Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre des années 2013, 2014 et 2015.
Par un jugement n° 2000622 du 9 juin 2023, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés les 28 juillet 2023 et 22 mars 2024, M. B..., représenté par Me Gavet, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer la décharge sollicitée ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 6 000 euros au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la reconstitution du chiffre d'affaires des " solides " de l'EURL Le Donegal doit être fondée sur une étude de marge produit par produit et une pondération de ces marges au regard des achats permettant de calculer une marge moyenne ; elle est radicalement viciée ou excessivement sommaire ;
- le taux de perte des bières à la pression doit être porté à 22 % au lieu de 7 % qui a été retenu par l'administration ;
- le taux de pertes et offerts doit être porté à 8 % sur les autres produits liquides ai lieu de 5 % qui a été retenu par l'administration ;
- la consommation du personnel de l'EURL Le Donegal, soit 12 euros hors taxes par jour et par personne, basée sur le prix d'une consommation de burgers et de sodas, doit être portée à
8 880 euros pour l'année 2013, 9 540 euros pour l'année 2014 et 9 000 euros pour l'année 2015, au lieu des montants retenus par l'administration, soit respectivement 3 619 euros, 3 650 euros et 3 726 euros ;
- à titre subsidiaire, le capital social de l'EURL Le Donegal s'élevant à plus de 7 700 euros, seul un montant de 770 euros par an pouvait être soumis aux prélèvements sociaux au regard des dispositions de l'article L. 131-6 du code de la sécurité sociale et de la jurisprudence du Conseil d'État.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 2 février et 5 avril 2024, le ministre de l'économie et des finances conclut à un non-lieu à statuer partiel compte tenu d'un dégrèvement intervenu en cours d'appel et au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la sécurité sociale ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Geffray,
- et les conclusions de M. Brasnu, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Après une vérification de comptabilité de l'EURL Le Donegal, dont M. B... est le gérant et l'associé unique, des rappels d'impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée ont été notifiés par l'administration à l'EURL le 14 décembre 2016, confirmés partiellement les 22 mars 2017 et 20 septembre 2017 et mis en recouvrement le 12 septembre 2018. Par une proposition de rectification du 14 décembre 2016, l'administration a regardé les omissions de recettes révélées par ce contrôle comme des revenus distribués imposables entre les mains de M. B..., en sa qualité de maître de l'affaire, en application des dispositions des 1° et 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts. Elle a imposé ces revenus selon la procédure contradictoire. M. B... a demandé au tribunal administratif de Nantes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre des années 2013, 2014 et 2015. Par un jugement du 9 juin 2023, dont M. B... relève appel, le tribunal a rejeté sa demande.
Sur l'étendue du litige :
2. Par une décision du 11 avril 2024, postérieure à l'introduction de la requête, l'administration a prononcé un dégrèvement de prélèvements sociaux, à concurrence de
1 185 euros en droits et 616 euros en pénalités au titre de l'année 2013, de 16 064 euros en droits et 7 581 euros en pénalités au titre de l'année 2014 et de 13 754 euros en droits et 5 830 euros en pénalités au titre de l'année 2015. Les conclusions de la requête de M. B... sont, dans ces mesures, devenues sans objet. Il n'y a pas, par suite, lieu d'y statuer.
Sur le bien-fondé des impositions supplémentaires :
En ce qui concerne le rejet de la comptabilité :
3. Il ne résulte pas de l'instruction que des tickets Z quotidiens, des doubles de tickets délivrés aux clients, des enregistrements sur le disque dur de la caisse enregistreuse lors de la vérification de comptabilité pour justifier les recettes de l'EURL Le Donegal ont été présentés pendant la vérification. Alors même que la caisse a disparu avant le début du contrôle sur place du fait d'un vol à la suite d'un cambriolage dans l'établissement donnant lieu à un dépôt de plainte enregistré le 10 octobre 2016, selon le gérant, aucune exploitation des données issues d'une mémoire de sauvegarde ou des enregistrements sur le système d'une telle mémoire n'a pu être effectuée. Les justificatifs de recettes présentés au service se sont caractérisés par une absence de détail des produits vendus tant au regard de la diversité des produits achetés auprès des fournisseurs que des produits proposés à la clientèle. Certains comptes bancaires ouverts au nom de l'EURL ne figuraient pas en comptabilité, affectant ainsi l'ensemble des opérations bancaires retracées au bilan. Compte tenu de ces éléments, c'est à bon droit que l'administration a rejeté la comptabilité de l'EURL en raison des graves irrégularités dont elle est entachée du fait de l'absence de valeur probante et de justification détaillée des recettes déclarées sur chacun des exercices vérifiés et d'information complète.
En ce qui concerne la reconstitution du chiffre d'affaires :
4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : " Lorsque l'une des commissions ou le comité mentionnés à l'article L. 59 est saisi d'un litige ou d'une rectification, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission ou le comité. / Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission ou du comité. (...) ". Il résulte de ces dispositions, conformément à leur finalité, que l'administration fiscale doit être regardée comme ayant établi l'imposition conformément à l'avis exprès de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires lorsqu'elle ne s'écarte, le cas échéant, de cet avis, que dans une mesure favorable au contribuable. Il en résulte également, lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités, que la charge de la preuve incombe au contribuable dès lors que l'administration doit ainsi être regardée comme ayant établi l'imposition conformément à l'avis exprès de la commission départementale des impôts.
5. En l'espèce, le montant des recettes de l'EURL Le Donegal reconstituées par l'administration a été fixé conformément à l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires. En application de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales, il appartient ainsi au contribuable d'apporter la preuve du caractère exagéré des redressements.
6. En second lieu, aux termes de l'article 93 du code général des impôts : " 1. Le bénéfice à retenir dans les bases de l'impôt sur le revenu est constitué par l'excédent des recettes totales sur les dépenses nécessitées par l'exercice de la profession. Sous réserve des dispositions de l'article 151 sexies, il tient compte des gains ou des pertes provenant soit de la réalisation des éléments d'actif affectés à l'exercice de la profession, soit des cessions de charges ou d'offices, ainsi que de toutes indemnités reçues en contrepartie de la cessation de l'exercice de la profession ou du transfert d'une clientèle [...] ".
7. Le contribuable à qui incombe la charge de prouver l'exagération d'une reconstitution de ses recettes peut, s'il n'est pas en mesure d'établir le montant exact de ses résultats en s'appuyant sur une comptabilité régulière et probante, soit critiquer la méthode d'évaluation que l'administration a suivie et qu'elle doit faire connaître au contribuable, en vue de démontrer que cette méthode aboutit, au moins sur certains points et pour un certain montant, a une exagération des bases d'imposition, soit encore, aux mêmes fins, soumettre à l'appréciation du juge une nouvelle méthode d'évaluation permettant de déterminer les bases d'imposition avec une précision meilleure que celle qui pouvait être atteinte par la méthode primitivement utilisée par l'administration. A l'appui de sa démonstration, il peut, en cours d'instance et à la faveur notamment d'une mesure d'instruction ordonnée par le juge, non seulement apporter tous les éléments de preuve comptables ou extracomptables, mais aussi se fonder sur des faits reconnus exacts par l'administration, ou dont le juge serait amené, en cas de contestation, à reconnaître l'exactitude.
S'agissant des " solides " (repas) :
8. Alors que l'administration a appliqué la méthode dite " des vins " compte tenu de la prédominance de l'activité de débit de boissons, puis a déterminé le chiffre d'affaires des seuls solides par extrapolation, M. B..., qui invoque le caractère excessivement sommaire et radicalement vicié de la reconstitution des chiffres d'affaires de l'EURL Le Donegal en ce qui concerne les solides, propose une méthode alternative de reconstitution du chiffre d'affaires des solides fondée sur une étude de marge produit par produit et une pondération de ces marges au regard des achats permettant de calculer une marge moyenne
9. En premier lieu, rien n'empêchait le vérificateur d'appliquer cette méthode dite " des vins " puis, faute d'éléments suffisants ou sérieux de comptabilité, d'extrapoler en matière de solides. M. B... n'est pas fondée à soutenir que cette méthode ne pourrait pas être appliquée en l'espèce du seul fait que la vente de boissons est prédominante dans la détermination de son chiffre d'affaires par rapport à la restauration.
10. En second lieu, la pondération par quantité vendue des solides est impossible à appliquer en l'absence d'éléments comptables probants.
11. Enfin, la comparaison des coefficients déclarés avec ceux de marge reconstituée à la suite des observations de l'EURL indique une différence très faible entre un coefficient reconstitué par l'administration de 1,66, 1,65 et 1,96 respectivement au titre des années 2013, 2014 et 2015 et un coefficient reconstitué par le comptable hors perte de 1,73 pour chaque année et avec perte de 1,63 pour chaque année. Ce faible écart démontre l'absence de tout caractère exagéré de la reconstitution du chiffre d'années au titre de chacune de ces trois années en litige. Ainsi, les prix et marges par produit solide, calculés dans la réponse à la proposition de rectification, confirment la marge reconstituée pour les solides alors que les calculs de marge que l'EURL propose ne sont pas assortis d'éléments probants et ne tiennent pas compte de l'évolution des prix d'achat entre 2013 et 2015. Comme elle l'a fait, l'administration devait prendre en compte la restauration dans la mesure où celle-ci représente environ 20 % du chiffre d'affaires dans la reconstitution globale. M. B... ne démontre donc pas que la restauration serait gérée de telle manière que le chiffre d'affaires de celle-ci serait inférieur à celui qui a été reconstitué. Il n'apporte pas la preuve que la reconstitution du chiffre d'affaires des " solides " est radicalement viciée ou excessivement sommaire.
S'agissant des " liquides " :
Quant aux taux de perte des bières à la pression :
12. L'EURL Le Donegal réalise près de 70% de son chiffre d'affaires grâce à la consommation de bières. Pour ce faire, elle dispose de neuf tirages de fûts, lesquels sont situés sous l'établissement et à près de onze ou douze mètres du tuyau qui les séparent des points de distribution de la bière. M. B... invoque le caractère insuffisant des spécificités d'exploitation relatives à la reconstitution des chiffres d'affaires " liquides " et demande la prise en compte d'un taux de perte des bières à la pression de 22 % au lieu de 7 % retenu par l'administration et, à cette fin, produit plusieurs constats d'huissier.
13. Il est loisible tant à l'administration fiscale dans le cadre des opérations de reconstitution de chiffre d'affaires qu'au contribuable pour critiquer la reconstitution ainsi opérée, de se référer aux données de l'activité d'exercices antérieurs ou postérieurs, pourvu que les conditions d'exploitation, établies par tout moyen, de ces exercices n'aient pas varié ou qu'elles puissent être ajustées pour tenir compte de leur évolution,
14. M. B... verse quatre constats d'huissiers. Les trois premiers constats réalisés les 5 juillet 2017, 22 mars 2018 29 mars 2018 qui respectivement indiquent un taux de perte de 21,67%, 22,5% et 21,88%, soit une moyenne de perte de 22%. Le quatrième et dernier constat dressé le 7 novembre 2018 après réfection totale de l'installation du tirage à neuf par le distributeur en septembre 2018 précise en revanche un taux de perte de 5%. Il résulte donc de ce dernier constat que la diminution sensible du taux de perte est liée au changement de l'installation du système, l'ancienne installation vétuste et défectueuse étant à l'origine des pertes significatives, ces caractéristiques étant renforcées par la longueur du tuyau de près de douze mètres. Dans ces conditions, M. B... est fondé à soutenir à soutenir que le taux de perte des bières à la pression est de 22% et non de 7%.
Quant au taux de pertes et offerts sur les autres produits :
15. M. B... demande la prise en compte d'un taux de pertes et offerts de 8 % sur les autres produits, faisant notamment valoir l'inexpérience des serveurs, l'absence de doseurs sur les bouteilles ou encore les offres promotionnelles telles que les " happy hours ". Ce taux, initialement fixé à 3 %, a été porté à 5 % après avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires afin de tenir compte des conditions d'exploitation de l'EURL. Toutefois, M. B... n'apporte pas d'éléments à l'appui de sa demande.
S'agissant de la consommation du personnel :
16. M. B..., en estimant la consommation de son personnel à 12 euros hors taxes par jour et par personne, basée sur le prix d'une consommation de burger et de sodas, demande que les montants en base soient portés à 8 880 euros pour l'année 2013, 9 540 euros pour l'année 2014 et 9 000 euros pour l'année 2015, au lieu des montants retenus par l'administration, soit respectivement 3 619 euros, 3 650 euros et 3 726 euros. Toutefois, d'une part, elle ne contredit pas l'administration qui affirme que les sommes qu'elle a retenues proviennent de sa comptabilité elle-même et ont été déclarées et, d'autre part, la méthode proposée par la requérante est dénuée de toute justification s'agissant du montant par journée travaillée, que M. B... évalue à 12 euros par salarié et par jour.
En ce qui concerne les revenus distribués :
17. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : / 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital (...) / 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices. (...) ". La qualité de seul maître de l'affaire suffit à regarder le contribuable comme bénéficiaire des revenus réputés distribués, en application du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, par la société en cause, la circonstance qu'il n'aurait pas effectivement appréhendé les sommes correspondantes ou qu'elles auraient été versées à des tiers étant sans incidence à cet égard.
18. Les impositions demeurant en litige procèdent de l'inclusion dans les revenus taxables entre les mains de M. B... dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, sur le fondement des dispositions précitées du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, de sommes correspondant à un rehaussement des bénéfices de l'EURL Le Donegal au titre de l'exercice clos en 2013, 2014 et 2015 et regardées comme des revenus distribués par cette entreprise à l'intéressé, que l'administration a considéré comme l'unique maître de l'affaire.
19. M. B... disposait du pouvoir d'engager juridiquement l'EURL Le Donegal à l'égard des tiers, détenait seul la gestion et la programmation de la caisse enregistreuse, dirigeait l'ensemble des opérations juridiques et économiques et disposait seul de la signature du compte bancaire de l'EURL. Ainsi, l'administration a pu légalement déduire de la qualité de seul maître de l'affaire de M. B... qu'il devait être regardé comme le bénéficiaire des revenus réputés distribués par l'EURL au regard des dispositions précitées du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts et ce, sans qu'il soit besoin d'examiner les mêmes revenus au regard de celles du 2° du 1 de l'article 109.
En ce qui concerne l'assiette des prélèvements sociaux :
20. D'une part, aux termes de l'article L. 131-6 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction issue de l'article 11 de la loi du 17 décembre 2012 de financement de sécurité sociale applicable aux revenus distribués ou payés à compter du 1er janvier 2013 : " Les cotisations d'assurance maladie et maternité, d'allocations familiales et d'assurance vieillesse des travailleurs indépendants non agricoles sont assises sur leur revenu d'activité non salarié (...). / Est également prise en compte, dans les conditions prévues au deuxième alinéa, la part des revenus mentionnés aux articles 108 à 115 du code général des impôts perçus par le travailleur non salarié non agricole, son conjoint ou le partenaire auquel il est lié par un pacte civil de solidarité ou leurs enfants mineurs non émancipés et des revenus visés au 4° de l'article 124 du même code qui est supérieure à 10 % du capital social et des primes d'émission et des sommes versées en compte courant détenus en toute propriété ou en usufruit par ces mêmes personnes. Un décret en Conseil d'Etat précise la nature des apports retenus pour la détermination du capital social au sens du présent alinéa ainsi que les modalités de prise en compte des sommes versées en compte courant (...) ". Aux termes de l'article L. 136-3 du même code dans sa rédaction alors applicable :
" Sont soumis à la contribution les revenus professionnels des travailleurs indépendants au sens de l'article L. 242-11. / La contribution est assise sur les revenus déterminés par application des dispositions de l'article L. 131-6 (...) ". Aux termes de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction alors applicable, relatif à la contribution sociale sur les revenus du patrimoine, aux dispositions duquel renvoient directement ou indirectement les articles 1600-0 C, 1600-0 F bis et 1600-0 G du code général des impôts relatifs à la contribution sociale généralisée, aux prélèvements sociaux et à la contribution au remboursement de la dette sociale : " I.- Les personnes physiques fiscalement domiciliées en France au sens de l'article 4 B du code général des impôts sont assujetties à une contribution sur les revenus du patrimoine assise sur le montant net retenu pour l'établissement de l'impôt sur le revenu, à l'exception de ceux ayant déjà supporté la contribution au titre des articles L. 136-3, L. 136-4 et L. 136-7 : (...) / c) Des revenus de capitaux mobiliers ; (...) III.- La contribution portant sur les revenus mentionnés aux I à II ci-dessus est assise, contrôlée et recouvrée selon les mêmes règles et sous les mêmes sûretés, privilèges et sanctions que l'impôt sur le revenu (...) ".
21. D'autre part, l'article R. 131-2 du code de la sécurité sociale, désormais codifié à l'article R. 131-7 du code de la sécurité sociale en application de l'article 1er du décret n° 2016-192 du 25 février 2016, dispose dans sa rédaction alors en vigueur : " Pour l'application du troisième alinéa de l'article L. 131-6 : / 1° Les apports retenus pour la détermination du capital social sont les apports en numéraire intégralement libérés et les apports en nature à l'exclusion de ceux constitués par des biens incorporels qui n'ont fait l'objet ni d'une transaction préalable en numéraire ni d'une évaluation par un commissaire aux apports ; / 2° Les sommes versées en compte courant correspondent au solde moyen annuel du compte courant d'associé. Ce solde moyen annuel est égal à la somme des soldes moyens du compte courant de chaque mois divisée par le nombre de mois compris dans l'exercice ; / 3° Le montant du capital social, des primes d'émission et des sommes versées en compte courant d'associé est apprécié au dernier jour de l'exercice précédant la distribution des revenus mentionnés aux articles 108 à 115 du code général des impôts et le versement des revenus visés au 4° de l'article 124 du même code ".
22. Il résulte de ces dispositions que, si les revenus distribués ont en principe le caractère de revenus des capitaux mobiliers passibles de la contribution sociale sur les revenus du patrimoine, la part de ces revenus perçue par le gérant majoritaire d'une société à responsabilité limitée, relevant en cette qualité du régime des travailleurs non-salariés non agricoles, son conjoint ou le partenaire auquel il est lié par un pacte civil de solidarité ou leurs enfants mineurs non émancipés, doit être regardée, pour son assujettissement aux prélèvements sociaux, comme des revenus d'activité pour leur fraction excédant 10 % du capital social et des primes d'émission ainsi que des sommes versées en compte courant. Cette fraction entrant ainsi dans le champ des contributions portant sur les revenus d'activité, elle ne saurait être soumise à celles assises sur les revenus du patrimoine.
23. M. B... relève, en sa qualité d'associé unique et gérant de l'EURL Le Donegal, du régime des travailleurs indépendants non agricoles. Ainsi, il résulte des dispositions précitées de l'article L. 131-6 du code de la sécurité sociale, dans leur version en vigueur à compter du 1er janvier 2013, que les revenus distribués à M. B..., provenant de l'EURL Le Donegal, au titre des années 2013, 2014 et 2015, doivent être regardés, pour leur assujettissement aux contributions sociales, comme des revenus d'activité pour leur fraction excédant 10 % du capital social déterminé à partir des apports en numéraire intégralement libérés, ainsi que des primes d'émission et des sommes versées en compte courant détenus par M. B....
24. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve au contribuable, il appartient au juge de l'impôt, au vu de l'instruction et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si la situation du contribuable entre dans le champ de l'assujettissement à l'impôt ou, le cas échéant, s'il remplit les conditions légales d'une exonération.
25. Si M. B... fait valoir que la fraction des revenus distribués au titre des années 2013, 2014 et 2015 excédant 10 % du capital social de l'EURL Le Donegal, soit la fraction excédant la somme de 770 euros au titre de chaque année, n'était pas passible des contributions sociales assises sur les revenus du patrimoine, il ne l'établit pas dès lors qu'il se borne à produire un extrait " Pappers " du registre national du commerce et des sociétés, au demeurant à jour du 27 juillet 2022, aux termes duquel le capital social s'élève à 7 700 euros. Dans ces conditions, alors qu'il est seul en mesure d'apporter les justifications nécessaires à la détermination de la fraction des revenus distribués excédant 10% du capital social de l'EURL Le Donegal, il n'est pas fondé à demander la réduction de l'assiette des contributions sociales sur les revenus du patrimoine.
26. Il résulte de ce qui précède que M. B... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par son jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes, n'a pas prononcé la décharge des impositions supplémentaires à l'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre des années 2013, 2014 et 2015 dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers compte tenu de la réduction des bases d'imposition de l'EURL Le Donegal au titre de l'exercice clos en 2013, 2014 et 2015 rappelée au point 14 ci-dessus.
27. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, pour l'essentiel, la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande M. B... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. B... à hauteur de 1 185 euros en droits et 616 euros en pénalités au titre de l'année 2013, de 16 064 euros en droits et 7 581 euros en pénalités au titre de l'année 2014 et de 13 754 euros en droits et 5 830 euros en pénalités au titre de l'année 2015.
Article 2 : M. B... est déchargé de la différence entre le montant des droits et pénalités des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre des années 2013, 2014 et 2015 dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers compte tenu de la réduction des bases d'imposition de l'EURL Le Donegal au titre des exercices clos en 2013, 2014 et 2015 rappelée au point 14 du présent arrêt.
Article 3 : Le jugement n° 2000622 du tribunal administratif de Nantes du 9 juin 2023 est réformé en ce qu'il est a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Délibéré après l'audience du 20 septembre 2024 à laquelle siégeaient :
- M. Quillévéré, président de chambre,
- M. Geffray, président-assesseur,
- M. Penhoat, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 octobre 2024.
Le rapporteur
J.E. GEFFRAYLe président de chambre
G. QUILLÉVÉRÉLa greffière
A. MARCHAIS
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 23NT0235302