein de cette même partie du règlement applicable à toutes les zones, il est précisé " 4. Qualités architecturales des constructions / (...) Constructions contiguës à un bâtiment identifié au patrimoine bâti d'intérêt local ou à un monument historique / Dans les zones U, les constructions contiguës aux bâtiments (*) identifiés au titre du patrimoine bâti d'intérêt local ou au titre des Monuments historiques prennent en compte dans leur conception les caractéristiques patrimoniales des bâtiments (*) patrimoniaux. ".
8. Par ailleurs, ce même règlement précise, s'agissant de la zone UP, que cette zone " couvre les secteurs qui, par leur composition urbaine homogène et caractéristique du siècle dernier, constituent des ensembles patrimoniaux d'intérêt local qu'il convient de préserver en raison de leur valeur culturelle et historique. / Ces ensembles à dominante résidentielle, caractérisés par un tissu urbain aéré, est composé de typologies bâties spécifiques (hôtels particuliers et villas de qualité du XIXème siècle) et d'ensembles urbains assez homogènes. / (...) La préservation et la mise en valeur de ces secteurs n'interdisent pas toute évolution du bâti, mais supposent que les projets ne portent atteinte ni à l'homogénéité de leur composition urbaine, ni aux caractéristiques des éléments de patrimoine. / Les extensions et les nouvelles constructions s'insèrent dans le respect de l'ordonnancement existant et de la composition spécifique des hôtels particuliers et villas du XIXe siècle organisées le plus souvent avec une cour à l'avant et un jardin à l'arrière. / (...) L'aspect extérieur des constructions est travaillé en fonction des caractéristiques morphologiques du secteur en prenant en compte les ensembles bâtis homogènes dans lesquels se situe le projet ainsi que les spécificités des constructions avoisinantes. / Les constructions doivent présenter une simplicité de volume et une unité d'aspect des matériaux. Les projets peuvent présenter une conception contemporaine. / Les projets respectent les dominantes de composition (verticales et horizontales, rythmes des percements, pentes de toiture -2 ou 4 pans-). (...) ". Et aux termes de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales. ". Les dispositions précitées du plan local d'urbanisme intercommunal de Rennes métropole ont le même objet que celles de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme et posent des exigences qui ne sont pas moindres. Dès lors, c'est par rapport aux dispositions du règlement du plan local d'urbanisme que le juge doit apprécier, au terme d'un contrôle normal, la légalité de la décision contestée.
9. Il ressort des pièces du dossier que la construction autorisée est un immeuble en R+3 d'une hauteur de 14,50 mètres en son point le plus haut. Cette construction comprend sur trois de ses cotés des terrasses, pour certaines en porte-à-faux, et, sur sa partie ouest, en limite de la propriété avec la parcelle BN 1027, une tour d'une hauteur de 14,50 mètres assurant la desserte des différents niveaux de l'immeuble, un mur pignon aveugle d'une hauteur de 9,80 mètres, ainsi que des terrasses prolongeant certaines parties du bâtiment comprenant des habitations, lesquelles sont coiffées d'une toiture atteignant 13,95 mètres au faitage. Sur ce côté ouest, la largeur du mur comprenant la tour et le mur pignon est de 15,01 mètres. Cette tour est prévue, sur ce même coté, en pierres de schiste et majoritairement en briques grises, tandis que le mur pignon aveugle sera composé d'un socle en pierre de schiste surmonté pour l'essentiel de briques grises. Un toit plat est prévu au sommet de la tour, alors que le reste de la construction sera doté d'une couverture à quatre versants en zinc prépatiné. L'autorisation contestée prévoit par ailleurs sur le terrain d'assiette du projet, la démolition d'une maison existante en R + combles aménagées, située en continuité de la construction située sur la parcelle BN 1027, et d'un garage situé en fond de parcelle, accessible depuis l'allée Adolphe Orain.
10. La parcelle d'assiette du projet est située aux abords immédiats du parc du Thabor, en zone UP au plan local d'urbanisme intercommunal correspondant à un secteur qui " par sa composition urbaine homogène et caractéristique du siècle dernier, constitue un ensemble patrimonial d'intérêt local qu'il convient de préserver en raison de sa valeur culturelle et historique ". Elle est limitrophe à l'ouest, sur la parcelle BN 1027, d'une maison d'habitation, dite ancien hôtel Oudin, identifiée par ce même document comme " un édifice remarquable ou exceptionnel de grande qualité patrimoniale " correspondant " soit à des constructions singulières à l'échelle locale, soit à des constructions les plus représentatives d'une typologie locale. Il s'agit d'édifices non dénaturés ayant conservé une cohérence architecturale de la façade et des décors. ". Cette construction protégée est située à la croisée de quatre voies, dont deux des trois autres angles de ce carrefour supportent également des maisons identifiées au même titre. En limite est du terrain d'assiette du projet, rue de la Palestine, se trouve aussi une maison identifiée par le plan local d'urbanisme comme appartenant aux " édifices significatifs de qualité patrimoniale ". En outre, aux abords immédiats du projet, rue de la Palestine et boulevard de la Duchesse A..., plusieurs constructions sont protégées aux mêmes titres et appartiennent à la même zone UP. Cette zone, qui ne couvre pas la totalité de la rue de la Palestine, forme ainsi, au sens du plan local d'urbanisme intercommunal, un ensemble patrimonial d'intérêt local dont ses auteurs affirment qu'il convient de le préserver en raison de sa valeur culturelle et historique.
11. Il résulte de ce qui vient d'être exposé que l'arrêté contesté autorise la réalisation en limite immédiate de la parcelle supportant l'ancien hôtel Oudin d'un mur pignon d'une hauteur de 9,80 mètres prolongé par une tour de 14,60 mètres sur une largeur totale de 15,01 mètres. Cette construction se substitue à une maison d'habitation d'une hauteur limitée à R + combles aménagées, aux caractéristiques architecturales sur rue similaires à celles de l'ancien hôtel Oudin. Ainsi l'arrêté contesté permet l'édification d'un mur de brique pour l'essentiel qui, depuis la partie est de la rue de la Palestine, va limiter substantiellement la vue sur cette construction identifiée comme étant de grande qualité patrimoniale. De même, alors que la vue de l'arrière de cette même construction était jusque-là dégagée depuis l'espace public situé au sud du boulevard de la Duchesse A... et à l'angle avec la rue de la Palestine, permettant notamment d'apprécier ses volumes et son insertion par rapport aux autres constructions d'intérêt patrimonial proches, ce même mur situé en limite directe de la parcelle supportant l'hôtel Oudin, va fortement limiter ces vues et supprimer des perspectives. Il ressort également des pièces du dossier qu'eu égard à la configuration des lieux marquée par l'existence d'un carrefour et de dénivelés, la construction contestée sera particulièrement visible, depuis plusieurs endroits de ce même espace public. Par ailleurs le choix de la brique grise pour l'édification de l'essentiel du mur pignon aveugle est sans lien avec les moellons de schiste composant l'hôtel Oudin et la tour autorisée, à toit plat, rompt visuellement avec les nombreuses constructions protégées précitées. De plus, la façade de cette tour donnant sur la rue de la Palestine est caractérisée par de nombreuses baies vitrées, pour certaines continues sur toute la hauteur, sans rapport avec les constructions présentes à ses abords immédiats dans cette rue. Il en va de même de la réalisation de nombreuses terrasses ouvertes. L'existence de constructions de facture contemporaine aux abords immédiats du projet est à égard sans réelle incidence dès lors que la maison apparemment récente située en vis-à-vis du projet, rue de la Palestine, est de faible hauteur et largement dissimulée par un mur de pierre et que l'immeuble, situé allée Adolphe Orain, est localisé en deuxième rang par rapport à la rue de la Palestine. Nombre des autres constructions contemporaines situées à proximité et mentionnées par la commune ne sont pas en zone UP. Enfin, s'il ressort des pièces du dossier, notamment de la notice architecturale et des documents graphiques, que le pétitionnaire a cherché à prendre en compte l'ensemble du bâti homogène ancien proche dans lequel il se situe, l'implantation du projet, eu égard à ses caractéristiques précitées marquées notamment par d'importantes terrasses sur presque tout son pourtour, ne peut être regardée comme participant à la mise en valeur des édifices identifiés par les auteurs du plan local d'urbanisme intercommunal au titre du patrimoine.
12. Dans ces conditions, le projet autorisé étant de nature à porter atteinte à l'homogénéité de la composition urbaine dans lequel il s'inscrit et ne participant pas à la mise en valeur des édifices proches identifiés au titre du patrimoine par le plan local d'urbanisme intercommunal, dont l'ancien hôtel Oudin qu'il jouxte, les consorts F... sont fondés à soutenir que l'arrêté contesté est intervenu en méconnaissance des dispositions de l'article 1 du règlement précité ainsi que de celles citées au point 8 régissant les constructions sises en zone UP.
13. En second lieu, aux termes de l'article 4 du titre IV du règlement du plan local d'urbanisme intercommunal de Rennes métropole applicable à toutes les zones : " (...) Construction contiguë à un bâtiment identifié au patrimoine bâti d'intérêt local ou à un Monument historique. / Dans les zones U, les constructions contiguës aux bâtiments (*) identifiés au titre du patrimoine bâti d'intérêt local ou au titre des Monuments historiques prennent en compte dans leur conception les caractéristiques patrimoniales des bâtiments (*) patrimoniaux. (...) ".
14. Il ressort des pièces du dossier que l'hôtel Oudin précité, identifié au titre du patrimoine bâti d'intérêt local, se prolonge rue de la Palestine, jusqu'en limite du terrain d'assiette du projet autorisé, par un garage automobile au linteau commun. Il en résulte que le projet d'immeuble contesté, implanté à cet endroit en limite de propriété, est contigu de cette construction. Par ailleurs pour les motifs exposés précédemment, essentiellement en raison des caractéristiques de l'immeuble autorisé marquées par l'existence d'une haute tour, largement vitrée, de nombreuses terrasses et l'édification d'un mur aveugle d'une hauteur conséquente essentiellement constitué en briques grises en limite séparative de la parcelle supportant l'hôtel Oudin, il n'est pas établi que la construction autorisée aurait pris en compte les caractéristiques patrimoniales de ladite construction contiguë. Par suite, M. F... et autres sont fondés à soutenir que l'arrêté contesté méconnait les dispositions précitées en ce qu'elles imposent en pareille hypothèse de contiguïté de prendre en compte lesdites caractéristiques patrimoniales des bâtiments patrimoniaux contigus.
15. Pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme aucun autre moyen n'apparait susceptible, en l'état de l'instruction, de fonder l'annulation de l'arrêté attaqué et de la décision de rejet du recours gracieux de M. F... et autres.
Sur l'application des articles L. 600-5 et L. 600-5-1 du code de justice administrative :
16. Aux termes de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en œuvre de l'article L. 600-5-1, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice n'affectant qu'une partie du projet peut être régularisé, limite à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce et, le cas échéant, fixe le délai dans lequel le titulaire de l'autorisation pourra en demander la régularisation, même après l'achèvement des travaux. Le refus par le juge de faire droit à une demande d'annulation partielle est motivé. ". Aux termes de l'article L. 600- 5-1 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en œuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis (...) d'aménager, (...) estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. ".
17. Il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux parlementaires, que lorsque le ou les vices affectant la légalité de l'autorisation d'urbanisme dont l'annulation est demandée, sont susceptibles d'être régularisés, le juge doit surseoir à statuer sur les conclusions dont il est saisi contre cette autorisation. Il invite au préalable les parties à présenter leurs observations sur la possibilité de régulariser le ou les vices affectant la légalité de l'autorisation d'urbanisme. Le juge n'est toutefois pas tenu de surseoir à statuer, d'une part, si les conditions de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme sont réunies et qu'il fait le choix d'y recourir, d'autre part, si le bénéficiaire de l'autorisation lui a indiqué qu'il ne souhaitait pas bénéficier d'une mesure de régularisation. Un vice entachant le bien-fondé de l'autorisation d'urbanisme est susceptible d'être régularisé, même si cette régularisation implique de revoir l'économie générale du projet en cause, dès lors que les règles d'urbanisme en vigueur à la date à laquelle le juge statue permettent une mesure de régularisation qui n'implique pas d'apporter à ce projet un bouleversement tel qu'il en changerait la nature même.
18. D'une part les vices mentionnés aux points 12 et 14, tirés de ce que le permis de construire contesté méconnait les dispositions des articles 1 et 4 du titre IV du règlement du plan local d'urbanisme intercommunal ainsi que celles régissant les constructions situées en zone UP de ce même plan ne sont pas relatifs à une partie identifiable du projet au sens des dispositions de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme. D'autre part, eu égard aux dimensions et aux caractéristiques du projet, ainsi qu'à sa localisation, la régularisation de ces vices implique de revoir l'économie générale du projet et d'y apporter un bouleversement tel qu'il en changerait la nature même. Dans ces conditions, et contrairement à ce que demande la commune, la cour ne peut faire application ni des dispositions de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme ni de celles de l'article L. 600-5-1 du même code.
19. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme F... et autres sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.
Sur les frais d'instance :
20. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à l'octroi d'une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens à la partie perdante. Il y a lieu, dès lors, de rejeter les conclusions présentées à ce titre par la commune de Rennes et par M. D.... En revanche, il convient, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Rennes, sur le fondement des mêmes dispositions, la somme de 1 500 euros à verser globalement à M. F..., M. B..., M. L..., M. I..., M. et Mme T..., M. N..., Mme W..., Mme H... et M. P... au titre des frais exposés par ces derniers.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 2102491 du 28 novembre 2022 du tribunal administratif de Rennes et l'arrêté du 25 novembre 2020 par lequel la maire de Rennes a délivré à M. D... un permis de construire valant permis de démolition, ainsi que la décision rejetant le recours gracieux des consorts F..., sont annulés.
Article 2 : La commune de Rennes versera à M. F..., M. B..., M. L..., M. I..., M. et Mme T..., M. N..., Mme W..., Mme H... et M. P... la somme globale de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Les conclusions de la commune de Rennes et de M. G... D... sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Q... F..., désigné représentant unique des requérants par leur conseil en application de l'article R. 751-3 du code de justice administrative, à la commune de Rennes et à M. G... D....
Copie en sera transmise au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Rennes en application de l'article R. 751-10 du code de justice administrative.
Délibéré après l'audience du 24 octobre 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Degommier, président de chambre,
- M. Rivas, président assesseur,
- Mme Ody, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 novembre 2024.
Le rapporteur,
C. RIVAS
Le président,
S. DEGOMMIER
Le greffier,
C. GOY
La République mande et ordonne au préfet d'Ille-et-Vilaine en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23NT00246