Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision implicite née le 11 octobre 2022 par laquelle la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé contre la décision du 19 juillet 2022 de l'autorité consulaire française à Bruxelles (Belgique) refusant de lui délivrer un visa d'entrée et de long séjour en qualité d'étudiant.
Par un jugement n° 2211814 du 30 janvier 2023, le tribunal administratif de Nantes a annulé cette décision et a enjoint au ministre de l'intérieur de délivrer à M. C... un visa d'entrée et de long séjour en qualité d'étudiant dans un délai d'un mois.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 24 février 2023 et 6 avril 2023, le ministre de l'intérieur, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Nantes.
Il soutient que :
- les premiers juges n'ont pas examiné sa demande de substitution de motifs ;
- M. C... ne dispose pas de ressources suffisantes pour financer son séjour en France ;
- son projet d'études manque de cohérence et de sérieux, ce qui révèle un risque de détournement de l'objet du visa à des fins migratoires.
Par un mémoire en défense, enregistré le 4 avril 2023, M. C..., représenté par Me Guilbaud, demande à la cour :
1°) de rejeter la requête du ministre de l'intérieur ;
2°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de lui délivrer le visa qu'il sollicite dans un délai de quinze jours ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la directive (UE) 2016/801 du Parlement européen et du Conseil du 11 mai 2016 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- l'instruction interministérielle relative aux demandes de visas de long séjour pour études dans le cadre de la directive UE 2016/801 du 4 juillet 2019 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Mas,
- et les observations de Me Guilbaud, représentant M. C....
Considérant ce qui suit :
1. Par un jugement du 30 janvier 2023, le tribunal administratif de Nantes a annulé, à la demande de M. C..., la décision implicite née le 11 octobre 2022 par laquelle la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé par M. C... à l'encontre de la décision du 19 juillet 2022 de l'autorité consulaire française à Bruxelles lui refusant la délivrance d'un visa d'entrée et de long séjour en qualité d'étudiant et a enjoint au ministre de l'intérieur de délivrer à M. C... le visa d'entrée et de long séjour sollicité, dans un délai d'un mois. Le ministre de l'intérieur relève appel de ce jugement.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Il résulte de l'examen du jugement attaqué que le tribunal administratif de Nantes n'a pas répondu à la demande de substitution de motifs, présentée dans son mémoire en défense par le ministre de l'intérieur, tirée de ce que la décision contestée peut être légalement fondée sur un autre motif tiré de ce que le manque de sérieux et de cohérence du projet d'études de M. C... révèle un risque de détournement de l'objet du visa à des fins migratoires, demande de substitution de motifs que le tribunal n'a pas davantage visée. Le jugement attaqué est donc entaché d'irrégularité sur ce point et doit être annulé.
3. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Nantes.
Sur la légalité de la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France :
4. L'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration dispose : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / (...) 8° Rejettent un recours administratif dont la présentation est obligatoire préalablement à tout recours contentieux en application d'une disposition législative ou réglementaire ". L'article L. 211-5 du même code dispose : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".
5. Il ressort de l'accusé de réception du recours formé par M. C... devant la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France que, pour rejeter la demande de visa d'entrée et de long séjour présentée par l'intéressé, la commission de recours s'est appropriée le motif de la décision du 19 juillet 2022 de l'autorité consulaire française à Bruxelles tiré de ce que : " Les informations communiquées pour justifier les conditions de séjour sont incomplètes et/ou ne sont pas fiables ".
6. Cette décision ne mentionne ainsi pas de manière suffisamment précise les considérations de fait sur lesquelles s'est fondée l'autorité administrative et ne met dès lors pas M. C... à même de contester utilement ces motifs. Cette décision est, par suite, insuffisamment motivée, en méconnaissance des dispositions législatives précitées.
7. Cette décision n'étant pas annulée pour un vice tenant aux motifs qui la fondent mais pour une irrégularité de forme, le ministre de l'intérieur ne peut utilement demander qu'il soit procédé à une substitution de motifs.
8. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la demande de M. C..., que ce dernier est fondé à demander l'annulation de la décision implicite de la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France née le 11 octobre 2022.
Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :
9. Eu égard aux motifs qui le fondent, l'exécution du présent arrêt n'implique pas nécessairement que le ministre de l'intérieur délivre à M. C... le visa qu'il sollicite, mais seulement qu'il se prononce à nouveau sur la demande de visa présentée par l'intéressé. Sur le fondement des dispositions de l'article L. 911-2 du code de justice administrative, il y a lieu de lui enjoindre d'y procéder dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les frais d'instance :
10. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par M. C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du 30 janvier 2023 du tribunal administratif de Nantes est annulé.
Article 2 : La décision implicite de la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France née le 11 octobre 2022 est annulée.
Article 3 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur de réexaminer la demande de visa présentée par M. C... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la demande présentée par M. C... ainsi que ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. A... C....
Délibéré après l'audience du 15 octobre 2024, à laquelle siégeaient :
- Mme Buffet, présidente de chambre,
- Mme Montes-Derouet, présidente-assesseure,
- M. Mas, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 novembre 2024.
Le rapporteur,
B. MASLa présidente,
C. BUFFET
La greffière,
M. B...
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23NT00515