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08/11/2024 | FRANCE | N°22NT03101

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 2ème chambre, 08 novembre 2024, 22NT03101


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme D... A... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler les décisions par lesquelles le maire de Bénouville, agissant au nom de l'Etat, et le préfet du Calvados ont implicitement rejeté sa demande tendant à l'établissement de procès-verbaux d'infraction aux législations de l'urbanisme et de l'environnement pour des faits relatifs à divers travaux réalisés sur des parcelles voisines de sa propriété.



Par un jugement n° 1700439 du 31 mai 2

018, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.



Par un arrêt n° 18NT02978 du 25...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... A... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler les décisions par lesquelles le maire de Bénouville, agissant au nom de l'Etat, et le préfet du Calvados ont implicitement rejeté sa demande tendant à l'établissement de procès-verbaux d'infraction aux législations de l'urbanisme et de l'environnement pour des faits relatifs à divers travaux réalisés sur des parcelles voisines de sa propriété.

Par un jugement n° 1700439 du 31 mai 2018, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 18NT02978 du 25 février 2022, la cour administrative d'appel de Nantes a annulé la décision implicite du préfet du Calvados et, en tant qu'elle porte sur la législation de l'urbanisme, la décision implicite du maire de Bénouville, agissant au nom de l'Etat, ainsi que, dans cette mesure, le jugement du 31 mai 2018 du tribunal administratif de Caen, a enjoint au maire de Bénouville, agissant au nom de l'Etat, et, en cas de carence de ce dernier, au préfet du Calvados, de faire dresser, en application des dispositions de l'article L. 480-1 du code de l'urbanisme, un procès-verbal d'infraction et d'en adresser une copie au ministère public, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt de la cour.

Procédure devant la cour :

Mme A... a présenté, le 23 mai 2022, une demande en vue d'obtenir l'exécution de de l'arrêt n° 18NT02978 rendu le 25 février 2022 par la cour.

Par une lettre du 1er août 2022, le président de la cour administrative d'appel a informé Mme A... du classement administratif de sa demande.

Par une lettre du 17 août 2022, Mme A..., représentée par Me Ferretti, a contesté la décision de classement administratif.

Par une ordonnance du 26 septembre 2022, le président de la cour administrative d'appel a décidé l'ouverture d'une procédure juridictionnelle.

Par un arrêt n°22NT03101 du 10 novembre 2023, la cour administrative d'appel de Nantes a prononcé une astreinte de 50 euros par jour à l'encontre de l'Etat, s'il ne justifiait pas avoir, dans le mois suivant la notification de cet arrêt, exécuté l'arrêt n° 18NT02978 du 25 février 2022, et ce jusqu'à la date à laquelle l'arrêt aurait reçu exécution.

Le 11 janvier 2024, la commune de Bénouville a transmis à la cour un procès-verbal, dressé le 21 novembre 2023, par lequel un agent assermenté de la direction départementale des territoires et de la mer du Calvados a constaté, sur la parcelle cadastrée à la section AK sous le n° 223, une infraction aux dispositions du f) de l'article R. 421-23 du code de l'urbanisme.

Par des mémoires enregistrés les 31 janvier et 3 avril 2024, Mme A..., représentée par Me Le Borgne, demande à la cour :

1°) d'enjoindre au préfet du Calvados de faire dresser un procès-verbal d'infraction et d'en adresser une copie au ministère public, dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

2°) de liquider l'astreinte prononcée par la cour administrative d'appel dans son arrêt du 10 novembre 2023.

Elle soutient que :

- le procès-verbal de constat d'infraction n'est pas complet ;

- il ne mentionne pas qu'il a été fait à la demande de Mme A... ;

- il n'indique pas que les travaux sont soumis à déclaration préalable en application de l'article R. 421-23 du code de l'urbanisme ;

- l'agent de la DDTM n'a pas précisé la hauteur des remblais mais a uniquement fourni une information sur la superficie de ces derniers sans que la surface ne soit précisément mesurée ;

- les deux photographies jointes au procès-verbal de constat ne sont ni légendées ni précisément localisées ; l'agent n'a pas pris la peine de mesurer la hauteur ou la superficie des remblais ;

- il n'est pas indiqué que les remblais ont été réalisés en méconnaissance du plan local d'urbanisme et du plan de prévention des risques inondations (PPRI) ce qui constitue une infraction aux dispositions du I de l'article L. 562-5 du code de l'environnement ;

- il convient d'enjoindre à l'Etat de réaliser un nouveau constat, en précisant la méthode à suivre pour parvenir à l'établissement d'un constat permettant aux autorités judiciaires de décider s'il convient d'engager des poursuites pénales à l'égard de M. B....

Par un mémoire, enregistré le 22 mars 2024, la commune de Bénouville, représentée par Me Labrusse, conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que :

- le procès-verbal de constat n'est pas incomplet ;

- l'exécution de l'arrêt rendu le 25 février 2022 par la cour n'impliquait pas de constater une infraction au code de l'environnement ;

- les règles du PPR multirisques n'ont pas été méconnues ; en tout état de cause, le moyen est inopérant à l'appui de la demande d'exécution de l'arrêt du 25 février 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Dias,

- les conclusions de M. Le Brun, rapporteur public,

- et les observations de Me Le Borgne, représentant Mme A....

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêt n° 18NT02978 du 25 février 2022, la cour administrative d'appel de Nantes a enjoint au maire de Bénouville, agissant au nom de l'Etat, et, en cas de carence de ce dernier, au préfet du Calvados, de faire dresser, en application des dispositions de l'article L. 480-1 du code de l'urbanisme, un procès-verbal de l'infraction, prévue à l'article L. 480-4 du même code commise par M. B..., aux dispositions du f ) de l'article R. 421-23 de ce code et d'en adresser une copie au ministère public, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt. Par un arrêt n°22NT03101 du 10 novembre 2023, la cour administrative d'appel de Nantes a prononcé une astreinte de 50 euros par jour à l'encontre de l'Etat, s'il n'avait pas justifié avoir, dans le mois suivant la notification de cet arrêt, exécuté l'arrêt n° 18NT02978 du 25 février 2022, et ce, jusqu'à la date à laquelle l'arrêt aurait reçu exécution.

2. D'une part, aux termes de l'article L. 911-6 du code de justice administrative : " L'astreinte est provisoire ou définitive. Elle doit être considérée comme provisoire à moins que la juridiction n'ait précisé son caractère définitif. Elle est indépendante des dommages et intérêts. ". Aux termes de l'article L. 911-7 du même code : " En cas d'inexécution totale ou partielle ou d'exécution tardive, la juridiction procède à la liquidation de l'astreinte qu'elle avait prononcée. / Sauf s'il est établi que l'inexécution de la décision provient d'un cas fortuit ou de force majeure, la juridiction ne peut modifier le taux de l'astreinte définitive lors de sa liquidation. / Elle peut modérer ou supprimer l'astreinte provisoire, même en cas d'inexécution constatée. ". Aux termes de l'article R. 921-7 du même code : " À compter de la date d'effet de l'astreinte prononcée, même à l'encontre d'une personne privée, par le tribunal administratif ou la cour administrative d'appel, le président de la juridiction ou le magistrat qu'il désigne, après avoir accompli le cas échéant de nouvelles diligences, fait part à la formation de jugement concernée de l'état d'avancement de l'exécution de la décision. La formation de jugement statue sur la liquidation de l'astreinte. / (...). ".

3. D'autre part, aux termes de l'article L. 480-1 du code de l'urbanisme : " Lorsque l'autorité administrative et, au cas où il est compétent pour délivrer les autorisations, le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale compétent ont connaissance d'une infraction de la nature de celles que prévoient les articles L. 480-4 et L. 610-1, ils sont tenus d'en faire dresser procès-verbal. / Copie du procès-verbal constatant une infraction est transmise sans délai au ministère public. ". Aux termes de l'article L. 480-4 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " Le fait d'exécuter des travaux mentionnés aux articles L. 421-1 à L. 421-5 en méconnaissance des obligations imposées par les titres Ier à VII du présent livre et les règlements pris pour leur application ou en méconnaissance des prescriptions imposées par un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou par la décision prise sur une déclaration préalable est puni d'une amende comprise entre 1 200 euros et un montant qui ne peut excéder, soit, dans le cas de construction d'une surface de plancher, une somme égale à 6 000 euros par mètre carré de surface construite, démolie ou rendue inutilisable au sens de l'article L. 430-2, soit, dans les autres cas, un montant de 300 000 euros. En cas de récidive, outre la peine d'amende ainsi définie un emprisonnement de six mois pourra être prononcé. / Les peines prévues à l'alinéa précédent peuvent être prononcées contre les utilisateurs du sol, les bénéficiaires des travaux, les architectes, les entrepreneurs ou autres personnes responsables de l'exécution desdits travaux. / (...) ". Aux termes de l'article R. 421-23 de ce code : " Doivent être précédés d'une déclaration préalable les travaux, installations et aménagements suivants : (...) f) A moins qu'ils ne soient nécessaires à l'exécution d'un permis de construire, les affouillements et exhaussements du sol dont la hauteur, s'il s'agit d'un exhaussement, ou la profondeur dans le cas d'un affouillement, excède deux mètres et qui portent sur une superficie supérieure ou égale à cent mètres carrés (...) ".

4. Il résulte de l'instruction que, le 21 novembre 2023, un agent assermenté de la direction départementale des territoires et de la mer (DDTM) du Calvados s'est déplacé au droit de la propriété de M. B..., sur la parcelle cadastrée à la section AK sous le n° 223, et qu'au terme de cette visite, réalisée en présence de ce dernier, il a dressé un procès-verbal par lequel il certifie avoir constaté sur cette propriété qu'il a été procédé à des exhaussements de sol d'une surface supérieure à 100 m² et que le fossé achevé en 2016 a été comblé avec de la terre végétale, et précise que ces travaux ont été entrepris sans autorisation, en méconnaissance des dispositions du f) de l'article R. 421-23 du code de l'urbanisme, et que les faits ainsi constatés constituent un délit prévu et réprimé par les articles L. 480-4 et suivants du code de l'urbanisme. D'une part, par son arrêt du 25 février 2022, la cour a annulé le refus du maire de Bénouville, agissant au nom de l'Etat, et du préfet du Calvados de dresser un procès-verbal d'infraction et a enjoint à ces autorités de dresser un tel procès-verbal au motif, non pas que les exhaussements litigieux constitueraient une infraction au I de l'article L. 562-5 du code de l'environnement, mais qu'ils sont constitutifs de l'infraction prévue à l'article L. 480-4 du code de l'urbanisme. Par suite, la circonstance que le procès-verbal du 21 novembre 2023 ne constate pas l'existence d'une infraction au I de l'article L. 562-5 du code de l'environnement est sans incidence sur l'exécution de la chose jugée par l'arrêt rendu le 25 février 2022 par la cour. D'autre part, si le procès-verbal ne précise pas la hauteur des exhaussements constatés sur la parcelle litigieuse, il indique expressément que les dispositions du f) de l'article R. 421-23 du code de l'urbanisme ont été méconnues de sorte que l'agent assermenté a nécessairement constaté des exhaussements d'une hauteur supérieure à celle de deux mètres fixée par ces dispositions. Au regard du contenu de ce constat, les services du préfet du Calvados ont pris les mesures propres à assurer l'exécution de l'arrêt du 25 février 2022 de la cour, dans le délai imparti par l'arrêt du 10 novembre 2023. Il n'y a pas lieu, dès lors, de procéder à la liquidation de l'astreinte prononcée par ce dernier arrêt. Pour les mêmes motifs, les conclusions présentées par Mme A... tendant à majorer le montant de cette astreinte doivent être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de liquider l'astreinte prononcée à l'encontre de l'Etat par l'arrêt du 10 novembre 2023 de la cour administrative d'appel de Nantes.

Article 2 : Les conclusions présentées par Mme A... tendant à majorer le montant de l'astreinte prononcée à l'encontre de l'Etat sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... A... et au ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques.

Une copie en sera transmise au préfet du Calvados et à la commune de Bénouville.

Délibéré après l'audience du 15 octobre 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Buffet, présidente de chambre

- Mme Montes-Derouet, présidente-assesseure,

- M. Dias, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 novembre 2024.

Le rapporteur,

R. DIAS

La présidente,

C. BUFFETLa greffière,

M. C...

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22NT03101


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NT03101
Date de la décision : 08/11/2024
Type de recours : Exécution décision justice adm

Composition du Tribunal
Président : Mme BUFFET
Rapporteur ?: M. Romain DIAS
Rapporteur public ?: M. LE BRUN
Avocat(s) : TASCIYAN

Origine de la décision
Date de l'import : 17/11/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-11-08;22nt03101 ?
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