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01/10/2024 | FRANCE | N°22NT04037

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 5ème chambre, 01 octobre 2024, 22NT04037


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B..., M. et Mme F... et E... D... et M. et Mme C... et E... G... ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 4 août 2021 par lequel le maire de Pléneuf-Val-André (Côtes-d'Armor) a accordé à la société Domaine Le Roc Fleuri un permis d'aménager pour la création d'un lotissement de neuf lots sur un terrain situé allée Jean Bart et la décision implicite de rejet de leur recours gracieux.



Par un jugement n° 2200588 du

20 octobre 2022, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.



Procédure devant...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B..., M. et Mme F... et E... D... et M. et Mme C... et E... G... ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 4 août 2021 par lequel le maire de Pléneuf-Val-André (Côtes-d'Armor) a accordé à la société Domaine Le Roc Fleuri un permis d'aménager pour la création d'un lotissement de neuf lots sur un terrain situé allée Jean Bart et la décision implicite de rejet de leur recours gracieux.

Par un jugement n° 2200588 du 20 octobre 2022, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 20 décembre 2022 et 8 juin 2023, M. A... B..., M. et Mme F... et E... D... et M. et Mme C... et E... G..., représentés par Me Dubreuil, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 20 octobre 2022 du tribunal administratif de Rennes ;

2°) d'annuler l'arrêté du 4 août 2021 du maire de Pléneuf-Val-André et sa décision rejetant leur recours gracieux ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement est irrégulier ; le principe du contradictoire n'a pas été respecté ; leur mémoire en réplique du 1er septembre n'a pas été communiqué à la défense alors même qu'il contenait un nouveau moyen et que le délai de cristallisation des moyens n'avait pas expiré ; le jugement est insuffisamment motivé ;

- la procédure est irrégulière, au regard de l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme, en l'absence d'étude d'impact ou de l'avis de l'autorité environnementale exemptant le projet d'étude d'impact ;

- la décision attaquée méconnait les dispositions de l'article L. 121-13 du code de l'urbanisme et le schéma de cohérence territoriale du pays de Saint-Brieuc ;

- la décision méconnait les dispositions de l'article L. 121-23 du code de l'urbanisme ;

- la décision est entachée d'illégalité du fait de l'illégalité du plan local d'urbanisme, soulevée par la voie de l'exception, en ce qu'en méconnaissance de l'article L. 121-27 du code de l'urbanisme, il n'a pas classé les boisements situés sur la parcelle en espace boisé classé, en ce qu'il méconnait le principe de non-régression inscrit à l'article L. 110-1 du code de l'environnement et le principe d'équilibre inscrit à l'article L. 101-2 du code de l'urbanisme compte-tenu de la consommation foncière liée à l'urbanisation ; l'illégalité du plan local d'urbanisme emporte remise en vigueur de l'ancien plan local d'urbanisme lequel classait en zone naturelle le terrain d'assiette du projet.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 mai 2023 la commune de Pléneuf-Val-André, représentée par la société Cabinet Coudray, conclut au rejet de la requête et demande de mettre à la charge de M. B..., de M. et Mme D... et de M. et Mme G... une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par M. B... et autres ne sont pas fondés.

Par des mémoires enregistrés les 22 février et 21 juin 2023, ce dernier n'ayant pas été communiqué, la société Domaine Le Roc Fleuri, représentée par Me Rouhaud, conclut au rejet de la requête et demande de mettre à la charge de M. B..., de M. et Mme D... et de M. et Mme G... une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- à défaut de justifier du respect des formalités prévues par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme, la requête d'appel est irrecevable ;

- les moyens soulevés par M. B... et autres ne sont pas fondés

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Rivas,

- les conclusions de M. Frank, rapporteur public,

- les observations de Me Dubreil, représentant M. B..., M. et Mme D..., et M. et Mme G..., H..., représentant la commune de Pléneuf-Val-André, et de Me Peres, substituant Me Rouhaud, représentant la société Domaine Le Roc Fleuri.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 4 août 2021, le maire de Pléneuf-Val-André (Côtes-d'Armor) a accordé à la société Domaine Le Roc Fleuri un permis d'aménager pour la création d'un lotissement de neuf lots sur un terrain situé allée Jean Bart. M. B..., M. et Mme D..., et

M. et Mme G... ont demandé au tribunal administratif de Rennes l'annulation de cet arrêté. Par un jugement du 20 octobre 2022, dont ils relèvent appel, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : " (...) La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes dans les conditions prévues aux articles R. 611-2 à R. 611-6. / Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux. ". Par ailleurs aux termes de l'article R. 600-5 du code de l'urbanisme : " Par dérogation à l'article R. 611-7-1 du code de justice administrative, et sans préjudice de l'application de l'article R. 613-1 du même code, lorsque la juridiction est saisie d'une requête relative à une décision d'occupation ou d'utilisation du sol régie par le présent code, (...) les parties ne peuvent plus invoquer de moyens nouveaux passé un délai de deux mois à compter de la communication aux parties du premier mémoire en défense. Cette communication s'effectue dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article R. 611-3 du code de justice administrative. (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier que les consorts B... ont saisi le tribunal le administratif de Rennes d'une demande suivie d'un mémoire en réplique, enregistrés respectivement les 2 février et 1er septembre 2022. Les consorts B... ne peuvent pas utilement se prévaloir de ce que, dès lors que ce dernier mémoire n'a pas été communiqué, le principe du caractère contradictoire de la procédure s'en serait trouvé méconnu, dès lors qu'un défaut de communication de leurs propres écritures à la partie adverse ne saurait avoir préjudicié à leurs droits. En outre, le jugement attaqué a répondu, en ses points 7 à 16, au moyen tiré de l'illégalité du classement de la parcelle d'assiette du projet au plan local d'urbanisme soulevé uniquement dans leur mémoire du 1er septembre 2022 et dans le délai imparti par les dispositions de l'article R. 600-5 du code de l'urbanisme. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du principe du caractère contradictoire de la procédure doit être écarté.

4. En second lieu, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés. ".

5. Les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à l'ensemble des arguments présentés les consorts B..., ont exposé avec la précision nécessaire, au point 15 du jugement attaqué, les motifs pour lesquels ils ont estimé que le classement de la parcelle d'assiette du projet ne méconnaissait pas le principe d'équilibre figurant à l'article L. 101-2 du code de l'urbanisme. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation du jugement attaqué doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la composition du dossier de demande de permis d'aménagement :

6. Les consorts B... ne peuvent utilement se prévaloir d'une méconnaissance des dispositions de l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme, lequel ne trouve à s'appliquer qu'aux dossiers de demande de permis de construire. Toutefois ils peuvent être regardés comme ayant soulevé ce moyen au regard de l'article R. 441-5 du même code.

7. Aux termes de l'article R. 441-5 du code de l'urbanisme : " Le dossier joint à la demande de permis d'aménager comprend en outre, selon les cas : / 1° L'étude d'impact ou la décision de l'autorité chargée de l'examen au cas par cas dispensant le projet d'évaluation environnementale lorsque le projet relève du tableau annexé à l'article R. 122-2 du code de l'environnement. L'autorité compétente pour délivrer l'autorisation d'urbanisme vérifie que le projet qui lui est soumis est conforme aux mesures et caractéristiques qui ont justifié la décision de l'autorité chargée de l'examen au cas par cas de ne pas le soumettre à évaluation environnementale ; (...) ". Par ailleurs, aux termes de l'article L. 122-1 du code de l'environnement, dans sa rédaction alors applicable : " (...) II.- Les projets qui, par leur nature, leur dimension ou leur localisation, sont susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement ou la santé humaine font l'objet d'une évaluation environnementale en fonction de critères et de seuils définis par voie réglementaire et, pour certains d'entre eux, après un examen au cas par cas. / Pour la fixation de ces critères et seuils et pour la détermination des projets relevant d'un examen au cas par cas, il est tenu compte des données mentionnées à l'annexe III de la directive 2011/92/ UE modifiée du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement. (...) / III.- L'évaluation environnementale est un processus constitué de l'élaboration, par le maître d'ouvrage, d'un rapport d'évaluation des incidences sur l'environnement, dénommé ci-après " étude d'impact ", de la réalisation des consultations prévues à la présente section, ainsi que de l'examen, par l'autorité compétente pour autoriser le projet, de l'ensemble des informations présentées dans l'étude d'impact et reçues dans le cadre des consultations effectuées et du maître d'ouvrage. / (...) Lorsqu'un projet est constitué de plusieurs travaux, installations, ouvrages ou autres interventions dans le milieu naturel ou le paysage, il doit être appréhendé dans son ensemble, y compris en cas de fractionnement dans le temps et dans l'espace et en cas de multiplicité de maîtres d'ouvrage, afin que ses incidences sur l'environnement soient évaluées dans leur globalité. (...) ".

8. Il ressort des pièces du dossier que le lotissement autorisé prévoit la réalisation de neuf lots avec une surface de plancher maximale envisagée de 2 750 m² sur un tènement de 6 535 m². En conséquence le projet n'est pas au nombre de ceux mentionnés au tableau annexé à l'article R. 122-2 du code de l'environnement, notamment de son point " 39. Travaux, constructions et opérations d'aménagement. ", mentionné à l'article R. 441-5 précité du code de l'urbanisme. Par ailleurs ce même tènement, situé en zone 1AUc du plan local d'urbanisme communal, correspond à un ancien jardin, supportant quelques pins, compris dans une zone urbanisée, et ne se situe ni en zone naturelle d'intérêt écologique, faunistique et floristique (ZNIEFF) ni en site Natura 2000, même s'il est aux abords de tels sites. Le terrain d'assiette du projet est également séparé des falaises de Piégu par une zone urbanisée. Son appartenance à un réservoir de biodiversité identifié par le schéma de cohérence territoriale (SCOT) du Pays de Saint-Brieuc n'est pas à elle seule de nature à établir la nécessité d'une saisine de l'autorité environnementale ou même d'une évaluation environnementale eu égard à sa localisation et à ses caractéristiques. Les consorts B... font également valoir que l'existence d'un projet immobilier de seize logements situé à proximité justifiait une évaluation environnementale en raison des effets cumulés de ce projet avec celui en litige de la société Domaine Le Roc Fleuri. Cependant, la demande de permis de construire pour ce projet distinct et présenté par une tierce personne a été déposée près de trois mois après l'autorisation accordée à la société Domaine Le Roc Fleuri, alors même que la commune avait connaissance d'un projet immobilier de ce type, et elle correspond à un projet différent situé en zone UC au plan local d'urbanisme. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'insuffisance du dossier de demande de permis d'aménager doit être écarté.

En ce qui concerne l'application de la loi dite littoral :

9. En premier lieu, aux termes de l'article L. 121-13 du code de l'urbanisme : " L'extension limitée de l'urbanisation des espaces proches du rivage ou des rives des plans d'eau intérieurs désignés au 1° de l'article L. 321-2 du code de l'environnement est justifiée et motivée dans le plan local d'urbanisme, selon des critères liés à la configuration des lieux ou à l'accueil d'activités économiques exigeant la proximité immédiate de l'eau. / Toutefois, ces critères ne sont pas applicables lorsque l'urbanisation est conforme aux dispositions d'un schéma de cohérence territoriale ou d'un schéma d'aménagement régional ou compatible avec celles d'un schéma de mise en valeur de la mer. (...) ".

10. Il résulte de ces dispositions qu'une opération conduisant à étendre l'urbanisation d'un espace proche du rivage ne peut être légalement autorisée que si elle est, d'une part, de caractère limité et, d'autre part, justifiée et motivée dans le plan local d'urbanisme selon les critères qu'elles énumèrent. Cependant, lorsqu'un schéma de cohérence territoriale (SCOT) comporte des dispositions suffisamment précises et compatibles avec ces dispositions législatives qui précisent les conditions de l'extension de l'urbanisation dans l'espace proche du rivage dans lequel l'opération est envisagée, le caractère limité de l'urbanisation qui résulte de cette opération s'apprécie en tenant compte de ces dispositions du schéma concerné.

11. Toutefois, une opération qu'il est projeté de réaliser en agglomération ou, de manière générale, dans des espaces déjà urbanisés ne peut être regardée comme une extension de l'urbanisation que si elle conduit à étendre ou à renforcer de manière significative l'urbanisation de quartiers périphériques ou si elle modifie de manière importante les caractéristiques d'un quartier, notamment en augmentant sensiblement la densité des constructions. En revanche, la seule réalisation dans un quartier urbain d'un ou plusieurs bâtiments qui est une simple opération de construction ne peut être regardée comme constituant une extension au sens de la loi.

12. Il ressort des pièces du dossier, d'une part, qu'eu égard à sa proximité avec le rivage et aux caractéristiques de l'espace l'en séparant, ainsi qu'aux caractéristiques de l'ensemble urbain au sein duquel il se trouve, le terrain d'assiette du projet litigieux doit être regardé comme un espace proche du rivage au sens des dispositions précitées du code de l'urbanisme. D'autre part, l'arrêté contesté autorise la réalisation d'un lotissement de neuf lots d'une surface de plancher maximale de 2 750 m² sur un tènement de 6 535 m². Ce tènement est enserré sur trois côtés par des maisons d'habitation tandis que, sur le quatrième coté, en direction du rivage, une maison d'habitation est également implantée. L'ensemble appartient ainsi à un espace urbanisé qui s'étend au sud en direction du centre-ville de Pléneuf-Val-André et, au nord-ouest, vers la pointe de Pléneuf. Par suite, ce permis d'aménager doit être regardé comme une simple opération de construction et non comme une extension de l'urbanisation au sens des dispositions précitées de l'article L. 121-13 du code de l'urbanisme. Le moyen tiré de la violation de cet article doit, en conséquence, être écarté.

13. En second lieu, aux termes de l'article L. 121-23 du code de l'urbanisme : " Les documents et décisions relatifs à la vocation des zones ou à l'occupation et à l'utilisation des sols préservent les espaces terrestres et marins, sites et paysages remarquables ou caractéristiques du patrimoine naturel et culturel du littoral, et les milieux nécessaires au maintien des équilibres biologiques./ Un décret fixe la liste des espaces et milieux à préserver, comportant notamment, en fonction de l'intérêt écologique qu'ils présentent, les dunes et les landes côtières, les plages et lidos, les forêts et zones boisées côtières, les îlots inhabités, les parties naturelles des estuaires, des rias ou abers et des caps, les marais, les vasières, les zones humides et milieux temporairement immergés ainsi que les zones de repos, de nidification et de gagnage de l'avifaune désignée par la directive 79/409 CEE du 2 avril 1979 concernant la conservation des oiseaux sauvages. ". Aux termes de l'article R. 121-4 du même code : " En application de l'article L. 121-23, sont préservés, dès lors qu'ils constituent un site ou un paysage remarquable ou caractéristique du patrimoine naturel et culturel du littoral et sont nécessaires au maintien des équilibres biologiques ou présentent un intérêt écologique : / 1° Les dunes, les landes côtières, les plages et les lidos, les estrans, les falaises et les abords de celles-ci ; / (...) / 6° Les milieux abritant des concentrations naturelles d'espèces animales ou végétales telles que les herbiers, les frayères, les nourriceries et les gisements naturels de coquillages vivants, ainsi que les espaces délimités pour conserver les espèces en application de l'article L. 411-2 du code de l'environnement et les zones de repos, de nidification et de gagnage de l'avifaune désignée par la directive 2009/147/CE du Parlement européen et du Conseil du 30 novembre 2009 concernant la conservation des oiseaux sauvages ; / (...). / Lorsqu'ils identifient des espaces ou milieux relevant du présent article, les documents d'urbanisme précisent, le cas échéant, la nature des activités et catégories d'équipements nécessaires à leur gestion ou à leur mise en valeur notamment économique. ".

14. Il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet est constitué d'un ancien et vaste jardin comprenant quelques arbres et végétaux, dont des grands pins anciens que le projet prévoit de conserver pour leur majorité. Ce même terrain se situe en retrait du littoral depuis lequel il n'est pas établi qu'il serait visible eu égard à la topographie des lieux, à la présence d'habitations l'enserrant et aux caractéristiques mêmes du projet autorisé en raison de l'édification de maisons d'habitation aux hauteurs limitées situées non loin de constructions existantes de gabarit et de hauteur supérieurs. Si le SCOT du Pays de Saint-Brieuc inclut ce tènement, tout comme la zone urbanisée de la pointe de Pléneuf, dans un des " réservoirs principaux de biodiversité de la trame verte ", il demeure que ce schéma distingue au sein de son document d'orientations et d'objectifs (DOO) et au titre des prescriptions, les secteurs classés à ce titre en zones naturelles ou agricoles de ceux situés en zones urbaine ou à urbaniser, comme en l'espèce. Ainsi les auteurs de ce document n'ont pas entendu interdire toute urbanisation de ces zones. Par ailleurs, si le terrain d'assiette du projet est situé non loin de zones protégées en qualité de ZNIEFF ou de site Natura 2000, il n'en est pas directement limitrophe mais en est séparé par des maisons d'habitation, tout comme des falaises de Piégu. Il résulte par ailleurs du règlement graphique du plan local d'urbanisme de Pléneuf-Val-André que ce tènement n'est pas limitrophe d'une zone naturelle NL mais classé au sein d'une zone 1AUc, laquelle est enserrée au sein d'une zone UC. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions citées au point précédent doit être écarté.

En ce qui concerne l'illégalité du plan local d'urbanisme communal soulevée par la voie de l'exception :

15. Aux termes de l'article L. 600-12-1 du code de l'urbanisme : " L'annulation ou la déclaration d'illégalité d'un schéma de cohérence territoriale, d'un plan local d'urbanisme, d'un document d'urbanisme en tenant lieu ou d'une carte communale sont par elles-mêmes sans incidence sur les décisions relatives à l'utilisation du sol ou à l'occupation des sols régies par le présent code délivrées antérieurement à leur prononcé dès lors que ces annulations ou déclarations d'illégalité reposent sur un motif étranger aux règles d'urbanisme applicables au projet. (...) ".

16. Il résulte de l'article L. 600-12-1 du code de l'urbanisme que l'annulation ou la déclaration d'illégalité d'un document local d'urbanisme n'entraine pas l'illégalité des autorisations d'urbanisme délivrées lorsque cette annulation ou déclaration d'illégalité repose sur un motif étranger aux règles d'urbanisme applicables au projet en cause. Il appartient au juge, saisi d'un moyen tiré de l'illégalité du document local d'urbanisme à l'appui d'un recours contre une autorisation d'urbanisme, de vérifier d'abord si l'un au moins des motifs d'illégalité du document local d'urbanisme est en rapport direct avec les règles applicables à l'autorisation d'urbanisme. Un vice de légalité externe est étranger à ces règles, sauf s'il a été de nature à exercer une influence directe sur des règles d'urbanisme applicables au projet. En revanche, sauf s'il concerne des règles qui ne sont pas applicables au projet, un vice de légalité interne ne leur est pas étranger.

17. En premier lieu, aux termes de l'article L. 121-27 du même code : " Le plan local d'urbanisme classe en espaces boisés, au titre de l'article L. 113-1, les parcs et ensembles boisés existants les plus significatifs de la commune ou du groupement de communes, après avis de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites. ". La protection instituée par ces dispositions ne s'applique qu'au travers du classement en espace boisé, par les plans locaux d'urbanisme, des parcs et ensembles boisés existants les plus significatifs. À ce titre, l'obligation de classement prévue par ces dispositions impose d'examiner si les boisements en cause font partie des parcs et ensembles boisés les plus significatifs à l'échelle du territoire couvert par le plan local d'urbanisme.

18. Il ressort des pièces du dossier que les auteurs du plan local d'urbanisme de Pléneuf-Val-André n'ont pas inclus les parcelles d'assiette du projet et ses abords immédiats dans les espaces boisés classés existants les plus significatifs, au titre de l'article L. 121-27 du code de l'urbanisme. Il n'est pas établi que ces parcelles seraient constitutives d'un tel espace eu égard notamment à la présence de seulement quelques arbres à cet endroit. Le caractère significatif de ces arbres, apprécié à l'échelle de la commune, et allégué par les consorts B... par la simple comparaison avec deux espaces boisés proches, lesquels n'ont du reste pas davantage été protégés à ce titre, et un autre espace plus éloigné, n'est pas davantage établi. Enfin, s'il est allégué que le nombre de boisements classés au titre de l'article L. 121-27 du code de l'urbanisme au plan local d'urbanisme communal est insuffisant, cette circonstance n'établit pas davantage que le terrain litigieux appartiendrait à un espace boisé classé au sens des dispositions précitées de l'article L. 121-27 du code de l'urbanisme.

19. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 110-1 du code de l'environnement dans sa rédaction applicable à la date de l'arrêté contesté : " I. - Les espaces, ressources et milieux naturels terrestres et marins, les sons et odeurs qui les caractérisent, les sites, les paysages diurnes et nocturnes, la qualité de l'air, les êtres vivants et la biodiversité font partie du patrimoine commun de la nation. Ce patrimoine génère des services écosystémiques et des valeurs d'usage. / (...) II. - Leur connaissance, leur protection, leur mise en valeur, leur restauration, leur remise en état, leur gestion, la préservation de leur capacité à évoluer et la sauvegarde des services qu'ils fournissent sont d'intérêt général et concourent à l'objectif de développement durable qui vise à satisfaire les besoins de développement et la santé des générations présentes sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs. Elles s'inspirent, dans le cadre des lois qui en définissent la portée, des principes suivants : / (...) 9° Le principe de non-régression, selon lequel la protection de l'environnement, assurée par les dispositions législatives et réglementaires relatives à l'environnement, ne peut faire l'objet que d'une amélioration constante, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment. (...). ".

20. Les consorts B... soutiennent que le plan local d'urbanisme adopté le 15 décembre 2016 est intervenu en violation du principe de non-régression tel que précisé par les dispositions précitées. A l'appui de ce moyen ils se limitent à invoquer le fait que ce plan local d'urbanisme révèlerait une " urbanisation galopante " du fait de la réduction des terres agricoles et naturelles protégées au regard du plan d'occupation des sols adopté en 2004. Cette réduction, qu'ils évaluent du reste à seulement 5 hectares sur un total de 1 258 hectares de terres naturelles et agricoles, n'est pas, à elle-seule, de nature à établir une méconnaissance de ce principe. Par suite, ce moyen ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté.

21. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 100-2 du code de l'urbanisme dans sa rédaction applicable à la date de l'arrêté contesté : " Dans le respect des objectifs du développement durable, l'action des collectivités publiques en matière d'urbanisme vise à atteindre les objectifs suivants : / 1° L'équilibre entre : / (...) b) Le renouvellement urbain, le développement urbain maîtrisé, la restructuration des espaces urbanisés, la revitalisation des centres urbains et ruraux, la lutte contre l'étalement urbain ; / c) Une utilisation économe des espaces naturels, la préservation des espaces affectés aux activités agricoles et forestières et la protection des sites, des milieux et paysages naturels ; (...). ".

22. Les consorts B... soutiennent que ce principe d'équilibre n'est pas respecté en raison selon eux d'un développement urbain communal croissant effectué au détriment des surfaces naturelles et agricoles, et de l'ouverture à l'urbanisation d'une zone auparavant classée en secteur naturel et située à proximité immédiate de zones à fort enjeu environnemental. Cependant, ainsi qu'il ressort du rapport de présentation du plan local d'urbanisme, à l'échelle communale, la superficie des zones urbaines a été réduite dans le plan local d'urbanisme adopté en 2016 par rapport au document d'urbanisme précédent de 2004, tout comme les zones à urbaniser qui sont réduites de moitié. Par ailleurs, si les surfaces agricoles sont réduites par rapport au précédent plan, celles correspondant aux zones naturelles sont en augmentation. A cet égard, il résulte des calculs mêmes des requérants que les surfaces agricoles et naturelles ont été réduites de l'ordre seulement de 5 hectares sur un total de 1 258 hectares. Si les requérants font également valoir que le permis d'aménager contesté illustre également un nouveau développement urbain non comptabilisé par les auteurs du plan local d'urbanisme de 2016, le terrain concerné fait partie d'une zone classée 1AUc, d'une superficie d'environ 1 hectare. Au vu de ces constats, la méconnaissance du principe d'équilibre entre un développement urbain maitrisé et la lutte contre l'étalement urbain et l'utilisation économe des espaces naturels n'est pas établie.

23. Il résulte des points 15 à 22 que les consorts B... ne sont pas fondés à invoquer, par la voie de l'exception, l'illégalité de la délibération du 15 décembre 2016 du conseil municipal de Pléneuf-Val-André adoptant le plan local d'urbanisme communal.

24. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée à la requête, que M. B..., M. et Mme D..., et M. et Mme G... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.

Sur les frais d'instance :

25. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à l'octroi d'une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens à la partie perdante. Il y a lieu, dès lors, de rejeter les conclusions présentées à ce titre par M. B..., M. et Mme D..., et M. et Mme G.... En revanche, il convient, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de ces derniers, sur le fondement des mêmes dispositions, la somme de 800 euros au titre des frais exposés respectivement par la commune de Pléneuf-Val-André et la société Domaine Le Roc Fleuri.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B..., de M. et Mme D..., et de M. et Mme G... est rejetée.

Article 2 : M. B..., de M. et Mme D..., et M. et Mme G... verseront ensemble à la commune de Pléneuf-Val-André et à la société Domaine Le Roc Fleuri la somme de 800 euros à chacune sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., désigné représentant unique en application de l'article R. 751-3 du code de justice administrative, à la commune de Pléneuf-Val-André et à la société Domaine Le Roc Fleuri.

Délibéré après l'audience du 12 septembre 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Degommier, président de chambre,

- M. Rivas, président assesseur,

- Mme Ody, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er octobre 2024.

Le rapporteur,

C. RIVAS

Le président,

S. DEGOMMIER

La greffière,

S. PIERODÉ

La République mande et ordonne au préfet des Côtes-d'Armor en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22NT04037


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NT04037
Date de la décision : 01/10/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DEGOMMIER
Rapporteur ?: M. Christian RIVAS
Rapporteur public ?: M. FRANK
Avocat(s) : CABINET LEXCAP RENNES

Origine de la décision
Date de l'import : 06/10/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-10-01;22nt04037 ?
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