Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 20 mars 2024 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a décidé son transfert aux autorités belges et d'enjoindre à celui-ci, à titre principal, de lui délivrer une attestation de demande d'asile en procédure normale, et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation.
Par un jugement n° 2406048 du 6 mai 2024, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a annulé cet arrêté préfectoral, et a enjoint au préfet de Maine-et-Loire de réexaminer la situation de M. B... dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement.
Procédures devant la cour :
I. Par une requête, enregistrée le 5 juin 2024 sous le n° 24NT01687, le préfet de Maine-et-Loire demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes du 6 mai 2024 ;
2°) de rejeter la demande de première instance de M. B....
Il soutient que l'agent ayant mené l'entretien de M. B... doit être considéré comme étant une personne habilitée et qualifiée conformément à l'article 5 du règlement Dublin III et qu'aucun autre moyen soulevé par M. B... n'est fondé.
Par un mémoire, enregistré le 11 septembre 2024, M. B..., représenté par Me Blin, conclut à titre principal au non-lieu à statuer et à titre subsidiaire, au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la préfecture de Maine-et-Loire a exécuté le jugement attaqué et M. B... a été convoqué le 27 juin 2024 pour enregistrer sa demande d'asile en procédure normale ;
- le moyen soulevé par le préfet de Maine-et-Loire n'est pas fondé.
M. B... a été maintenu au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 13 septembre 2024.
II. Par une requête, enregistrée le 5 juin 2024 sous le n° 24NT01688, le préfet de Maine-et-Loire demande à la cour de prononcer le sursis à exécution du jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes du 6 mai 2024.
Il soutient que l'agent ayant mené l'entretien de M. B... doit être considéré comme étant une personne habilitée et qualifiée conformément à l'article 5 du règlement Dublin III.
Par un mémoire, enregistré le 11 septembre 2024, M. B..., représenté par Me Blin, conclut à titre principal au non-lieu à statuer et à titre subsidiaire, au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la préfecture de Maine-et-Loire a exécuté le jugement attaqué et M. B... a été convoqué le 27 juin 2024 pour enregistrer sa demande d'asile en procédure normale ;
- le moyen soulevé par le préfet de Maine-et-Loire n'est pas fondé.
M. B... a été maintenu au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 13 septembre 2024.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013 ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée relative à l'aide juridictionnelle ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Picquet,
- et les observations de Me Blin pour M. B....
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant guinéen né le 14 juin 1996, déclarant être entré irrégulièrement en France le 14 février 2024, s'est présenté en préfecture le 27 février 2024 pour solliciter son admission au séjour au titre de l'asile. Il a demandé au tribunal administratif de Nantes l'annulation de l'arrêté du 20 mars 2024 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a décidé son transfert aux autorités belges, responsables de l'examen de sa demande d'asile. Par un jugement du 6 mai 2024, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a annulé cet arrêté préfectoral, et a enjoint au préfet de Maine-et-Loire de réexaminer la situation de M. B... dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement. Le préfet de Maine-et-Loire, d'une part, fait appel de ce jugement et, d'autre part, demande à la cour de surseoir à son exécution.
2. Ces deux requêtes sont dirigées contre le même jugement et présentent à juger des questions semblables. Il y a lieu, dès lors, de les joindre pour statuer par un même arrêt.
Sur la requête n° 24NT01687 :
En ce qui concerne l'exception de non-lieu à statuer :
3. Il ressort des pièces du dossier qu'en exécution de l'injonction prononcée par le jugement attaqué du 6 mai 2024, la préfecture a délivré, le 27 juin 2024, à M. B..., une attestation de demande d'asile en procédure normale. Cette circonstance ne rend pas, toutefois, sans objet l'appel formé par le préfet de Maine-et-Loire contre ce jugement. L'exception de non-lieu à statuer opposée par M. B... doit donc être écartée.
En ce qui concerne le moyen accueilli par le tribunal :
4. Aux termes de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'Etat membre responsable, l'Etat membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4. / (...) 5. L'entretien individuel a lieu dans des conditions garantissant dûment la confidentialité. Il est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national. / 6. L'Etat membre qui mène l'entretien individuel rédige un résumé qui contient au moins les principales informations fournies par le demandeur lors de l'entretien. Ce résumé peut prendre la forme d'un rapport ou d'un formulaire type. (...) ".
5. Il ressort des mentions figurant sur le compte-rendu signé par M. B... qu'il a bénéficié le 27 février 2024, soit avant l'intervention de la décision contestée, de l'entretien individuel prévu par l'article 5 précité du règlement n° 604/2013. La seule circonstance que l'agent qui a conduit cet entretien est seulement identifié par la mention " Préfecture de la Loire-Atlantique - L'agent habilité ", sa signature et ses initiales manuscrites et la mention manuscrite " agent qualifié ", ne permet pas de tenir pour établi que cet entretien n'aurait pas été mené par une personne qualifiée en vertu du droit national. Enfin, il ressort du compte-rendu de cet entretien, effectué en français, eu égard aux détails précis qu'il expose, qu'il a permis à M. B... de faire état des informations utiles. Par suite, le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article 5 du règlement du 26 juin 2013 doit être écarté et c'est à tort que le premier juge a accueilli ce moyen pour annuler l'arrêté contesté.
6. Toutefois, il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. B... devant le tribunal administratif et devant la cour.
En ce qui concerne les autres moyens soulevés par M. B... :
7. En premier lieu, l'arrêté contesté a été signé par M. Nicolas Brochard, secrétaire administratif de classe exceptionnelle, adjoint à la cheffe de pôle régional Dublin de la préfecture de Maine-et-Loire. A la date de cet arrêté, M. G... disposait, en vertu d'un arrêté du préfet de Maine-et-Loire du 28 février 2024, publié le même jour au recueil des actes administratifs de l'Etat dans ce département, d'une délégation de signature lui permettant de signer au nom du préfet les décisions portant transfert de ressortissants étrangers vers l'Etat responsable de l'examen de la demande d'asile, en cas d'absence ou d'empêchement de M. C... F..., directeur de l'immigration et des relations avec les usagers, et de Mme D... H..., cheffe du pôle régional Dublin, dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'ils n'auraient pas, à cette même date, été absents ou empêchés. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté contesté doit être écarté.
8. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 572-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) l'étranger dont l'examen de la demande d'asile relève de la responsabilité d'un autre Etat peut faire l'objet d'un transfert vers l'Etat responsable de cet examen. / Toute décision de transfert fait l'objet d'une décision écrite motivée prise par l'autorité administrative (...) ". Est suffisamment motivée une décision de transfert qui mentionne le règlement n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 et comprend l'indication des éléments de fait sur lesquels l'autorité administrative se fonde pour estimer que l'examen de la demande présentée devant elle relève de la responsabilité d'un autre Etat membre, une telle motivation permettant d'identifier le critère du règlement communautaire dont il est fait application.
9. Il ressort des termes de la décision contestée, qui vise notamment le 2 de l'article 7 et l'article 18 du règlement n° 604/2013 et l'article L. 572-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que M. B... est entré irrégulièrement le 14 février 2024 en France, où il a présenté une demande d'asile auprès du préfet de la Loire-Atlantique le 27 février 2024, que la consultation du fichier Eurodac a fait apparaître qu'il avait préalablement sollicité l'asile auprès des autorités belges. Elle précise que les autorités belges ont accepté leur responsabilité par accord du 7 mars 2024. Elle indique qu'en application du règlement précité, ces autorités doivent être regardées comme responsables de la demande d'asile de M. B.... Elle mentionne également que M. B... a déclaré être célibataire et ne pas avoir de membres de sa famille en France, et que les problèmes de santé dont il fait état ne sont pas assortis de justificatifs médicaux, et en tire pour conséquence que l'intéressé ne présente pas de vulnérabilité particulière et que la décision de transfert ne porte pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au sens de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Elle indique enfin que M. B... n'établit pas de risque personnel constituant une atteinte grave au droit d'asile en cas de remise aux autorités belges. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'insuffisance de la motivation de la décision contestée doit être écarté.
10. En troisième lieu, aux termes de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un Etat membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement, et notamment : /a) des objectifs du présent règlement et des conséquences de la présentation d'une autre demande dans un Etat membre différent ainsi que des conséquences du passage d'un Etat membre à un autre pendant les phases au cours desquelles l'Etat membre responsable en vertu du présent règlement est déterminé et la demande de protection internationale est examinée ; /b) des critères de détermination de l'Etat membre responsable, de la hiérarchie de ces critères au cours des différentes étapes de la procédure et de leur durée, y compris du fait qu'une demande de protection internationale introduite dans un Etat membre peut mener à la désignation de cet Etat membre comme responsable en vertu du présent règlement même si cette responsabilité n'est pas fondée sur ces critères ; /c) de l'entretien individuel en vertu de l'article 5 et de la possibilité de fournir des informations sur la présence de membres de la famille, de proches ou de tout autre parent dans les Etats membres, y compris des moyens par lesquels le demandeur peut fournir ces informations ; /d) de la possibilité de contester une décision de transfert et, le cas échéant, de demander une suspension du transfert ; /e) du fait que les autorités compétentes des Etats membres peuvent échanger des données le concernant aux seules fins d'exécuter leurs obligations découlant du présent règlement ; /f) de l'existence du droit d'accès aux données le concernant et du droit de demander que ces données soient rectifiées si elles sont inexactes ou supprimées si elles ont fait l'objet d'un traitement illicite, ainsi que des procédures à suivre pour exercer ces droits (...). /2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les Etats membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3. / Si c'est nécessaire à la bonne compréhension du demandeur, les informations lui sont également communiquées oralement, par exemple lors de l'entretien individuel visé à l'article 5. (...) ".
11. Il résulte de ces dispositions que le demandeur d'asile auquel l'administration entend faire application du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit se voir remettre l'ensemble des éléments d'information prévus au paragraphe 1 de l'article 4 du règlement. La remise de ces éléments doit intervenir en temps utile pour lui permettre de faire valoir ses observations, c'est-à-dire au plus tard lors de l'entretien prévu par les dispositions de l'article 5 du même règlement, entretien qui doit notamment permettre de s'assurer qu'il a compris correctement ces informations. Eu égard à leur nature, la remise par l'autorité administrative de ces informations prévues par les dispositions précitées constitue pour le demandeur d'asile une garantie.
12. Il ressort des pièces du dossier que M. B... s'est vu remettre, le 27 février 2024, le jour même de l'enregistrement de sa demande d'asile en préfecture, et à l'occasion de l'entretien individuel, soit en temps utile, les brochures A et B, en langue française qu'il a déclaré comprendre, conformes aux modèles figurant à l'annexe X du règlement d'exécution (UE) n° 118/2014 de la Commission du 30 janvier 2014, dont il a signé les pages de garde, qui contiennent les informations prescrites par les dispositions précitées. M. B... a signé un compte-rendu d'entretien indiquant que les informations contenues dans ces brochures ont été portées oralement à sa connaissance. Enfin, il ressort de ce document que M. B... a eu le temps de s'exprimer sur sa situation. Dans ces conditions, son droit à l'information résultant de l'article 4 précité du règlement n° 604/2013 n'a pas été méconnu.
13. En quatrième lieu, aux termes du 2 de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'État membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre État membre peut être désigné comme responsable (...) ". Aux termes de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. / L'État membre qui décide d'examiner une demande de protection internationale en vertu du présent paragraphe devient l'État membre responsable et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité. (...) ". Par ailleurs, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
14. Ces dispositions doivent être appliquées dans le respect des droits garantis par la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par ailleurs, eu égard au niveau de protection des libertés et des droits fondamentaux dans les Etats membres de l'Union européenne, lorsque la demande de protection internationale a été introduite dans un Etat autre que la France, que cet Etat a accepté de prendre ou de reprendre en charge le demandeur et en l'absence de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, les craintes dont le demandeur fait état quant au défaut de protection dans cet Etat membre doivent en principe être présumées non fondées, sauf à ce que l'intéressé apporte, par tout moyen, la preuve contraire. La seule circonstance qu'à la suite du rejet de sa demande de protection par cet Etat membre l'intéressé serait susceptible de faire l'objet d'une mesure d'éloignement ne saurait caractériser la méconnaissance par cet Etat de ses obligations.
15. D'une part, il ne ressort pas des pièces du dossier ni des termes de l'arrêté contesté que le préfet de Maine-et-Loire ait entaché cet arrêté d'un défaut d'examen particulier de la situation personnelle de M. B... et, particulièrement, de sa vulnérabilité.
16. D'autre part, si M. B... soutient qu'en cas de transfert vers la Belgique, il risque d'être éloigné, par ricochet, vers son pays d'origine, la Guinée, où il encourt des traitements inhumains et dégradants contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ces circonstances, qui ne sont pas susceptibles de caractériser la méconnaissance par la Belgique de ses obligations quant au traitement de sa demande de protection, sont inopérantes. Le requérant n'établit ni l'existence de défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs d'asile en Belgique à la date de l'arrêté litigieux, alors que ce pays est un Etat membre de l'Union européenne, partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New-York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni qu'il ne pourrait y faire valoir tout nouvel élément concernant tant sa situation personnelle que celle qui sévit en Guinée. A cet égard, les articles de presse faisant état de l'engorgement des structures d'accueil liés à des afflux importants de demandeurs d'asile et le jugement du tribunal de première instance francophone de Bruxelles du 26 juin 2023, qui n'émane que d'une juridiction interne, ne sauraient être regardés comme suffisants pour établir de telles défaillances systémiques au sens du règlement communautaire précité, alors même que le tribunal condamne l'Etat belge à mettre un terme à " la violation systémique du droit de l'Union en matière d'accueil ". Si, au vu d'un communiqué de presse du 29 août 2023, la secrétaire d'État à l'asile et la migration belge a décidé de réserver les places d'accueil aux familles avec enfants et de ne plus accueillir temporairement de demandeurs d'asile qui sont des hommes seuls, l'exécution de cette décision a été suspendue par une décision du Conseil d'Etat belge du 13 septembre 2023. Alors même que la presse a relaté les déclarations de la secrétaire d'Etat indiquant qu'elle ne " changerait pas sa politique ", il n'est pas établi que les hommes seuls seraient, de manière systémique, exclus du dispositif d'accueil des demandeurs d'asile. L'arrêt n° 49255/22 du 18 juillet 2023 E... contre Belgique de la cour européenne des droits de l'homme, qui constate une violation du seul article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ne mentionne qu'une " carence systémique des autorités belges d'exécuter les décisions de justice définitives relatives à l'accueil des demandeurs de protection internationale ", au regard d'un délai de trois mois et demi mis à l'exécution de l'ordonnance d'un juge belge pour que M. E... obtienne une offre d'hébergement de l'Agence fédérale pour l'accueil des demandeurs d'asile " Fedasil ", ainsi qu'un " problème systémique concernant la capacité des autorités à se conformer à la propre législation interne de la Belgique sur le droit à l'hébergement des demandeurs d'asile y compris aux décisions de justice définitives en ordonnant le respect " qui ne peuvent être regardés comme constituant des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs au sens du règlement communautaire précité. Les seules circonstances qu'il aurait subi des persécutions en Guinée, est demandeur d'asile, souffre d'une hépatite B, et est dans l'attente des résultats d'une échographie réalisée postérieurement à l'arrêté litigieux, ne suffisent pas, en l'absence d'éléments étayés, à le placer dans une situation d'exceptionnelle vulnérabilité justifiant que sa demande d'asile soit instruite en France. Par suite, les moyens tirés de ce que la décision litigieuse serait contraire au §2 de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, aux articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et à l'article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 doivent être écartés.
17. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de Maine-et-Loire est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président tribunal administratif de Nantes a annulé son arrêté du 20 mars 2024 pris à l'encontre de M. B... et lui a enjoint de réexaminer sa situation.
Sur la requête n° 24NT01688 :
18. Dès lors qu'il est statué par le présent arrêt sur les conclusions du recours du préfet de Maine-et-Loire tendant à l'annulation du jugement attaqué, les conclusions tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement sont privées d'objet. Il n'y a donc pas lieu d'y statuer.
Sur les frais liés au litige :
19. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat les sommes demandées par M. B... sur ce fondement.
DÉCIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête enregistrée sous le n° 24NT01688 tendant au sursis à exécution du jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes du 6 mai 2024.
Article 2 : Le jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes du 6 mai 2024 est annulé.
Article 3 : Les conclusions présentées par M. B... devant le tribunal administratif de Nantes et devant la cour sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à Me Blin et à M. A... B....
Une copie en sera transmise, pour information, au préfet de Maine-et-Loire.
Délibéré après l'audience du 24 septembre 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président,
- M. Derlange, président assesseur,
- Mme Picquet, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 octobre 2024.
La rapporteure,
P. PICQUET
Le président,
L. LAINÉ
Le greffier,
C. WOLF
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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Nos 24NT01687,24NT01688