Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Les associations Eau et Rivières de Bretagne et Bretagne Vivante SEPNB ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 16 janvier 2023 du préfet du Morbihan portant enregistrement de l'installation de méthanisation de la société Centrale Biométhane du Roi Morvan, située à Lann Mine Braz, sur le territoire de la commune de Guiscriff et du plan d'épandage des digestats associé.
Par un jugement n° 2301766 du 30 novembre 2023, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et des mémoires enregistrés les 29 janvier, 1er mars, 13 mai, 10 juin et 29 juin 2024, ce dernier n'ayant pas été communiqué, les associations Eau et Rivières de Bretagne et Bretagne Vivante SEPNB, représentées par Me Dubreuil, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 30 novembre 2023 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 16 janvier 2023 du préfet du Morbihan portant enregistrement de l'installation de méthanisation de la société Centrale Biométhane du Roi Morvan, située à Lann Mine Braz, sur le territoire de la commune de Guiscriff et du plan d'épandage des digestats associé ;
3°) de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elles soutiennent que :
- le jugement attaqué est irrégulier dès lors qu'il est insuffisamment motivé ;
- les premiers juges ont omis de statuer sur les conclusions à fin de communication de l'étude floristique zones humides résultant de la visite de terrain du 28 mai 2021 par le bureau d'études ENCIS ;
- les premiers juges ont omis de statuer sur le moyen tiré de l'erreur de droit résultant de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 512-7-2 du code de l'environnement ;
- les premiers juges ont méconnu leurs obligations en matière d'instruction en ne prenant pas toute mesure utile afin de disposer des éléments nécessaires à la solution du litige ;
- l'arrêté contesté méconnait les dispositions de l'article L. 214-3 du code de l'environnement dès lors que le projet contesté conduit à la destruction d'une zone humide de plus d'un hectare et aurait dû faire l'objet d'une procédure d'autorisation environnementale ;
- l'arrêté contesté méconnait les dispositions de l'article L. 512-7-2 du code de l'environnement dès lors que le projet contesté aurait dû faire l'objet d'une évaluation environnementale en raison de la sensibilité du milieu dans lequel le projet est localisé ; les parcelles d'implantation du projet supportent une zone humide et des espèces protégées ;
- l'arrêté contesté méconnait les dispositions de l'article R. 512-46-3 du code de l'environnement dès lors que les incidences notables sur les zones humides ne sont pas décrites avec une précision suffisante ;
- l'arrêté contesté est entaché d'erreur d'appréciation au regard des dispositions de l'article R. 214-1 du code de l'environnement en l'absence d'autorisation d'assèchement d'une zone humide dont la superficie est supérieure à un hectare.
Par un mémoire en défense, enregistré le 17 mai 2024, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par les associations requérantes ne sont pas fondés.
Par des mémoires enregistrés les 16 avril, 24 mai et 18 juin 2024, la société Centrale Biométhane du Roi Morvan, représentée par Me Gandet, conclut à titre principal au rejet de la requête, à titre subsidiaire à ce que la cour, en vertu des pouvoirs qu'elle tient de son office de juge de plein contentieux des installations classées pour la protection de l'environnement, sursoie à statuer pour permettre la régularisation des vices entachant l'arrêté contesté, et à ce qu'il soit mis à la charge solidaire des requérantes, une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête est irrecevable dès lors que les représentants des associations requérantes n'ont pas capacité pour agir ;
- les moyens soulevés par les associations requérantes ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la directive n° 2011/92/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011, modifiée par la directive n° 2014/52/UE du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement ;
- le code de l'environnement ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Dubost,
- les conclusions de M. Frank, rapporteur public,
- les observations de Me Dubreuil, représentant les associations Eau et Rivières de Bretagne et Bretagne Vivante SEPNB et celles de Me Sicoli substituant Me Gandet, représentant la société Centrale Biométhane du Roi Morvan.
Considérant ce qui suit :
1. Par une demande du 13 août 2021, complétée le 13 juillet 2022, la société Centrale Biométhane du Roi Morvan, filiale du groupe Engie Bioz, a sollicité du préfet du Morbihan l'enregistrement, au titre de la législation sur les installations classées pour la protection de l'environnement, d'une installation de méthanisation de déchets agricoles et industriels sur le territoire de la commune de Guiscriff, pour un volume total de déchets admis sur le site d'environ 33 000 tonnes par an, soit 90 tonnes par jour. Par un arrêté du 16 janvier 2023, le préfet du Morbihan a procédé, sur le fondement de l'article L. 512-7 du code de l'environnement, à l'enregistrement de l'installation de la société Centrale Biométhane du Roi Morvan. Les associations Eau et Rivières de Bretagne et Bretagne Vivante SEPNB ont alors demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler cet arrêté. Elles relèvent appel du jugement du
30 novembre 2023 par lequel ce tribunal a rejeté leur demande.
Sur la fin de non-recevoir opposée à la requête d'appel :
2. Une association est régulièrement engagée par l'organe tenant de ses statuts le pouvoir de la représenter en justice, sauf stipulation de ces statuts réservant expressément à un autre organe la capacité de décider de former une action devant le juge administratif. Il appartient à la juridiction administrative saisie, qui en a toujours la faculté, de s'assurer, le cas échéant, que le représentant de cette personne morale justifie de sa qualité pour agir au nom de cette partie. Tel est le cas lorsque cette qualité est contestée sérieusement par l'autre partie ou qu'au premier examen l'absence de qualité du représentant de la personne morale semble ressortir des pièces du dossier. A ce titre, si le juge doit s'assurer de la réalité de l'habilitation du représentant de l'association qui l'a saisi, lorsque celle-ci est requise par les statuts, il ne lui appartient pas, en revanche, de vérifier la régularité des conditions dans lesquelles une telle habilitation a été adoptée.
3. Il ressort des statuts des associations Eau et Rivières de Bretagne et Bretagne Vivante SEPNB que leurs conseils d'administration ont compétence pour ester en justice tant en demande qu'en défense et que les présidents de ces associations les représentent dans tous les actes de la vie civile. Par ailleurs, par des délibérations des 24 mars et 18 mars 2023, les conseils d'administration des deux associations ont décidé de former un recours à l'encontre de l'arrêté du préfet du Morbihan du 16 janvier 2023 et de mandater leurs présidents respectifs pour les représenter y compris en appel. La circonstance que les délibérations produites n'auraient pas été conservées sur des feuillets numérotés est sans incidence sur l'appréciation de la réalité de l'habilitation des représentants de ces associations. Enfin, il ressort de la requête d'appel, que les associations requérantes sont représentées par leurs présidents respectifs, lesquels comme il a été dit ont été habilités pour le faire. Dans ces conditions, la fin de non-recevoir opposée tirée de l'absence de capacité pour agir en appel des représentants des associations Eau et Rivières de Bretagne et Bretagne Vivante SEPNB doit être écartée.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
Sur les fins de non-recevoir opposées à la demande de première instance :
4. En premier lieu, aux termes de l'article R. 411-1 du code de justice administrative : " La juridiction est saisie par requête. La requête indique les nom et domicile des parties. Elle contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge. (...) ".
5. La demande de première instance des associations Eau et Rivières de Bretagne et Bretagne Vivante SEPNB comporte l'énoncé des faits, des moyens et des conclusions soumises au tribunal administratif de Rennes. Par suite, la fin de non-recevoir opposée par le préfet en première instance, tirée de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 411-1 du code de justice administrative, doit être écartée.
6. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 414-2 du code de justice administrative : " Les personnes physiques et morales de droit privé non représentées par un avocat, autres que celles chargées de la gestion permanente d'un service public, peuvent adresser leur requête à la juridiction par voie électronique au moyen d'un téléservice accessible par le réseau internet. (...) ". Aux termes de l'article R. 414-5 du même code : " Par dérogation aux dispositions des articles R. 411-3, R. 411-4, R. 412-1, R. 412-2 et R. 611-1-1, le requérant est dispensé de produire des copies de sa requête, de ses mémoires complémentaires et des pièces qui y sont jointes. Il est également dispensé de transmettre l'inventaire détaillé des pièces lorsqu'il utilise le téléservice mentionné à l'article R. 414-2 ou recourt à la génération automatique de l'inventaire permise par l'application mentionnée à l'article R. 414-1. Le requérant transmet chaque pièce par un fichier distinct, à peine d'irrecevabilité de sa requête. Cette obligation est applicable à la transmission des pièces jointes aux mémoires complémentaires, sous peine pour le requérant de voir ces pièces écartées des débats après invitation à régulariser non suivie d'effet. Chaque fichier transmis au moyen de l'application mentionnée à l'article R. 414-1 porte un intitulé commençant par le numéro d'ordre affecté à la pièce qu'il contient par l'inventaire détaillé. Lorsque le requérant recourt à la génération automatique de l'inventaire permise par l'application, l'intitulé du fichier décrit également le contenu de cette pièce de manière suffisamment explicite. Chaque pièce transmise au moyen du téléservice mentionné à l'article R. 414-2 porte un intitulé décrivant son contenu de manière suffisamment explicite. Les obligations fixées au précédent alinéa sont prescrites au requérant sous peine de voir la pièce écartée des débats après invitation à régulariser non suivie d'effet. "
7. Les dispositions de l'article R. 414-5 précité ont pour finalité de permettre un accès uniformisé et rationalisé à chacun des éléments du dossier de la procédure, selon des modalités communes aux parties, aux auxiliaires de justice et aux juridictions et concourent à la qualité du service public de la justice rendu par les juridictions administratives et à la bonne administration de la justice.
8. D'une part, il résulte de ces dispositions que le non-respect des obligations qu'elles prescrivent aux parties n'entraîne pas le rejet de leurs écritures comme irrecevables, mais implique seulement d'écarter des débats les pièces qui ne satisfont pas aux exigences de l'alinéa 3. D'autre part, il ressort de la demande de première instance transmise par le téléservice, présentée par les associations Eau et Rivières de Bretagne et Bretagne Vivante SEPNB, qui n'étaient pas représentées par un avocat, que les pièces jointes ne comportaient pas de numéro d'ordre et ne figuraient pas dans l'ordre de l'inventaire généré automatiquement par l'application. Toutefois, les associations n'ont pas été invitées par le tribunal à régulariser ces productions et les pièces jointes, au nombre de 18, comportaient un intitulé précis permettant de les identifier aisément. Ainsi, la présentation des pièces, bien que comportant notamment une erreur dans l'ordre de leur enregistrement, était claire et précise et permettait, d'identifier les pièces jointes. Enfin, les pièces dont il s'agit ainsi que leur inventaire ont été communiqués aux parties. Par suite, la fin de non-recevoir opposée par le préfet à la demande de première instance tirée de la méconnaissance des dispositions citées au point 6 doit être écartée et il n'y a pas lieu d'écarter des débats les pièces jointes de la demande de première instance.
9. En troisième lieu, il ressort des pièces de la procédure que la demande de première instance a été signée par les présidents des associations Eau et Rivières de Bretagne et Bretagne Vivante SEPNB qui ont été habilités comme il a été dit au point 3 du présent arrêt à représenter ces associations pour demander l'annulation de l'arrêté du préfet du 16 janvier 2023. Ainsi, la fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance tirée de l'absence de capacité pour agir des représentants des associations Eau et Rivières de Bretagne et Bretagne Vivante SEPNB doit être écartée.
Sur la légalité de l'arrêté du 16 janvier 2023 :
10. Aux termes de l'article L. 512-7 du code de l'environnement : " I. - Sont soumises à autorisation simplifiée, sous la dénomination d'enregistrement, les installations qui présentent des dangers ou inconvénients graves pour les intérêts mentionnés à l'article L. 511-1, lorsque ces dangers et inconvénients peuvent, en principe, eu égard aux caractéristiques des installations et de leur impact potentiel, être prévenus par le respect de prescriptions générales édictées par le ministre chargé des installations classées. (...) ". Aux termes de l'article L. 512-7-2 du même code : " " Le préfet peut décider que la demande d'enregistrement sera instruite selon les règles de procédure prévues par le chapitre unique du titre VIII du livre Ier pour les autorisations environnementales : 1° Si, au regard de la localisation du projet, en prenant en compte les critères mentionnés à l'annexe III de la directive 2011/92/UE du 13 décembre 2011 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement, la sensibilité environnementale du milieu le justifie ; 2° Ou si le cumul des incidences du projet avec celles d'autres projets d'installations, ouvrages ou travaux situés dans cette zone le justifie ; (...) ". En vertu de l'annexe 4 de l'article R. 511-9 de ce code, les installations de méthanisation de matière végétale brute, effluents d'élevage, matières stercoraires, lactosérum et déchets végétaux d'industries agroalimentaires traitant des quantités de matières supérieures à 30 tonnes par jour mais inférieures à 100 tonnes par jour sont soumises au régime de l'enregistrement.
11. Il résulte de ces dispositions que le préfet doit se livrer à un examen du dossier afin d'apprécier, tant au regard de la localisation du projet que des autres critères mentionnés à l'annexe III de la directive, relatifs à la caractéristique des projets et aux types et caractéristiques de l'impact potentiel, si le projet doit faire l'objet d'une évaluation environnementale, ce qui conduit alors à le soumettre au régime de l'autorisation environnementale.
12. Au titre du type et des caractéristiques de l'impact potentiel du projet qu'il y a ainsi lieu d'apprécier, le point 3 de l'annexe III de la directive à laquelle il est renvoyé, mentionne qu'il doit notamment être tenu compte de : " h) la possibilité de réduire l'impact de manière efficace ".
13. L'arrêté contesté procède à l'enregistrement d'une unité de méthanisation qui traitera une quantité de matières d'origine agricole et agro-industrielle de 90 tonnes par jour en moyenne, soit une quantité de matières très proche de celle soumise à un régime d'autorisation de 100 tonnes par jour. Cette unité de méthanisation s'implantera sur les parcelles cadastrées section YM
nos 4 et 5 sur le territoire de la commune de Guiscriff. D'abord, il résulte de l'instruction, notamment du dossier de demande d'enregistrement, que ces parcelles présentent un enjeu écologique modéré et qu'en ce qui concerne les surfaces présentant des haies, cet enjeu est fort dès lors que celles-ci jouent un rôle d'habitat pour différentes espèces ainsi qu'un rôle de corridor écologique. A cet égard, le dossier de demande relève que les haies constituent l'habitat de plusieurs espèces protégées pour lesquelles la société pétitionnaire a par ailleurs sollicité une dérogation au titre des espèces protégées pour la destruction de sites de reproduction ou d'aires de repos d'espèces animales protégées et de destruction d'espèces animales protégées. Par ailleurs, l'avis défavorable du conseil scientifique régional du patrimoine naturel de Bretagne du
23 novembre 2022 mentionne que les inventaires faunistiques réalisés à l'intérieur du périmètre directement impacté sont lacunaires et qu'aucun inventaire de la flore n'ayant été réalisé, il n'est pas possible d'identifier le niveau d'enjeu sur la flore. Ensuite, le projet contesté est situé à
50 mètres de la zone naturelle d'intérêt écologique, faunistique et floristique (ZNIEFF) de type 2 " Rivière Isole, tourbière du bassin amont et vallées boisées ", et à 350, 560, 2 800 et 3 000 mètres de quatre autres ZNIEFF de type 1 et 2. Il résulte du dossier de demande d'enregistrement et de l'avis du conseil scientifique régional du patrimoine naturel de Bretagne précité que ces espaces naturels constituent un enjeu majeur du territoire et qu'ils sont très vulnérables vis-à-vis des pollutions dès lors que les zones humides et cours d'eau sont interconnectés. Il est en outre constant qu'une zone humide borde le terrain d'implantation du projet et que ce dernier est situé en tête du bassin versant de l'Isole. Enfin, si des mesures destinées à limiter les impacts du projet contesté ont été prévues, le conseil scientifique régional du patrimoine naturel de Bretagne a, à cet égard, estimé dans son avis précité que " bien que le dossier présente un catalogue de mesures préventives vis-à-vis du risque de pollution des milieux naturels, le peu d'information fournie apparaît donc insuffisante pour garantir l'absence de nuisance du projet après mise en fonctionnement, sur les écosystèmes remarquables situés en aval ". Par ailleurs, s'agissant de la compensation de la destruction de 214 mètres linéaires de haie et l'évitement par le projet de la zone humide située en bordure des parcelles, le conseil scientifique régional du patrimoine naturel de Bretagne indique que le niveau de compensation est faible et que la haie compensatoire s'implantera au sein de la zone humide laquelle sera donc impactée par celle-ci. Il ne résulte en outre pas de l'instruction que des mesures d'accompagnement et de suivi des mesures compensatoires aient été mises en œuvre. Dans ces conditions, le préfet ne pouvait légalement estimer, tant au regard de la localisation du projet, de ses caractéristiques, que du type et des caractéristiques de son impact potentiel, que celui-ci ne présentait pas une sensibilité environnementale justifiant la mise en œuvre des dispositions de l'article L. 512-7-2 du code de l'environnement.
Sur l'application de l'article L. 181-18 du code de l'environnement :
14. Aux termes de l'article L. 181-18 du code de l'environnement : " I.- Le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre une autorisation environnementale, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, même après l'achèvement des travaux : / 1° Qu'un vice n'affecte qu'une phase de l'instruction de la demande d'autorisation environnementale, ou une partie de cette autorisation, limite à cette phase ou à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce et demande à l'autorité administrative compétente de reprendre l'instruction à la phase ou sur la partie qui a été entachée d'irrégularité ; 2° Qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé par une autorisation modificative peut, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, surseoir à statuer jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation. Si une telle autorisation modificative est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations (...) ".
15. Les dispositions précitées de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, qui concernent les pouvoirs du juge de l'autorisation environnementale, sont applicables aux recours formés contre une décision d'enregistrement d'une installation classée dans le cas où le projet fait l'objet, en application du 7° du paragraphe I de l'article L. 181-2 du code de l'environnement, d'une autorisation environnementale tenant lieu d'enregistrement ou s'il est soumis à évaluation environnementale donnant lieu à une autorisation du préfet en application du troisième alinéa du II de l'article L. 122-1-1 du même code.
16. Dans les autres cas où le juge administratif est saisi de conclusions dirigées contre une décision relative à l'enregistrement d'une installation classée, y compris si la demande d'enregistrement a été, en application de l'article L. 512-7-2 du code de l'environnement, instruite selon les règles de procédure prévues pour les autorisations environnementales, les dispositions de l'article L. 181-18 du code de l'environnement ne sont pas applicables. Cependant, en vertu des pouvoirs qu'il tient de son office de juge de plein contentieux des installations classées pour la protection de l'environnement, le juge administratif, s'il estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'une illégalité entachant l'élaboration ou la modification de cet acte est susceptible d'être régularisée, peut, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, surseoir à statuer jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation.
17. Enfin, lorsque l'annulation n'affecte qu'une partie seulement de la décision, le juge administratif peut déterminer s'il y a lieu de suspendre l'exécution des parties non viciées de cette décision. Et lorsqu'il prononce l'annulation, totale ou partielle, d'une décision relative à une installation classée soumise à enregistrement, il a toujours la faculté, au titre de son office de juge de plein contentieux, d'autoriser lui-même, à titre provisoire, et le cas échéant sous réserve de prescriptions et pour un délai qu'il détermine, la poursuite de l'exploitation de l'installation en cause, dans l'attente de la régularisation de sa situation par l'exploitant.
18. Il résulte de ce qui précède que le vice rappelé au point 13 du présent arrêt ne peut être régularisé dans les conditions prévues par l'article L. 181-18 du code de l'environnement, qui ne sont pas applicables s'agissant de conclusions dirigées contre une décision relative à l'enregistrement d'une installation classée. Par ailleurs, eu égard à l'importance du vice entachant la décision en litige, qui implique que la demande de la société soit instruite selon la procédure de l'autorisation environnementale et fasse l'objet d'une évaluation environnementale, celui-ci n'est pas susceptible d'être régularisé.
19. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la régularité du jugement attaqué, ni sur les autres moyens de la requête, que les associations Eau et Rivières de Bretagne et Bretagne Vivante SEPNB sont fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.
Sur les frais liés au litige :
20. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge des associations Eau et Rivières de Bretagne et Bretagne Vivante SEPNB qui ne sont pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par la société Centrale Biométhane du Roi Morvan au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 800 euros à verser à l'association Eau et Rivières de Bretagne et une somme de 800 euros à verser à l'association Bretagne Vivante SEPNB au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 2301766 du 30 novembre 2023 du tribunal administratif de Rennes est annulé.
Article 2 : L'arrêté du préfet du Morbihan du 16 janvier 2023 est annulé.
Article 3 : L'Etat versera à l'association Eau et Rivières de Bretagne et à l'association Bretagne Vivante SEPNB une somme de 800 euros chacune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Eau et Rivières de Bretagne, à l'association Bretagne Vivante SEPNB, ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques, à la société Centrale Biométhane du Roi Morvan.
Copie, en sera adressée pour information, au préfet du Morbihan.
Délibéré après l'audience du 12 septembre 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Degommier, président de chambre,
- M. Rivas, président-assesseur,
- Mme Dubost, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er octobre 2024.
La rapporteure,
A.-M. DUBOST
Le président,
S. DEGOMMIER
La greffière,
S. PIERODÉ La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 24NT00242