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08/10/2024 | FRANCE | N°24NT00692

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 1ère chambre, 08 octobre 2024, 24NT00692


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 10 juin 2022 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.



Par un jugement n° 2209037 du 11 octobre 2023, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la requête.



Procédure devant la cour

:



Par une requête enregistrée le 7 mars 2024, M. A..., représenté par Me Bourgeois, demande à la cour ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 10 juin 2022 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2209037 du 11 octobre 2023, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 7 mars 2024, M. A..., représenté par Me Bourgeois, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes en date du 11 octobre

2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 10 juin 2022 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique de lui délivrer le titre de séjour sollicité ou, à défaut, de réexaminer sa demande dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir sous astreinte de 75 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros à son avocat au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

S'agissant de la décision de refus de séjour :

- la décision est entachée d'une erreur de fait qui a eu une influence sur la décision ;

- le préfet a méconnu les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et a commis une erreur manifeste d'appréciation ; l'ensemble de ses liens personnels et familiaux se trouvent en France ; il assure l'entretien et l'éducation de ses trois enfants ;

- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision porte atteinte au droit protégé par le paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ;

S'agissant de la décision portant obligations de quitter le territoire français :

- cette décision doit être annulée par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;

- la décision porte atteinte au droit protégé par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision porte atteinte au droit protégé par les stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ;

S'agissant de la décision fixant le délai de départ volontaire :

- cette décision doit être annulée par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;

S'agissant de la décision fixant le pays de destination :

- cette décision doit être annulée par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;

- la décision est entache d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense enregistré le 30 mai 2024, le préfet de la Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 13 mai 2024.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Viéville a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A..., ressortissant angolais né le 25 mai 1987, a déclaré être entré en France, muni d'un visa de court séjour, via le Portugal, le 14 mai 2021. Le 28 octobre 2021, il a demandé au préfet de la Loire-Atlantique la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant. Par un arrêté du 10 juin 2022, le préfet a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et a fixé l'Angola comme pays de renvoi.

Par un jugement du 11 octobre 2023, le tribunal administratif de Nantes a rejeté le recours de M. A... contre cet arrêté. M. A... relève appel de ce jugement.

Sur la légalité de l'arrêté attaqué :

En ce qui concerne le refus de séjour :

2. En premier lieu, M A... soutient que le préfet a commis une erreur de fait en estimant qu'il ne rapportait pas la preuve qu'il était l'auteur de plusieurs virements effectués au profit de son épouse qui demeure sur le territoire français en situation régulière. Si M. A... justifie par les pièces qu'il produit être le débiteur de plusieurs virements qu'il a effectués depuis l'Angola au bénéfice de son épouse, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'erreur de fait ait exercé une quelconque influence sur le sens de la décision prise par le préfet et n'est par suite pas de nature à entrainer l'annulation du refus de séjour attaqué.

3. En deuxième lieu, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile par adoption du motif retenu par le tribunal administratif.

4. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, (...) ". M. A... soutient qu'il a rejoint la France en raison de l'éloignement de son épouse et de ses trois enfants mineurs, qu'il y réside avec eux depuis un an à la date de la décision attaquée après être entré sur le territoire régulièrement, qu'il assure l'entretien et l'éducation de ses trois enfants, qu'il connait parfaitement les valeurs de la République, a une parfaite maîtrise du français et n'est pas défavorablement connu des services de police ou de gendarmerie.

5. Cependant, M. A... s'est maintenu irrégulièrement en France au-delà de la durée de validité de son visa de court séjour alors qu'il a décidé de rejoindre sa famille sans attendre l'issue de la procédure de regroupement familial qui avait été initiée et ne pouvait donc ignorer que son maintien sur le territoire français n'était pas certain. L'intéressé ne précise pas les raisons pour lesquelles il est demeuré en Angola lorsque sa femme et ses enfants se sont installés en France en 2015. S'il justifie avoir effectué des transferts d'argent au bénéfice de son épouse entre octobre 2020 et août 2021, il ne produit aucun autre élément sur le maintien de ses liens avec sa famille durant cette période de séparation. Enfin, à la date de la décision attaquée, les deux époux ne justifiaient d'une durée de vie commune sur le territoire français que d'un an et un mois alors que M. A... a passé l'essentiel de son existence en Angola, où il a nécessairement conservé des attaches sociales et culturelles. Il suit de là que le moyen doit être écarté.

6. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "salarié", "travailleur temporaire" ou "vie privée et familiale" (...) ".

7. L'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précité permet la délivrance de deux titres de séjour de nature différente que sont, d'une part, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " et, d'autre part, la carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ". Il résulte de ces dispositions que le législateur a entendu laisser à l'administration un large pouvoir pour apprécier si l'admission au séjour d'un étranger répond à des considérations humanitaires ou si elle se justifie au regard des motifs exceptionnels que celui-ci fait valoir. Il appartient seulement au juge administratif, saisi d'un moyen en ce sens, de vérifier que l'administration n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation qu'elle a portée sur l'un ou l'autre de ces points.

8. M. A... rappelle sa situation maritale avec son épouse depuis 2019, la scolarisation de ses enfants et que sa situation irrégulière lui interdisant de travailler, il ne saurait lui être opposé un défaut d'insertion professionnelle. Ainsi, M. A... ne fait état d'aucune considération humanitaire ou motif exceptionnel, au sens des dispositions rappelées ci-dessus de l'article

L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de nature à justifier une admission exceptionnelle au séjour. Le moyen tiré de ce que le préfet de la Loire-Atlantique aurait entaché la décision attaquée d'une erreur manifeste d'appréciation en refusant de l'admettre exceptionnellement au séjour doit, par suite, être écarté.

9. En cinquième lieu, M. A... ne saurait utilement se prévaloir de l'atteinte portée au droit protégé par les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant à l'encontre de la décision portant refus de séjour dès lors que cette dernière décision n'a pas pour effet de l'obliger à quitter le territoire et de le séparer de ses enfants.

10. En sixième lieu, pour les motifs exposés précédemment, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation dans l'examen de sa situation personnelle.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

11. La décision portant refus de séjour n'étant pas annulée, M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation par voie de conséquence de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

12. Aux termes de l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La décision portant obligation de quitter le territoire français est motivée. / Dans le cas prévu au 3° de l'article L. 611-1, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour. (...) ".

13. Le moyen tiré de l'atteinte portée au droit protégé par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le moyen tiré de l'atteinte portée au droit protégé par les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5. M. A... n'est pas davantage fondé à soutenir qu'en l'obligeant à quitter le territoire français, le préfet aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de cette décision sur sa situation personnelle et familiale.

En ce qui concerne la décision fixant un délai de départ volontaire :

14. La décision portant refus de séjour n'étant pas annulée, M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation par voie de conséquence de la décision fixant un délai de départ volontaire.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

15. En premier lieu, dès lors que le présent arrêt rejette les conclusions dirigées contre la décision portant refus de titre de séjour, le moyen tiré de ce que l'annulation de cette décision devrait entrainer, par voie de conséquence, l'annulation de la décision fixant le pays de destination ne peut qu'être écarté.

16. En second lieu, M. A... soutient qu'au regard du système de santé existant en Angola, il ne bénéficiera pas de la même offre de soins qu'en France et ne sera donc plus en mesure de soigner sa maladie intestinale chronique. Toutefois, en se bornant à produire des ordonnances médicales et des résultats d'analyse, il n'établit pas qu'il serait dans l'impossibilité de bénéficier d'un suivi médical dans son pays d'origine. Par suite, le moyen doit être écarté.

17. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, le tribunal administratif de Nantes a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 10 juin 2022 du préfet de la Loire-Atlantique. Par voie de conséquence, les conclusions aux fins d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera adressée, pour information, au préfet de la Loire-Atlantique.

Délibéré après l'audience du 20 septembre 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Quillévéré, président de chambre,

- M. Geffray, président assesseur,

- M. Viéville, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 octobre 2024.

Le rapporteur

S. VIÉVILLELe président de chambre

G. QUILLÉVÉRÉ

La greffière

A. MARCHAIS

La République mande et ordonne ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 24NT0069202


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 24NT00692
Date de la décision : 08/10/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. QUILLÉVÉRÉ
Rapporteur ?: M. Sébastien VIEVILLE
Rapporteur public ?: M. BRASNU
Avocat(s) : BOURGEOIS

Origine de la décision
Date de l'import : 13/10/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-10-08;24nt00692 ?
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