Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 11 avril 2023 du préfet du Calvados portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant son pays de renvoi.
Par un jugement n° 2302692 du 19 janvier 2024, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 14 mai et 8 août 2024, Mme A..., représentée par Me Ndiaye, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 19 janvier 2024 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 11 avril 2023 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Calvados de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, qui renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et entaché son arrêté d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- son état de santé constitue, compte tenu de son âge, une circonstance humanitaire et un motif exceptionnel au sens de l'article L. 435-1 code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 juin 2024, le préfet du Calvados conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.
Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 16 avril 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Gélard, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A..., ressortissante de la République du Congo (Brazzaville), relève appel du jugement du 19 janvier 2024 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 avril 2024 du préfet du Calvados portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant son pays de renvoi.
2. Aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 (...) ".
3. Portant sur la délivrance des catégories de cartes de séjour temporaire prévues par les dispositions auxquelles il renvoie, l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'institue pas une catégorie de titres de séjour distincte mais est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France soit au titre de la vie privée et familiale, soit au titre d'une activité salariée. Il fixe ainsi, notamment, les conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France au titre d'une activité salariée. Il appartient au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation.
4. Mme A... se prévaut de sa présence en France depuis 2012 et de son état de santé. Il est toutefois constant que le titre de séjour qui lui avait été délivré à compter du 20 janvier 2014, en raison de son état de santé, n'a pas été renouvelé au-delà du 7 juillet 2018. A cet égard, si lors de la réunion de la commission départementale du titre de séjour qui s'est tenue le 24 février 2023, son conseil a indiqué qu'elle bénéficiait toujours d'une prise en charge médicale et médicamenteuse pour un état de stress post-traumatique et une hypertension artérielle sévère, les documents dont elle se prévaut ne permettent pas d'établir qu'à la date de la décision contestée ces pathologies se seraient aggravées. Il est d'ailleurs constant qu'à la suite du non renouvellement de ce titre de séjour, l'intéressée a fait l'objet, le 20 mai 2019, d'une obligation de quitter le territoire français, qu'elle n'a, au demeurant, pas exécutée, et que les recours dirigés contre cette décision ont été rejetés par le tribunal administratif de Caen le 24 septembre 2019 puis par la cour le 9 décembre 2019. Par ailleurs, si la requérante, qui est née en 1959, se prévaut de son insertion professionnelle en qualité d'agent d'entretien et de nettoyage jusqu'en 2019, la promesse d'embauche dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée qu'elle produit est datée du 6 avril 2021, et n'a pas été actualisée depuis cette date. Enfin, si Mme A... soutient être aidée financièrement par un frère et des neveux et nièces qui séjournent régulièrement en France, et souligne également ses actions de bénévolat, les seuls justificatifs ou attestations qu'elle produit ne suffisent pas à établir qu'elle aurait tissé, depuis son entrée en France, des liens personnels stables et d'une particulière intensité. Eu égard à l'ensemble de ces éléments, et en dépit de l'avis favorable émis par la commission départementale du titre de séjour, en refusant de régulariser la situation de l'intéressée, le préfet n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.
5. En second lieu, aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée./ Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance (...). ". Pour l'application de ces dispositions et stipulations, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.
6. Ainsi qu'il a été dit précédemment, Mme A..., qui n'est pas dépourvue de toutes attaches familiales dans son pays d'origine, où elle a vécu jusqu'à l'âge de cinquante-trois ans, et où résident ses trois enfants majeurs, s'est maintenue irrégulièrement sur le territoire français en dépit d'une mesure d'éloignement prise à son encontre en mai 2019. Elle ne justifie pas avoir noué en France depuis 2012 des liens personnels et amicaux d'une particulière intensité. Dans ces conditions, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision contestée porterait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale.
7. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande. Pour les mêmes motifs, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des articles 37 de la loi du 10 juillet 1971 modifiée, relative à l'aide juridique et L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'intérieur.
Une copie en sera transmise, pour information, au préfet du Calvados.
Délibéré après l'audience du 19 septembre 2024 à laquelle siégeaient :
- Mme Brisson, présidente de chambre,
- M. Vergne, président-assesseur,
- Mme Gélard, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 4 octobre 2024
La rapporteure,
V. GELARDLa présidente,
C. BRISSON
Le greffier,
Y. MARQUIS
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 24NT01410