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04/10/2024 | FRANCE | N°22NT03476

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 2ème chambre, 04 octobre 2024, 22NT03476


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. et Mme C... A... ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision implicite par laquelle la directrice générale de l'Agence nationale de l'habitat (ANAH) a rejeté leur recours administratif préalable obligatoire formé contre la décision du 21 mai 2021 refusant de leur accorder la subvention " MaPrimeRénov' ".



Par un jugement n° 2104874 du 16 septembre 2022, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.


> Procédure devant la cour :



Par une requête et un mémoire, enregistrés le 7 novembre 2022 et...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C... A... ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision implicite par laquelle la directrice générale de l'Agence nationale de l'habitat (ANAH) a rejeté leur recours administratif préalable obligatoire formé contre la décision du 21 mai 2021 refusant de leur accorder la subvention " MaPrimeRénov' ".

Par un jugement n° 2104874 du 16 septembre 2022, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 7 novembre 2022 et le 21 septembre 2023, M. et Mme A..., représentés par la société Via Avocats, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 16 septembre 2022 du tribunal administratif de Rennes ;

2°) d'annuler la décision de la directrice générale de l'ANAH leur refusant l'attribution de la prime de transition écologique ainsi que la décision implicite de cette autorité rejetant leur recours administratif préalable obligatoire contre la décision leur refusant cette subvention ;

3°) de mettre à la charge de l'ANAH une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. et Mme A... soutiennent que :

- le jugement attaqué est irrégulier ; le premier mémoire en défense de l'ANAH leur a été communiqué tardivement ;

- la décision contestée est entachée d'une erreur de fait ; les travaux ont commencé après le dépôt du dossier ;

- la décision contestée a été prise en méconnaissance des dispositions du 2° du II de l'article 2 du décret du 14 janvier 2020.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 août 2023, l'Agence nationale de l'habitat (ANAH), représentée par Me Seban, conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés par M. et Mme A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n°2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020 ;

- le décret n°2020-26 du 14 janvier 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Dias,

- les conclusions de M. Le Brun, rapporteur public,

- et les observations de Me Leduc représentant M. et Mme A....

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme A... ont sollicité l'octroi d'une subvention au titre du dispositif " MaPrimeRénov' " pour un projet d'installation d'une pompe à chaleur dans la maison d'habitation dont ils sont propriétaires et qu'ils occupent, sur le territoire de la commune de Noyal-Pontivy (Morbihan). Par une décision notifiée le 21 mai 2021, la directrice générale de l'Agence nationale de l'habitat (ANAH) a refusé d'accorder la subvention au motif que les travaux avaient été commencés avant le dépôt du dossier de demande. Le silence gardé pendant plus de deux mois par la directrice générale de l'ANAH sur le recours préalable obligatoire formé contre cette décision, et reçu le 25 mai 2021, a fait naître une décision implicite de rejet, le 25 juillet suivant. Par un jugement du 16 septembre 2022, le tribunal administratif de Rennes a rejeté la demande de M. et Mme A... tendant à l'annulation de cette décision. Les requérants relèvent appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 5 du code de justice administrative : " L'instruction des affaires est contradictoire. Les exigences de la contradiction sont adaptées à celles de l'urgence, du secret de la défense nationale et de la protection de la sécurité des personnes ". L'article R. 611-1 de ce code prévoit que : " La requête et les mémoires, ainsi que les pièces produites par les parties, sont déposés ou adressés au greffe. / La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes dans les conditions prévues aux articles

R. 611-2 à R. 611-6. / Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux ". Aux termes de l'article R. 613-2 du même code : " Si le président de la formation de jugement n'a pas pris une ordonnance de clôture, l'instruction est close trois jours francs avant la date de l'audience indiquée dans l'avis d'audience prévu à l'article R. 711-2. (...)".

3. Il ressort des pièces du dossier qu'alors qu'en application de l'article R. 613-2 du code de justice administrative, la clôture automatique d'instruction est intervenue trois jours francs avant l'audience, soit le lundi 29 août 2022 à 0 heures, le premier mémoire en défense de l'ANAH a été produit le jeudi 25 août 2022 et a été communiqué le même jour au conseil de M. et Mme A..., qui ne l'a toutefois reçu, via l'application " Télérecours ", que le vendredi 26 août 2022 à 10 heures 41, soit moins de deux jours ouvrés avant la clôture de l'instruction. Ce délai n'était pas suffisant pour que M. et Mme A... puissent en prendre connaissance et éventuellement y répondre par la production d'un nouveau mémoire avant la clôture de l'instruction. Les requérants sont, dès lors, fondés à soutenir que le caractère contradictoire de l'instruction a été méconnu. Par suite, le jugement attaqué doit être annulé.

4. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. et Mme A... devant le tribunal administratif de Rennes.

Sur la légalité de la décision implicite par laquelle la directrice générale de l'ANAH a rejeté le recours préalable obligatoire de M. et Mme A... :

5. Il ressort des pièces du dossier et notamment du mémoire en défense produit en première instance par l'ANAH, que la directrice générale de cette agence a refusé à M. et Mme A... le bénéfice de la prime de transition écologique au motif que les travaux avaient été commencés avant l'accusé de réception par l'ANAH de la demande de prime, et que les intéressés n'entraient dans aucune des dérogations leur permettant d'engager les travaux avant le dépôt de leur demande.

6. Aux termes de l'article 15 de la loi du 28 décembre 2019 de finances pour 2020, dans sa rédaction applicable à la date de la décision contestée : " (...) II.-Il est créé une prime de transition énergétique destinée à financer, sous conditions de ressources, des travaux et dépenses en faveur de la rénovation énergétique des logements. (...). Par dérogation, entre le 1er janvier 2021 et le 31 décembre 2021, le bénéficiaire peut déposer une demande de prime après avoir commencé ses travaux ou prestations, sous réserve que ceux-ci soient justifiés par un devis réalisé entre le 1er octobre 2020 et le 31 décembre 2020, qu'ils aient commencé au cours de cette même période et que le bénéficiaire ne soit pas éligible à la prime à la date de démarrage des travaux ou prestations. Les caractéristiques et conditions d'octroi de cette prime ne peuvent être moins favorables pour le bénéficiaire que celles régissant le crédit d'impôt prévu à l'article 200 quater du code général des impôts dans sa rédaction résultant de la présente loi. Elles sont définies par décret. (...) Les conditions et les modalités suivant lesquelles le directeur général de l'agence mentionnée à l'article L. 321-1 du code de la construction et de l'habitation attribue la prime, habilite les mandataires et prononce des sanctions sont définies par décret. / III.-A.-Les I et II s'appliquent aux dépenses payées à compter du 1er janvier 2020. (...). ".

7. Aux termes de l'article 1 du décret du 14 janvier 2020 relatif à la prime de transition énergétique dans sa rédaction applicable au litige : " (...) II.-Entre le 1er juillet 2021 et le 31 décembre 2022, la prime de transition énergétique peut être attribuée aux personnes physiques propriétaires ou titulaires d'un droit réel immobilier conférant l'usage d'un logement pour financer les dépenses en faveur de la rénovation énergétique du logement qu'ils donnent à bail dans les conditions suivantes : 1° le logement est loué à titre de résidence principale dans un délai de 6 mois suivant la date de paiement du solde de la prime ; / 2° le logement est loué à titre de résidence principale pendant une durée minimale de 5 ans à compter de la date du paiement du solde de la prime ; / 3° le logement ou l'immeuble concerné est achevé depuis plus de deux ans à la date de début des travaux et prestations ; / 4° Le propriétaire s'engage à informer son locataire de la réalisation de travaux financés par la prime ; / 5° Le propriétaire s'engage, dans le cas d'une éventuelle réévaluation du montant du loyer, à déduire le montant de la prime du montant des travaux d'amélioration ou de mise en conformité justifiant cette réévaluation et à en informer son locataire. (...) ".

8. Aux termes de l'article 2 du même décret : " (...) II.- Seuls les travaux et prestations commencés après l'accusé de réception par l'Agence nationale de l'habitat de la demande de prime y ouvrent droit. Cet accusé de réception ne vaut pas décision d'attribution de la prime. / (...) / Par dérogation au premier alinéa du présent II : / 1° entre le 1er janvier 2021 et le 31 décembre 2021, les personnes physiques propriétaires occupant leur logement et appartenant aux catégories mentionnées aux 3° et 4° de l'article 3 du présent décret peuvent déposer une demande après avoir commencé leurs travaux ou prestations du 1er octobre 2020 au 31 décembre 2020 sur la base d'un devis signé entre ces mêmes dates ; / 2° entre le 1er janvier 2021 et le 31 décembre 2021, les personnes physiques titulaires d'un droit réel immobilier conférant l'usage d'un logement peuvent déposer une demande après avoir commencé leurs travaux ou prestations du 1er octobre 2020 au 30 juin 2021 sur la base d'un devis signé entre ces mêmes dates ; / 3° entre le 1er juillet 2021 et le 31 décembre 2021, le bénéficiaire mentionné au II de l'article 1 du présent décret peut déposer une demande après avoir commencé ses travaux ou prestations du 1er octobre 2020 au 30 juin 2021 sur la base d'un devis signé entre ces mêmes dates ; / 4° entre le 1er janvier 2021 et le 31 décembre 2022, le bénéficiaire peut déposer une demande après avoir réalisé la prestation mentionnée au 8 ou 14 de l'annexe 1 du présent décret. (...) ".

9. Il ressort des pièces du dossier que l'ANAH a accusé réception, le 3 mai 2021, de la demande de prime déposée en ligne par M. et Mme A..., et qu'à cette date les travaux de fourniture et de pose d'une pompe à chaleur, pour le financement desquels la prime avait été demandée, avaient déjà été commencés, ainsi qu'il ressort de la facture établie le 23 avril 2021 par l'entreprise qui les a réalisés. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision contestée serait fondée sur des faits matériellement inexacts doit être écarté.

10. Par ailleurs, en tant que propriétaires de leur logement, M. et Mme A... ne peuvent être regardés comme " titulaires d'un droit réel immobilier conférant l'usage d'un logement ", et n'entrent donc pas dans le champ de la dérogation prévue au 2° du II de l'article 2 du décret du 14 janvier 2020. Dès lors qu'ils occupent le logement dont ils sont propriétaires, ils ne sont pas davantage au nombre des bénéficiaires " donnant à bail à leur logement " visés au 3° du même article. Enfin, M. et Mme A... n'établissent pas ni même n'allèguent relever des autres hypothèses énumérées à l'article 2 du décret du 14 janvier 2020, permettant de déroger à la règle prévue au même article selon laquelle seuls les travaux et prestations commencés après l'accusé de réception de la demande ouvrent droit à la prime. Le moyen tiré par M. et Mme A... de ce qu'ils pouvaient bénéficier d'une dérogation à cette règle doit, par suite, être écarté.

11. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à demander l'annulation de la décision contestée.

Sur les frais liés au litige :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Agence nationale de l'habitat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme demandée par M. et Mme A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du 16 septembre 2022 du tribunal administratif de Rennes est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. et Mme A... devant le tribunal administratif de Rennes est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme C... A... et à l'Agence nationale de l'habitat.

Délibéré après l'audience du 17 septembre 2024 , à laquelle siégeaient :

- Mme Buffet, présidente de chambre,

- Mme Montes-Derouet, présidente-assesseure,

- M. Dias, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 octobre 2024.

Le rapporteur,

R. DIAS

La présidente,

C. BUFFETLa greffière,

M. B...

La République mande et ordonne au ministre de la Transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques en ce qui les concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22NT03476


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NT03476
Date de la décision : 04/10/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BUFFET
Rapporteur ?: M. Romain DIAS
Rapporteur public ?: M. LE BRUN
Avocat(s) : CABINET SEBAN ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 13/10/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-10-04;22nt03476 ?
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